Lors de l'inauguration de la gare de Saint-André, le 15 mai 1892, il n'existe pas encore de buffet de la gare. En revanche, il apparaît sur un plan d'ensemble daté du 20 juillet 1892. Ce bâtiment ne comporte alors qu'un rez-de-chaussée. Plan d'ensemble de la station de Saint-André, 1892.
Le statut juridique du buffet de la gare est celui de tous les buffets de la ligne : l'exploitation est concédée mais pas la propriété (inaliénable car domaine public ferroviaire), les travaux sont en revanche financés par le concessionnaire. Ainsi, le bâtiment été réalisé à la demande de Zéphirin Gibert "par ses soins et à ses frais", pour un montant de 3 500 francs ; il en devient officiellement, et rétroactivement, le concessionnaire par convention avec la Compagnie des chemins de fer du sud de la France en 1896. Le ministère des Travaux publics, propriétaire du terrain acheté via la Compagnie au moment de la construction de la station, autorise cette concession mais sous réserve que : "l'Etat sera propriétaire du bâtiment construit par M Gibert, [et que] la Compagnie en aura la jouissance pendant la durée de la concession et pourra concéder cette jouissance à M Gibert ou à tout autre".
En 1912, Zéphirin Gibert entreprend pour la première fois des travaux importants d'agrandissement : il s'agit d'exhausser le bâtiment d'un niveau pour y créer, à l'étage, un logement personnel. Ce projet est approuvé par décision ministérielle du 28 janvier 1913. Cette surélévation a été réalisée pour un montant de 3 000 francs.
Premier projet d'agrandissement du buffet, 1912. Elévation.
En avril 1914, nouveau projet d'extension : Zéphirin Gibert souhaite cette fois adjoindre à son buffet une salle à manger et une cuisine au rez-de-chaussée par la construction d'une extension en métal et verre. L'armature de métal a été réalisée par M. Bourrillon et la verrerie par M. Philip, tous deux artisans à Saint-André. Il ne reste rien de cette structure. Deuxième projet d'agrandissement du buffet, 1914. Elévation.
Le 1er mars 1919, la totalité de l'immeuble a fait retour à l'Etat en raison de la fin de la convention. Une nouvelle convention est passée le 23 mai 1922, cette fois avec Louis Gibert, fils de Zéphirin Gibert qui devient le nouveau concessionnaire.
Entre 1922 et 1927, Louis Gibert lance et fait réaliser un nouveau projet "d'agrandissement et de transformation". Cet agrandissement est réalisé en deux étapes : l'adjonction de deux corps de bâtiments en retour puis l'exhaussement de la partie centrale. Par lettre du 31 août 1927 il fait savoir que les travaux sont terminés. Les dépenses résultant de ce projet de transformation sont évaluées dans un rapport de l'inspecteur de la voie, à 155 000 francs.
Troisième projet d'agrandissement du buffet, 1927. Plans et élévations.
En 1937, le buffet change de concessionnaire : par convention, Marcel Coquillat, chef de cuisine en est le nouveau bénéficiaire. Il se contente de petits travaux pour la réalisation desquels il suscite l'autorisation de la Compagnie en 1946. Il s'agit de construire un petit local à l'arrière du bâtiment, de rénover différentes baies de la façade, de transformer des fenêtres en portes-fenêtres et de réaliser "une porte d'entrée artistique et marquise en tuiles, genre provençale [sic]".
L'évolution, les transformations, l'agrandissement spectaculaire du buffet de la gare de Saint-André entre 1892 et 1927 sont représentatifs de la période d'expansion économique du village de Saint-André, expansion étroitement liée à l'arrivée de cette nouvelle ligne de chemin de fer.
Le premier bâtiment est sans doute extrêmement simple, à un seul niveau en rez-de-chaussée uniquement destiné à sa fonction commerciale : il comprend alors une "salle de consommation" d'environ 5 mètres par 8 mètres avec une cuisine et une salle à manger, avec à l'arrière du bâtiment, en appentis, une "souillarde" et un office1.
Le premier agrandissement, en 1912, double sa surface : "M Gibert voudrait pouvoir habiter le buffet pour ne pas avoir à faire le trajet de St André à la gare à la mauvaise saison, alors qu'il fait à peine jour au passage de premiers trains"2, ainsi un niveau de logis est ajouté au-dessus du rez-de-chaussée qui maintient sa vocation commerciale. Le bâtiment reste en briques même si le matériau est critiqué pour sa faible capacité d'isolation. On connaît bien l'aspect du nouveau buffet par les plans et élévations des projets architecturaux mais aussi par les cartes postales. [carte postale] Vue du buffet-hôtel depuis le sud avant 1927.
De plan rectangulaire, simple en profondeur, couvert d'un toit à longs pans, l'édifice présente une façade ordonnancée à trois travées, avec porte centrale ; la scansion est faite par les chaînages d'angle et deux jambes formées de la même alternance de briques et pierres blanches en légère saillie sur l'enduit de façade. Les encadrements des baies sont constitués de la même manière.
Le deuxième agrandissement avec l'adjonction de l'annexe en véranda n'est connu que par les plans.
Le troisième, et sans doute plus important, agrandissement est celui réalisé en deux étapes entre 1922 et 1927. Au bâtiment de 1912, sont, dans un premier temps, adjoints deux corps de bâtiments en retour à deux étages carrés, le bâtiment d'origine reste à un étage carré. Un témoignage visuel de cet état est à nouveau apporté par une carte postale. [Carte postale] Vue de l'Hôtel de la Gare depuis le sud-est entre 1922 et 1927.
Peu avant 1927, le bâtiment central, ancien buffet donc est exhaussé d'un niveau, il arrive ainsi au même niveau que les deux avants-corps. Le Buffet-Hôtel de la Gare, devenu Le Grand Hôtel, est alors un bâtiment imposant, de plan en U, avec façade ordonnancée à travées, porte centrale, il présente deux étages carrés sous des toits à longs pans et demi-croupe sur les avants-corps.[Carte postale] Vue générale du Grand Hôtel depuis le sud-est, entre 1927 et 1937.
Une carte postale prise entre 1937 et 1937 donne une idée de son aménagement intérieur et du décor mural. [Carte postale] Le Grand-Hôtel. Son salon et son hall.. Le rez-de-chaussée est organisé pour la réception : dans la partie sud, la grande salle manger, dans le corps central, le hall (aujourd'hui cloisonné) avec l'escalier à deux volées droites menant aux étages, puis, dans le corps de bâtiment nord, un grand salon ; à l'arrière cuisine et office. Au premier étage, les deux volées de l'escalier arrivent chacune sur un palier desservant les chambres ; de chaque palier, au nord et au sud, part un escalier en équerre menant au deuxième étage, occupé également par des chambres.
C'est encore, à peu de transformations près, le bâtiment observable aujourd'hui : la marquise surmontant la porte centrale n'existe plus, les baies du rez-de-chaussée de part et d'autre de la porte centrale ont été arrondies en 1946, les demi-croupes ont été supprimées sans doute à l'occasion d'une réfection de la toiture. Le décor peint qui ornait la façade a également disparu.
Lors de l'enquête en 2006, l'hôtel était fermé, les baies du rez-de-chaussée murées.
Photographe au service régional de l'Inventaire de Provence-Alpes-Côte d'Azur de 1970 à 2006.