• enquête thématique régionale, ponts et aménagements du Rhône en Provence-Alpes-Côte d'Azur
pont romain immergé (pont de bateaux antique)
Œuvre étudiée
Copyright
  • (c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton bassin du Rhône - Arles
  • Hydrographies Grand Rhône (le)
  • Commune Arles
  • Lieu-dit Monplaisir, Trinquetaille
  • Adresse quai Saint-Pierre
  • Cadastre 2008 BT non cadastré ; domaine public
  • Dénominations
    pont
  • Précision dénomination
    pont de bateaux
  • Appellations
    pont de bateaux

SYNTHÈSE HISTORIQUE :

Dès l´Antiquité, voire la Préhistoire, on traversait le Rhône à Arles au moyen de radeaux, puis de barques ou de bateaux à fond plat. A l´époque romaine, la ville est un carrefour routier où se croisent les voies Domitia, venant d´Espagne, Agrippa, remontant jusqu´à Lyon et Aurelia, rejoignant l´Italie, cette dernière franchissant le Grand Rhône (Référence : IA13004134) au cœur de la cité. Arles est aussi ''le point de rencontre de la navigation maritime, de la navigation fluviale et de la navigation sur les marais''. Il faut donc établir un point de franchissement stable, durable et plus propice à la traversée que le bac [sans référence] installé à l´endroit le plus étroit du fleuve (BILLO, p. 11, p. 15 ; MURATI, p. 14 ; BAEUMLE, LAGNY, VACHIN, p. 8-9 et p. 13).

On ne peut avancer une date certaine, mais c´est sans doute à la fin du 1er siècle qu´un pont de bateau est construit. En effet, la ville connaît à l´époque flavienne une nouvelle phase d´extension, un ''second plan d´urbanisme''. Le pont semble lié à ce dernier puisque sa culée sur la rive gauche est dans le prolongement du grand axe de l´amphithéâtre, réalisation majeure de cette période. Le pont se situe un peu à l´extérieur de la ville, à son extrémité nord-est, hors des remparts romains, à l´endroit le plus large et le moins profond du fleuve. C´est alors le pont fixe sur le Rhône le plus méridional (PRADE, p. 104 ; DANIEL, HEIJMANS 1990, p. 20 ; BILLO, p. 15 ; DANIEL, HEIJMANS 1992, p. 97 ; ROUQUETTE, p. 174).

Arles était une des rares villes à posséder un pont de bateaux permanent, ce qui représente une prouesse technologique peu commune dans l´Antiquité. Le pont a d´abord une vocation militaire puis économique comme passage entre les rives d´une cité en pleine expansion et en relation avec l´activité du port fluvio-maritime d´Arles (Site internet Patrimoine ville d´Arles). Il formait sûrement une ''rupture de charge'' entre navigation fluviale et maritime, et ''nécessitait le transfert des marchandises des bateaux de mer sur les bateaux fluviaux'', et vice-versa, ''donnant au quartier de Trinquetaille une activité économique de première importance'' (ROUQUETTE, p. 174).

Le forum des Corporations d´Ostie, le port de Rome, regroupait les bureaux de commerce de tous les grands ports de l´empire romain. Le sol du comptoir (schola) des Arlésiens était orné d´une mosaïque réalisée sous les Sévères, c´est-à-dire entre 193 et 235 ap. J.-C., représentant très probablement le pont de bateaux de la cité provençale avant la division du fleuve en trois bras. ''On distingue de chaque côté du fleuve deux constructions (deux arches) surmontées d´un décor (statues) ainsi que le tablier reposant sur trois bateaux à proue relevée. La passerelle ne se prolonge pas jusqu´aux arches pour laisser place à un pont-levis'' (PRADE, p. 104 ; BAEUMLE, LAGNY, VACHIN, p. 15).

Les fouilles de 2009 ayant révélé des éléments de la fin du 3e et du début du 4e siècle, les maçonneries du pont ont sans doute été refaites à cette époque qui a vu la réfection de bâtiments publics et du réseau de voies d'Arles (BIZOT, Rapport de fouilles, p. 3).

Le pont semble disparaître entre le 8e siècle, époque à laquelle il est encore mentionné par un auteur arabe, et le 10e siècle (BILLO, p. 17 ; BIZOT, plaque sur site).

Des vestiges des culées en pierre du pont ont longtemps été visibles sur chaque rive aux périodes de basses eaux. Ils sont représentés par Rebatu, sur un dessin de 1639 (Bibl. Mazarine, ms. 4418) (PRADE, p. 104).

