Historique
Si le castrum de Mezallia est mentionné dès 1252, on ne trouve mention de l'ecclesia qu'à partir de 1351 dans les pouillés (puis à nouveau en 1673 et au 16e siècle) ; elle dépend sous l'Ancien Régime du diocèse de Glandèves.
Un document, conservé dans les archives communales déposées de l'ancienne commune de La-Colle-Saint-Michel (rattachée dans un premier temps à la commune de Peyresq, puis à celle de Thorame-Haute), est particulièrement intéressant pour dater, indirectement, l'église de Méailles. Ce document est une transaction passée entre les communautés de Peyresc et de Méailles au sujet des limites de leur territoires respectifs. Le document consultable aujourd'hui date de 1687, il s'agit d'une copie d'une copie antérieure (de 1608) du document original de 1253. L'acte ne concerne pas directement l'église donc mais il est précisé qu'il est signé "dans le lieu de meaille pres la voute de leglise nouvelle ou ediffice de st. Jacques de meailles lan de notre seigneur 1253". Voilà qui donne une date relative à l'édifice.
Cette datation est confirmée tout d'abord par l'histoire du village du Méailles (Référence IA04002215) dont le déperchement a sous doute dans le courant du 13e siècle : les habitants quittent le site escarpé et malaisé du Chastelard, pour s'installer à son emplacement actuel. Le village se structure alors autour de l'église nouvellement construite.
Détail : chapiteau de la deuxième travée de la nef (entre la deuxième et la troisième travée, retombée de l'arc doubleau, au nord).Les caractéristiques stylistiques et les sources bibliographiques corroborent également cette datation : L. Thévenon propose une datation au milieu du 13e siècle, R Collier au 13e siècle, l'abbé Féraud au 14e siècle. Cela correspond à l'actuelle nef : cet édifice primitif de la fin de l'art roman était constitué d'une nef unique voûtée en berceau sur arcs doubleaux ouvrant sur une abside semi-circulaire voutée en cul-de-four, les petits chapiteaux figurés, en cul-de-lampe de la deuxième travée datent de cette période. Sur le pignon ouest, on lit clairement la trace de cet édifice avec l'emplacement d'une ouverture (porte) en partie basse, un petite baie encore en place et la trace sur le haut de la voûte.
Sans doute à la fin du 15e siècle ou au début du 16e siècle (période contemporaine du retable encore visible dans l'église IM04002885), l'église est agrandie au nord par trois grandes arcades sur un collatéral et au sud par une chapelle à travée unique. Le collatéral nord présente les caractéristiques d'un gothique un peu archaïque : la voûte sur croisée d'ogives demeure assez lourde et basse, les colonnes engagées portent, en guise de chapiteaux, des têtes figurées presqu'encore romanes, même si les piles composites présentent un modénature gothique avec des moulures prismatiques sur leurs bases. Pour R Collier, si l'ouverture sur la chapelle sud est contemporaine, elle aurait été revoûtée d'arêtes au 17e siècle.
L'église est dédiée à saint Jacques mais, en 1788, Achard la place sous la titulature de la Vierge, tout comme Féraud en 1861, sous le titre de la Visitation, chacun note cependant également que le saint patron de Méailles est saint Jacques apôtre. La titulature a donc glissé et l'église a été placée sous le titre du saint patron du village.
Vue de la chapelle des Pénitents (aujourd'hui démolie), accolée au mur ouest de l'église, depuis le sud-ouest, vers 1970.Sur le cadastre napoléonien de 1830, l'église est prolongée à l'ouest par la chapelle des Pénitents blancs qui possède sa propre entrée au sud mais devait probablement communiquer avec l'intérieur de la paroissiale. Elle aurait, selon la tradition orale, été construite en remerciement de la fin de l'incendie qui a ravagé le bourg vers 1620. Il se trouve que l'église possède un retable et tableau (Référence : IM04002880) avec la figuration de deux pénitents qui selon toutes évidences provient de cette chapelle. Le tableau en question est sans conteste du 17e siècle et très probablement de la première moitié. Sur les photographies datées de 1970, la forme des baies (en plein cintre) semble également indiquer une datation similaire. La chapelle aurait donc été construite dans le 2e quart du 17e siècle. D'après le questionnaire sur l'état des paroisses, vers 1840, la confrérie des Pénitents blancs existe encore à cette date, c'est alors la seule confrérie de la paroisse. La chapelle est démolie en 1991, elle était désaffectée depuis 1970.
