Dossier d’œuvre architecture IA83002199 | Réalisé par
  • enquête thématique régionale, architecture militaire de Provence-Alpes-Côte d'Azur
batterie de Mord'huy
Œuvre étudiée
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  • (c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Dénominations
    batterie
  • Appellations
    batterie de Mord'huy
  • Dossier dont ce dossier est partie constituante

Construction et armement

En 1679, date de la première tournée à Toulon de Vauban, commissaire général des fortifications, la presqu'île de Saint-Mandrier (alias presqu'île de Cépet) n'était pas fortifiée, seule la petite rade et son débouché sur la grande rade étant défendus par des ouvrages pérennes de défense côtière. L'idée d'une mise en défense planifiée de la presqu'île n'émerge dans les projets de Vauban qu'en 1695, liée à la menace d'une croisière anglaise en Méditerranée. Une carte des rades de Toulon sur laquelle on a marqué les batteries des environs pour empescher le bombardement exprime la stratégie proposée par Vauban, mais celle-ci est affinée par son collaborateur et relais local Antoine Niquet, directeur des fortifications de Provence, auteur d'une carte plus détaillée, datée du 22 mars 1695, associée à un mémoire sur l'état des batteries à faire et à réparer sur la côte des rades de Toulon 1.

Un long retranchement ou ligne de batteries numérotées 15 à 17 est indiqué par le plan de Vauban sur la côte est de la presqu'île, le point 15 correspondant à la future batterie du Puits, le point 16 à celle de Mord'huy, chacune proposée pour porter trois canons. La carte et le mémoire de Niquet précisent ces données : le projet de batterie placé sur la pointe de Mordhuy y est cotée 12 et commenté "Pour incommoder les vaisseaux qui pouroient mouiller tout à fait au dehors du Cap Cepet, il est bon de poster 2 ou 3 gros canons seulement sur la hauteur notée 12, ne faisant autre façon que d'aplanir la place à mettre des platteformes". Le cumul de l'armement des deux batteries projetées du Puits (13) et de Mord'huy, atteint huit canons, un retranchement de plage étant prévu entre les deux dans le vallon du Puy. A la date même du mémoire, Niquet passe marché à l'entrepreneur toulonnais Aguillon pour la construction de sept batteries le long de la cote de Saint Mandrier, dont celle de Mord'huy. Le Plan de Toulon et de ses rades, copié sur celui de M. de Vauban, daté du 19 mars 1701 2, qui indique les batteries réalisées, en figure une, de plan en fer à cheval, au Puits, et une autre, plus petite, au-dessus de la pointe de Mord'huy. Sur le plan de la rade de Toulon en l’année 1703 3 figure, sous le n°17, au-dessus de la pointe de Mord'huy, non nommée, la batterie de la plage du Puis, munie de 3 pièces de 6... (de 64). En 1759, François Milet de Monville, directeur des fortifications de Provence, dresse un état des batteries de côte dans un mémoire daté du 9 mars et sur une Carte des rades de Toulon 4. La batterie de Mord'huy, cotée 6, est mentionnée comme ayant besoin de "quelques réparations pour y placer une ou deux pièces, de façon qu'elles puissent tirer de tous costés." Ce qui est aussi le cas de celle du Puits. Milet ajoute : "je propose une petite redoute en maçonnerie sur la hauteur qui est à leur droite, pour protéger leur gorge de concert avec le redoute qui a été construite en arrière de la batterie du Puy. Je propose encore d'élever sur les derrières de leurs plates-formes un parapet de 4 p. 1/2 de hauteur." Le Mémoire pour servir au projet général de 1764, rédigé par Milet de Monville 5, mentionne, dans ses observations générales, ses intentions de principe pour l'amélioration des défenses des batteries, non intégrées au projet. Au nombre de celles-ci, on note : " retrancher solidement par la gorge les batteries de Faubregas, de la Verne, soutenir par des redoutes sur les hauteurs dominantes les batteries du Puits, de Mord'huy, de St Mandrier et de la Coudoulière".

Le 1er mars 1768, le sous-brigadier du génie Louis d’Aguillon, qui assure depuis 1766 le suivi de l’exécution des ouvrages de défense de Toulon, consacre aux batteries de côte un chapitre de son Mémoire sur la ville de Toulon 6. Il y dénombre sept batteries armées en temps de guerre pour augmenter les défenses que procurent à la rade les forts et batteries fermés, armés en permanence. Ces batteries, désarmées en temps de paix, sont celle du Cap Brun, de la Croupe Lamalgue, de Faubrégas, et, sur la presqu’île de Cépet, celles de Saint-Mandrier, de Saint Elme, de Mord’huy (armée de 4 canons de 24), et du Puits (armée de 10 canons de 36). Aguillon fait état de la nécessité de stabiliser l’état de ces batteries qui toutes en général sont à barbette et dans un très mauvais état. L’emplacement de ces batteries n’est point estable et il arrive qu’à toutes les nouvelles guerres, lorsqu’il est question de les armer, on est obligé d’en former les plates-formes en madriers de chêne posés sur des corps morts enterrés. Ces bois exposés aux pluyes et à l’ardeur du soleil en été se pourrissent en peu de temps ce qui occasionne une consommation de bois étonnante et une dépense considérable. Aguillon propose en conséquence de les reconstruire en maçonnerie, avec parapets à front escarpé, et à la gorge une fermeture formée d’un mur et d’un fossé pour les mettre non seulement à l’abri d’un coup de main mais même pour s’assurer des équipages destinés à servir le canon. Les plates formes ne doivent plus être construites sur des madriers de chêne, mais, mais en pierre de taille ou en maçonnerie d’engravats. De plus chaque batterie doit avoir un petit magasin à poudres, un magasin pour les effets de recharge de l’artillerie et un corps de garde, car jusqu’à présent, les effets étaient entreposés en période d’armement, aux frais du roi, dans les bâtiments ruraux (cassines ou bastides) les plus proches, parfois trop éloignés, et insuffisamment sûrs.

