Dossier collectif IA06002781 | Réalisé par
Buffa Géraud (Contributeur)
Buffa Géraud

Conservateur du Patrimoine au service régional de l'Inventaire général de Provence-Alpes-Côte d'Azur de 2004 à 2017.

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  • patrimoine industriel, parfumeries de Grasse
moulins de Grasse
Copyright
  • (c) Ville d'art et d'histoire, Grasse

Dossier non géolocalisé

  • Dénominations
    moulin
  • Aires d'études
    Grasse
  • Adresse
    • Commune : Grasse

Contexte historique de l'aménagement des moulins

La Provence orientale (vigueries de Grasse, Draguignan et Saint-Paul) concentre sous l’Ancien Régime une grande part des moulins provençaux. À titre d’exemple, elle accueille au 17e siècle, 40 % des moulins communaux de toute la Provence1. Au sein de cet espace géographique, la ville de Grasse tient sans doute déjà à cette époque une place importante puisque la cité accueille selon le cadastre de 1644, une trentaine de sites abritant souvent plusieurs unités (par exemple : deux moulins à farine ou un moulin à farine et un moulin huile). Au milieu du 19e siècle, ce chiffre avoisine soixante établissements en état de fonctionnement. Il s’agit d’une concentration importante comme le montre la carte générale des cours d’eau, des canaux d’irrigation et des usines des Alpes-Maritimes, dressée en 1865.

Carte générale des cours d'eau, des canaux d'irrigation et des usines, sur les cours d'eau non navigables ni flottables du département des Alpes-Maritimes [détail]. Carte générale des cours d'eau, des canaux d'irrigation et des usines, sur les cours d'eau non navigables ni flottables du département des Alpes-Maritimes [détail].

Cette démultiplication de sites s’est appuyée, à Grasse, sur la combinaison de deux éléments naturels favorables : un relief escarpé et un débit d’eau constant. Néanmoins la juxtaposition de ces deux conditions primordiales n’explique pas tout et ce sont aussi des facteurs historiques et humains qui ont rendu ce déploiement possible. Il est indéniable que les ressources en eau de Grasse ont constitué, dans le contexte d’une certaine pénurie hydraulique provençale, une chance pour l’essor économique de la cité. Néanmoins, cette ressource jugée comme abondante pour une population au contact avec d’autres localités confrontées au manque d’eau, ne doit pas être surestimée. En effet, la source historique de Grasse, la Foux, qui est restée jusqu’à la fin du 19e siècle la principale ressource en eau de la ville, présente un débit moyen de 60 litres par seconde. Sans négliger cette quantité d’eau disponible, elle ne peut, en revanche, rivaliser avec des localités installées à proximité de fleuves ou de rivières plus abondantes. Dans ces conditions, quels ont été les autres facteurs qui ont permis aux Grassois de tirer le meilleur parti de leurs ressources en eau et de leur topographie ? D’autant qu’au-delà de ce nombre conséquent de moulins, leur regroupement dans un espace assez restreint constitue un autre élément caractéristique.

Une ville sans seigneur ?

La ville de Grasse a été fondée autour du 12e siècle sous l’impulsion supposée d’un seigneur mythique, dont l’existence est de plus en plus remise en cause par les historiens médiévistes qui s’intéressent aux conditions de fondation de cette cité. Rapidement après les premières décennies d’existence de l’agglomération, la gestion municipale est dirigée par une oligarchie de notables organisée en Consulat. Ce statut juridique a procuré à la commune une large autonomie dans son administration quotidienne et, semble-t-il, joué un rôle important dans son développement économique.

En 1227, par le jeu des alliances dans un contexte d’instabilité politique et de guerre, la ville de Grasse fait allégeance aux Comtes de Provence ce qui met un terme à l’administration consulaire. Néanmoins, la mise sous tutelle de la ville ne semble pas s’être accompagnée d’une perte absolue de son autonomie. Le collège des anciens consuls continue de gérer les affaires courantes et notamment ce qui a trait au domaine de l’eau. En effet, le document par lequel Grasse se soumet au Comte Bérenger stipule clairement (selon les traductions proposées de ce texte) que la cité garde une entière indépendance en matière de gestion communale des ressources hydrauliques : « Item le dit comte a donné et concédé aux dits Consuls, comme dessus recevant, tant dans Grasse que hors et partout où il seront situés, dans tout 14 épiscopats d’Antibes ou ailleurs, soit qu’ils consistent en rivières, moulins, fours, près, eaux ou autres quelconques possessions en autres lieux et que chacun puisse vendre, donner son bien et l’aliéner, sans être obligés de donner aucun trizain. ». D’une manière générale, les Comtes de Provence ne semblent pas avoir maintenu une présence et une pression, notamment fiscale, très prononcée sur la ville de Grasse, située aux confins de sa frontière orientale.

Cette autonomie explique sûrement, d’une part, l’absence attestée de moulins banaux et, d’autre part, la prédominance de moulins de particuliers. En effet, il est observé que dans d’autres localités la présence des moulins banaux et la volonté seigneuriale de constituer des monopoles dans la mouture des céréales et dans la production d’huile a pu freiner l’initiative privée en matière d’aménagement de moulins. Sans totalement supprimer les réalisations privées, la domination seigneuriale a pu parfois constituer un obstacle à la construction de ce type de moulins privés. À Grasse, l’absence d’un moulin seigneurial associée à l’autonomie en matière de gestion des ressources hydrauliques a donc probablement favorisé cette multiplication d’unités.

En revanche, des interrogations subsistent pour ce qui concerne les moulins communaux puisque aucun moulin de ce type n’a été identifié : l’absence de moulins communaux à partir du 17e siècle est avérée. Elle demeure également peu prégnante pour les périodes antérieures. Pourtant, l’un des signes révélateurs de l’émancipation des communes d’Ancien Régime vis-à-vis d’un pouvoir central s’exprime par l’implication des municipalités dans la création et la gestion de moulins. Appliquée à l’exemple grassois, cette observation suppose probablement qu’après avoir aidé à la fondation des premières installations hydrauliques, les municipalités qui se sont succédées à la tête de cette ville se sont désengagées des moulins tout en laissant cette activité à des particuliers, dès la fin de la période médiévale.

Cette mise en retrait des intérêts communaux aux profits d’intérêt particuliers ne semble cependant pas avoir été défavorable à l’oligarchie de la cité puisque parmi les propriétaires de moulins d’Anciens Régime se trouve un nombre conséquent de notables locaux, impliqués dans la gestion de la ville : officiers publiques, hommes de loi, élites économiques (négociants, marchands …).

De plus, la cession à des « privés » de la gestion des moulins à probablement attiré à Grasse les capitaux de petits seigneurs laïcs des localités qui environnent cette cité. Ces derniers ont trouvé dans le mode d’administration de la ville, un terrain favorable à l’investissement de fonds. Dans cette optique, le moulin grassois type constitue pour son propriétaire une source de revenus ou de rente. L’établissement ainsi acquis est mis en location à un fermier, qui exploite véritablement l’outil de travail. Ces diverses observations tendent à penser que l’objet des moulins à Grasse dépasse rapidement (dès le 16e siècle) la satisfaction des besoins locaux de ravitaillement en farine et en huile et que les Grassois ont inscrit leur activité dans un réseau d’échanges commerciaux à une échelle plus vaste.

Exemples catégoriels de propriétaires de moulins de Grasse sous l’Ancien-Régime :

Nobles et aristocrates : Antoine de Castellane, seigneur de Gourdon et Antoine Cresp, seigneur de Saint-Césaire qui à la fin du 17e siècle possèdent chacun 3 moulins à Grasse ; les familles Mougins, seigneurs de Roquefort, les De Calvi, barons de Vignolès, les Sauvage, comtes de Nice, les Théas d’Andon, le noble Jean-Baptiste de Bompard, seigneur de Montaigne ( ?), le marquis Honoré Charrier ( ?) ou bien le seigneur de Seillans possèdent aussi un établissement à Grasse.

Les Officiers : Antoine Court, procureur ; Auguste Cresp, procureur du roi ; Alexis Trestour, chancelier ; Gabriel Lemore, avocat du roi ; famille Bain, avocats ; Antoine Mouton, greffier ; Honoré de Carpillet, écuyer ; Antoine Mougins, avocat et administrateur en la Cour ; Joseph Hugues, viguier ; Lazard (greffier) et Honoré (notaire royal) Maure ; Honoré de Carpillet (avocat en la cour et lieutenant au siège) ; Antoine (sergent royal) et Jean-Joseph (huissier) Mantégues

Les religieux : Honoré Niel, prêtre ; les révérends pères dominicains ; les frères de Lérins ; Jean Théas seigneur d’Andon, prêtre docteur en Sorbonne, archidiacre en l’église cathédrale de Grasse ; le chanoine Mouton ; Honoré de Saint-Honorat ; les oratoriens de Grasse

L'organisation des moulins grassois

La multiplication des moulins particuliers à Grasse a conduit nécessairement à l’établissement de règles collectives ayant pour objet d’assurer le bon fonctionnement de l’ensemble de l’infrastructure, notamment en matière de prévention des conflits liés à la répartition de l’eau. Progressivement donc un ensemble de principes de bonne conduite s’est installé de manière tacite, informelle ou ponctuelle.

Au milieu du 16e siècle, cet ensemble de prescriptions est regroupé dans un règlement général qui nous est connu par un document du 07 février 15682. La définition de cette règle écrite commune semble s’inscrire dans un contexte de tension entre les divers usagers de l’eau de la Foux. Elle traduit donc la volonté de remettre un peu d’ordre dans cette question : « Tous ceux que le conseil vieux et nouveau et autres cités avaient députés pour mettre ordre à l’eau, pour éviter quelque esclandre ».

Par la suite, les principes édictés dans ce règlement sont restés la matrice générale des conditions de répartition de l’eau jusqu’au milieu du 19e siècle. En effet, les quelques ajustements à ce texte, ajoutés postérieurement à sa date de rédaction, ne l’ont que très légèrement modifié et n’ont pas fait évoluer le cadre général. Globalement, ce règlement a eu pour mission de répartir l’eau destinée à l’arrosage des jardins et prés et celle utile pour mouvoir les moulins. Les autres domaines artisanaux employant de l’eau, et notamment celui des tanneurs, n’y figurent pas. L’esprit général de ce texte est, entre autres, de garantir un approvisionnement stable aux quartiers agricoles placés à l’ouest du centre-ville (quartier de Tracastel, du Cours …), c’est-à-dire les secteurs plus éloignés géographiquement des ressources en eau. Cette volonté s’y exprime de manière sous-jacente en proposant une rotation horaire de l’utilisation de l’eau par quartier et non une rotation nominative par propriété. Cette disposition explique aussi sûrement la grande pérennité de ce texte.

Ainsi, plus concrètement, l’essentiel du règlement a consisté à établir une forme de calendrier d’emploi de l’eau entre arrosage et utilisation pour les moulins. Cette répartition est réalisée au moyen d’une attribution, par quartier, d’horaires journaliers évoluant en fonction des saisons. Le détail de ce roulement ne renseigne cependant pas spécifiquement sur le nombre de moulins concernés par ce règlement au moment de son élaboration. Il confirme néanmoins déjà la prégnance du découpage territorial encore observé aujourd’hui entre les quartiers concentrant des moulins.

La gestion de chacun de ces espaces communaux est confiée à un syndicat. Le nombre précis de ces syndicats est méconnu bien que certains soient mentionnés régulièrement dans les documents d’archives, notamment le syndicat du quartier Tracastel, du quartier de la Porte Neuve, du quartier de la Roque, des moulins des Paroirs, du quartier des Pouilles, de la Croix et des propriétés de la Marigarde. La mission de ces syndicats et de leurs représentants est de veiller à ce que l’eau, considérée comme un bien commun, soit équitablement répartie entre utilisateurs. Pour prévenir les problèmes tels que l’appropriation de l’eau par un seul utilisateur ou un syndicat de quartier en particulier, le règlement établit clairement les rôles de chacun. Il s’agit, en fait, d’une multitude d’actions et de tâches à accomplir telles que l’entretien des canaux, l’ouverture et la fermeture des martelières…

L’élément essentiel étant que chaque utilisateur rétablisse en temps et en heure, le cours des eaux publiques après utilisation, dans les canaux construits à cet effet. Dans le cas des moulins, la restitution se fait quasiment sans perte puisque l’eau est principalement utilisée pour actionner les roues hydrauliques. Après avoir été acheminée par un canal d’amenée jusqu’à la roue, elle retourne au canal principal en empruntant le canal de fuite de chaque moulin. Les terrains de cultures disposent d’installations similaires.

