Commentaire historique
Il faut noter qu'il convient d'écrire Peyresc pour désigner le village avant la Révolution, l'orthographe est ensuite modifiée en Peyresq pour distinguer le lieu du "cy-devant" Fabri de Peiresc.
La première mention de Peyresc se trouve dans une la charte d'Annot du cartulaire de Saint-Victor où il est question du castro Perisco, charte de 1042. Le castrum de Peiresco est ensuite mentionné, vers 1200, dans le cartulaire dit Pergamenorum, où sont recopiés les actes essentiels concernant le comté de Provence, de 921 à 1331, cité par Bouche. Le lieu est à nouveau cité dans les pouillés en 1252, puis dans l'enquête de Leopardo da Foligno en 1332. Il n'est cependant question de l'église, dans ces mêmes pouillés, qu'en 1351 : on trouve l'ecclesia de Petrisco dans les comptes royaux, à nouveau en 1376 dans les comptes de procurations puis dans la liste des taxes synodales du 16e siècle. L'église de Peyresc dépend du diocèse de Glandèves.
D'après Françoise Hildesheimer, qui retrace l'histoire du diocèse de Glandèves, l'abbaye Saint-Dalmas de Pedona (aujourd'hui Borgo San Dalmazzo), au Piémont, avait des prieurés dans le diocèse de Glandèves et notamment à Peyresc. Assertion confirmée par Jean-Claude Poteur qui détaille les possessions de l'abbaye au Moyen Age, et mentionne Saint-Michel de Peyresc. Le prieuré figure également sur la carte des abbayes et prieurés bénédictins au 13e siècle de l'Atlas historique. La première église de Peyresc pourrait donc avoir été édifiée au 13e siècle, sous l'égide des moines de l'abbaye de Pédone, à l'époque de la deuxième période d'expansion de ladite abbaye, peut-être avant 1252 (date la première mention du lieu dans les pouillés). C'est en effet du début du 13e siècle que Luc Thévenon date la partie la plus ancienne de l'édifice.
En 1456, a lieu une nouvelle consécration de l'église. Dans les archives de Fabri de Peiresc (1580-1637), conservées à la bibliothèque Inguimbertine de Carpentras, on trouve copie d'un document manuscrit de 1456, écrit en latin, qui avait été, au début du 17e siècle, trouvé, enveloppé de cire dans un trou de la pierre d'autel du maître-autel de l'église. La transcription de ce document pourrait être celle-ci : "En l'an du Seigneur 1456 et le 16 du mois d'août, la présente église a été faite avec l'autel en l'honneur de saint Pons par le Révérend père frère Pierre Marini, évêque de Glandèves, confesseur du Roi". Si l'on analyse l'architecture de la chapelle, on pourrait déduire que cette nouvelle consécration correspond à de grands travaux : au début du 15e siècle, la voûte a visiblement été refaite. On observe en effet une rupture de l'appareil entre les murs et la voûte, des ouvertures ont été reprises ou murées et les arcs doubleaux de la voûte retombent sur les piliers encastrés mal calibrés par rapport aux sections des arcs. Il se peut que l'édifice ait été au préalable voûtée en bois.
Carte de Cassini, 3e quart 18e siècle [hameau de Peyresc].Le bénéfice de Peyresc passe en 1480, aux mains de l'évêque. Le registre des insinuations de l'évêché de Glandèves porte en effet, à la date du 16 octobre 1480 : "Reconnaissance par les héritiers et donataires du vicaire de Pedona des droits ouverts au profit de Mgr l'évêque de Glandèves par le décès dudit vicaire". En 1744, Thevenon et Navello mentionnent des travaux intérieures (notamment le retable de 1744 sur l'autel majeur). L'église apparaît clairement sur la carte militaire de Bourcet de la Saigne, mais aussi sur la carte de Cassini, dans le 3e quart du 18e siècle.