Une visite d’inspection sur l’État actuel des batteries des rades de Toulon 7 faite en décembre 1770 par les sieurs Champorcin, Vialis, Boullement et Imbert, précise que l'objet de la batterie de Mord'huy est d'avertir en cas que les vaisseaux ennemis paroissent sur la côte, et de les en éloigner, elle est armée de 4 pièces de 24, dont une hors de service ; il n'y a ni affût ni plate-forme.

Dans la période révolutionnaire, en l'an 2 de la République, après la reprise de Toulon aux anglais, une inspection du front de mer faite le 1er pluviose (20 janvier 1794) par Samuel de Marescot, chef de bataillon du génie, indique que les batteries existant (armées) dans la presqu’île sont "la vieille batterie, la Caraque, les Frères, le Puy, le Morduy, la Coudoulière (...) et la batterie du cap St Elme" 8. Il précise qu'elles "ne sont autre chose que des plate-formes, presque toutes en briques, bordées d'un petit parapet de quelques pouces seulement de hauteur (...) en bon état, mais (...) qu'il serait à propos de les enceindre de murs crénellés ainsi qu'il a été pratiqué à la batterie de la Carraque (Marescot fait ici allusion à la batterie de Saint-Mandrier), autrement, rien n'empêche l'ennemi de faire de petites descentes et d'en venir égorger la garde, et enclouer les pièces, ou même les jeter à la mer". Ce texte prouve que ces batteries avaient été réparées après 1768. A la suite, une commission d'experts composée des sieurs Locquin, Thévenard, Toufaire et Pierron, examine l'état de situation des batteries de l’entrée et de l’intérieur de la rade du Port de la montagne (nouveau nom de Toulon à partir de la Convention), pour augmenter la défense de ce port par des ouvrages extérieurs (...) 9. L’armement de la batterie de Mord'huy, au 1er germinal (21 mars 1794) est de quatre canons de 24, mais elle dispose en outre de trois embrasures vides, son réarmement, au 16 prairial (4 juin) la gratifie de dix canons de 36, d'un mortier de grande portée, et d'un four à rougir les boulets, avec nécessité de la remanier en conséquence : "Cette batterie sera rallongée dans le S (sud?) pour 3 canons de plus".

Le plan de la presqu'île de Cépet pour l'an 9 (1800) 10 montre que les projets de batteries neuves de 1794 n'ont pas été réalisés, seules celle préexistantes étant en place. L'épaulement de la batterie de Mord'huy est exprimé sommairement en deux branches jointives mais décalées en baïonnette, la gauche plus en avant que la droite, avec un petit bâtiment à la gorge de la branche gauche. Cette disposition, également figurée le plan de la presqu'île de Cépet pour 1811 11, confirme l'agrandissement de la batterie primitive, pour l'adapter à dix pièces.

Les projets pour assurer la défense des presqu'îles de Balaguier et Cépet font l'objet d'un rapport du général Maureilhan au Comité des fortifications, en date du 6 janvier 1812 12, qui mentionne le projet du directeur des fortifications de Toulon, dont l'article 7 propose de construire une batterie de 18 pièces retranchée à la gorge entre la plage du Puy et la batterie de Mord'huy, pour tenir lieu des deux batteries du Puy et de Mord'huy. Ce projet n'est pas soutenu, l'inspecteur demandant seulement d'armer convenablement les batteries du Puy et de Mord'huy. Dans une lettre datée de Saint Cloud le 3 mai 1812 et adressée au duc de Feltre 13, son ministre de la guerre, Napoléon ordonne le programme à mettre en oeuvre d'urgence à la Croix des Signaux et à la Carraque, et mentionne accessoirement les batteries du Puy et de Mord'huy, à maintenir, en précisant : "Ce n'est qu'en 1814 et 1815 qu'on pourra s'occuper des tours de Mordhuy et du cap Cépet, si cela est jugé nécessaire", ce qui laisse penser qu'il envisageait de construire à Mord'huy une tour-modèle 1811 du type de celle de la Croix des Signaux. Le 15 juillet 1812, le vice-amiral Emériau commandant en chef de l'armée navale de la Méditerranée, signale que la défense de l'entrée de la rade est imparfaitement assurée par le seul flanc droit. Il en conclut qu'il faut renforcer les ouvrages du Puy et de Mord'huy, avec une forte couverture de la batterie, et une garnison en presqu’île.

Sur le plan d'ensemble de la rade dressé en 1816, la batterie est exprimée sans changement, si ce n'est la présence de trois petits bâtiments à sa gorge et non un seul. Des plans d'atlas dressés en 1818 14 donnent le détail de ses dispositions : un épaulement très allongé en deux branches à parapet continu, incurvé en saillie dans sa moitié (branche) gauche, rectiligne dans sa moitié droite, avec, pour cette branche droite, un retour de parapet à angle droit et une plate-forme d'artillerie rectangulaire soutenue à la gorge par un mur de terrassement. Les bâtiments sont encaissés en contrebas des plates-formes des deux moitiés de la batterie, le plus grand, soit le corps de garde ou réduit, vers le centre, presque carré, refendu en trois pièces inégales, face à l'escalier-rampe montant à la batterie. Au pied de la terrasse de l'aile droite et de son escalier d'accès central, un petit bâtiment correspond au four à boulets. A l'arrière et au-dessus de l'aile gauche, est un minuscule magasin carré.

Comme la plupart des autres batteries de côte de Toulon et de la presqu'île, celle de Mord'huy entre en léthargie pendant plus d'un quart de siècle. La nouvelle commission de défense des côtes, en 1841 15, lance un programme général de remise aux normes des batteries de côte, en plaçant au premier degré d'importance, dans la presqu'île de Saint-Mandrier, celles de Saint-Elme et de La Carraque, mais en formulant des préconisations générales pour toutes.