Afin d’éviter une trop forte déperdition d’eau, les horaires d’arrosage et d’utilisation pour les moulins sont séparés. Lors des périodes d’activité des moulins (plutôt en hiver), les arrosants disposent de plages horaires décalées (petit matin, soirée ou nuit). Chaque quartier ou chaque syndicat a, par la suite, précisé et ajusté ce règlement en fonction de ses spécificités. Dans ce cas, la répartition des eaux est établie plus clairement et parfois même nominativement. Un grand nombre de ces adaptations est approuvé lors des délibérations du conseil municipal, garant des ressources hydrauliques de Grasse (la Foux et Rioublanquet) depuis le 13e siècle. Un dépouillement exhaustif de ces nombreuses délibérations est à ce jour impossible. Un programme de numérisation et d’indexation des délibérations du conseil municipal, prévu pour les prochaines années devrait faciliter ce travail de repérage archivistique et d’analyse historique.

L'affectation des moulins

Deux temps marquent l’évolution des moulins de Grasse. Le premier, sous l’Ancien Régime, se caractérise par une infrastructure hydraulique « multitâche » comprenant en majorité des moulins pour productions alimentaires (farine et huile) et secondairement des moulins non alimentaires servant aux productions artisanales (scie à bois, taillanderie, paroir3, papeterie …). L’autre temps est celui de l’oléiculture. En effet, à partir de la seconde moitié du 18e siècle on observe un processus de recentrage des moulins grassois. Cette évolution se fait par l’adaptation des moulins qui existent déjà ou par la construction de nouveaux, spécialement conçus pour l’huile d’olive. Ce phénomène a entraîné l’abandon des autres types de production.

Sous l’Ancien Régime

Au 18e siècle

L’analyse des affectations des moulins montre que, jusqu’au milieu du 18e siècle, les productions d’huile et de farine sont assez proches : en moyenne 85% des établissements du 18e siècle disposent d’une unité de fabrication d’huile et 75% d’une unité de production de farine. Le pourcentage des moulins réunissant sur un même lieu les deux attributions s’approche de 65%.

La réaffectation de l’infrastructure des moulins grassois autour de l’oléiculture commence à se manifester dans le cadastre de 1757 : la part des moulins centrés sur la production de farine baisse à 60% alors que la production d’huile reste stable autour des 80%. De même, ce mouvement se précise un peu plus avec l’augmentation du nombre des moulins à ressence (huile de ressence servant en savonnerie) qui passe d’une seule unité dans le cadastre de 1750 à 8 dans le cadastre de 1757. Cette réorientation est encore suggérée au 18e siècle avec la lente disparition des moulins attachés à des productions non alimentaires. Ainsi, les 3 paroirs encore mentionnés dans le cadastre de 1750 disparaissent dans le cadastre de 1757. La même remarque vaut pour l’unique papeterie de la ville, pour le martinet et pour les 3 taillanderies.

Au 17e siècle

Si l’on compare ces éléments statistiques, établis à partir des quatre cadastres du 18e siècle, avec les éléments recueillis dans le cadastre de 1644, on constate même qu’en un peu plus d’un siècle, la situation de l’affectation des moulins s’est inversée. En effet, en 1644 la production de farine occupe 80% des sites et celle de l’huile n’occupe que 55% des établissements. La prédominance de moulins à farine au 17e siècle confirme l’observation de l’historien Paul Gonnet dans l’Histoire de Grasse4, révélant qu’une part importante de l’économie de Grasse de cette époque se concentre sur le commerce des céréales.

Enfin, il peut être indiqué que, sous l’Ancien Régime, le nombre de moulins non alimentaires reste stable avec la mention de 4 paroirs, 1 martinet et 1 papeterie. Néanmoins, en proportion, leur part diminue entre le 17e siècle et le 18e siècle du fait de l’augmentation des constructions de nouveaux moulins à farine et à huile.

Évolution de l’origine sociale des propriétaires

Le mouvement amorcé au milieu du 18e siècle, de recentrage de l’activité des moulins autour de l’oléiculture se traduit par un changement d’origine sociale des propriétaires de moulins. En effet tout au long de la deuxième partie du 18e siècle, les membres des couches sociales supérieures traditionnelles se départissent progressivement de leur bien au profit de celle des marchands, alors en pleine ascension. Ceux-ci s’approprient progressivement ces lieux et en font aménager de nouveaux. Dans ce cas, la relation entre l’activité du moulin et la profession des nouveaux propriétaires devient plus directe. Le moulin cesse d’être uniquement la source d’un profit provenant d’une rente foncière. Il s’insère en effet davantage dans l’activité marchande de transformation et de production de biens négociables de son propriétaire ; ce dernier assurant souvent lui-même l’écoulement commercial de sa production.

En revanche, cette proximité plus grande entre le propriétaire et son infrastructure de production ne supprime pas l’ancien système de mise en location du bien.

À partir du milieu du 18e siècle, le rachat presque systématique des moulins par les marchands, et notamment les parfumeurs, devient de plus en plus perceptible. Au 19e siècle, au moment où l’on recentre les moulins uniquement sur la production d’huile d’olive, de nombreuses familles de parfumeurs disposent de leur propre moulin.

Propriétaires dont la profession peut nécessiter de posséder un moulin :

Louis Aubin, parandurier ; Jean Bonnefons, tanneur ; Claude Henri Courmes, tanneur, Antoine Cresp, taillandier ; Jean-Honoré Charrier, blanchisseur ; Louis Dominique Luce, tanneur ; François Mathieu, tisseur de toile ; Henri Pons, tanneur ; Pierre Roubaud, tanneur ; Jean Ricord, plâtrier ; Claude Toussan, taillandier ; Germain Taffin, taillandier ; François Lions, menuisier ; Jean Louis Raynaud, serrurier ; Louis Aubin, parandurier ; Pierre Gonnelle, tanneur ; Léopold Gilly, passementier ; Charles Pugnaire, taillandier ; Claude Taulanne, taillandier ; Pons Gilette, chapelier ; Pierre Jean Cresp, chapelier ;

Parfumeurs :

- Cadastre de 1757 : Scipion Artaud, Alexandre Camatte, François Escoffier, Jean Honoré Gilette, Alexandre Muraour ; Antoine Raibaud

- 1ère moitié du 19e siècle (moulins de parfumeur en plus du cadastre 1757) : Jordany, Mottet, Massas, Bruery, Chiris, Cavallier, Pascal, Jean François Court

Les moulins au temps de l’industrie : 1750-1850

Si l’importance des moulins traduit le dynamisme économique de Grasse sur le long terme, il ne faut cependant pas surestimer la prospérité de la ville qui reste tout de même très relative. Les conjonctures économiques ont beaucoup évolué, notamment au tournant des 18e et 19e siècles, période qui se caractérise par un certain appauvrissement commercial de Grasse. Pour l’historien Paul Gonnet, l’économie de la cité sort affaiblie des secousses successives de la Révolution et de l’Empire. Ces années de troubles politiques ont précipité la chute (déjà amorcée dès la seconde moitié du 18e siècle) du commerce de la tannerie qui assurait la richesse et le rayonnement de la ville au moins depuis le 17e siècle. Dans ce contexte, l’auteur note que les Grassois recentrent leur activité sur les éléments d’une économie traditionnelle ou de terroir. Mais le redressement s’avère lent.

Dans ce contexte défavorable, la ville cherche à réorienter ses occupations commerciales et la production d’huile d’olive apparaît bien avant la parfumerie, comme une opportunité à privilégier. Ce point de vue semble notamment être celui de l’administration française qui durant le premier tiers du 19e siècle paraît encourager ce renforcement de l’oléiculture de Grasse et de ses alentours.

Quelques rapports sont produits durant ces années par les agents de l’État pour valider cette option économique à développer. Il est intéressant de signaler que la parfumerie n’est pas réellement considérée comme une voie crédible de réorientation pour Grasse. Ces rapports cherchent à définir le potentiel réel de développement que représente le domaine de l’oléiculture pour ce territoire. Néanmoins, ces études statistiques ne peuvent éluder les nombreux problèmes qui se posent à ce secteur économique. Ainsi, sont évoqués dans les années 1815, l’aspect très aléatoire des récoltes d’olives, les problèmes liés aux parasites… On souligne notamment que les nombreux moulins de la ville tournent rarement tous ensemble du fait de l’insuffisance des récoltes d’olive.

Malgré ces réserves, l’observation des moulins de Grasse confirme que l’intégralité des sites a eu pour dernière attribution la fabrication d’huile. Plus aucune trace ne subsiste de la mouture du blé, du foulage des draps ou de la fabrication de papier encore présents au 18e siècle. La disparition de ces diverses tâches s’est opérée au profit du développement de l’oléiculture. Comme il a été dit, ce recentrage autour d’une seule tâche s’est produit d’une part en transformant les installations existantes, d’autre part en ajoutant de nouvelles constructions. Ce changement est bien circonscrit chronologiquement. Il débute discrètement au milieu du 18e siècle et s’accélère notablement à partir du début du 19e siècle, de sorte que vers 1860, Grasse ne compte plus qu’un à deux moulins à blé encore en activité (le moulin dit de Brun et un autre au quartier des Ribes) et plus qu’un seul moulin non alimentaire en fonctionnement (moulin à plâtre aux Hautes-Ribes).

Quelques parfumeurs possèdent déjà des moulins sous l’Ancien Régime. Leur proportion parmi les propriétaires de moulins augmente continuellement à partir de la seconde moitié du 18e siècle et se renforce durant la première moitié du 19e siècle. Ils deviennent eux-mêmes négociants en huile parallèlement à leur occupation principale (et le demeurent jusqu’au 20e siècle).

L’achat de moulins par les parfumeurs traduit le renforcement des liens techniques et commerciaux entre oléiculture et parfumerie. Il n’est toutefois pas indispensable pour le développement de leur activité. Ils peuvent également se contenter de s’approvisionner auprès des producteurs d’huile. L’achat d’un moulin reste donc une option de développement parmi d’autres.

Les parfumeurs peuvent aussi privilégier l’installation de moulins directement dans leurs usines à parfums. Il peut s’agir dans les premiers temps de l’industrialisation, de l’installation de presses dans les ateliers. L’avènement de la machine à vapeur en parfumerie au milieu du siècle facilite également l’aménagement de broyeurs à meule.

Quelle qu’en soit l’utilisation, ces moulins de l’industrie servent aux parfumeurs d’une part à la préparation des graisses d’enfleurage par le malaxage, dans les broyeurs à meule, des panes de graisse de porc ou de bœuf. D’autre part, ils sont utiles au broyage de certaines racines ou végétaux employés en parfumerie (iris, myrte …) que ce soit pour en extraire l’odeur ou pour faire des poudres.

Moulin d'une parfumerie fonctionnant avec une machine à vapeur.Moulin d'une parfumerie fonctionnant avec une machine à vapeur.

Atelier de parfumerie comportant des presses hydrauliques et une meule de moulin fonctionnant grâce à une machine à vapeur.Atelier de parfumerie comportant des presses hydrauliques et une meule de moulin fonctionnant grâce à une machine à vapeur.

Les presses servent aussi à produire des essences. En effet, à la proximité technologique, assez courante, décrite plus haut, s’adjoint un procédé technique qui lie encore plus nettement la parfumerie et l’oléiculture : l’enfleurage à la graisse végétale, qui permet la production d’huiles parfumées à l’odeur de fleur. La documentation ancienne montre que ces huiles sont, avec les pommades parfumées (à base de graisses animales) et les huiles essentielles (obtenues par distillation hydraulique), les productions les plus courantes des parfumeurs grassois de la première partie du 19e siècle. Toutes les trois se fondent sur des principes techniques employés depuis des temps ancestraux.

