Les origines
Plusieurs cavités naturelles ont été occupées, au moins depuis le Néolithique et sans doute avant (Grotte de Méailles ou Trou de Bœuf, grottes de la Maouna et notamment le Pertuis de Méailles, abri naturels au pied de la falaise du village...).
Il est également possible que le site actuel du village puisse correspondre à un oppidum. Effectivement, la situation dominante en bordure de falaise, accompagnée d'une source (Font Vieille), apparaît comme un site propice à l'établissement d'une occupation de type cap barré.
A l'époque romaine, il est probable qu'une installation agricole ait été installée aux quartiers des Villars et de la Lare puis, lors des épisodes troublés de l'Antiquité tardive et du Premier Moyen-Age, la e sièclepopulation se retire sur des sites perchés, plus faciles à défendre. Ainsi, il est possible qu'un habitat cherche à s'installer au lieu-dit Chastelard, au-dessus du lieu-dit Saint-Pons. Effectivement, un acte de donation de 1042, en faveur de l'Abbaye Saint-Victor de Marseille fait mention d'une « église Saint-Pons » sur le territoire de Segumagna (à cette époque = Le Fugeret, Méailles, La Colle, Peyresc). Le site du village est peut-être occupé simultanément.
Organisation du village à la fin du Moyen Age
Le déperchement de l'habitat s'est sans doute produit à la fin de l'époque médiévale, peut-être autour du 13e siècle. Le village a alors quitté le site escarpé et malaisé du Chastelard, pour s'installer à son emplacement actuel, en position dominante et protégée par le Ravin de Lara à l'est et la falaise à l'ouest.
Dès cette époque, le village se trouve organisé autour de l'église orientée, avec les quartiers appelés Le Château et Haut de Ville. D'après Féraud, la construction remonterait au 14e siècle, ce qui semble pertinent. On peut également dater de cette époque les bases de l'îlot de bâtiments nommé Le Château (parements en moyen appareil de pierre de taille calcaire, restes de baie geminée, grande porte en arc plein-cintre à claveaux extradossés...).« Le Château ». Porte en arc plein-cintre et parement en moyen appareil de grès.
Une enceinte de maisons-rempart existait probablement autour du village. Sur le cadastre de 1830, on note d'ailleurs le micro-toponyme Le Barri (= rempart) en contrebas du village, côté Vaïre.
En outre, les îlots situés au-dessus de l'église sont nommés Haut de Ville à l'état des sections du cadastre de 1830, précisant ainsi indirectement qu'une partie de la Ville médiévale s'étendait bien en contrebas de l'église.
Le village à l'Epoque Moderne
Une importante phase de reprise de l'agglomération a eu lieu autour du 16e siècle et du 17e siècle, comme en témoignent les quelques chronogrammes de cette époque. Ce phénomène se traduit également par un grand nombre d'éléments d'encadrements chanfreinés en pierre de taille de grès : fenêtres à meneau, fenêtres en demi-croisée, linteaux à accolades, linteaux monolithes sur coussinets, encadrements de portes en anse de panier... Ces éléments lapidaires chanfreinés, en place ou plus souvent en remplois, concernent près d'un quart des maisons du village. Parcelle D118, fenêtre à meneau chanfreiné.
On notera également la présence d'enduit ancien (du 17e siècle ?), repéré sur quatre maisons (1984 D 123, 179, 180, 181). Il s'agit d'un enduit rustique à pierres-vues, très couvrant, sur lequel ont été tracées à frais, à l'aide d'un bâton au bout arrondi, des lignes parallèles grossières évoquant un faux parement assisé. Un décor similaire de faux appareil gravé se retrouve à l'état de vestige sur l'élévation nord de la Tour du Murat, au Fugeret.
Ces enduits gravés portent tous des traces de suie, qui sont par ailleurs visibles sur un certain nombre de façades, ou parties de façade, de Méailles. La tradition orale rapporte que ces traces ont été laissées par un violent incendie qui détruisit une grande partie du village. Cependant, deux incendies sont parfois mentionnés, l'un dans les années 1620, l'autre au cours de la seconde moitié du 18e siècle, qui aurait surtout concerné la partie basse. L'on rajoute qu'avant ces incendies (celui du début du 17e siècle ?), les maisons du village étaient à longs pans et couvertes en chaume. La Chapelle des Pénitents aurait été construite en remerciement pour la fin de l'incendie, qui aurait été dû à l'intercession de la Vierge, dont la statue avait été sortie en procession à cette occasion. Enduit rustique avec faux appareil grossier gravé ; baie murée. Importantes traces de suie.