Sur ce même cadastre de 1830, n'apparaissent ni le clocher ni la sacristie actuels, partie nord-est du bâtiment. En 1858, dans le procès-verbal de la visite pastorale, le clocher est en effet dit "mesquin". Un nouveau clocher est érigé entre 1889 et 1891, il est dès l'origine muni d'une horloge, qui est changée en 1933, la nouvelle est réalisée par les établissements Crétin-L'Ange à Morbier (dans le Jura). La sacristie est sans doute contemporaine du clocher puisqu'en 1890 on procède déjà à des réparations de son toit.
En 1830, le cimetière se trouve encore à l'angle nord-est et à l'est de l'église sans doute depuis l'érection du premier édifice ; en 1854 , il est déplacé à l'extérieur du bourg. Ainsi, dans la visite pastorale de 1858, le cimetière est dit "neuf et les murs sont en bon état".
On trouve traces dans les archives de nombreuses remises en état de l'édifice depuis 1840. Vers 1840 en effet, dans le Questionnaire sur l'état des paroisses envoyé par le diocèse, le curé desservant écrit que "le corps de l'église est en bon état mais l'intérieur demanderait quelques réparations, le pavé surtout est totalement dégradé". Les réparations sont faîtes entre 1840 et 1858 : en 1858, dans le procès-verbal de la visite pastorale, l'église est dite en bon état et la toiture neuve tout comme le pavé de la nef (sans doute celui que l'on observe encore aujourd'hui), celui du sanctuaire, en carreaux noirs et blancs est réalisé en 1890, il a été remplacé au début du 20e siècle par ces carreaux ciment. En 1897 : les murs extérieurs sont crépis, le cadran solaire de la façade sud a ainsi sans doute été réalisé à cette occasion puisqu'il porte la date de 1897. En 1947, est engagée la réfection complète du toit de l'église qui s'est effondré. En 1993 des travaux sont engagés sur les façades de l'église et "sur l'accès" (perron et porte d'entrée).
Description
Plan de l'église paroissiale, 2015.L'église paroissiale de Méailles a été construite au centre du bourg qui se développe au nord et au sud. Située sur un plateau, l'église est bien visible grâce à son clocher ; elle semble se situer à mi chemin entre deux chapelles isolées, en bord de falaise : la chapelle Saint-Jacques au nord et la chapelle Notre-Dame au sud.
Construite perpendiculairement à la pente, l'église est orientée et s'ouvre par une porte précédée d'un perron sur un petite place au sud.
De plan irrégulier, elle est constituée d'une nef de trois travées s'achevant par une abside semi-circulaire et d'un bas-côté septentrional de la même longueur que la nef, accessible par trois grandes arcades ; la nef est également ouverte (au niveau de sa troisième travée), par une grande arcade identique, au sud, sur une chapelle latérale. La sacristie et le clocher se trouvent au nord-est du bâtiment.
Les trois travées barlongues de la nef sont voûtées en berceau légèrement brisé sur deux arcs doubleaux à profil rectangulaire qui reposent sur des pilastres engagés au sud et sur des cul-de-lampe au nord dont certains sont figurés. Dans la nef, une corniche en quart de rond court au sommet des murs, au niveau de l'amortissement des doubleaux, avec décrochement dans l'abside. Le bas-côté est composé également de trois travées, selon la même largeur que la nef, voûtées sur croisées d'ogives à fort relief, retombant sur les colonnes engagées ornées de figures en relief. Pour relier le bas-côté à la nef, trois grandes arcades en arc brisé ont été percées, ces arcs sont moulurés de facettes concaves. A la retombée des arcs se trouvent des piles composites à la modénature complexe. L'abside semi-circulaire est voûtée en cul-de-four.Coupe transversale de l'église, 2015.
La nef est éclairée par deux baies en arc brisé au sud, la chapelle sud par une baie de même ; deux oculi ont été percés : l'un sur le mur ouest, l'autre sur l'arc triomphal : le bas-côté nord est aveugle. L'accès à l'édifice est possible grâce à la porte principale, au sud, mais également grâce à une autre porte, plus modeste, au nord, ouvrant sur la première travée du bas-côté.
L'ensemble est construit en moellons de calcaire équarris avec chaînage d'angle et couvert d'un toit à longs pans avec tuiles creuses sur la face sud du toit et de bardeaux de mélèze sur la face nord ; le toit du clocher, en pavillon, est lui couvert de tuiles vernissées en écailles polychromes. Un petit clocher à une seule arcade est posé sur le pignon ouest. Le clocher est enduit avec chaînage d'angle harpé régulier en légère saillie ; il possède trois niveaux, le troisième étant percé de quatre baies en plein cintre.
Conservateur en chef du patrimoine en poste au Service régional de l'Inventaire à la DRAC de Poitiers de 2002 à 2005, puis au Service de l'Inventaire de la DRAC d'Aix-en-Provence. En poste au Service de l'Inventaire et du patrimoine, région Provence-Alpes-Côte d'azur depuis 2008.