La production d’huiles parfumées se rattache surtout à une période (seconde moitié du 18e siècle - 1ère moitié du 19e siècle) quand apparaissent les premières formes d’industrialisation de la parfumerie. Cette phase concerne alors essentiellement la rationalisation des modes de production par la formalisation et le séquençage des processus. En revanche, elle n’intègre pas encore la mécanisation des diverses étapes de fabrication par l’utilisation de machines à vapeur.

Le principe technique d’extraction des odeurs de fleurs par l’utilisation des corps gras se fonde sur la propriété des matières grasses qui captent et conservent les odeurs. À chaque fois, l’opération peut se décliner de deux façons : à froid, c’est-à-dire avec une matière grasse employée à température ambiante ; à chaud et dans ce cas le feu de bois constitue jusqu’aux années 1860 le seul procédé utilisé pour chauffer l’huile. Le procédé d’enfleurage à froid (à température ambiante) sur huile s’effectue avec des châssis ou cadres en bois d’environ un mètre sur 70 cm. Le cadre enserre un fin grillage métallique (comparable au grillage des poulaillers). Des linges en coton sont imbibés d’huile d’olive de cailletier (nom de la variété d’oliviers cultivés dans la région grassoise), c’est-à-dire une huile douce, plus neutre olfactivement. Le coton est ensuite posé sur le châssis et les fleurs y sont étalées. Après un temps de macération adapté, durant lequel la matière grasse absorbe les molécules odorantes contenues dans les pétales, les fleurs sont intégralement défaites de leurs odeurs. Reste à retirer les débris végétaux et à presser les bouts de tissus pour en récolter l’huile qui s’est naturellement chargée du parfum végétal et à la filtrer.

Enfleurage à froid sur huile.Enfleurage à froid sur huile.

Les mêmes produits peuvent être obtenus en chauffant l’huile d’olive très légèrement. Les huiles et les fleurs sont ainsi mélangées dans une cuve métallique posée sur un feu. En remuant à l’aide d’une spatule, les fleurs libèrent leurs odeurs qui sont captées par la matière grasse. Ce système présente trois avantages : il mobilise beaucoup moins de mains-d’œuvre, prend moins de temps et moins de place. Il présente en revanche l’inconvénient de produire des huiles odorantes de moins bonne qualité puisque la chaleur peut cuire les végétaux et altérer l’odeur des fleurs. Elle peut également, comme pour la distillation, laisser une odeur de brûlé aux productions.

Enfleurage à chaud à l'huile.Enfleurage à chaud à l'huile.

L’enfleurage sur huile demeure, aux côtés des produits obtenus par l’extraction sur graisse animale et par distillation, l’un des produits phare de la parfumerie grassois de la première partie du 19e siècle. À partir des années 1860, du fait des évolutions techniques, la fabrication d’huiles parfumées régresse. Celle des pommades se poursuit de manière significative jusque dans l’entre-deux-guerres. Quant à la distillation, le principe reste encore aujourd’hui en vigueur.

Malgré son obsolescence plus précoce, la technique d’enfleurage sur huile n’en demeure pas moins un débouché original pour l’huile d’olive produite à Grasse.

Le déclin des moulins de Grasse

D’une manière générale, la décennie 1860-1870 marque un tournant important dans l’histoire des moulins grassois. Deux facteurs apparus au cours de ces années amorcent le long mais inexorable déclin de ce secteur économique. La première est d’ordre administratif et politique. En effet, en 1861, le département des Alpes-Maritimes est fondé, avec le rattachement de l’arrondissement de Grasse à l’ancien Comté de Nice. Cette transformation entraîne un bouleversement de l’ordre des priorités départementales, qui se différencient de celles du département du Var, auquel était jusque là rattachée Grasse. Les Alpes-Maritimes s’engagent dans le développement de l’économie de la villégiature et du tourisme, ce qui privilégie les métiers de la construction et de l’hôtellerie au détriment des industries de produits manufacturés et des productions liées à l’économie rurale. Ainsi, parmi les embryons d’industries locales apparues durant les premières décennies du 19e siècle au sein de l’arrondissement de Grasse ne demeure pratiquement plus que la parfumerie grassoise.

L’évolution technique de cette profession est le second facteur qui entraîne l’obsolescence des moulins. L’introduction des machines à vapeur dans le processus de fabrication d’essence odorante réduit en effet le recours aux moulins hydrauliques. Dès lors, malgré des politiques cycliques de soutien à l’oléiculture locale, ce secteur perd de son influence au profit de centres de production d’huile d’olive étrangers comme l’Italie ou l’Espagne.

Cette perte de primauté des moulins n’empêche cependant pas la modernisation d’une partie de l’infrastructure grassoise, avec l’installation durant les années 1920, de turbines hydroélectriques dans certains établissements de la commune. La conversion des anciennes installations hydrauliques permet ainsi de produire de l’électricité et de renouveler le matériel de fabrication d’huile. La fonderie niçoise Giordan Frères dote nombre de moulins en turbines, presses hydrauliques et broyeurs à meule mécanisés. Cette donnée est essentiellement la conséquence de l’évolution du cadre juridique français. Avec sa loi sur l’eau de 1921, l’État promeut la production hydroélectrique à plus grande échelle. La micro-électricité et la pico-électricité profitent de cette tendance même si la doctrine énergétique de la France vise en premier lieu à équiper le pays d’une infrastructure hydroélectrique beaucoup plus puissante.

Plaque des fonderies Giordan Frères.Plaque des fonderies Giordan Frères.Equipements de moulins des années 1920.Equipements de moulins des années 1920.

La Seconde Guerre mondiale, période de pénurie alimentaire et énergétique, entraîne de manière conjoncturelle le maintien ou la remise en activité d’un grand nombre de moulins de Grasse. Ce renouveau se maintient durant les années d’immédiat après-guerre. Mais l’hiver rigoureux de 1956/1957, qui provoque le gèle de la totalité de la production d’olives du pays grassois, sonne localement le glas de la fabrication d’huile d’olive. Beaucoup d’établissements ne se relèvent pas à la suite de ces intempéries et ferment définitivement leurs portes. Les oliveraies les plus durement touchées ne sont pas restaurées faute d’investissement. Les quelques unités de moulins qui persistent en captant les restes de la récolte locale déclinent à mesure que cette production oléicole régresse.

Les moulins sont progressivement rachetés et transformés en habitation. Aujourd’hui, la production d’huile d’olive à Grasse n’est plus réalisée que dans deux établissements. Cette activité se trouve toujours dans d’anciens moulins hydrauliques. Elle emploie néanmoins un matériel de production moderne de centrifugeuses répondant aux normes européennes. Les anciens équipements (roues hydrauliques, broyeurs à meules et presses mécaniques et hydrauliques) ne sont conservés que comme témoignage d’un passé révolu.

Analyse architecturale

Critères d'observation des sites

À partir de critères spécifiques d’observation et d’analyse du bâti, l’étude des moulins de Grasse a conduit à interroger plus particulièrement les solutions retenues pour l’agencement des systèmes hydrauliques des sites. Cette question s’est imposée d’une part à cause d’un état de conservation du corpus peu favorables à d’autres types de questionnement. Elle a été privilégiée, d’autre part, en raison de ce qui caractérise les conditions d’aménagement des moulins de Grasse, c'est-à-dire leur grande proximité les uns par rapport aux autres. L’objet de l’analyse de ces sites a donc consisté à se demander si la concentration d’un grand nombre de moulins autour d’une source hydraulique relativement modeste et dans un espace restreint a amené une réponse organisationnelle particulière en matière de positionnement et d’agencement des sites.

Ce questionnement a d’emblée écarté toutes les observations sur la relation entre lieux d’activité et lieux d’habitation : les étages des constructions, par exemple, souvent intégralement remaniés, n’ont pas été visités. Par voie de conséquence, l’emprise foncière des bâtiments qui mêlent différentes fonctions (moulins, habitations, dépendances agricoles) a été considérée comme un élément peu discriminant. De même, les différentes tailles des bâtiments semblent avoir une assez faible incidence sur les installations des moulins. Ainsi, les systèmes hydrauliques des moulins du centre-ville, placés dans des immeubles à logements de plusieurs étages, et ceux des moulins de la périphérie situés dans des maisons rurales, ne se distinguent pas fondamentalement : la différence entre moulins de ville et moulins de campagne n’est pas apparue suffisante pour l’établissement d’une typologie très instructive sur la nature de ce patrimoine historique.

En revanche, ont été privilégiées toutes les observations associées au positionnement des roues hydrauliques, leur situation par rapport au sens de la pente dominante, au sens du courant de l’eau ou de leur disposition les unes par rapport aux autres, que ce soit dans un même site ou bien entre sites voisins. Cet abord propose de comparer ce que les bâtiments ont en commun (une infrastructure pour recevoir l’eau) et qui les différencient structurellement d’autres types de constructions. Ainsi, cet aspect fonctionnel ou structurel des bâtiments est préféré, pour l’établissement d’une typologie, à des données plus formelles (localisation, morphologie d’ensemble, mode de construction).

Rapidement s’est associée à cette grille d’analyse la question de la modernisation des sites puisqu’au 19e siècle tous les moulins (sauf rares exceptions) étudiés ont été transformés, agrandis et adaptés pour l’oléiculture. Dans ce cadre, il a semblé intéressant de se demander si les options de réaménagement des systèmes hydrauliques apportent un éclairage sur les capacités de broyage des moulins. En d’autres termes quelle est, dans un contexte de transformation, la part d’inspiration, de modification ou d’adaptation des sites à partir des systèmes hydrauliques primitifs ? D’autre part, existe-t-il des critères techniques qui expliquent tel ou tel choix d’agencement ? Et pour finir, y a-t-il un agencement qui semble avoir tiré le meilleur parti de la ressource hydraulique disponible et du système existant de distribution d’eau ?

Localisation et chronologie

La commune de Grasse et ses différents quartiersLa commune de Grasse et ses différents quartiers

Localisation

Les moulins de Grasse se répartissent dans trois espaces différents du territoire communal. La principale concentration de moulins se situe dans le centre ancien et dans ses faubourgs immédiats. Le deuxième espace se trouve dans une ancienne zone rurale, à l’ouest de la commune. Le secteur le moins densément occupé par les moulins se trouve dans le quartier de Magagnosc, à l’est de Grasse. Chaque espace est indépendant des autres notamment du point de vue de la question des ressources énergétiques.

Les moulins proches du centre-ville

Tous les moulins proches du centre-ville fonctionnent grâce à l’énergie hydraulique. L’alimentation des établissements de cette zone s’est faite principalement grâce à l’adduction de la Foux. Il s’agit d’une source dont la résurgence la plus importante se trouve en amont du centre ancien, à environ 200 mètres de l’ancienne enceinte nord-est de la vieille ville. Cette source et son débit moyen de 60 l/s ont mis en mouvement jusqu’à 40 sites différents. Chaque site étant constitué de plusieurs unités, cette eau a contribué à mettre en mouvement au minimum 80 roues hydrauliques.

Plan distributif des eaux de la Foux, d'après la carte (1809/1833) dressée par Jacques QuinePlan distributif des eaux de la Foux, d'après la carte (1809/1833) dressée par Jacques Quine

Aujourd’hui, 29 de ces établissements restent parfaitement identifiables. L’ensemble comporte 56 logements de roues.

Le canal des moulins

L’eau de la Foux est conduite aux établissements au moyen d’un canal, autrefois nommé canal des moulins. Ce canal longe la limite nord de la vieille ville. Un peu plus à l’ouest, il plonge dans le cœur du centre urbain marqué par une forte pente. Dans l’enceinte de la ville, il dessert quatre anciens moulins. Son tracé dessine approximativement un demi-cercle. Lorsqu’il sort des limites primitives de la vieille ville, ce canal se recentre par rapport à l’axe de la Foux. Aucune raison précise ou clairement identifiée n’explique pourquoi le canal emprunte en centre-ville ce parcours bien à l’ouest de la Foux.