Le colonel Édouard Picot, directeur des fortifications de Toulon, et le chef du génie Dautheville, bientôt remplacé par le chef de bataillon Joseph Corrèze, sont chargés, à partir de 1843, de travailler aux projets de reconstruction ou de réorganisation des ouvrages de défenses, tant forts que batteries. Celle de Mord'huy fait l'objet d'un premier projet en 1846, avec une dépense estimé de 4000 fr, ce qui correspond à une adaptation la plus économique possible ; ce projet est de représenté en 1847 16 : comme dans le cas de la batterie de Saint-Elme, il s'agit d'abord de resserrer la partie utile de l'épaulement existant, pour limiter la surface de ce qui doit être renforcé et réorganisé, en application de la consigne générale consistant à réduire le nombre de pièces et de calibres à servir dans les batteries de côte : "Conformément à l'avis du comité (des fortifications), on n'épaissira jusqu'à 6 mètres que la gauche de la batterie, pour quatre pièces, et on laissera subsister dans son état actuel la partie droite. La fermeture à la gorge consistera en un mur qui, partant de l'extrémité gauche de la crête de l'épaulement, ira aboutir à l'angle nord du corps de garde existant, et en un autre mur partant de l'angle sud du même corps de garde et aboutissant au mur actuel exhaussé d'un mètre (...) Le corps de garde actuel sera restauré et rendu défensif au moyen de créneaux."

Projets pour 1848. Fortifications. Article 5 (Défense des côtes). Organiser la batterie du Mord'huy. 1848.Projets pour 1848. Fortifications. Article 5 (Défense des côtes). Organiser la batterie du Mord'huy. 1848.Le mémoire pour les projets de 1848 17 apporte quelques précisions : "l'abandon de la partie droite est peu regrettable, car des murs que d'après les anciens plans on pourrait croire en bon état de conservation, sont en pierres sèches et tombent en ruines. On rend défensif, suivant les vœux de la commission, le corps de garde actuel et on maintient sa distribution intérieure, composée d'un petit magasin à poudres voûté de 2m30 de longueur sur 2m de largeur dans œuvre, d'une chambre pour le gardien et d'une autre un peu plus grande pour les soldats". La capacité estimée est de 18 soldats. Le plan joint, établi par le capitaine Ramet, montre ce petit corps de garde, dont les murs maigres sont à percer de six créneaux, qui se trouve désormais situé à la droite de la gorge de la nouvelle batterie réduite. Celle-ci réoccupe l'épaulement de la branche gauche de l'ancienne, en l'épaississant et en lui donnant deux retours à peu près symétriques ; le mur de fermeture à la gorge, retranché par un fossé taillé dans le roc dominant, est prévu très court. Il adopte un tracé vaguement bastionné : courtine au centre avec porte, un demi-bastion à gauche dont la face fait mur de coupure du retour de l'épaulement, bastion à droite, les murs du corps de garde lui tenant lieu de faces et lui procurant un flanc gauche. Le plan de la branche droite de l'ancienne batterie est exprimé comme devant être détruit. Le projet est estimé à 5000 fr.

Le projet pour 1849, évalué à 12.900fr, est sensiblement différent : l'épaulement pour quatre pièces reste assez semblable, mais il n'est plus question de déblayer le rocher à sa gorge pour créer un fossé et un mur de retranchement, même très resserré. Le corps de garde existant est détruit et remplacé par un neuf plus long, à peu près au même emplacement, mais dans un axe pivoté à droite. Sa longueur impose de tailler un peu en réserve le front rocheux pour dégager de la place à la gorge de la batterie. Curieusement, la distribution et l'économie de ce corps de garde sommaire reprennent celle de l'ancien : même largeur, même faible épaisseur de murs, même position du magasin à poudres voûté dans une travée opposée au côté de l'entrée du bâtiment. Seule la chambre pour les soldats est doublée de longueur, pour accueillir vingt hommes, et précédée de deux petites pièces de part et d'autre du vestibule d'entrée, une pour le chef de poste, l'autre pour la cuisine. Ce corps de garde est crénelé du côté de l'entrée et sur son grand côté regardant vers l'intérieur de la batterie. Contemporain de la diffusion des modèles-type de réduits de batterie de côte mis au point en 1846, corps de garde défensifs ou tours, déclinés en trois échelles de dimensionnement, ce projet pour 1849 en constitue une variante "au rabais", moins robuste, moins bien retranchée, peu qualifiable de réduit défensif, compromis avec l'ancien corps de garde. De fait, ce projet n'est pas exécuté et la réorganisation de la batterie est ajournée pendant près de dix ans.

Projet pour 1858-1859. Fortifications (Défense des côtes) Compléter la batterie du Mord'huy. 1858.Projet pour 1858-1859. Fortifications (Défense des côtes) Compléter la batterie du Mord'huy. 1858.Le nouveau projet, fait par le capitaine Meunier sous la direction du chef du génie de Toulon, le colonel Antoine Long, est daté de 20 avril 1858, et évalué à 28.650 fr 18. Le plan du projet ne montre presque aucun changement avec celui de 1848 en ce qui concerne le nouvel épaulement de la batterie pour quatre pièces de calibre 30cm tirant dans trois directions. Par contre, la branche droite de l'ancienne batterie n'est plus abandonnée, mais réhabilitée, avec un parapet reformé, moins pour accueillir des pièces d'artillerie supplémentaires, non prévues, que pour défiler des tirs venus des vaisseaux ennemis le nouveau corps de garde projeté. Il s'agit cette fois d'un véritable réduit, beaucoup plus grand que l'ancien, donc implanté plus à gauche, sur un emplacement moins contraint par le relief dominant, donc à l'arrière de cette branche droite. Le modèle est celui du corps de garde crénelé type 1846, n° 3, pour vingt hommes, soit adapté à une batterie de quatre pièces. Il est partiellement retranché par un fossé particulier, selon le modèle-type, et sa porte, prévue du côté opposé à l'épaulement, face à l'escarpement rocheux, est desservie par une rampe descendante. Ce corps de garde coûte à lui seul 22.000 fr. L'avis du comité des fortifications du 16 juin 1858 approuve le projet, en demandant d'essayer de relever le sol d'assiette du corps de garde pour diminuer les déblais. Les travaux des épaulements sont réalisés en 1859, avec un crédit de 6000fr. Le corps de garde est construit en 1860-1861, conformément au projet.