La même tradition orale rappelle que le quartier des Prés était anciennement une forêt de mélèzes, dont les arbres auraient été coupés lors d'une reconstruction du village.
Evidemment, la plupart des maisons ont été largement remaniées au cours du 18e siècle et surtout du 19e siècle. C'est également à cette époque qu'ont eu lieu un certain nombre d'aménagements publics.
Les aménagements des 19e et 20e siècles
Dès novembre 1840, la commune cherche à acheter une maison pour l'école, ainsi que pour une salle de mairie. Le choix se porte sur une maison d'habitation qui appartient alors à Jacques Sauvan dit Rose, « située au bas du village, quartier du Planet » et « composée d'un rez-de-chaussée, de deux étages et d'un galetas ». Le prix de la maison est estimé à 1 500 francs. En juillet 1841, le maçon Feraud en réalise les plans et coupes au 1/100e. Le rez-de-chaussée est occupé par une boutique, une cave, un bûcher et un « petit cabinet ». Le premier étage est principalement occupé par une « chambre servant de salle d'étude » avec cheminée et par une petite chambre à coucher. Le deuxième étage est occupé par trois chambres à coucher. Un escalier tournant dessert les étages jusqu'au comble. En juillet 1841, le Sous-Préfet demande une subvention pour les réparations à effectuer, cependant que la commune a uniquement les moyens pour l'achat. Le 6 octobre 1841, devant le notaire royal du Fugeret Honoré Antoine Sauvan, Jacques Rose Sauvan vend au Maire de Méaille Désiré Sauvan, cette maison d'habitation, située sur la parcelle 480bis, et destinée à « l'appropriation d'une maison d'école et d'une salle de mairie », pour la somme convenue.
Cette école sera délaissée après la reconstruction du presbytère, dans la première moitié des années 1870, où une nouvelle salle de classe est installée. Les très importants travaux de reconstruction et de réaménagements du presbytère (il était presque en ruine en 1869) ont duré jusqu'en 1876-1877. Une seconde phase de transformation a eu lieu en 1899-1900.
En 1854, le cimetière quitte son emplacement médiéval à l'angle nord-est de l'église, pour être installé à son emplacement actuel. Il est agrandi en 1911, puis à la fin du 20e siècle.
En 1873, c'est l'achat d'une maison pour l'école des filles qui est envisagé, pour une somme avec travaux de 3 177 francs. Les habitants, par le biais d'une souscription volontaire, ont réuni la somme de 2118 francs. Une subvention d'un tiers du total est demandée, soit 1059 francs. Il est considéré « que l'école des filles de Méailles a été installée jusqu'à présent dans un local qui est loin de satisfaire aux prescriptions » et que ce projet est favorable « aux intérêts de l'instruction primaire, mais encore à la santé de la maîtresse et des élèves ». Enfin, « le local que la commune a l'intention de faire approprier fournira une installation convenable sous tous rapports », et la Préfecture donne son approbation et apporte son soutien à cette demande. En août 1873, l'Inspecteur Primaire d'Arrondissement est favorable aux plans et devis prévus pour « l'appropriation d'une maison d'école », ainsi qu'au secours demandé.
Les chronogrammes du début du 20e siècle semblent d'ailleurs correspondre à des réaménagements minimes ou à des extensions. Cependant, plusieurs maisons de la rue principale ont été profondément modifiées lors de l'alignement de cette rue dans les années 1920. Les façades concernées se remarquent par la présence dans la maçonnerie de moellons ayant des faces noircies (issus des matériaux de démolition remployés sur place), mélangés à des moellons exempts de traces de suie.
Au printemps 1936, des travaux sont entrepris par l'entrepreneur Germain Michel d'Ubraye « pour la couverture du Ravin de Lara, nivellement de la Place, aménagement de l'Abreuvoir-Fontaine situé sur la Place » (pour un coût de 7 838 francs et 42 centimes). Ce projet a été établi par M. Lalauze, ingénieur-conseil à Entrevaux.