Par la suite, le canal suit un chemin plus direct. Il traverse tout d’abord, presque en ligne droite, le faubourg de la ville également nommé Ville-Basse. Il serpente ensuite de part et d’autre d’un vallon (dont il sera question plus loin), rejoignant les moulins des divers quartiers qui se succèdent jusqu’à la plaine où les eaux se déversent dans le Grand Vallon, collecteur naturel des eaux de la ville.

La distance parcourue par le canal est de 2 km à vol d’oiseau. Son parcours réel au sol est très approximativement de 2,5 km. Le canal a été détruit ou comblé à de multiples endroits et toutes les parties conservées sont aujourd’hui couvertes. Avant ces transformations intervenues surtout dans la seconde moitié du 20e siècle, il alimentait directement 28 établissements, dont 25 sont encore au moins partiellement conservés (27 établissements sont regroupés sur un tronçon de 1700 mètres).

Le canal des moulins traverses 6 groupes de quartiers et lieux-dits différents : centre-ville, Porte Neuve-La Roque-Font Laugière, Quartier des Moulins-les Paroirs, le Capitou-les Pouilles, la Croix-Marigarde, Moulin de Brun. Ces quartiers segmentent le canal des moulins en tronçons de longueur assez semblables, autour de 300 mètres. Chaque changement de zone est souligné soit par une vanne ou « martelière » à chaque extrémité, soit par une rupture de pente assez marquée. Ces coupures sont clairement identifiables grâce aux documents d’archives et aux observations de terrain. Ainsi, les quatre moulins du centre-ville sont compris entre deux martelières principales. L’une se trouve Place aux Aires, en sous-sol : c’est à cet endroit que le canal des moulins commence réellement. Il se branche sur un canal principal destiné aux usages domestiques et à l’arrosage des anciennes cultures à l’ouest de la vieille ville. Ensuite, le canal est coupé significativement en sortie du centre-ville par un « éperon divisoir » également assez imposant et qui a donné son nom à la rue qui l’accueille, la Pouost (terme provençal qui désigne la planche en bois qui compose une martelière). Débute à cet endroit la zone de Porte Neuve-La Roque-Font Laugière qui s’achève plus bas à l’endroit où les eaux de la Foux et les eaux du vallon de Rioublanquet se rejoignent. À cet endroit, commence le quartier des Moulins/Paroirs. Cet espace est marqué par la présence, en plus du canal des moulins, d’un cours d’eau naturel. Tous deux s’écoulent plus ou moins parallèlement. Cette proximité entre le canal des moulins et ce petit vallon s’observe jusqu’à la plaine.[Vue des moulins du quartier Font Laugière vers 1860.][Vue des moulins du quartier Font Laugière vers 1860.][Vue du quartier des moulins de Grasse, vers 1860][Vue du quartier des moulins de Grasse, vers 1860][Vue d'ensemble du quartier des moulins.][Vue d'ensemble du quartier des moulins.]

[Plan du quartier des moulins.][Plan du quartier des moulins.]Plan d'ensemble du moulin de la Croix.Plan d'ensemble du moulin de la Croix.

Après le quartier Moulins-Paroirs, celui des Pouilles-Capitou débute par une forte chute d’eau et s’achève avec un réservoir de rétention qui signale le quartier de la Croix-Marigarde. Celui-ci s’achève, comme pour Font-Laugière, par un « carrefour hydraulique ». En effet, au bas de ce quartier, les eaux de la Foux et du vallon rejoignent les eaux du vallon de Rasitny, qui arrivent de l’ouest de la ville. Enfin, le quartier du Moulin de Brun (IA06002438) ne comprend que le moulin éponyme. Le canal des moulins se termine là en se déversant principalement dans le Grand Vallon.·

Localisation des moulins de la Foux et du canal des moulins.Localisation des moulins de la Foux et du canal des moulins.

Le vallon de Rioublanquet-Le Rossignol et les eaux de la Tierçade

Dans le secteur près du centre-ville, un autre espace de concentration de moulins s’est constitué. Le nombre de moulins qui s’y sont trouvés est plus difficile à définir (démolitions, flous des archives). On suppose qu’il y en avait 9 dont 6 sont encore conservés au moins partiellement (4 ont fait l'objet d'une notice : IA06001661, IA06001662, IA06001663, IA06001664). Là aussi, l’eau de la Foux constitue le principal apport d’eau pour mettre en mouvement ces moulins. En revanche, ces établissements n’ont aucun lien avec le canal des moulins.

Ces sites occupent les versants d’un vallon escarpé dit du Rossignol ou de Rioublanquet, au fond duquel coulent les eaux de la Tierçade. La provenance de cette eau n’est pas bien identifiée : une part importante est associée au contexte géologique de la Foux, mais d’autres voies d’alimentation, complètent le débit qui reste constant au cours des saisons.

Ce vallon borde la limite est de la vieille ville qu’il contourne en contrebas, du nord-est jusqu’au sud-est. L’utilisation des eaux de ce ruisseau pour actionner les roues de moulins n’a pas été établie avec certitude. En revanche, il est avéré qu’il sert de réceptacle aux eaux de la Foux après passage dans les moulins. En effet, ces diverses unités ne sont pas reliées entre elles par un seul canal mais par plusieurs branchements effectués à partir de la Foux et dont les trajectoires bifurquent et finissent par se rejeter individuellement dans la Tierçade.

L’aménagement des moulins de cette zone paraît postérieur aux établissements dépendant du canal des moulins. Il est vrai que ce secteur très escarpé et peu accessible paraît présenter plus de difficultés d’implantation et d’adduction, ce qui pourrait expliquer ces installations tardives. Sous l’Ancien Régime, la présence proportionnellement plus importante de moulins non alimentaires tels que les scies hydrauliques, les taillanderies ou aiguisoir voire les ressences montre une forme de spécialisation de cet espace. Cette spécialisation pourrait avoir été induite par un système d’adduction moins efficace n’autorisant l’installation que d’activités nécessitant moins d’eau courante (ressence, scie, aiguisoire). Par ailleurs, ces difficultés d’adduction d’eau expliquent certainement la présence dans le vallon d’une importante chute d’eau artificielle, d’environ 10 mètres de haut, obtenue en combinant le processus naturel de sédimentation et le comblement volontaire consolidé par un mur en pierre de taille.

À son extrémité (au sud-est), le cours d’eau de la Tierçade rencontre et alimente le canal des moulins. Tous deux poursuivent leur course parallèlement, dans un environnement moins abrupt et moins encaissé que celui du vallon du Rioublanquet.

Les moulins des Ribes

Le deuxième espace communal le plus densément occupé par des moulins est le vallon des Ribes. Onze établissements y ont été dénombrés dont dix fonctionnent grâce à la force hydraulique. Cet espace a été concerné par la construction de moulins plus tardivement que le centre-ville et ses faubourgs immédiats. En effet, les moulins des Ribes ont été aménagés majoritairement à partir du 18e siècle.

Historiquement, cette zone est subdivisée en trois, d’amont en aval : les Hautes Ribes, les Ribes-Moyennes et les Basses-Ribes. Le réseau hydraulique attaché à ce quartier s’étend sur approximativement 2500 mètres. Il est constitué, d’une part, d’un premier vallon conduisant les eaux de la source de la cascade. Ce premier bras d’eau alimente, par le biais de biefs de dérivation individuels, trois établissements. À 500 mètres en aval, ce vallon rencontre un deuxième petit cours d’eau dit de Font-Marine. Il s’agit vraisemblablement d’un bras dérivé de la source de la cascade. Les deux cours d’eau se regroupent pour n’en former qu’un, avec un débit renforcé. Puis, 150 mètres plus bas, et après avoir alimenté un moulin supplémentaire, ce vallon rejoint un troisième vallon plus important. Ce grand vallon, dit des Ribes, est le lit d’un cours d’eau à débit relativement constant. À ce point de son parcours, le vallon des Ribes ne met directement en mouvement qu’un seul moulin. Avec l’apport des eaux de la source de la cascade, son débit est sensiblement renforcé. La partie en amont de cette intersection correspond à la zone des Hautes Ribes.

[Cours d'eau longeant le moulin de la cascade vers 1900.][Cours d'eau longeant le moulin de la cascade vers 1900.]

La partie avale est parfois nommée, dans les sources anciennes, Ribes Moyennes et plus communément, les Basses Ribes. S’y succèdent 5 autres anciens moulins dont les 3 derniers sont installés sur un canal dérivatif commun, d’environ 1200 mètres de long. La densité de moulins dans le quartier des Ribes est nettement moins importante que dans le secteur urbain (1 moulin tous les 227 mètres contre 1 moulin tous les 90 mètres voire tous les 60 mètres) alors que les ressources en eau et la dénivellation sont très similaires. Cette différence s’explique notamment par l’intégration des moulins des Ribes dans des propriétés rurales polyvalentes (dont trois importantes blanchisseries) au parcellaire plus étendu que celui des propriétés proches du centre ancien. Le moulin ne forme, dans ce cas, qu’une dépendance agricole parmi d’autres. Dans ce contexte, à l’origine rural, l’interaction entre alimentation hydraulique des moulins et les cours d’eau naturels se voit mieux. La ponction en direct, par une prise d’eau, sur les cours d’eau est encore observable à divers endroits contrairement aux moulins près du centre-ville.

Il faut enfin signaler que le quartier des Hautes Ribes comprend aussi un ancien moulin à plâtre. Celui-ci était mis en mouvement par traction animale.

Localisation des moulins des RibesLocalisation des moulins des Ribes

Les moulins de Magagnosc

Le quartier de Magagnosc se trouve à l’est de Grasse. Assez vaste, il est constitué de plusieurs « hameaux » dont le principal est celui du Thoronnet. Ces petites zones agglomérées étaient espacées les unes des autres. Chacune dispose d’au moins un ancien moulin : hameau du Thoronnet (2 moulins), des Roumégons, de Saint-Laurent (2 moulins), de la Lauve (2) et du Nertas.

Au total 8 anciens moulins ont été dénombrés dans cet espace communal. N’étant pas pourvu d’une source d’eau abondante, susceptible de mettre en mouvement des moulins, l’essentiel des établissements, aujourd’hui presque tous disparus, fonctionnaient grâce à la traction animale. Ce sont donc 8 moulins dits à sang qui complétaient l’infrastructure hydraulique grassoise. Ces établissements n’ont presque pas été pris en considération dans le cadre de cette synthèse. Néanmoins l’ensemble de ces moulins sont signalés dans le cadastre de 1644 et semblent faire partie des plus anciens moulins de Grasse.

[Le hameau de Magagnosc et ses différents quartier, vers 1900.][Le hameau de Magagnosc et ses différents quartier, vers 1900.]

Localisation des moulins de MagagnoscLocalisation des moulins de Magagnosc

Chronologie d’aménagement des moulins

La construction

En tenant compte d’éventuelles erreurs de transcription ou de relevé, le cadastre de 1644 (le plus clair des cadastres des 16e et 17e siècles) fait état d’une trentaine de moulins sur le territoire de la commune de Grasse : 7 moulins à sang au quartier de Magagnosc, environ 22 moulins dépendant des eaux de la Foux et de la Tierçade. Aucun moulin n’est encore mentionné au quartier des Ribes. Sur ces divers sites, 18 ont été identifiés et localisés avec certitude, parmi lesquels 9 ont fait l’objet d’une notice Mérimée.

En secteur urbain, peu de liens entre le lieu d’implantation des moulins et la chronologie ont été établis. Il semblerait, tout de même, que les sites les plus anciens sont ceux de de Magagnosc et du centre-ville. Néanmoins, des moulins sont également signalés, dès l’Époque moderne, dans l’ensemble des quartiers placés sur le tracé du canal des moulins, situés en contrebas du centre ancien. Notamment le Moulin de Brun, le plus éloigné des moulins grassois dépendant de l’eau de la Foux.

Le nombre des implantations de moulins à Grasse double par la suite, puisque le cadastre couvrant la période de 1757 à 1791 fait état de l’existence d’une soixantaine de moulins dont seulement deux ou trois constructions nouvelles réalisées durant la période couverte par ce cadastre.

Ainsi l’installation de la soixantaine de sites recensés à Grasse est réalisée avant la fin de l’Ancien Régime, c’est-à-dire assez indépendamment du contexte de réorientation économique de la ville et du développement industriel de la parfumerie.