Un plan détaillé d'état de la presqu'île, pour le projet d'établissement d'un chemin carrossable reliant les batteries, daté du 2 février 1867 19, mentionne, pour la batterie de Mord'huy, un armement de cinq pièces, alors que quatre pièces seulement étaient mentionnées sur un plan du 8 janvier 1860, un mortier ayant sans doute été ajouté aux quatre canons du nouvel épaulement.

Le rapport de la commission mixte de révision de l'armement du littoral, daté du 6 mars 1873 20, considère que les batteries de la presqu’île de Cépet qui sont dirigées vers le large, soit principalement celles du Puits et de Mord’huy, présentent l’inconvénient de ne pouvoir faire converger leurs feux sur un même point de la route suivie par l’ennemi, étant disposées presque en ligne droite. Les rapporteurs en concluent que ces batteries dispersées, pourraient être avantageusement remplacées par une forte batterie sur la hauteur de la Croix des Signaux. Le principe du déclassement de la batterie de Mord'huy est proposé par la commission de défense des côtes du 16 décembre 1874. L'avis n'est pas suivi d'effet, mais il n'est plus question de renouveler l'organisation ou l'armement de cette batterie, notamment lorsqu'une circulaire du 18 mars 1876 fixe de nouvelles normes spécifiques aux batteries de côte, notamment la réduction des sections d'artillerie à une ou deux pièces, séparées par des traverses-abris. Le plan de défense de la rade de Toulon de 1876 approuvé le 4 avril 1877 21, prévoit l’abandon de six batteries, dont Mord'huy, l’adaptation de cinq et la création ex-nihilo de neuf autres, dont celle de la Croix des Signaux. Ce programme favorisant un nouveau type de batterie de côte, situé en altitude, est mis en œuvre à partir de l’année 1878, notamment par la construction d'une grande batterie de huit pièces sur la hauteur de la Croix des Signaux. Si la batterie de Saint Elme, vouée à l'abandon, est finalement réorganisée en 1877-1878, celle de Mord'huy est simplement maintenue en service minimum, avec un armement réduit à deux canons de 30cm et d'un mortier à plaque de 32 cm. Au 1er octobre 1877, la batterie abritait des munitions et des poudres pour 312 coups dont 40 chargés et 12 boites à mitraille ainsi que 100 bombes vides pour le mortier. Leur service devait être assuré par 6 canonniers exercés et 13 auxiliaires.

Déclassée le 3 décembre 1888 et désarmée, la batterie de Mord'huy connait une réutilisation en 1904, dans le cadre du plan d'éclairage défensif du front de mer de Toulon, comme poste photo-électrique. En plus des batteries, la défense du front de mer avait développé dès la fin du XIXe siècle un autre moyen d’action fixe, des lignes de torpilles immergées, soit des mines dont la mise de feu électrique est dirigée et commandée depuis la terre. Un ensemble de postes d’observation optique et de commande électrique ont alors été implantés autour de la rade, et perfectionnés au tournant du siècle par des projecteurs permettant de fouiller la nuit pour débusquer d’éventuels navires ennemis. La batterie basse du cap Brun, qui comporte aussi un corps de garde crénelé type 1846 (en l'occurrence, un n°1), offre un bon exemple de ce type d'infrastructure, réalisée en 1905-1907, sans se substituer à la batterie proprement dite, maintenue en fonction et actualisée.

A Mord'huy, plus petit site, il s'agit clairement d'une reconversion, ou transgression d'usage. Dans ce cadre, le corps de garde de 1860 est conservé, mais son parapet est dérasé pour en réduire la hauteur et en améliorer le défilement. A proximité immédiate et à l'arrière de la gorge de l'ancienne batterie de 30cm, l'escarpement rocheux est entaillé pour abriter un local avec atelier et magasin au charbon pour un moteur à vapeur faisant tourner une génératrice d'électricité, et une citerne d'eau pour la production de vapeur. L'une des casemates du corps de garde est décaissée d'un mètre et ouverte sur le côté gauche pour servir d' abri de jour au projecteur. Face à cette issue, le sol de l'ancienne batterie de 30cm est creusé d'une tranchée rectiligne, longue d'une vingtaine de mètres, qui traverse l'épaulement en tunnel pour déboucher à son pied, face à la mer, dans l'abri de combat du projecteur. Une voie ferrée est établie dans la tranchée entre abri de jour et abri de combat. D'après un plan datable de 1905, l'épaulement de la batterie de 30cm est en bon état, alors que celui de la branche droite réparée en 1859 est dégradé.

Une dépêche ministérielle du 21 juillet 1906 recommande la création, "sur la ligne Mord'huy - Pointe de Carqueiranne, d'une zone de barrage comportant sur chaque rive deux feux soit que l'un soit fixe et l'autre chercheur, soit que le rôle de fixe et de chercheur soit joué alternativement par l'un et l'autre dans la moitié du secteur à explorer À Mord'huy les deux feux seront: -le feu de 1.50 existant -un feu de 0.90 dont l'emplacement est à déterminer."22 Un rapport de projet du 8 octobre 1910 demande la mise en place de ce second feu une quinzaine de mètres à la gauche du premier, les abris de combat des deux pouvant être reliés à l'arrière par une galerie bétonnée sous l'épaulement, utilisable comme abri de jour pour les deux projecteurs, afin d'éviter la sujétion de remiser chaque jour le projecteur dans le réduit, opération longue et pénible par suite de la déclivité du terrain et de la résistance de la courbe qui précède le tunnel 4. Ce projet n'a pas été réalisé.

Analyse architecturale

Site et implantation générale

La batterie de Mord'huy occupe un site très contraint dans sa topographie, sorte de petite plate-forme en partie naturelle, en partie aménagée, en balcon à 18m d'altitude au-dessus de la mer sur le versant d'un escarpement rocheux en forte déclivité.

La grande rade vue de Mord'huy ; au loin à gauche, hauteurs de Carqueiranne.La grande rade vue de Mord'huy ; au loin à gauche, hauteurs de Carqueiranne.

