Historique
Le site de Saint-Pierre est probablement un oppidum protohistorique, dont l'occupation a sans doute continué jusqu'à l'époque médiévale. De nombreuses traces anthropiques ont en effet été relevées sur les parois du labyrinthe rocheux, de nature religieuse ou rituelle (trous de cupules, vasques creusées au sommet des blocs rocheux), ou de nature domestique (trous de poutres creusés sur plusieurs parois et correspondant à des bâtiments de deux à trois niveaux, faille naturelle transformée en porte avec feuillure et trou de loquet, rampe en pierre sèche, etc.). La surface de la grande plateforme située à une dizaine de mètres au sud de la chapelle est entaillée de profondes rigoles (fondations d'un bâtiment ?) et la tradition orale rapporte qu'un grand trou d'attache était creusé à l'extrémité de cette plateforme.
Dans la chapelle, la lecture des murs de l'abside, et des murs nord et ouest de la nef, montre un parement originel en petit appareil qui porte d'importantes traces d'incendie. L'abside possédait une fenêtre axiale, dont l'encadrement a disparu lors d'une reprise de la maçonnerie. Le mur nord présente en outre une baie murée, dont l'encadrement en « trou de serrure » avec claveaux extradossés, pourrait faire remonter sa construction à l'Antiquité tardive ou au début du Moyen Age. En revanche, le mur sud a été entièrement remanié, avec l'adjonction d'un auvent sur piliers, et la suppression de la partie haute du gouttereau (au 17e ou au 18e siècle ?). La surélévation des murs et la construction de la voûte d'arêtes qui couvrait la nef date de cette même campagne de transformation. L'ermitage a peut-être été accolé au début du 18e siècle et des réaménagements ont également concerné l'espace devant et autour de la chapelle : construction d'un grand mur de soutènement côté est (dont le sommet porte la date de 1722), creusement du chemin qui circule autour du bâtiment.
Plan de masse et de situation d'après le cadastre napoléonien de 1830, section B, parcelle 83.La chapelle est figurée et nommée sur la Carte de Provence des Ingénieurs Géographes Militaires (1748-1778) au 1/14 000e environ. En 1788, Achard décrit l'ancienne procession de la paroisse, qui avait lieu le 29 juin, jour de saint Pierre, et qui allait du Fugeret à la chapelle Saint-Pierre, "bâtie dans un désert à deux lieux de la paroisse". Cette particularité pourrait témoigner dans le sens d'un site fondateur pour la communauté du Fugeret. Un peu plus tard, l'édifice est nommé chapelle Saint-Pierre-du-Bois dans les documents révolutionnaires.
Le cadastre de 1830 la mentionne comme « bâtiment chapelle » appartenant à la Commune du Fugeret. Le plan de masse de cette époque montre clairement le chemin qui fait le tour du bâtiment. Dans le questionnaire sur l'état des paroisses de 1840, le curé mentionne la chapelle qui est encore en bon état et la procession du 29 juin qui visiblement attire encore beaucoup de fidèles, y compris des paroisses voisines : "il y a une chapelle dédiée à st Pierre à 2 heures de la paroisse ; on y fait dire quelques fois la messe".
En 1900 cependant, l'évêque modifie l'usage qui voulait que le jour de la fête patronale la grand messe soit célébrée dans la chapelle, cet usage ayant "tant pour le clergé que pour les fidèles de nombreux inconvénients" : une messe basse sera désormais dite à une heure matinale (7 heure) à la chapelle tandis que la grand messe aura lieu à la paroissiale. C'est sans doute le début de l'abandon de la chapelle. Un dessin de l'abbé de Méailles, Juvénal Pellissier, réalisé en 1921, montre qu'à cette époque le porche devant la chapelle n'existe déjà plus, et qu'un clocheton orné d'une croix rayonnante était fixé au faîtage. Pourtant, dans les années 1930, la chapelle est encore le but de la procession du 29 juin.
Description
Chapelle Saint-Pierre-du-Bois, vers 1890.Cette chapelle est située à environ 2 kilomètres à l'est du village du Fugeret, au sommet d'un grand chaos gréseux formant un labyrinthe naturel de type lapiaz. Elle a été érigée à l'extrémité de la falaise, un chemin courant tout autour de l'a construction comprenant une chapelle et un ermitage accolé, il est en partie creusé dans le rocher côté est, avec une réserve formant garde-corps, côté ouest il est soutenu par un mur..
La chapelle, orientée, présente un plan très simple à nef unique prolongée d'une abside saillante, semi-circulaire voûtée en cul-de-four. L'accès à la nef se faisait (avant l'écroulement du mur) par le mur sud, largement ouvert par une baie plein cintre précédée d'un porche. Cette chapelle correspond au type, très répandu, des chapelles à façades ouvertes.
Elle est construite en maçonnerie de moellons de grès équarris, avec un parement en petit appareil visible sur une hauteur de 2 à 4 mètres. Dans le mur nord, on note une baie murée, avec un encadrement en « trou de serrure », en pierre de taille de tuf avec claveaux extradossés. On note des corbelets en pierre de taille à l'épaulement de l'abside, et une niche est murée côté sud. Les murs recevaient un enduit stuqué avec un décor peint. La nef était couverte par une voûte d'arêtes reposant sur quatre piliers maçonnés. Le goutereau sud était uniquement fermé par une grille en bois, donnant sous un porche couvert par un auvent qui reposait sur deux piliers en pierre de taille. Le toit à longs pans était couvert en planches de mélèze.
Le bâtiment d'un ermitage, dont il ne reste également que des vestiges, est accolé au nord. Il a été construit en maçonnerie de moellons de grès, les chaînes d'angle sont en pierre de taille. Il comportait un rez-de-chaussée et un étage carré. Le rez-de-chaussée était occupé par un logis. Il était accessible par une porte piétonne côté est, il était éclairé par une fenêtre (murée en jour) côté est, et par deux jours en fente côté ouest. Une cheminée est en visible, engagée dans le mur, flanquée de deux niches, l'une accueillant un potager et l'autre un cendrier. L'étage carré était occupé par une chambre, éclairée côté nord par une fenêtre et côté est par un jour en fente. Le toit à longs pans était couvert en tuile creuse, l'avant-toit et les rives étant traitées par un débord de lauzes. Sur l'esplanade dégagée devant la chapelle, on note une fosse creusée dans le rocher que la tradition locale désigne comme « sarcophage ».