L’agrandissement des moulins

La première moitié du 19e siècle correspond à une phase d’agrandissement des sites existants. Ce processus d’extension peut même être plus précisément daté ; il se concentre sur environ 50 ans, entre 1810 et 1860. Le plan du cadastre napoléonien de Grasse, établi en 1809, offre un bon état des lieux des moulins grassois à l’issue de l’Ancien Régime. La superposition de ce plan avec celui d’aujourd’hui permet de prendre la mesure de ces extensions. Les agrandissements sont ensuite datables grâce aux informations cadastrales et aux actes de mutation. Ces extensions ont consisté pour beaucoup à multiplier par deux ou trois l’emprise foncière des bâtiments et par voie de conséquence des capacités de production des moulins dans des proportions équivalentes. En effet, l’ajout d’un nouveau bâtiment sur un site correspond, en premier lieu, à l’ajout d’une unité de production supplémentaire, c’est-à-dire d’une roue hydrauliques et d’un moulin à huile. Cette unité peut éventuellement être associée à des étages de logements. Par opposition, l’ajout de dépendances, telles que la construction d’une maison, d’une écurie ou de tout autre édifice n’étant pas impliqué directement dans l’activité du moulin est très rare.

De plus, à Grasse, l’agrandissement des sites correspond clairement à une phase de modernisation des installations. La meilleure preuve de cette modernisation est l’adoption généralisée de la roue hydraulique verticale. Cet ajout peut se faire soit au moyen d’un réaménagement des installations hydrauliques existantes ; soit par la suppression d’une roue horizontale et la création d’une chambre hydraulique verticale ; soit, comme dans la majorité des cas, par la construction d’un nouveau bâtiment sur un espace non bâti de la propriété.

Néanmoins, quelle que soit la forme qu’a prise la modernisation, celle-ci revêt un aspect assez spécifique à la ville. En effet, les Grassois ne semblent pas avoir profité entièrement des gains de puissance et de productivité que permet l’installation d’une roue verticale, notamment par rapport à l’ancien système des roues horizontales. Ainsi, une forme d’archaïsme semble avoir subsisté puisque jamais les nouvelles roues n’ont été utilisées pour mettre en mouvement de manière simultanée plus de 2 broyeurs à 1 meule chacun. Cette observation distingue le cas grassois d’autres territoires où l’implantation des roues verticales a autorisé la mise en mouvement de systèmes bien supérieurs à deux broyeurs à meules. Cette singularité se traduit au sein des moulins grassois par la multiplication des roues verticales, n’actionnant qu’une seule unité de broyage, dotée d’une seule ou de deux meules maximum. Il n’est donc pas rare de trouver des moulins qui abritent trois roues hydrauliques verticales pouvant fonctionner simultanément.

Cette forme d’agencement des moulins rappelle l’ancien modèle des moulins dans lesquels on multiplie le nombre de roues horizontales actionnant chacune un seul broyeur. Les deux modèles se distinguent néanmoins : dans l’exemple grassois, la roue verticale peut servir à faire tourner jusqu’à deux meules alors que la roue horizontale n’autorise la mise mouvement que d’une seule meule.

Les raisons expliquant le choix de maintenir plusieurs roues hydrauliques verticales, sans exploiter toutes leurs capacités, demeurent assez obscures, notamment lorsque l’on tient compte de l’investissement financier que peut représenter, à cette époque, l’installation d’une roue de ce type.

Enfin, on observe que dans 6 cas de figure (dont 4 sites voisins : IA06001666, IA06001667, IA06001668, IA06001649), l’agrandissement s’est opéré d’une manière assez semblable. Ainsi des bâtiments ont été ajoutés successivement, d’amont en aval par rapport à la pente du terrain et parallèlement par rapport au sens général du courant de l’eau. Dans cette configuration, les moulins primitifs occupent le point le plus bas de la propriété. Un premier bâtiment est construit en amont contre le bâtiment ancien, puis un deuxième, voire un troisième. Ces établissements finissent par former, dans leur ensemble, des édifices hétérogènes rectangulaires, parallèles au sens du courant de l’eau, et perpendiculaires aux courbes de niveau du terrain.

Evolution des moulins dans la première moitié du XIXe siècleEvolution des moulins dans la première moitié du XIXe siècle

La construction des ressences

La construction de ressences dans les établissements grassois constitue l’une des raisons qui incitent à l’agrandir des moulins. Ces unités, souvent de plus petite dimension que les moulins à huile, sont ajoutées aux structures qui existent déjà, en grande majorité, entre le dernier quart du 18e siècle et au cours de la première moitié du 19e siècle. Hormis les quatre moulins situés en centre-ville tous les autres ont un jour été équipés d’au moins une ressence en plus des autres installations. Un établissement a même servi uniquement de ressence. Sur les 14 ressences clairement identifiées, toutes datent du 19e siècle : 6 ressences se trouvent dans des bâtiments indépendants, 4 autres se trouvent dans des constructions accolées aux anciens bâtiments et les 4 dernières ont été, semble-t-il, aménagées dans les structures existantes.

Implantation des moulins à ressence des RibesImplantation des moulins à ressence des RibesImplantation des moulins à ressence alimentés par la FouxImplantation des moulins à ressence alimentés par la Foux

Composition d'ensemble

Le site

Le corpus architectural étudié est extérieurement d’un aspect assez similaire bien qu’il n’existe pas un plan type de moulin. Du moins, les différences observées ne permettent pas d’établir de véritables typologies de sites. Quelques éléments distinctifs sont apportés lors des travaux d’agrandissement et de rénovation de ces établissements mais, de la même façon, ces travaux n’ont pas conduit à l’émergence d’une forme spécifique généralisée à un groupe de moulins.

Une seule différence typologique notable peut être à nouveau signalée entre les 6 moulins situés en secteur urbain (4 en centre-ville et 2 au quartier Font-Laugière) et tous les autres. Ces moulins urbains se trouvent dans des immeubles à logements de la vieille ville de Grasse. Ils ne se situent donc pas dans un environnement rural, entourée de parcelles de jardin. Cette différence d’implantation n’a cependant pas une grande incidence sur la nature des installations des moulins.

Dans ces conditions, il est possible de proposer une description synthétique du moulin grassois typique. Celui-ci intègre généralement un groupe de plusieurs constructions d’époques différentes, le plus souvent accolées. Ces différents corps de bâtiments se trouvent sur des propriétés rurales avec parcelles de terrain non bâties (terrasses de culture, prés, oliveraies). Les moulins de Grasse s’apparentent à de grandes maisons rurales hétérogènes mais avec la particularité de se trouver à proximité d’un cours d’eau. En centre-ville et dans le quartier Font-Laugière, les moulins se répartissent indifféremment de part et d’autre du canal des moulins. Dans les autres quartiers en contrebas, et sans que l’on sache bien pourquoi, les moulins sont placés majoritairement sur la rive gauche du vallon. Le moulin est plus précisément placé entre le cours d’eau naturel situé en aval du bâtiment et le canal des moulins qui alimente le moulin par l’amont. La même observation se vérifie pour les moulins des vallons du Rioublanquet et des Ribes.

Moulin dit Huilerie Sainte-Anne, au quartier des Ribes.Moulin dit Huilerie Sainte-Anne, au quartier des Ribes.

Moulin type dans le quartier des Paroirs.Moulin type dans le quartier des Paroirs.

La taille de ces édifices est variable, mais tous sont pourvus d’au moins un étage. La distribution interne d’un moulin est souvent la même : les étages de rez-de-chaussée, de sous-sol, ou de soubassement sont dévolus aux installations des moulins. Le premier étage est également généralement associé à l'activité du moulin. Celui-ci sert alors à entreposer les olives avant traitement. Les fruits sont ensuite déversés dans les broyeurs situés au niveau inférieur au moyen de trappes ménagées dans le plancher et munies de conduites en bois, canalisant les quantités de fruits acheminés dans les broyeurs. Ces étages de stockage ont totalement été modifiés lors de la réhabilitation des moulins et n’ont, de ce fait, été visités que sommairement. Les travaux effectués masquent systématiquement les traces de l’ancienne attribution. Cependant, même si les étages de stockage ou d’épandage des olives ont été transformés au cours des dernières décennies, on a remarqué que la présence de ces salles a été prise en considération lors de l’agencement global des bâtiments des moulins et notamment de leur disposition par rapport à la pente. Ainsi, dans 80% des sites, ces salles de stockage se trouvent dans des rez-de-chaussée surélevés (hormis les 6 moulins du centre-ville). Les installations de broyage se trouvent donc au premier étage de soubassement. Cette disposition présente l’intérêt de faciliter l’acheminement des olives. En effet, cette opération se fait alors presque de plain-pied, et par conséquent sans gravir de hauteurs.

Moulin Sainte-Anne : A gauche de la meule conduit à olives en bois.Moulin Sainte-Anne : A gauche de la meule conduit à olives en bois.

Généralement, les salles de broyage (du premier étage de soubassement) constituent l’entrée la plus visible et la plus facilement accessible du moulin. Elles sont à chaque fois précédées d’une cour qui confronte la route principale ou carrossable du site. Ces espaces de travail, disposant de grandes portes cochères, sont ouverts à la clientèle du moulin. Celle-ci y apporte sa récolte d’olives et surveille les bonnes conditions de fabrication de son huile.

À l’inverse, l’entrée des salles de stockage au rez-de-chaussée est généralement plus confidentielle. Elle se confond avec les accès privatifs du moulin situés à l’arrière du bâtiment et desservis par un petit chemin. Lorsqu’un bâtiment comprend d’autres étages, il s’agit d’espaces d’habitation n’entrant pas directement dans l’activité du moulin. En plus des 6 moulins du centre-ville, 28 sites présentent de tels étages en élévation : 16 comprennent un étage carré, 11 en comprennent 2 et 1 seul comprend 3 étages.

Si la fonction résidentielle des moulins s’est accentuée avec la réhabilitation des sites après l’arrêt de l’activité (seconde moitié 20e siècle), dès l’origine, des espaces de logement ont été intégrés aux sites ne serait-ce que pour loger l'exploitant du moulin. Enfin, à l’intérieur, les dernières parties des bâtiments ayant un rapport direct avec l’activité du moulin sont les étages de comble ou greniers à foin. Le foin est nécessaire pour nourrir les bêtes de sommes. En outre, tous ces sites comprennent des jardins avec dépendances extérieures dont certaines ont un lien avec la l’activité du moulin : fontaine, lavoirs, anciens bassins de décantation aujourd’hui en grande partie comblés, petits bâtiments ruraux (poulailler, clapiers, hangars sommaires).

Principe de fonctionnement d'un moulin à huile. A gauche un moulin à roue verticale, à droite un moulin à roue horizontale.Principe de fonctionnement d'un moulin à huile. A gauche un moulin à roue verticale, à droite un moulin à roue horizontale.

Les sous-sols : systèmes hydrauliques et caves

Tous les étages de rez-de-chaussée, de rez-de-chaussée surélevés ainsi que tous types d’étages inférieurs sont affectés à l’activité du moulin (systèmes hydrauliques, bassins et salle de broyage).

Les vestiges du système hydraulique se trouvent au plus bas, dans des caves, sous un ou plusieurs étages de soubassement.

Les roues hydrauliques

L’aménagement des sous-sols des moulins est réalisé en fonction de la roue hydraulique qui constitue le moteur de l’installation. Chaque roue hydraulique est associée à un canal d’amenée de l’eau et d’un dispositif de rejet des eaux après passage sur la roue. Comme ces divers canaux sont aujourd’hui souvent obstrués ou ont été comblés, il n’a pas été possible d’en proposer une analyse synthétique globale. Néanmoins, on a pu observer que tous les moulins sont alimentés par un système dérivatif propre et ne sont pas placés directement sur le canal collectif d’approvisionnement en eau. De plus, chaque logement de roue est doté d’un canal de fuite secondaire qui contourne la roue. Par ce système, la roue peut être momentanément mise hors d’eau, sans interrompre l’alimentation générale du moulin. L’ensemble de ces dispositifs rend les roues indépendantes les unes des autres.