Dès 1954, la commune cherche à construire une nouvelle école primaire et le projet retient une « école prototype » avec un bâtiment standardisé, proposé alors par les services de l'Etat. C'est « le prototype Masson chalet-école de 25 à 30 élèves » qui est retenu en 1955. Une parcelle située au nord-est du village est achetée à ces fins, avec arrêté d'Utilité Publique (parcelle C 491). En 1956, c'est l'architecte Masson, établi à Manosque et concepteur du prototype, qui dirige les travaux pour réaliser cette opération. Un article de journal, rédigé après l'inauguration présente la construction du « châlet-école ». Il s'agit d'un « coquet bâtiment en forme de chalet de montagne […] comportant au rez-de-chaussée une vaste salle de classe largement éclairée par de grandes baies ». A l'étage, « un coquet logement » a été prévu pour l'instituteur. « Cette construction a été conçue dans un style fort coquet des chalets de montagne qui, néanmoins, surprend un peu ici où domine l'influence méditerranéenne, mais ce chalet est de la plus heureuse inspiration. Il comporte sur la façade une décoration-revêtement de bois clair, tandis que sur le côté gauche la porte d'entrée est décorée par un pilier où les pierres apparentes sont du plus heureux effet. L'ensemble est de construction à la fois hardie et confortable ». « L'exécution des travaux est confiée à l'entreprise Richerme d'Entrevaux ». Dans cet article, on apprend également que peu de jours auparavant, la commune avait réceptionné les travaux d'adduction d'eau et des égouts.
En 1966, la commune achète la parcelle numéro 263 de la section D (504 m2, coût 2000 francs) dont « l'acquisition est faite dans le but de créer une place publique ». Cette parcelle « est indiquée [au cadastre] comme étant à l'état de sol ; en fait elle est constituée par un terrain abandonné où se trouvent les ruines d'une maison irréparable ».
Le four à pain communal a été démoli au début des années 1970. La Chapelle des Pénitents, adossée à l'église, a été rasée dans les années 1990.
L'apport de la cartographie
1- Carte de Provence des Ingénieurs Géographes militaires (1748-1778), au 1/14 000e environ1.
Sur ce document, le village apparaît avec son plan actuel. Les îlots denses de la partie basse sont figurés, alors que le quartier haut, au bâti plus lâche, est représenté par de nombreux bâtiments isolés. La chapelle (ou l'oratoire) Sainte-Madeleine est dessinée tout en haut du quartier supérieur, mais elle n'est pas nommée. La chapelle (ou l'oratoire) Saint-Joseph est représentée, en bas du village, également sans nom.
On retrouve également des bâtiments au quartier des Granges, où deux oratoires sont dessinés. La chapelle Saint-Jacques est désignée à l'extrémité nord de l'arête rocheuse du village. La chapelle Notre-Dame est également dessinée et nommée.
2- Plan cadastral et état des sections (1830)
Sur la feuille de la section D du cadastre, le village apparaît constitué de 136 parcelles désignées comme « maison », et de 103 parcelles indiquées comme « bâtiment rural » ou « bâtiment ». On remarque également une trentaine de parcelles mentionnées comme « aire à battre », principalement situées entre le haut du village et la chapelle Saint-Jacques.
Dans le centre du village, un certain nombre de bâtiments sont en multipropriété. C'est le cas pour 12 % des maisons et 6 % des entrepôts agricoles. Ce phénomène concerne des parcelles de petite ou moyenne taille, jamais des grandes.
De manière classique dans l'urbanisation villageoise de haute Provence, on retrouve des entrepôts agricoles agglomérés aux entrées du villages (toponymes), à proximité des aires à battre. Cependant on note également qu'au centre du village, chaque îlot de maisons comprend au moins un ou deux bâtiments agricoles. Ces derniers occupent d'ailleurs souvent des angles d'îlots.
L'église est flanquée de la Chapelle des Pénitents à l'ouest et du cimetière au nord-est. La Chapelle Saint-Joseph est indiquée comme ruinée. On remarque également le Presbytère, ainsi qu'un four à pain communal (parcelle 1830 D 428).
Toponymie
Dans l'état des sections du cadastre de 1830, le Village est nommé en plusieurs quartiers. Ces micro-toponymes parfois très précis sont souvent d'origine historique, patronymique, topographique ou liés à des usages.
Extrait du plan cadastral de 1830 avec report des toponymes de l'état de section.
On retrouve La Place au sud de l'église. L'église et le quartier situé sous l'actuel monument aux morts sont nommés Vignonne. En contrebas, on note Le Barri, Braumone et Pradon. La partie basse correspond aux quartiers de Le Four, Garrigou, Planet, Le Paty. A l'extrémité sud-est, on trouve la Maison de Taxi. L'extrémité sud est appelée Le Rocher, alors que les îlots de bâtiments dominant la Vaïre sont nommés Le Roquet.
Le quartier situé au-dessus de l'église se nomme Font Vieille. Le quartier agricole situé en haut du village est La Terrasse, au-dessus on trouve les quartiers de Haut de Ville et du Pont de Sainte Magdelaine, rappelant l'existence d'une ancienne chapelle.
Au sud-est du village, on retrouve le quartier des Granges, alors qu'au-dessus du village, le quartier des aires à battre est L'Aire, Les Aires, voire L'Aire d'Honoré.