Entre 1863 et 1866, lors des travaux de mise en œuvre de la grande digue, sur la rive gauche, le départ d´une arche est intégrée aux nouveaux aménagements de la berge (BIZOT, plaque sur site).

En 2009, des fouilles archéologiques de sauvetage sont organisées avant la restauration et le confortement des quais de la rive droite. Elles permettent de dégager les massifs de maçonnerie liés au pont, certainement les assises de la chaussée qui y menait, et de mettre au jour des fondations de bâtiments datant des années 300-320, constituant sans doute un point de contrôle ou de douane. Les vestiges sont ensuite consolidés et intégrés au nouveau quai, de manière à ce qu´ils soient mis en valeur (idem).

Les vestiges du pont romain sont la propriété de l’État et de Voies Navigables de France (V.N.F.). Ils sont classés Monuments historiques depuis 1920 et inscrits au Patrimoine mondial de l'Unesco depuis 1981 (Site internet Patrimoine ville d´Arles).

DESCRIPTION

Le pont était établi dans la partie la plus large et la moins profonde du fleuve, là où le courant était le moins fort, légèrement en aval du pont ferroviaire dit de Lunel ou pont aux Lions (Référence : IA13004061) (DANIEL, HEIJMANS 1990, p. 21 ; MURATI, p. 14).

L´aspect du pont est connu grâce à l´analyse de sa représentation supposée sur la mosaïque d´Ostie, grâce aux fouilles archéologiques menées sur ses vestiges et enfin, grâce aux textes qui l´évoquent, comme celui du poète Ausone au 4e siècle de notre ère (PRADE, p. 104 ; MURATI, p. 14).

L´ouvrage prenait la forme d´un ensemble constitué d´un pont de bateaux encadré par deux éléments d´architecture fixes et permanents. Ces culées étaient composées d´arches voûtées en plein cintre d´un diamètre de 4,50 m, ce qui permet d´évaluer à 7 m la largeur d´une travée. ''D´après les informations obtenues grâce aux prospections subaquatiques, [chaque partie] en pierre aurait été constituée d'au moins cinq travées''. Sa longueur totale devait être de 280 m (DANIEL, HEIJMANS 1990, p. 22 ; BILLO, p. 20 ; DANIEL, HEIJMANS 1992, p. 98).

Le pont de bateaux proprement dit comprenait une dizaine de bateaux fluviaux liés les uns aux autres, ancrés fermement dans le fleuve et ''attachés, pour les quatre premiers, de chaque côté à deux bittes d´amarrage maçonnées. Un platelage de fortes poutres [maintenait] la cohésion des barques et [recevait] le tablier. Aux extrémités, deux ponts-levis [assuraient] la liaison souple avec les culées en pierre afin de permettre le passage des navires'' (BILLO, p. 17 et p. 20 ; BAEUMLE, LAGNY, VACHIN, p. 14).

Le tablier de bois devait être long de 192 m, large de 10,50 m, et sa chaussée d´environ 8,50 m. Au niveau de l´alignement de coques, il était bordé de garde-corps qui contribuaient à le raidir (BILLO, p. 20 ; DANIEL, HEIJMANS 1992, p. 98 ; MURATI, p. 14).

On sait qu´un départ d´arche en grand appareil est englobé dans les quais de la rive gauche, et donc invisible aujourd´hui (BIZOT, Rapport de fouilles, p. 1).

Il subsiste quelques vestiges de l´ouvrage en rive droite sous la forme de quatre massifs de maçonnerie, bien dégagés lors des fouilles de 2009. Un massif est ''resté en place ; deux autres ont subi une forte inclinaison et le quatrième est renversé''. Après étude, ils ont été consolidés et inclus dans les nouveaux aménagements des quais afin de rester bien visibles : ils apparaissent aujourd´hui semi-engagés dans les parements du quai (DANIEL, HEIJMANS 1992, p. 97 ; BIZOT, plaque sur site).

A l’'époque romaine, Arles est une cité prospère, qui, plus proche de la mer qu’'aujourd'’hui, est à la fois un carrefour routier et un port marquant la limite entre navigation fluviale et navigation maritime. La Via Aurelia, axe menant de Gaule en Italie, requérait un point de franchissement plus stable et pérenne que les bacs [sans référence] ou les barques à fond plat. Ainsi, probablement vers la fin du 1er siècle, un pont de bateaux comportant des culées en pierre est édifié. Il a sans doute été refait pour tout ou partie à l’'époque de Constantin, soit au tournant des 3e et 4e siècles. Il existe à Ostie, le port de Rome, sur la place des Corporations, une mosaïque datant de la toute fin du 2e siècle ou du début du 3e, représentant probablement cet ouvrage de façon stylisée. On ignore à quelle date le pont de bateaux romain a disparu, peut-être entre le 8e et le 10e siècle. Des ruines des parties maçonnées ont subsisté pendant des siècles, observables lors des basses eaux du fleuve. Au milieu du 19e siècle, celles de la rive gauche ont été incorporées aux structures de la grande digue. En 2009, des fouilles archéologiques ont permis de mieux dégager et d’étudier les massifs en pierre de la rive droite. Ils ont ensuite été intégrés aux nouveaux quais, et sont ainsi mis en valeur de façon durable. Ces vestiges sont la propriété de l’État et de Voies Navigables de France (V.N.F.). Ils sont classés Monuments historiques depuis 1920 et inscrits, au sein de l’'ensemble des édifices romains arlésiens, au Patrimoine mondial de l'Unesco depuis 1981.