Le système de la roue verticale s’est imposé sur la roue horizontale au 19e siècle. Au moment de la cessation d’activité des moulins de Grasse, durant la deuxième partie du 20e siècle, tous les moulins de Grasse fonctionnent grâce à une roue verticale. Ainsi, 59 chambres hydrauliques verticales ont été identifiées et 52 ont été visitées : on compte 33 logements de roues vides et 19 avec la roue encore présente. Toutes ces pièces sont bâties selon un modèle similaire. La roue est logée dans une salle haute et étroite : approximativement 8 mètres de haut sur 1 mètre de large. Les roues étant toutes alimentées par-dessus, chaque chambre hydraulique dispose d’une amenée d’eau sur le point haut du mur latéral et d’une évacuation au bas du mur opposé. Ces chambres sont toutes partiellement enterrées : en moyenne, 1/3 de la chambre hydraulique déborde sur l’étage du premier soubassement et côtoie la salle de broyage.

À Grasse, 80% des chambres hydrauliques sont abritées à l’intérieur du bâtiment. Pour les 20% restants, les roues se trouvent, à l’extérieur, contre les murs pignons des moulins dans une chambre hydraulique maçonnée. Il est probable qu’à l’origine, nombre de roues se trouvaient à l’extérieur. Elles ont été intégrées aux constructions lors de l’extension des établissements et l’ajout d’autres bâtiments.

En revanche, le positionnement de la roue par rapport au sens du courant présente différents cas de figures :

lorsque la roue est parallèle au sens du courant de l’eau (du nord vers le sud), la chambre hydraulique se situe en bordure du bâtiment, le long du mur gouttereau formant la limite haute de l’édifice.

Lorsque la roue hydraulique est perpendiculaire au sens général du courant, la place de la chambre hydraulique peut se trouver soit en limite de construction, contre les murs pignons, soit au cœur du bâtiment. Dans ce dernier cas de figure, la chambre hydraulique sert de cloison séparative. Elle permet alors d’organiser l’espace intérieur des salles de broyage, aussi bien en soubassement qu’en rez-de-chaussée.

Le renvoi d’angle

La chambre hydraulique abrite également le renvoi d’angle. Il s’agit du système qui permet de transmettre aux meules, la force mécanique générée par la roue hydraulique. Ce système d’engrenage est formé de deux couronnes d’entraînement dentées formant un angle droit, placées sur un massif en maçonnerie.

À Grasse, le renvoi d’angle a été placé, en grande majorité, sous les broyeurs à meules dans de petites salles voûtées mesurant moins de 1,5 mètre de côtés (31 salles vides et 16 salles avec le mécanisme). Ces salles s’ouvrent largement sur le logement de la grande roue (renvoi d’angle devant se trouver dans l’axe de la grande roue). Les salles qui abritent le renvoi d’angle ont de ce fait une hauteur de plancher plus élevée que celle du reste de la chambre hydraulique. À cette configuration type, s’ajoutent six installations présentant un renvoi d’angle aménagé latéralement au broyeur à meule et non en sous-sol. Il se trouve alors à la même hauteur que la salle de broyage.

Le positionnement du renvoi d’angle, sous le ou les broyeurs, provient semble-t-il d’un choix effectué lors de l’aménagement des roues verticales. De sorte qu’il peut être suggéré que cette configuration résulte du réagencement du système hydraulique antérieur : il est vraisemblable que nombre des salles voûtées qui abritent le renvoi d’angle sont d’anciennes chambres hydrauliques de roues horizontales. Ces pièces auraient donc simplement été reconverties. Dans ces conditions, l’aménagement de la roue verticale consiste à construire (creuser et élever) une grande salle contre l’une des extrémités de la chambre de la roue horizontale ; puis, à supprimer la roue horizontale pour la remplacer par le renvoi d’angle. Cette option d’agencement du renvoi d’angle sous le broyeur, aurait par la suite été conservée et généralisée aux nouvelles constructions.

Cette hypothèse ne peut en revanche être évoquée sans certaines précautions car les importantes transformations apportées aux moulins pour l’aménagement des roues verticales masquent les anciennes installations des moulins. Ainsi, la succession chronologique roue horizontale/roue verticale n’a pu être attestée que dans 14 cas. Profil schématique (partiel) du canal des Moulins : Le profil du canal des moulins alterne des zones de pentes faibles et de chutes marquées. Ces chutes correspondent à l'emplacement des anciennes cuves des roues horizontales. Les diamètres des roues verticales qui les ont remplacées se sont affranchis des hauteurs de chutes préexistantes.Profil schématique (partiel) du canal des Moulins : Le profil du canal des moulins alterne des zones de pentes faibles et de chutes marquées. Ces chutes correspondent à l'emplacement des anciennes cuves des roues horizontales. Les diamètres des roues verticales qui les ont remplacées se sont affranchis des hauteurs de chutes préexistantes.

Exemple de renvoi d'angle situé à hauteur des broyeurs à meules (moulin Massas). Exemple de renvoi d'angle situé à hauteur des broyeurs à meules (moulin Massas).

Exemple de renvoi d'angle situé sous le broyeur à meule (moulin Massas).Exemple de renvoi d'angle situé sous le broyeur à meule (moulin Massas).

Les roues horizontales disparues

L’un des indices d’identification d’un ancien logement de roue horizontale est la présence de cuves de mise en pression (8 cuves identifiées) autrefois associées à ce type de chambres hydrauliques. Contrairement à de nombreux exemples de moulins d’autres localités, ces cuves sont placées, à Grasse, à l’intérieur des bâtiments (comme pour les roues verticales). Cette disposition particulière, où l’espace manque, a contraint à construire des cuves larges et peu profondes. Ceci les distingue à nouveau des cuves que l’on peut observer ailleurs et qui s’apparentent à des puits ou colonnes d’eau. Ainsi le diamètre et la profondeur des cuves grassoises varient entre 2 et 2,5 mètres (IA06002440, IA06002441). À deux reprises, ces cuves ont été cassées dans le sens de la hauteur pour permettre l’installation d’une roue verticale.

Une autre possibilité pouvant expliquer cette difficulté à identifier les anciens logements de roues horizontales est que certains sites étaient déjà équipés sous l’Ancien Régime de roues verticales. Pour finir, les sous-sols comprennent parfois des salles dotées de réservoirs d’eau que l’on nomme enfers et qui servent au nettoyage des ustensiles employés pour l’extraction de l’huile d’olive. D’autres caves que l’on nomme jarreries, servent de lieu de stockage de l’huile. Un seul exemple de jarrerie, située en sous-sol, a pu être identifié clairement.

Exemple d'une ancienne jarrerie implantée dans le sous-sol d'un moulin.Exemple d'une ancienne jarrerie implantée dans le sous-sol d'un moulin.

Le premier étage de soubassement : les salles de production de l’huile d’olive et de l’huile de ressence

Les salles de broyage se trouvent dans 86 % des cas (45 salles sur 52 identifiées) dans le premier étage de soubassement (il y a rarement plus d’un seul étage de soubassement dans les moulins). Toutes ces salles sont affectées au broyage des olives, sauf deux exceptions (une ruine de meule à farine et un moulin à plâtre). Ces espaces de broyage des olives abritent également les installations nécessaires aux opérations de pressage des olives après broyage.

Comme on l'a vu, lorsque le site n’est pas situé en secteur urbain, on accède le plus souvent à cet espace de travail, de plain-pied à partir d’une aire ou une cour. Les salles de broyage sont les parties du moulin accessibles à la clientèle.

Au total, 34 salles conservent encore un élément des installations nécessaires au broyage : 25 anciens moulins à huile et 9 ressences.

L’agencement intérieur de la salle de broyage des moulins à huile ne répond pas à un plan préétabli. Celui des ressences est plus contraint mais varie aussi d’un établissement à l’autre. La différence entre ces deux types de salles de production d’huile justifie une présentation séparée.

Néanmoins pour ces deux activités, la place des meules se détermine naturellement par rapport à celle de la roue hydraulique. Celle des presses, même lorsqu’elles sont en chapelle, semble plus libre. De ce fait il semblerait, pour des raisons évidentes de confort, qu’on les ait installées à proximité de la porte d’entrée de la salle (souvent à sa gauche) afin de faciliter le transport de l’huile.

La salle de broyage et de pressage du moulin à huile

Les salles de fabrication d’huile d’olive de première pression qui ont été visitées ne présentent pas de spécificités particulières. Il s’agit de salles d’un seul volume intérieur sans mezzanine ni demi-étage. Elles regroupent, dans un espace commun, le ou les broyeurs à meule mis en mouvement par la roue hydraulique et le système de pressage (presse à bras ou en chapelle). Lorsque le moulin comporte plusieurs roues hydrauliques, chaque roue est associée à une salle de broyage et de pressurage spécifique, placée dans une pièce indépendante.

Chaque pièce peut donc être dotée tantôt d’un seul broyeur à meule, tantôt de deux broyeurs associés. Ces pièces intègrent aussi entre une et trois presses à bras ou en chapelle (10 presses en chapelle recensées dans 7 sites différents). Aucun cas de mise en commun de presses entre plusieurs installations de broyage n’a été observé. Il s’agit donc d’une segmentation claire du moulin en diverses unités indépendantes.

Le broyeur à meules se décompose lui-même de bas en haut : d’un bac constitué, au fond (parfois d’une meule dormante en pierre ou meule couchée ou horizontale) surmontée à son extrémité d’un pourtour maçonné ou muret formant un cercle d’environ 1 mètre de haut. Au centre de ce bac se trouve un axe vertical relié au renvoi d’angle situés en sous-sol. Cet axe, constitué par une poutre en bois d’environ 30 cm de côté, supporte une meule en pierre verticale. En tournant dans le bac et sur elle-même, cette pierre écrase les olives.

Dans le cas où une même roue hydraulique met en mouvement deux broyeurs à une meule chacun et non une meule simple, les axes placés au centre des bacs sont surmontés de couronnes d’entraînement. Celles-ci sont mises en mouvement par une couronne maîtresse centrale (sans meule) faisant le relai entre le renvoi d’angle et les deux broyeurs à meules associés.

Parmi les 25 salles de broyage identifiées, 11 disposent d’une paire de meules et 11 d’une meule simple (les éléments conservés dans les 3 salles restantes n’ont pas permis de préciser la nature de ces installations). Les autres types d’installation sont très rares et associés à des mécanismes électriques.

Double broyeur à meules de moulin.Double broyeur à meules de moulin.

Broyeur de moulin à une meule.Broyeur de moulin à une meule.

Mais l’absence d’autres types de configurations ne signifie pas que tous les broyeurs à meules observés sont rigoureusement identiques. En effet, des meules de tailles et de proportions (rapport diamètre et épaisseur des meules) très diverses ont été relevées. Logiquement la taille de la meule mise en mouvement influe sur tout le reste : taille et hauteur du bac, des couronnes d’entraînement… Ainsi peut-on supposer qu’un ajustement du matériel de broyage s’est opéré en fonction de la puissance motrice générée par la roue hydraulique et son système de transmission (renvoi d’angle).

Une fois les olives broyées, on obtient une pâte d’olives. Cette pâte est répartie dans des pochettes ou sacoches en chanvre tressé également nommées scourtins. Ces scourtins, une fois remplis, sont pressés. À Grasse, les presses à bras dominent (seulement 4 cas de presses hydrauliques observées dont seulement deux ont entraîné la suppression des presses à bras). Quelques presses en chapelle ont également été identifiées. Il s’agit de presses maintenues dans un épais mur en pierre de taille dans lequel ont été ménagées des niches. Ces dernières, construites majoritairement durant la première moitié du 19e siècle, sont également associées aux ressences.

Une presse en chapelleUne presse en chapelle

En pressant, l’huile ruisselle des scourtins sur les bancs en pierre des presses et s’écoule ensuite, via un petit bec verseur, dans un réceptacle mobile placé contre le banc de la presse. À Grasse, le recours à ces bacs mobiles a été privilégié aux cuvettes en pierres taillées, fixes, que l’on peut observer dans des moulins d’autres communes (aucune cuvette en pierre n’a été recensée à Grasse).