On note également d'autres noms de lieux, liés à la fontaine-abreuvoir (La Fontaine, Vallon de la Fontaine), au pont (Le Pont, Pré du Pont, Le Noyer près du Pont), ou aux jardins (Les Ortous, Le Jardin, Le Jardin des Camoupies (?), Jardin du Rey)... On remarque en outre L'Amoudié et Papaou.
Structure de l'agglomération
Le village de Méailles est installé en bordure d'une falaise calcaire dominant la rive gauche de la Vaïre.
Il est construit sur une pente douce, avec l'église au centre. De part et d'autre de l'église, on trouve des îlots de bâtiments mitoyens, surtout composés de maisons dans la partie basse. Ces îlots sont séparés par des ruelles étroites, qui comportent quelques passages couverts. A l'extrémité sud, au départ de l'ancienne route de La Colle on remarque la petite chapelle Saint-Joseph.
L'îlot situé immédiatement en contrebas de l'église, appelé Le Château, correspond en partie à l'ancienne maison seigneuriale. Côté sud de cet îlot, on remarque notamment une grande porte en arc plein-cintre de même facture que celle de l'église, accompagné d'un moyen appareil de pierre de taille. Dans les bâtiments proches, on remarque un reste de baie géminée.
De nombreux bâtiments du centre possèdent des encadrements d'ouverture (portes et fenêtres) en pierre de taille chanfreinée. Plusieurs baies en demi-croisée ont été observées, en place, en remploi partiel ou en tant qu'éléments lapidaires isolés. Quelques linteaux à coussinets ou corbelets ont également été notés.
Un four à pain privé est installé à l'étage de soubassement d'une maison, située immédiatement au-dessus du monument aux morts. Il est construit en grès (bouche, sole, coupole), avec une banquette monolithe placée sous la bouche et munie d'un évier creusé (dimensions intérieures du four : diamètre = 300 cm ; hauteur = 120 cm). Ce four à pain a fonctionné jusqu'au début des années 1920.
Les bâtiments agricoles sont principalement regroupés aux entrées du village, même si on en retrouve quelques uns mêlés aux maisons d'habitation. Au quartier des Granges, ainsi qu'aux aires à battre, on remarque plusieurs grands bâtiments construits en hangars sur murs porteurs, avec un gouttereau ouvert et simplement protégé par un essentage de planches. Ces bâtiments, constitués d'une étable sous un grand fenil-séchoir, remontent au début du 20e siècle. Il semblerait qu'une partie d'entre eux aient été construits pour répondre aux besoins de fourrage et de stabulation nocturne pour les animaux de bâts travaillant au chantier ferroviaire. Les grands volumes de fenil ont également été permis par la mise à l'arrosage des prés de fauches, grâce à la construction du Canal de la Vaïre en 1898-1901.
Bâtiments publics
Plusieurs croix ou oratoires marquent l'entrée du village : aux aires à battre, à la fontaine, aux Granges. La chapelle des Pénitents, qui était adossée au pignon ouest de l'église a été détruite au début des années 1990. Le cimetière, initialement installé à l'angle nord-est de l'église a été déplacé à la fin des années 1850, puis agrandi en 1911.
La Mairie a connu plusieurs emplacements. Le premier local est installé dans la maison d'école achetée par la commune dans les années 1840 (ancienne maison Sauvan La Rose). Puis la Mairie est déplacée au Presbytère, dont les travaux de reconstruction sont réalisés dans les années 1870. Une autre maison, située au nord-est de l'église a également accueilli la Mairie. Enfin, depuis le début du 21e siècle, elle est installée dans le bâtiment de l'ancienne école primaire. De même que la Mairie, l'école a connu plusieurs bâtiments : simple pièce d'une maison, puis maison Sauvan La Rose, puis Presbytère, et enfin chalet-école construit en contrehaut de la fontaine-abreuvoir au milieu des années 1950.
Le ravin de Lara a été partiellement couvert dans les années 1930 puis 1960, afin de créer un parking automobile en contrebas de la fontaine-abreuvoir.
Le four à pain mentionné par le cadastre de 1830 a été démoli au début des années 1970. En revanche, un nouveau four à pain a été construit au pont de Lara en 2004-2005 dans le cadre d'un programme européen.
Des maisons pavillonnaires ont été construites aux quartiers des Granges, des Aires et des Prés.
Jean ou Jean-Baptiste Bourcet de La Saigne, né en 1713 et mort en 1771 en Corse. Frère cadet de Pierre Joseph Bourcet.
Officier général et ingénieur ordinaire du Roy.
Auteur entre 1764 et1769 des Cartes des Frontières Est de la France, à la suite du travail de son frère.