L'épaulement, face à l'est, regardant la côte de Carqueiranne, et son corps de garde, sont en quelque sorte coincés entre deux petites éminences taillées en falaise en front de mer, et directement adossés à celle de gauche (nord), qui forme le cap de Mord'huy. Le chemin d'accès passe entre ces deux hauteurs ; il fait aujourd'hui partie d'un lacis de routes militaires desservant les différents bâtiments et le parc foncier du Centre d'Instruction Naval (CIN) de Saint-Mandrier. L'ancienne batterie est l'un des sites d'entraînement du "commando Hubert"23.

Plan, distribution spatiale, circulations et issues, structure et mise en œuvre

Dans l'état actuel des lieux, le corps de garde crénelé type 1846 n° 3, construit en 1860 et remanié en 1904, est le seul élément monumental et le vestige le plus visible de la batterie. L'épaulement, dégradé au point d'avoir pratiquement disparu dans sa partie droite (sud), mieux conservé dans sa partie gauche, la plus ancienne dans l'absolu, mais elle est devenu peu significative du fait de la disparition des emplacements de tir, et ne se prête pas à description. Cet épaulement n'est plus qu'une sorte de relief ou merlon artificiel qui rehausse l'escarpement rocheux dévalant vers la mer, et qui continue à dérober le corps de garde aux vues depuis le large.

En revanche, la tranchée de communication entre le corps de garde crénelé et l'ancien abri de combat du projecteur, creusée en 1904 dans le sol de l'ancienne batterie et responsable de la destruction d'un à deux anciens emplacements de tir, est encore reconnaissable. Elle a perdu sa voie ferrée, mais ses murets de soutènement en blocage de moellons à joints beurrés, lardés de chantepleures encadrées en briques, sont bien conservés. Cette tranchée de chemin de fer en rampe légèrement descendante vers l'abri de combat, rectiligne sur une longueur de 29m, fait un virage d'un quart de tour à droite pour passer en tunnel sous l'épaulement dans un axe perpendiculaire, et non biais. L'arche d'entrée du tunnel est ménagée dans un mur de soutènement revêtant la coupure faite dans la banquette des anciens emplacements de tir, à l'arrière du parapet d'artillerie de l'épaulement, à la manière d'une entrée de tunnel ferroviaire civil, en dimensions réduites. Le mur de revêtement est parementé en opus incertum ou appareil polygonal, avec joints tirés au fer, arasé à l'horizontale sous une épaisse tablette en pierre de taille dure finie à la boucharde. L'arche elle-même est encadrée en pierre de taille de même nature et finition, avec claveaux saillant un sur deux. Au dessus de la clef de l'arc, une pierre de taille isolée millésimée 1904-1905, enchâssée dans le mur, commémore la construction de cet ouvrage d'art. Malheureusement, l'arche est aujourd'hui murée en sorte que ni le tunnel, ni l'abri de combat ne sont normalement accessibles. Il n'a pas été possible de descendre par l'extérieur de l'épaulement à l'abri de combat, en partie masqué par la végétation ; il se caractérise se singularise notamment par le fait que sa visière est constituée de plaques de blindages et non de béton armé.

Revêtement côté intérieur de l'ancien épaulement, arche du tunnel du projecteur du poste photo-électrique.Revêtement côté intérieur de l'ancien épaulement, arche du tunnel du projecteur du poste photo-électrique.

Le corps de garde crénelé est pour l'essentiel conforme au modèle-type 1846 n°3. Sa face latérale gauche regarde la gorge de l'épaulement de l'ancienne batterie de 30cm, la tranchée de chemin de fer partant de ce mur. Le fossé étroit qui l'entourait entièrement, tout à fait normatif, est aujourd’hui en grande partie comblé et dénaturé, notamment par destruction complète de la contrescarpe. Sa profondeur, et le soubassement du corps de garde, restent dégagées à droite de la façade d'entrée. La culée sur laquelle s'abaissait le tablier de l'ancien pont-levis émerge du comblement et reste reconnaissable, conservant un vestige de garde-corps en fer. Comme on l'a mentionné, sa plate-forme supérieure a entièrement perdu son parapet crénelé à bretèche, dérasé en 1904. Il présente donc l'aspect d'un bloc cubique de faible élévation, sans superstructures. Excepté ces mutilations, et le réaménagement, toujours en 1904, de la première de ses deux grandes casemates en abri de jour du projecteur, il est assez bien conservé dans l'aspect de ses façades, qui ont conservé leur enduit couvrant masquant la maçonnerie en blocage, et dans sa distribution interne. On note, au dehors, la présence de chaines d'angle harpées en pierres de taille bouchardées, partant d'un soubassement en léger relief, formant plinthe, parementé en petit appareil de moellons équarris et assisés, à finition rustique, comptant deux assises pour une dans les pierres du chaînage d'angle. Corps de garde crénelé type 1846 n° 3, façade d'entrée découronnée, porte à pont-levis.Corps de garde crénelé type 1846 n° 3, façade d'entrée découronnée, porte à pont-levis.

La principale, voire la seule entorse au modèle-type, tient aux proportions de son plan, pratiquement carré et non rectangulaire un peu allongé : les "petits côtés", dont celui de l'entrée, larges de 12m dans le modèle-type n°3, sont ici larges de 14,30m, les faces latérales, en principe longues de 14,75m, l'étant ici de 14,67m. Il est donc globalement un peu plus grand que le modèle-type. Par ailleurs, le reste du schéma distributif est parfaitement respecté : dans la partie médiane, deux grandes casemates de casernement transversales voûtées en berceau, ici larges de 3,30m, sont encadrées par deux travées de culée tripartites. Le voûtement des trois petites casemates de ces culées (l'une d'elle constituant le double sas d'entrée), est perpendiculaire à celui des grandes casemates, pour assurer la fonction de contrebutement. Les murs latéraux de ces travées de culées sont plus épais, pour absorber les poussées des voûtes des petites casemates. Toujours conformément au modèle-type, la travée de culée antérieure, est moins profonde (2,05m) que la postérieure (3,30m, comme les grandes casemates). Elle intègre en son centre la porte à pont-levis et son sas d’entrée en double profondeur encadrée symétriquement des deux autres petites casemates, deux fois plus larges. Celles-ci abritaient d’une part (à droite) la cuisine, d’autre part (à gauche), la loge du chef de poste ou gardien de batterie 24. Ces deux casemates prennent jour en façade par trois créneaux surmontés d'un fenestron demi-circulaire, bien conservés. Au-dessous de la travée de cuisine, au niveau du fossé, régnait la citerne du réduit.