Une presse à bras type se décompose, de bas en haut, d’un banc en pierre rectangulaire. Celui-ci sert, d’une part, de point d’appui pour le pressage et d’autre part à la collecte de l’huile, tout en assurant la stabilité de l’installation. En effet, ces bancs soutiennent le mécanisme de pressage principalement en bois. Il s’agit de deux poutres verticales enchâssée, en bas, dans chaque extrémité latérale du banc en pierre et, en haut, dans un contre poids rectangulaire, taillé dans un important tronc d’arbre de plusieurs centaines de kilogrammes. Les deux poutres latérales soutiennent partiellement le contrepoids, également tenu au mur par des crochets métalliques. Ces deux poutres servent aussi de rail à un plateau qui coulisse de haut en bas grâce à une vis sans fin, en bois ou en métal, placée au centre de la face inférieure du contrepoids. Le plateau en bois comprime, presse, écrase les scourtins posés au centre des bancs en pierre. L’abaissement du plateau et la compression se font à force d’homme et à l’aide de longs tirants en bois que l’on insère dans la partie haute de la vis sans fin. Lorsque la simple force humaine ne suffit plus, le tirant est attaché, à son extrémité, à une corde reliée à un cabestan. En tournant la manivelle du cabestan, le tirant exerce les dernières rotations nécessaires pour exprimer le maximum d’huile.

À Grasse, 37 presses, plus ou moins complètes, ont été recensées. Comme pour les broyeurs à meules, la taille de cet outillage est variable et ne semble pas renvoyer à des catégories standardisées. En revanche, une corrélation entre la taille des broyeurs et celle des presses mécaniques est observée sur place : à grand broyeur, grande presse.

Presses et cabestant dans un moulin.Presses et cabestant dans un moulin.

Les ressences

Dans la totalité du corpus de moulins étudiés, 14 unités sont clairement associées à une activité de ressence. Le moulin à ressence permet un second pressage des olives par le réemploi des pulpes d’olive déjà pressées. L’huile ainsi obtenue n’est plus comestible et sert à confectionner des savons.

Techniquement, les principes employés pour la production d’huile d’olive de première pression ressemblent à ceux de la ressence. Les installations hydrauliques (roue hydraulique, renvoi d’angle) et de pressage sont assez similaires. Plus précisément, les ressences permettent de recueillir l’huile résiduelle contenue dans la matière sèche qui reste après le premier pressage des olives pour l’obtention de l’huile d’olive alimentaire. Nommée grignon noir, cette matière est constituée d’éclats de noyaux, de la peau des olives et de la pulpe qui contient encore de l’huile. Le grignon noir est versé dans un broyeur à meule verticale, rempli d’eau froide. En tournant grâce à la roue à godets, la meule plongée dans l’eau commence à désagréger le grignon noir. Étant plus lourds, les éclats de noyaux restent au fond du bac du broyeur tandis que la pulpe remonte en surface. À ce stade, une partie de cette pulpe est déjà récupérée à l’aide d’une écumoire. La pulpe restante passe par une surverse dans un second bac accolé au broyeur. De plus petite dimension, ce bac est doté d’un râteau (tournant à la manière d’une meule) qui contribue à éliminer les derniers noyaux. Une partie de la pulpe est à nouveau retirée.

Grâce à l’adjonction d’eau claire, les pulpes restantes passent dans une dizaine de réservoirs d’eau qui permettent, par décantations successives, de prélever l’huile qui reste en surface.

Bassins d'eau extérieur d'un moulin à ressence.Bassins d'eau extérieur d'un moulin à ressence.

Les pulpes séparées des noyaux sont versées au fur et à mesure dans un chaudron d’eau chauffée à environ 80 degrés. Cette étape permet de liquéfier l’huile contenue dans la pulpe. Une fois à température, les pulpes sont transvasées à l’aide d’un récipient semblable à une poêle dans des scourtins et sont pressées. Pour mieux retenir les pulpes, les scourtins utilisés pour la ressence sont en fibre de riz, au tressage très fin.

Les ressences constituent des unités à part entière dans les moulins et disposent d’un appareillage propre permettant un fonctionnement parfaitement autonome. Elles réclament d’importantes quantités d’eau pour la décantation mais ne nécessite pas d’une forte puissance hydraulique. En effet, le mélange requiert moins d’énergie que le broyage des olives pour trois raisons (selon témoignage oral). L’action de mélanger est en soi moins « énergivore » que le broyage. De plus, la meule est plongée dans l’eau, ce qui allège le système. Enfin, les quantités de pulpes sont inférieures à celles des olives brutes.

Les moulins à ressences construits durant le deuxième quart du 19e siècle présentent un agencement assez similaire qui peut laisser penser qu’ils ont été conçus selon le même modèle. Il s’agit de simples constructions de plan rectangulaire, plus petites que les moulins à huile. Leurs roues métalliques sont placées en extérieur, dans une chambre maçonnée découverte et accolée au mur pignon. Dans ces ressences, les presses en chapelle ont été préférées aux presses mécaniques couramment employées à Grasse. Comme pour les moulins à huile, la disposition de la salle de production de l’huile est dictée par l’emplacement de la roue hydraulique. L’importance du processus de décantation amène à surélever le broyeur à meule et le râteau sur un édicule variant entre 1,5 mètre de haut et 2,5 mètres de haut. Cette mise en hauteur permet ensuite, dans la salle, d’aménager des réservoirs d’eau dont le plus profond peut atteindre 1,20 mètre. Ils sont munis de sur-verses qui conduisent l’eau d’un bassin à un autre bassin, placé à un niveau plus bas. Dans les salles de production, peuvent se trouver jusqu’à trois bassins. Le complément se situe ensuite, à l’extérieur ou en sous-sol. Ces installations complémentaires, qui exploitent bien la pente naturelle des terrains, ne sont conservées dans leur intégralité que dans deux sites. Ailleurs les bassins extérieurs ont été comblés et ceux des caves ont été détruits. Tous les bassins, qu’ils soient internes ou externes, ont approximativement la même taille 1,5 mètre sur 2 à 2,50 mètres pour une profondeur de 1,20 à 1,50 mètre. Dans les cas observés, où subsistaient les bassins intérieurs et extérieurs, le nombre total de bassin est d’environ dix (sans compter les bassins comblés et détruits).

Matériaux et mise en œuvre

La question de la mise en œuvre et des matériaux employés pour la construction des moulins se confronte à deux restrictions dans le cas de l’inventaire des établissements de Grasse. La première limite tient au fait qu’une grande partie des bâtiments qui abritent des moulins se composent de logements. Ces parties habitées ont le plus souvent été entièrement restructurées et rénovées et n’ont pas été prises en considération dans la présente étude. La seconde limite relève davantage d’un abord méthodologique. La manière dont ont été bâtis les parties des bâtiments attachés à l’activité des moulins est intéressante. Les contours et enjeux de cette analyse architecturale et structurelle ont été explicitement posés par André Guillerme : « Pour fonder solidement un moulin à eau dans un sol gorgé, il faut utiliser du mortier de chaux et de ciment (pouzzolane ou vieilles tuiles broyées, tuileau) et élever une bâtisse étanche. À la différence de la construction commune qui est stable, portante et inerte, le moulin doit être autoporteur et conçu comme un meuble soumis à la traction, à la compression, aux mouvements transversaux, ondulatoires. C’est une structure dynamique qui exige des connaissances mécaniques : la reconnaissance des futures poussées et des cisaillements éventuels, des compressions, des flexions, des tensions, des trépidations, des portances, des frottements. Bref, une représentation, une culture spécifique de l’élasticité monumentale qui va des fondations aux porte-à-faux de la roue, des charges sous les meules aux battements des cames ». Cet ensemble de paramètres à prendre en considération demeure en soi difficile à appréhender. L’analyse se complique encore, d’une part, lorsque, comme dans le cas grassois, tous les sites ont totalement été mis hors d’eau et que d’autre part l’analyse du bâti n’intègre pas une approche clairement archéologique avec, par exemple, une fouille par sondages des édifices. L’approche archéologique peut aussi aider à préciser les périodes d’édification des bâtiments les plus anciens.

En tenant compte de ces difficultés, la question de la mise en œuvre des moulins de Grasse se limite donc à quelques observations d’ordre général. Les moulins de Grasse sont abrités dans des édifices dont les corps de bâtiments les plus anciens remontent à l’Ancien Régime voire, sans doute, pour certaines parties, au bas Moyen-Age. Les ajouts de construction plus récents datent majoritairement de la première partie du 19e siècle. Malgré cette large amplitude chronologique, l’observation superficielle de la mise en œuvre ne permet pas d’établir des différences structurelles très prégnantes. Ainsi, l’ensemble des bâtiments des moulins de Grasse sont rectangulaires, les murs sont en maçonnerie de moellons, avec l’emploi très ponctuel de blocs de tuf. Lors de la restauration de ces édifices, les nouveaux propriétaires ont souvent opté pour l’écroutement des enduits de façade qui laissent apparaître la structure. Plusieurs murs pignons présentent des enduits à inclusion : incrustation de petite pierre dans l’enduit. D’autres ont été agrémentés de cadrans solaires. Aucun phénomène d’ornementation des moulins plus explicite n’est à signaler.

La couverture est en grande majorité la même : charpentes en bois, toits à longs pans recouverts de tuiles creuses. Intérieurement, la mise en œuvre la plus soignée concerne les parties de bâtiment en contact avec l’eau : les canaux d’amenée et généralement les systèmes hydrauliques, les cuves de mise en pression et les logements des roues hydrauliques. Ces dernières sont bâties au moyen de moellons taillés, assez réguliers, de moyen module. Les blocs sont liés au mortier. La qualité et le soin porté à la mise en œuvre sont encore plus prononcés pour les cuves de mises en pression. Elles sont constituées de blocs rectangulaires en calcaire. La précision de l’assemblage semble avoir été un souci permanent. Afin d’assurer l’étanchéité la plus efficace de l’installation, les blocs de moyen module se superposent de façon à ne laisser qu’un joint très fin.

Dans quelques salles de broyage et de pressurages, des arcs-doubleaux en pierre soutiennent les arcs et les planchers des plafonds constitués de poutres apparentes. Ces doubleaux peuvent rythmer l’espace intérieur : d’un côté de l’arc le broyeur à meule et de l’autre les presses.

Les réaménagements des sites et leur agrandissement ont ponctuellement conduit à employer des matériaux plus modernes : quelques rares couvertures en tuile creuses ont été remplacées par une couverture en tuiles mécaniques (le moulin des paroirs ou de la Croix). Un édifice, le Moulin de Brun, présente une structure de type béton avec toit-terrasse. Cette particularité ne concerne qu’une partie : l’une des salles de pressage et de broyage de l’établissement. Cette modification est intervenue dans l’entre-deux-guerres, lors de la transformation partielle de ce moulin en usine de fabrication de pâtes alimentaires.

Synthèse

La classification

On l'a vu, la singularité du patrimoine hydraulique de Grasse tient à la fois à sa forte concentration dans un espace géographique réduit ainsi qu'au nombre d’unités recensées. En secteur urbain, ce patrimoine forme quasiment ne chaîne ininterrompue de sites, parfois directement accolés. L’aménagement de ces sites et leur organisation, les uns par rapport aux autres, ont naturellement été influencés par cette proximité. Dans ce contexte, comprendre la façon dont l’énergie hydraulique a été mise en valeur apparaît comme une question importante.

La recherche typologique s’est centrée sur cet aspect et a relégué au second plan la mise au jour d’autres types de regroupements distinctifs moins opérants, tels que ceux relatifs à la taille des édifices ou leur répartition chrono morphologique. Ainsi, dans le cadre de cette analyse portant sur les modes de gestion des flux hydrauliques, plusieurs paramètres propres aux moulins de Grasse doivent être rappelés préalablement. Tout d’abord, il paraît nécessaire de rappeler les conditions qui ont conduit à une telle concentration de moulins dans un espace restreint.