L'église, tout comme le village, est laissée en déshérence après la Révolution, Féraud le décrit ainsi. Au 19e siècle de nombreux travaux sont entrepris pour la remise en état de l'église. En 1850, le sol de l'église est abaissé. En 1859, le conseil de fabrique envisage la construction d'une sacristie, l'église n'en possédait pas jusque-là, comme cela est clairement lisible sur le cadastre napoléonien. En 1867, le conseil municipal prend une délibération pour la construction de cette sacristie, le prix-fait est passé entre la commune et Jacques Janutol, "tailleur de pierre et maçon" de Beauvezer pour la "confection de gouttières en mélèze pour l'église" et "l'achat et la pose d'un tirant de fer pour l'église". Cette nouvelle sacristie est meublée d'une crédence en noyer grâce au don de l'abbé Boyer. En 1865, le perron à huit degrés est également construit (ou reconstruit), son avant dernière marche portant la date gravée dans la contremarche. En 1878, le conseil de fabrique puis le conseil municipal, décident de changer la grande porte de l'église selon le devis, "la porte sera répartie en trois pièces, dont une fermera l'arc de la porte et les deux autres les deux battants", elle est réalisée en noyer par Rémi Agnel. Est également placée une pierre de taille pour "servir de seuil à la dite porte", enfin il est convenu de "reprendre et crépir le jambage de trois fenêtres [...] et mettre une pierre de taille à l'une d'elles". Selon Louise Navello, "devant la porte d'entrée pointait un énorme rocher qui recouvrait 1/5e de la superficie de la place. Il sera enlevé au 19e siècle".
En 1903-1904, est entreprise la restauration du cimetière. L'adjudication des travaux a lieu le 31 mai 1903 à Joseph Simon, entrepreneur à Thorame-Basse, la réception des travaux, le 29 décembre 1904. Un mur de soutènement en pierres sèches est remplacé pour un mur de clôture en maçonnerie ordinaire. Un mur en maçonnerie ordinaire est construit sur le côté sud du cimetière, il est percé d'une porte d'entrée avec "deux pilastres en pierre de taille". Le mur côté est est exhaussé. Un chemin est tracé au milieu du cimetière (1m80 de large).
En 1920, la réfection de la toiture est réalisée avec le remplacement de lauzes de grès. Les lauzes proviennent de la carrière du Grand Coyer (près de la Colle-Saint-Michel). La toiture est définitivement remplacée par des bardeaux de mélèze en 1983 par l'entreprise René Simon, de Saint-André-les-Alpes. En 1983, l'association Pro-Peyresq décroûte l'intérieur de l'église, et notamment la voûte en cul-de-four de l'abside, couverte alors d'une fresque en ciel étoilé. Les mêmes déposent ensuite l'ancien parquet en mélèze, font couler une chape de béton et la recouvre d'une parquet neuf. Enfin, deux corbeaux sont taillés pour soutenir la tribune au fond de l'église, tribune moderne.
Analyse architecturale
La chapelle de Peyresq se trouve au centre du hameau, en bordure de la grande place. L'édifice, orienté, est construit en moyen appareil, à assises régulières, de moellons équarris de grès ; étant érigé perpendiculairement à la pente, le mur nord Vue générale intérieure vers l'est.est partiellement enterré, des roches naturelles affleurent dans les parties basses du mur sud. La chapelle est actuellement couverte de bardeaux de mélèze sur la chapelle et la sacristie et de lauzes sur l'abside du chevet. Un clocher-peigne à deux baies se dresse à l'aplomb du mur séparant abside et nef.
L'édifice est composé d'une nef unique couverte d'une voûte appareillée en berceau brisé. La nef compte deux travées délimitées par un arc doubleau. L'abside, à l'est de la nef, est voûtée en cul-de-four, un cordon en quart-de-rond court à la base de la voûte. L'entrée se fait par le mur sud, par ailleurs percé de trois baies étroites, en plein cintre, garnies de verrières : ces baies ont été percées ou agrandies après la construction de la chapelle si l'on en croit les désordre de l'appareil, bien visibles à l'intérieur. Le chœur est éclairé par une petite baie axiale percée sans doute plus tardivement que la construction du chevet : deux baies ont été murées de part et d'autre. La partie supérieure du mur ouest est percée d'une baie crucifère.
On accède à la sacristie par une porte percée dans le mur de l'abside, côté sud. Elle a été construite complètement désaxée par rapport à l'église, en mordant sur le cimetière. Elle est voûté d’arêtes. Le cimetière entour l'édifice à l'est et au nord. Le portail se trouve côté ouest. La plus ancienne tombe date de 1893.
Conservateur en chef du patrimoine en poste au Service régional de l'Inventaire à la DRAC de Poitiers de 2002 à 2005, puis au Service de l'Inventaire de la DRAC d'Aix-en-Provence. En poste au Service de l'Inventaire et du patrimoine, région Provence-Alpes-Côte d'azur depuis 2008.