  • Période(s)
    • Principale : 2e moitié 1er siècle , (incertitude)

Le pont romain était situé sur le coude du Grand Rhône, légèrement en aval du beaucoup plus tardif pont ferroviaire dit de Lunel (Référence : IA13004061). Il permettait à la Via Aurelia, qui reliait la Gaule à l'’Italie de Nîmes à Vintimille, de franchir le fleuve en un point large mais peu profond, où le courant est de moindre puissance. A l'’échelle de la ville, il servait à relier le centre administratif et économique d'’Arles en rive gauche, au quartier résidentiel de Trinquetaille en rive droite. Des vestiges sont visibles sur la rive droite, en contrebas du quai Saint-Pierre et du cimetière de Trinquetaille, sous la forme de quatre blocs de maçonnerie semi-engagés dans les nouveaux aménagements des quais. L'existence de ces vestiges, les fouilles archéologiques, les représentations anciennes et les textes historiques permettent une reconstitution plausible de l’'ouvrage. Sur chaque rive, il comportait une partie fixe maçonnée comprenant un nombre inconnu d’'arches qui offraient des culées solides au pont de bateaux au sens strict : des navires étaient solidement ancrés, reliés les uns aux autres et soutenant un platelage de bois autorisant le passage des piétons et véhicules. Des ponts-levis faisaient peut-être la liaison entre les parties maçonnées et les bateaux.

  • Murs
    • pierre maçonnerie
    • bois
  • Typologies
    pont de bateaux ; TYPO2 pont mobile
  • État de conservation
    détruit, vestiges
  • Statut de la propriété
    propriété d'un établissement public
    propriété de l'Etat
  • Intérêt de l'œuvre
    à signaler
  • Protections
    classé MH, 1920/12/01
  • Référence MH

Pont de bateaux franchissant le Grand Rhône à Arles, à hauteur de la rue de l'amphithéâtre (rive gauche) et du cimetière de Trinquetaille (rive droite) (?). Propriété : Etat et V.N.F. ; classé Monument historique (1920) ; classé au Patrimoine mondial de l'Unesco (1981).

Bibliographie

  • Billo, Maurice. Ponts et ouvrages d´art en Arles. Regards sur le patrimoine : histoire des différents franchissements du Rhône, des voies routières, ferrées, fluviales et des canaux en zone urbaine d´Arles. Aix-en-Provence : Editions Edisud, 1991. 159 p. ill.

    p. 15, p. 17 et p. 20
  • DANIEL, Philippe, Heijmans, Marc. Les ponts antiques d'Arles. Dans Groupe archéologique arlésien, 1990, n° 13.

    p. 19-22
  • Daniel, Philippe, Heijmans, Marc. Le pont romain d´Arles. Dans Bulletin archéologique de Provence, 1992, n° 21.

    p. 97-106
  • MURATI, Philippe. Ponts de Provence. Vingt siècles d´ouvrages d´art en Provence-Alpes-Côte d´Azur. Nice : Serre Editeur, 1994

    p. 14
  • Prade, Marcel. Les ponts, monuments historiques. Inventaire, description, histoire des ponts et ponts-aqueducs de France protégés au titre des Monuments historiques. Poitiers : éditions Brissaud, 1986. 432 pages.

    p. 104-105
  • Rouquette, Jean-Maurice (dir.). Arles. Histoire, territoires et cultures. Paris : Imprimerie nationale éditions, 2008.

    p. 174

Documents figurés

  • [Plan de situation des points de franchissements à Arles en 1945] / dans Histoire des bacs pour traverser le Rhône. Recherches historiques et sociologiques. / Henri Cogoluènhe, Thèse de doctorat. Lyon : Facultés catholiques de Lyon, 1980. Livre 2, p. 18.Dessin, 1945.

Date d'enquête 2011 ; Date(s) de rédaction 2012