L’essor des moulins grassois, dès la fin du Moyen-âge, trouve son origine dans un ensemble de conditions propres à l’histoire institutionnelle et économique de la commune. Ce sont le dynamisme de ses marchands et les libertés communales de gestion des ressources hydrauliques qui induisent la multiplication des sites. La construction des moulins paraît à priori moins directement liée aux possibilités offertes par le territoire en matière de ressources hydrauliques. Ainsi, pour répondre aux besoins d’implantation d’infrastructures hydrauliques privées, un modèle empirique d’aménagement s’est défini progressivement.

L’agencement des moulins grassois, les uns contre les autres, résulte de la relation qui existe entre la quantité d’eau disponible et la topographie escarpée d’une partie du territoire. Certes, le débit d’eau dont bénéficie Grasse est constant. Mais il n’en demeure pas moins assez modeste. C’est donc bien son association avec une forte pente qui a autorisé la multiplication des sites. La solution a consisté à installer des moulins sur les zones les plus escarpées du territoire. Ces zones escarpées et disposant d’une alimentation hydraulique appropriée, ne sont pas si nombreuses. Elles se concentrent au final dans deux espaces assez restreints, environ 2 km de long chacun. La tension entre quantité d’eau et topographie fournit ainsi une première explication à la concentration des moulins.

L’autre paramètre important à prendre en considération pour l’établissement d’une typologie est lié à la modernisation des moulins qui s’opère à partir de la fin du 18e siècle. Cette transformation s’effectue en parallèle de l’essor de l’oléiculture. Elle supprime matériellement tout une part de l’histoire ancienne de la meunerie grassoise. Cependant, les choix d’agencement qui s’opèrent à l’époque contemporaine éclairent, d’une manière assez diachronique, les enjeux réels de la répartition de l’eau entre toutes ces unités.

En effet, cette modernisation s’effectue, on peut le supposer, alors que les connaissances acquises en matière de gestion de l’eau sont bien maîtrisées par les Grassois. L’installation des roues verticales s’effectue donc dans le cadre d’une bonne évaluation du potentiel énergétique du territoire. Or, cette transformation n’a pas abouti à une rationalisation de l’activité autour de quelques établissements modernisés. Au contraire, la tendance à la multiplication de sites, entamée dès l’Ancien Régime, s’est renforcée avec l’ajout d’unités supplémentaires au sein même des moulins existants. La conséquence de cette démultiplication a conduit au maintien de sites juxtaposés de petite dimension et de ce fait l’impossibilité de mettre en mouvement plus de deux meules par roue verticale.

À partir de cette présentation des grands enjeux du développement des moulins grassois, la typologie observée tend à mettre en lumière « l’option hydraulique » qui a semblé la plus appropriée au moment de la transformation des moulins au 19e siècle. Elle tient compte ainsi de la meilleure exploitation du poids de l’eau pour la mise en mouvement des roues verticales.

La typologie proposée ne s’appuie que sur un faible échantillon : 22 logements de roues. Néanmoins il semble assez révélateur d’un aménagement fondé sur l’expérience acquise au fil des siècles tout en prenant en compte la réalité des moulins grassois au moment de leur transformation.

Enfin, avant de procéder à la présentation de l’arborescence typologique, il reste d’une part à rappeler que toutes les chambres hydrauliques du corpus sont placées parallèlement (sauf les 3 exceptions) au sens de la pente la plus prononcée de leur lieu d’implantation. D’autre part, que le système de transmission par renvoi d’angle placé sous le broyeur domine très largement (38 sites contre 6 avec renvoi d’angle à hauteur du broyeur). Enfin, que l’aménagement des moulins de Grasse repose avant tout sur l’adaptation la plus efficace des spécificités des terrains et non sur la construction d’une infrastructure artificielle de rétention d’eau, telles qu’un barrage, un imposant bief dérivatif ou des conduites forcées…

Typologie des moulins de Grasse

Codification de l’arborescence typologique :

I. Logements de roue parallèles au sens du courant (20 sites – 31 logements de roues)

II. Logements de roue perpendiculaires au sens du courant (16 sites – 21 logements de roues)

A. Connexion roue/meule(s) par renvoi d'angle situé sous le broyeur à meule (environ 38)

B. Connexion roue/meule(s) par renvoi d'angle à hauteur du broyeur à meule (6)

1. Broyeur avec une seule meule (11)

2. Deux broyeurs à une meule (11)

I. Logements de roue parallèle au sens du courant (11)

IA1. Logement de roue parallèle au sens du courant avec renvoi d'angle situé sous un broyeur à une seule meule (8)

IB1. Logement de roue parallèle au sens du courant avec renvoi d'angle situé à hauteur d'un broyeur à une seule meule (2)

IA2. Logement de roue parallèle au sens du courant avec renvoi d'angle situé sous deux broyeurs à une seule meule chacun (0)

IB2. Logement de roue parallèle au sens du courant avec renvoi d'angle situé à hauteur de deux broyeurs à une seule meule chacun (1)

II. Logement de roue perpendiculaire au sens du courant (11)

IIA1. Logement de roue perpendiculaire au sens du courant avec renvoi d'angle situé sous un broyeur à une seule meule (3)

IIB1. Logement de roue perpendiculaire au sens du courant avec renvoi d'angle situé à hauteur d'un broyeur à une seule meule (0)

IIA2. Logement de roue perpendiculaire au sens du courant avec renvoi d'angle situé sous deux broyeurs à une seule meule chacun (8)

IIB2. Logement de roue perpendiculaire au sens du courant avec renvoi d'angle situé à hauteur de deux broyeurs à une seule meule chacun (0)

Interprétation de la classification

Dans le cadre des 22 systèmes autorisant l’observation du lien entre roue hydraulique et broyeur à meule, cette classification typologique montre clairement que lorsque la roue hydraulique est parallèle au sens du courant, cette dernière sert essentiellement à mettre en mouvement une seule meule. La situation est inverse lorsque la roue hydraulique est perpendiculaire au sens de l’eau puisque, dans ce cas, la roue hydraulique verticale est reliée à deux meules.

Le positionnement de la roue perpendiculairement au sens du courant a donc peut-être permis de mettre en mouvement des mécanismes plus importants.

Les roues verticales, à Grasse, sont exclusivement des roues alimentées par-dessus. C'est donc le poids de l’eau qui actionne la roue et non la force du courant. Dans ce cadre, le positionnement perpendiculaire permet-il d’augmenter la quantité d’eau en amont de la roue ? Cette accumulation pourrait, dans cette situation, être augmentée par le virage que l’eau doit emprunter avant d’atteindre la roue. D’autre part, la roue verticale parallèle au sens de l’eau, bien qu’alimentée par-dessus, continue-t-elle secondairement à profiter de la force du courant ?

Cette question amène à se demander si une différence chronologique existe entre ces deux catégories de positionnement de roues. Ainsi, la roue verticale parallèle au sens de l’eau a-t-elle précédé la roue perpendiculaire ?

Cette question suppose que le principe même de la roue verticale par-dessus a mis du temps pour être bien intégré et que l’habitude des roues horizontales avec leur principe mécanique fondé sur la pression de l’eau se soit maintenu à travers les premières roues verticales parallèles au sens du courant.

Cette observation rejoint un autre archaïsme propre aux moulins grassois, celui qui a abouti à la multiplication des roues au sein d’un même établissement plutôt qu’à une concentration de l’infrastructure et une rationalisation par l’installation d’une seule roue capable d’actionner bien plus qu’une paire de meule.

Cependant, en ne prenant en compte que la ressource d’eau disponible, une telle concentration était elle envisageable ? Ou bien, par nature, les sources de Grasse et leur inscription dans un environnement escarpé, donc difficilement aménageable (ou bien strictement urbain, et donc encore plus contraint) étaient-elles suffisantes pour susciter une installation d’envergure ?

Et ceci sans le nécessaire aménagement de l’infrastructure de rétention d’eau en amont (barrages hydrauliques, réservoirs) seule susceptible de convenir pour des établissements de grande capacité ?

Enfin, au-delà de l’abord purement énergétique, et d’un point de vue plus organisationnel, le positionnement de la roue perpendiculairement au sens du courant n’autorise-t-il pas, plus simplement, un agencement intérieur convenant à l’installation de plus grands broyeurs à meule ? En effet, dans cette configuration, la roue verticale est logée contre les murs pignon, ce qui place la roue hydraulique en limite latérale des salles de broyage. Cette position faciliterait-elle ainsi l’organisation de l’espace en permettant de dégager des volumes intérieurs plus grands ou plus pratiques ?

1PICHARD, Georges. « Les moulins communaux en Provence au 17e siècle. Un révélateur de la montée des contraintes d’un monde économique ». In Jeux d’eau, moulins, meuniers et machines hydrauliques, xie-xxe siècle, Presse universitaires de Provence, Aix-en-Provence, 2008, p. 214 2Archives communales de Grasse. Impôts et comptabilité : DD 16, Règlements pour les eaux.3Le terme de paroir appliqué à un moulin désigne traditionnellement un moulin destiné à apprêter les peaux tannées. Le système hydraulique actionne alors un arbre à came. À Grasse, il est difficile de différencier les authentiques paroirs des moulins à tan. Aucun vestige de paroir et plus généralement de moulin non-alimentaire (fouloir, scie, taillanderie, martinet, aiguisoir) n’a été identifié. Pour les paroirs voir AZÉMA, Jean-Pierre Henri. Moulins du cuir et de la peau. Moulins à tan et à chamoiser en France. 17e-20e siècle. Barcelone : éd. Créer, 2004.4GONNET, Paul. Histoire de Grasse et sa région. Roanne/le Coteau : Horvath, 1984.
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Documents figurés

  • [Vue des moulins du quartier Font Laugière vers 1860.] / Photographie de Charles Nègre, vers 1860. Musée d'Art et d'Histoire de Provence, Grasse : 2010 0 6714.

  • [Plan du quartier des moulins.] / Plan à l'encre sur papier, 10/11/1862. Archives départementales des Alpes-Maritimes, Nice : 01 Fi 1544

  • Plan d'ensemble du moulin de la Croix. / Plan à l'encre sur papier, 28/10/1897. Archives départementales des Alpes-Maritimes, Nice : 3 U 2 646

  • [Vue d'ensemble du quartier des moulins.] / Photographie d'Alain Sabatier, années 1990. Archives communales, Grasse : DIA_08_09_19.

  • [Cascade dans le vallon du Rioublanquet vers 1900.] / Photographie de Jean Luce, vers 1900. Archives départementales des Alpes-Maritimes, Nice : 60 Fi 01209.

  • [Le hameau de Magagnosc et ses différents quartier, vers 1900.] / Photographie de Jean Luce, vers 1900. Archives départementales des Alpes-Maritimes, Nice : 60 Fi 12970.

  • Carte générale des cours d'eau, des canaux d'irrigation et des usines, sur les cours d'eau non navigables ni flottables du département des Alpes-Maritimes. / Plan à l'encre sur papier de l'ingénieur en chef Grandchau des Ponts et chaussées, 07/12/1865. Archives départementales des Alpes-Maritimes, Nice : 07 S 0152.

    Archives départementales des Alpes-Maritimes, Nice : 07 S 0152
  • [Cours d'eau longeant le moulin de la cascade vers 1900.] / Photographie de Jean Luce, vers 1900. Archives départementales des Alpes-Maritimes, Nice : 60 Fi 00156.

  • Préparation des graisses. / Gravure anonyme, début du 20e siècle. Musée International de la Parfumerie, Grasse : non coté.

  • Presse à écrou pour comprimer les toiles huilées et exprimer l'huile parfumée, milieu du 19e siècle. / Gravure anonyme, début du 20e siècle. Musée International de la Parfumerie, Grasse : non coté.

  • Préparation des graisses et enfleurage vers 1890 : broyeur à meule actinonné par une machine à vapeur et presses hydrauliques. / Gravure de Victor Rose, graveur, années 1890. Musée International de la Parfumerie, Grasse : non coté.

  • Bain-marie pour macération. / Gravure anonyme, fin du 19e siècle. Musée International de la Parfumerie, Grasse : non coté.

Date d'enquête 2010 ; Date(s) de rédaction 2015
(c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général
Buffa Géraud
Buffa Géraud

Conservateur du Patrimoine au service régional de l'Inventaire général de Provence-Alpes-Côte d'Azur de 2004 à 2017.

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