D’après Durbec, la commanderie du Temple de Rigaud (Alpes-Maritimes) a une possession au Fugeret. La première mention de cette commanderie remonte à 1269, la dépendance du Fugeret est donc nécessairement postérieure. Pourtant Isnard, dans l’état féodal du Fugeret, donne les templiers comme seigneurs dès le 12e siècle : dès le début du 13e siècle en effet, dans le dénombrement du cartulaire du comté de Provence dit Pergamenorum, on trouve le Fugeret sous le nom de Castrum de Filiareto.
Dans les pouillés, on trouve mention du lieu du Fugeret dès 1252, puis en 1351, il est question du prior de Fougaireto, en 1376, de l’ecclesia de Figayreto, enfin, au 16e siècle, de l’ecclesia de Fugeretto.
Au démantèlement de l’ordre en 1312, le prieuré pourrait être passé sous l’obédience de l’abbaye Saint-Victor de Marseillle. En tout état de cause, il est mentionné dans le cartulaire de l’abbaye, en 1337 sous le nom de Saint-Pons du Fugeret (Sancti Poncii de Folgaireto, Glandatensis diocesis). Vers 1380, Baratier recense deux moines au prieuré du Fugeret. La situation demeure pendant l’Ancien Régime et à la veille de la Révolution, en 1788, Achard, confirme la situation : « la collation du prieuré du lieu appartient à l’abbaye Saint-Victor de Marseille, et le prieur nomme à la Cure ».
L’église paroissiale a ainsi été construite sur les terres appartenant au prieuré, et donc à l’abbaye. Dans la soumission pour l’acquisition des biens saisis du prieuré, en 1790, il est question de « tous les biens dépendants du prieuré simple dit de st Pons dépendant de st Victor situés dans la commune du Fugeiret consistant en deux pièces de terre appellées la Haute et la Basse Condamine séparées seulement par le grand chemin ». Ces terres sont toujours ainsi nommées sur le cadastre napoléonien, l’église paroissiale se trouve au centre, le village et « la place publique » à l’ouest. L'origine de propriété de ces terres, et leur utilisation par un prieuré, pourrait justifier la configuration actuelle du village du Fugeret. L'église se trouve le plus souvent en effet au centre du village : ici, et cela est particulièrement visible sur le cadastre de 1830, l'église se trouve clairement à l'extérieur de l'agglomération. Ce n'est qu'après la saisie révolutionnaire, que de nouvelles constructions ont étendu l'emprise du village vers l'est, vers l'église paroissiale.
Ainsi la première église du Fugeret, dont on peut apercevoir sans doute des vestiges avec le petit appareil assisé du chevet actuel pourrait remonter au début du 13e siècle. L’intérieur, avec la voûte en cul-de-four, soulignée d’une corniche horizontale, ainsi que la petite baie en plein cintre à ébrasement semble confirmer cette datation. A ce moment en effet, le premier lieu d’occupation du Fugeret, au lieu perché du Chastel (voir dossier présentation de la commune) commence à être abandonné au profit du lieu actuel, en contrebas, plus proche de la route et de la Vaïre. Dans un registre des insinuations de l'évêché de Glandèves, dont dépend la paroisse du Fugeret sous l'Ancien Régime, on trouve d'une part mention d'une chapelle Notre-Dame qui existe dans l'église du Fugeret en 1484, puis, d'autre part, en 1491, d'une fondation d'une chapelle Saint-Jean-Bapstiste, toujours dans l'église.
La nef en revanche a été reconstruite en 1808 (élément historique également rapporté par l’abbé Féraud) : dans le questionnaire sur l’état des paroisses, en 1840, le curé écrit en effet que, en 1806, sous le poids de la neige, la voûte s’est effondrée. Cela est bien visible à l’intérieur avec la butée assez maladroite de l’arc brisée de la nef contre l’arc diaphragme du chœur. Il semble cependant rester, peut-être du 13e siècle également, des vestiges de l’encadrement en pierre de taille de la porte occidentale, dont les modénatures des piedroits ainsi que les voussures en plein cintre pourraient avoir été conservées.
Si la nef est reconstruite au début du 19e siècle, un important mobilier de la 2e moitié du 17e siècle est toujours en place dans l'église. Cela témoigne, à défaut de travaux d'agrandissement à ce moment-là, d'un réaménagement important de l'édifice.
Dans la visite pastorale de 1858, les murs de l'église sont "en bien bon état", tout comme la toiture ou les portes, le pavé est « parqueté de neuf » (en 1840, le curé écrivait en effet au sujet du sol qu’il était en mauvais état mais il précisait « dans quelques mois nous allons le boiser »). Il est probable que le décor peint, animant aujourd'hui encore les murs et les voûtes, ait été réalisé dans la foulée de ces travaux.
En 1899, on trouve trace, dans le livre-journal des recettes et dépenses de la fabrique paroissiale, de travaux sur la façade de l’église : châssis vitrail, 7 mètres de tuyau pour la conduite des eaux, tuiles, peintures, etc. En 1929, la porte est posée, les ferrures réalisées ou reprises. Entre 1903 et 1905, ce sont des réparations au couvert de l’édifice. En 1908, la visite pastorale porte « le tout en bon état, du sol au plafond ». En 1966, la toiture est entièrement refaite. En 1983, une réfection des façades de l'église et des murs du cimetière est entreprise. En 1991, les cloches sont électrifiées.
La sacristie, en 1722, dans un rapport sur les réparations à faire aux immeubles de l'évêché de Glandèves, est dite « en ruine ». En 1840, le curé desservant indique que c'est « le derrière de l'autel qui sert de sacristie, il est bien étroit et bien humide ce qui oblige de tenir les ornements au presbytère », il souhaite donc la construction d'une nouvelle sacristie. C’est semble-t-il chose faite en 1866 où, dans la visite pastorale, la sacristie est « très bien », ou encore, en 1876 : « la sacristie est grande, propre et bien régulière […], la crédence tout en bois de noyer, très bien faite et pouvant contenir tous les ornements ».
Sur le cadastre napoléonien de 1830, le cimetière n’occupe que la partie sud-ouest du cimetière actuel. Dans la visite pastorale de 1858, la clôture du cimetière est dite « en mauvais état au levant et au midi », il y a une « croix du milieu en bien bon état » : l'évêque ordonne donc que les deux murs du cimetière « à peu près démolis »" soient reconstruits. Cela a visiblement été fait avant la visite pastorale suivante qui a lieu en 1866 puisque la clôture est dite en bon état. Dans la visite pastorale de 1884, la clôture « a besoin d'être recrépie », la date gravée dans l’enduit de 1898 semble attester que ces travaux ont bien été réalisés. En 1979, le cimetière est agrandi de 830 m², jouxtant l'église, au sud-est, dans le prolongement de l'ancien. De nouveaux murs de clôture sont construits, avec deux portails. Une croix centrale est commandée en 1985 : elle est réalisée par l'entreprise Perez (marbrier à Digne), en pierre d'Estaillades (calcaire du Luberon).
Conservateur en chef du patrimoine en poste au Service régional de l'Inventaire à la DRAC de Poitiers de 2002 à 2005, puis au Service de l'Inventaire de la DRAC d'Aix-en-Provence. En poste au Service de l'Inventaire et du patrimoine, région Provence-Alpes-Côte d'azur depuis 2008.