L'arcade d’entrée de la porte est, selon la norme, couverte d'un arc à plein-cintre en pierre de taille appareillée bouchardée, et inscrite en retrait dans le tableau rectangulaire d’effacement du tablier du pont-levis, ici encadré d'un chambranle en pierre de taille à bossage tabulaires finis au rustique. A la suite, un premier sas extrêmement court abritait dans des renfoncements latéraux les poulies de guidage (encore en place) et les contrepoids des chaînes du pont-levis. Il est séparé du second sas, ou vestibule, par une arcade intermédiaire à feuillure de vantaux, cette arcade étant ici encadrée en briques et couverte plus bas que la moyenne par un arc très surbaissé, ce qui a permis de ménager au-dessus un jour de tympan. Le second sas dessert, de part et d'autre, les casemates latérales, par deux portes étroites à arc surbaissé encadrées en brique, et, dans l'axe, par une autre porte, plus large, qui a conservé ses vantaux de bois sous son arc surbaissée en briques, les grandes casemates et la circulation en corridor qui en traverse le mur de refend. Les deux casemates latérales de la culée d'entrée sont bien conservées. Dans celle de la cuisine, qui comporte, comme celle du chef de poste, un créneau oblique dirigé vers le premier sas, les enduits à la chaux de la voûte en briques et des parois en pierre, semble d'origine, laissant apparents les encadrements en briques des ébrasements des créneaux et du fenestron. Ce dernier conserve une grille ancienne à barres verticales. Ces encadrements intérieurs en briques contrastent avec ceux qui s'affichent en façade extérieure, en pierre de taille appareillée saillant sur le nu du parement enduit, formant chambranle extradossé autour du fenestron, harpé autour des fentes des créneaux. Corps de garde crénelé, créneaux et fenêtre de la casemate de culée de droite, vus de l'extérieur.Corps de garde crénelé, créneaux et fenêtre de la casemate de culée de droite, vus de l'extérieur.

Dans la première grande casemate de casernement, le tiers droit du volume, sur 4,30 de profondeur, était réservé d'origine pour le magasin aux vivres, par une cloison qui existe toujours. Du côté gauche, une autre cloison, plus proche de la circulation en corridor, a été construite en 1904. Elle réserve la majeure partie du volume restant de la casemate, dont le sol a été décaissé de près d'un mètre, pour l'abri de jour du projecteur : les aménagements qui en attestent sont la grande arcade encadrée en pierre de taille qui défonce le mur de fond cette casemate sur presque toute sa surface, pour laisser passage au wagonnet du projecteur, et, au sol, les rails encore en place. Les deux vantaux de fer de la porte, avec imposte vitrée, remontent peut-être à 1905. Par ailleurs, les grandes casemates ont conservé les enduits couvrant qui revêtent voûtes en briques et murs en pierre, et certains des crochets qui servaient à suspendre les hamacs, mais leurs prises de jours dans les murs latéraux, qui se composaient de deux créneaux surmontés d'un fenestron en demi-cercle, ont, à une exception près, été défoncées pour abaisser l'appui du fenestron aux dépens des créneaux et tout réunir en une grande fenêtre, peu représentative de l'état d'origine, ce qui altère l'intégrité des façades latérales. Les trois travées de la culée postérieure, en revanche, ont conservées leurs percements d'origine. En stricte application du modèle-type n° 3, elles logeaient un magasin à poudre au centre, large de 4,60m, seulement percé d'évents en chicane, sans accès direct depuis la seconde casemate de casernement, encadré symétriquement d'un magasin d'artillerie à droite, d'un local annexe à gauche, seul accès au magasin à poudre. Dans le modèle-type, cette annexe sert de logement au gardien de batterie.

1Vincennes, SHD, 1 VH 1831, 1679-1701, n° 23, 25. Malheureusement, la numérotation des ouvrages sur la carte de Vauban ne correspond pas à celle de la carte et du mémoire de Niquet.2Vincennes, SHD, 1 VH 1831 1679-1701 n° 36, feuille 103Vincennes, SHD, 1VH 1832 n° 74Vincennes, SHD, 1 VH 1833, 1748-1763 n° 23, 17595Vincennes SHD, 1 VH 1834, 1764-1769, n° 1.6Vincennes SHD, 1 VH 1834, 1764-1769, n° 22.7Vincennes, SHD, 1 VH 1835 1770-1777, n° 6, 8Vincennes, SHD, 1V H 1839 1791-1793, n° 26.9Vincennes, SHD, 1 VH 1839 1791-1793, n° 30 annexe 510Vincennes, SHD, 1 VH 1840 1799-1811.11Vincennes, SHD, 1 VH 1840 1799-1811.12Vincennes, SHD, 1 VH 1841 1812-1813. n° 213Vincennes, SHD, 1 VH 1841 1812-1813, n° 1214Toulon, SHD 4B1 1bis.15Toulon, SHD 4B1 47 n° 44.16Vincennes, SHD, 1 VH 1864, 1847. n°117Vincennes, SHD, 1 VH 1865, 1848. n°1 et plan n°21.18Vincennes, SHD, 1 VH 1870, 1858-1859, plan n° 15.19Vincennes, SHD, 1 VH 1875, 1866-1867, plan n° 20.20Commission mixte de révision des défenses du littoral dans le 5è arrondissement maritime, Rapport du 6 mars 1873. Toulon, SHM 4B1 22 n° 275.21Rapport de la commission … sur un nouveau plan d’ensemble de la défense du port de Toulon. Vincennes, SHM DD² 104522Renseignements donnés par Luc Malchair (voir site internet http://www.fortiff.be/iff/index.php, notice Mord'huy, annexe)23Le commando Hubert est l'un des sept commandos marine de la Marine nationale française. Il porte le nom du Lieutenant de vaisseau Augustin Hubert, tué au combat le 6 juin 1944 à Ouistreham. Il est spécialisé dans l'action sous-marine et dans les actions de contre-terrorisme maritime et est constitué de nageurs de combat.24Dans le modèle-type, cette disposition est inversée, et la loge du gardien de batterie est incluse dans la même casemate que celle du chef de poste, avec cloison intermédiaire.

La pointe de Mord'huy, à l'est de la presqu'île de Saint-Mandrier, est l'un des points retenus en 1695 par Vauban et son collaborateur Antoine Niquet, pour y établir une batterie de côte. Elle fait partie des sept batteries ouvertes construites à cette date par l'entrepreneur toulonnais Aguillon sur les côtes de Saint-Mandrier. Il ne s'agissait que d'un épaulement sommaire pour 3 canons. Comme les autres batteries, elle n'était armée qu'en temps de guerre, d'après un mémoire de 1768 qui donne un armement de 4 canons de 24 et signale le mauvais état de l'épaulement.

En 1794, une commission d'experts chargée d'examiner la situation des batteries de côte de la rade de Toulon, décide que celle de Mord'huy sera agrandie pour recevoir 10 canons de 36. Cet agrandissement est réalisé en ajoutant une branche droite à l'épaulement en place. Un petit corps de garde y est installé.

En 1841, la commission de défense des côtes lance un programme général de remise aux normes des batteries de côte, dont la réalisation est confiée, après 1843, au colonel Picot, directeur des fortifications de Toulon, et au chef du génie Corrèze. Un premier projet, en 1846, consiste à réduire l'épaulement existant à sa branche gauche, réorganisée pour 4 pièces (la consigne générale étant de limiter le nombre de pièces), à le fermer à la gorge, le corps de garde existant étant conservé et crénelé. En 1849, un nouveau projet propose un nouveau corps de garde crénelé de plan allongé, assez frêle. Ajourné jusqu'en 1858, le projet est alors reformulé par le capitaine Meunier et le chef du Génie Long. Plus coûteux, il comporte la restauration de la branche droite de 1794, et la construction d'un véritable réduit de batterie défensif : un corps de garde crénelé type 1846, n° 3, pour vingt hommes, soit adapté à une batterie de quatre pièces. Les travaux sont réalisés de 1859 à 1861. Jugée obsolète dès 1876 en vertu des nouvelles normes alors en vigueur, la batterie de Mord'huy est déclassée en 1888. Elle connait une reconversion en 1904, dans le cadre du plan d'éclairage défensif du front de mer de Toulon, comme poste photo-électrique, avec projecteur mobile de 1.50 sur rails et génératrice à vapeur.

  • Période(s)
    • Principale : 4e quart 17e siècle, 4e quart 18e siècle, 3e quart 19e siècle , daté par source
    • Secondaire : 1er quart 20e siècle
  • Dates
    • 1904, porte la date
  • Auteur(s)
    • Auteur :
      Niquet Antoine
      Niquet Antoine

      Ingénieur général des fortifications de Provence, de Dauphiné, de Languedoc en 1680. En 1700, il est à Toulon où il travaille avec Vauban sur un nouveau projet d'aménagement du site : retranchement de la ville, aménagement du port et de la darse, défense de la ville avec des forts et des tours. Auteur des projets de fortification de la place de Seyne (Alpes-de-Haute-Provence) en 1690.

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      ingénieur militaire attribution par source
    • Auteur :
      Picot Edouard
      Picot Edouard

      Colonel du Génie, directeur des fortifications de Toulon à partir de 1840. Dessine l'extension nord-ouest de l'enceinte de Toulon en 1845, et des modifications au fort Lamalgue en 1846. Supervise la conception ou l'évolution de plusieurs ouvrages de la presqu'île de Saint-Mandrier, dont le fort de la Croix des Signaux.

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    • Auteur :
      Corrèze Joseph
      Corrèze Joseph

      Chef du Génie à Toulon en 1845, lieutenant colonel en 1848. Collaboration ou direction de plusieurs chantiers de la place de Toulon :

      - 1843-1848 : remaniement du fort Malbousquet

      - 1845 : caserne du Pas de la Masque

      - 1846 : remaniement du fort Lamalgue

      - 1844-1848 : batterie de la Carraque et fort de la Croix des Signaux

      - 1846-1849 : remaniement de la batterie basse du Cap Brun et de la batterie de la Cride

      - 1861 : 2e enceinte de Toulon

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    • Auteur :
      Long Antoine
      Long Antoine

      Colonel du Génie à Toulon au milieu du XIXe siècle. Auteur d'un projet (non réalisé) pour le fort Balaguier en 1858, participe à l'élaboration du projet de la 2e enceinte de Toulon en 1845, conçoit le dessin de la 3e enceinte de Toulon en 1860.

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    • Auteur :
      Ramet
      Ramet

      Capitaine du Génie à Toulon entre 1844 et 1848. Contribue à l'achèvement de la batterie de la Carraque et du fort de la Croix des Signaux à Saint-Mandrier.

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    • Auteur :
      Meunier
      Meunier

      Capitaine du Génie, actif autour de Toulon vers 1858.

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      ingénieur militaire attribution par source
    • Auteur :
      Aguillon César
      Aguillon César

      Entrepreneur de maçonnerie à Toulon fin 17e, début du 18e siècle. Construit plusieurs batteries sur la rade de Toulon en 1695, ainsi que la poudrière de Milhaud entre 1692 et 1695. Réalise des travaux à la tour Balaguier en 1702.

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      entrepreneur de maçonnerie attribution par source

La batterie de Mord'huy occupe une petite plate-forme en partie aménagée, en balcon à 18m d'altitude sur le versant d'un escarpement rocheux en forte déclivité.

Dans l'état actuel des lieux, le corps de garde crénelé type 1846 n° 3, construit en 1860 et remanié en 1904, est le seul élément monumental de la batterie. L'épaulement, dégradé au point d'avoir pratiquement disparu dans sa partie droite, est mieux conservé dans sa partie gauche mais dénaturé (disparition des emplacements de tir). La tranchée de communication creusée en 1904 dans le sol de l'ancienne batterie à partir du corps de garde crénelé, passait en tunnel sous l'épaulement pour déboucher face à la mer dans l'abri de combat du projecteur. Aujourd'hui murée, l'arche d'entrée du tunnel, en pierre de taille, millésimée 1904-1905, est ménagée dans un mur de soutènement revêtant la coupure faite dans la banquette de l'épaulement. Les rails ont disparu, mais l'abri de combat subsiste, peu accessible.

Le corps de garde crénelé à un seul niveau logeable surmonté d’une plate-forme qui a perdu en 1904 son parapet crénelé ponctué de bretèches, est pour l'essentiel conforme au modèle-type. La seule entorse tient aux proportions de son plan, pratiquement carré (14,30m X 14,67m) et non rectangulaire un peu allongé. Le schéma distributif est respecté : dans la partie médiane, deux grandes casemates de casernement voûtées en berceau ici larges de 3,30m, sont encadrées par deux travées de culée tripartites.

La travée de culée antérieure, moins profonde (2,05m) que la postérieure (3,30m, comme les grandes casemates), intègre en son centre la porte à pont-levis et son sas d’entrée en double profondeur encadrée symétriquement des deux autres petites casemates, deux fois plus larges, jadis la cuisine, et loge du chef de poste. Ces deux casemates prennent jour en façade par trois créneaux surmontés d'un fenestron demi-circulaire. En 1904, la première des deux grandes casemates a été surbaissée et défoncée du côté de l'épaulement pour servir d'abri de jour du projecteur et s'ouvrir par une large porte sur la tranchée à voie ferrée.

  • Murs
    • calcaire moellon
    • pierre pierre de taille
    • brique
  • Toits
    ciment en couverture
  • Étages
    étage de soubassement, 1 étage carré
  • Couvrements
    • voûte en berceau
  • Élévations extérieures
    élévation à travées
  • Couvertures
    • terrasse
  • Typologies
    batterie ouverte
  • Statut de la propriété
    propriété publique

Ensemble remanié, mais en grande partie conservé. Intérêt patrimonial assez limité. Le corps de garde, bien que mutilé en 1904, reste bien conservé, et intéressant par sa réaffectation.

Documents d'archives

  • Mémoire pour servir au projet général des fortifications de la ville de Toulon, des forts et des batteries retranchées qui en dépendent... 8 janvier 1764. Service Historique de la Défense, Vincennes : Art. 8 sect 1 carton 4 (1 VH 1834).

  • AGUILLON LOUIS D'. Mémoire sur la ville de Toulon, son objet relativement à une déffensive simple en Provence, sa fortification ancienne de terre & de mer, et la nécessité indispensable qu'il y avoit d'avoir cette place dans un meilleur état de défense, pour metre à l'abry d'insulte l'arcenal et le département de marine, 1er mars 1768. Service Historique de la Défense, Vincennes : Art. 8 sect 1 (1 VH 1834), n°22.

  • Etat actuel des batteries des rades de Toulon suivant la visite qui en a été faite par MM. de Champorcin, de Vialis, Boullement et Imbert le 14 Xbre 1770. Service historique de la Défense, Vincennes : Archives du génie, Série 1V, Toulon, Art 8, carton 5 n° 6

  • Etat de situation des batteries de l’entrée et de l’intérieur de la rade du Port de la montagne (...), 1794. Service Historique de la Défense, Vincennes : 1 VH 1839 1791-1793, n° 30 annexe 5.

  • [Projet de batterie de Mord'huy. 1858] Sous la direction du Colonel Antoine Long. 20 avril 1858. Service Historique de la Défense, Vincennes : 1 VH 1870, 1858-1859, plan n° 15.

  • Commission mixte de révision des défenses du littoral dans le 5e arrondissement maritime. Rapport du 6 mars 1873. Service Historique de la Défense, Toulon : 4 B1 22 n° 275.

    Rapport de la Commission mixte de révision de la défense du littoral 1873

  • Rapport de la Commission de révision de l'armement du littoral du 5e arrondissement sur un nouveau plan d'ensemble de la défense du port de Toulon. 28 novembre 1876. Service Historique de la Défense, Vincennes : DD2 1045.

Documents figurés

  • Carte des rades de Toulon. / Dessin aquarellé, attribué à Vauban, 1695. Service Historique de la Défense, Vincennes : 1 VH 1831, plan n°23.

  • Plan de Toulon et de ses rades, copié sur celuy de M. de Vauban. / Dessin, par Antoine Niquet, 1701. Service Historique de la Défense, Vincennes : Art. 8 carton 1 (1 VH 1831), n° 1bis.

  • Carte des rades de Toulon. / Dessin, plume et aquarelle, par Nicolas François Milet de Montville, 9 mars 1759. Service Historique de la Défense, Vincennes : Art. 8 carton 3 (1 VH 1833) 1748-1763 n° 23, 1759.

  • [Carte de la presqu'île de Cépet.]. / Dessin, encre et lavis, 1811. Service Historique de la Défense, Vincennes : 1 VH 1840.

  • Projets supplémentaires pour 1866-1867. Fortifications. Établir un chemin carrossable reliant les batteries de la presqu'île de Cépet. / Dessin, encre, 1866. Service Historique de la Défense, Vincennes : 1 VH 1875.

  • Projets pour 1848. Fortifications. Article 5 (Défense des côtes). Organiser la batterie du Mord'huy. / Dessin, encre et lavis, signé capitaine du Génie Ramet, 1848. Service Historique de la Défense, Vincennes : 1 VH 1865, plan n°21.

  • Projet pour 1858-1859. Fortifications (Défense des côtes) Compléter la batterie du Mord'huy. / Dessin, encre et lavis, dessiné par le capitaine Meunier sous la direction du colonel Antoine Long, 20 avril 1858. Service Historique de la Défense, Vincennes : 1 VH 1870, plan n° 15.

  • Atlas des batteries. Batterie du Mord'huy. Corps de garde crénelé n°3 pour 20 H. / Dessin, plume et encre, 1879. Service Historique de la Défense, Vincennes : 4 V251

Date d'enquête 2015 ; Date(s) de rédaction 2016
(c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général
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