Dossier collectif IA04002095 | Réalisé par
Mosseron Maxence (Rédacteur)
Mosseron Maxence

Chercheur au Service régional de l'Inventaire de la Région Provence-Alpes-Côte d'Azur (2007-2022).

Cliquez pour effectuer une recherche sur cette personne.
;
  • inventaire topographique
maisons
Copyright
  • (c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

  • Dénominations
    maison
  • Aires d'études
    Pays Asses, Verdon, Vaïre, Var
  • Adresse
    • Commune : Colmars

I. Contexte de l'enquête

Le repérage

Ce dossier concerne les maisons de la commune de Colmars (canton de Castellane, ancien canton d'Allos-Colmars jusqu'en 2015, Communauté de communes Alpes Provence Verdon - Sources de Lumière, ancien Pays Asses, Verdon, Vaïre, Var, département des Alpes-de-Haute-Provence). Le terme "maison" comprend les édifices totalement dévolus à l'habitation, ainsi que ceux comprenant une partie habitation et une partie agricole (étable, remise, fenil…) réunies sous un même toit.

Les conditions de l'enquête

Le repérage des maisons sur la commune de Colmars a été effectué au cours des mois d'été 2010. Le recensement s'est fait à partir du cadastre le plus récent disponible, édition mise à jour pour 1983. Le plan cadastral dit "napoléonien", levé en 1827, a servi de point de repère et de comparaison pour les bâtiments antérieurs à cette date ; l'ensemble des états de section de ce cadastre a été consulté.Toutes les constructions portées sur le cadastre actuel ont été vues, au moins de l'extérieur. Le repérage a été effectué à l'aide d'une grille de description morphologique propre aux maisons et décrivant :

- la ou les fonction(s) visible(s) du bâtiment,

- la présence éventuelle et la caractérisation des espaces libres,

- la mitoyenneté,

- les matériaux principaux et secondaires et leur mise en œuvre,

- la forme du toit et la nature de la couverture et de l'avant-toit,

- le nombre d'étages visibles,

- la description des élévations et des baies,

- les décors extérieurs,

- les aménagements intérieurs (escalier, cheminée, cloisons…),

- les inscriptions historiques : dates portées, inscriptions…

Cette grille de repérage a donné lieu à l'alimentation d'une base de données destinée à faire un traitement statistique et cartographique. Le repérage est toujours confronté à la question de l'état du bâti. Ainsi, ont été repérés les bâtiments ayant subi quelques modifications de détail n'affectant pas leur lecture architecturale. Les bâtiments ruinés mais dont le parti pris architectural d'origine restait lisible ont également été repérés. En revanche, les bâtiments ayant subi des transformations majeures rendant illisibles leurs caractères architecturaux n'ont pas été retenus. Les bâtiments non retenus sont principalement ceux qui ont été très remaniés à une période récente, selon des normes de construction, des matériaux et un vocabulaire architectural très éloignés de ceux de l'architecture locale : élévations entièrement repercées de grandes ouvertures rectangulaires masquant les baies anciennes, utilisation de matériaux récents rendant illisible le parti d'origine, restructuration intérieure totale ou profonde…

II. Caractères morphologiques

Dans la commune de Colmars, les maisons ont été repérées dans le centre-ville intra-muros et ses faubourg (204 maisons), ainsi qu'aux hameaux de Chaumie Haut et Bas, Clignon Haut et Bas (6 maisons). A cela il faut ajouter quelques maisons de villégiature ou villas, qui ont été repérées aux abords du chef-lieu. Le faible nombre de maisons repérées en dehors du bourg tient à la nature très rurale des quatre hameaux communaux ainsi qu'au caractère dénaturé du bâti considéré.

Sur l'ensemble de la commune, 215 maisons ont été repérées et 21 ont été sélectionnées (soit environ 9 % du corpus total). Le parti a été pris de ne considérer dans le dossier collectif que les maisons du centre bourg (intra-muros) dans la mesure où les quatre hameaux communaux (Chaumie Bas et Haut, Clignon Bas et Haut), s'ils comportent quelques maisons, présentent des édifices souvent dénaturés et donc peu repérés, d'une part, d'autre part sont constitués pour l'essentiel de fermes et d'entrepôts agricoles (c'est très remarquable à Chaumie Haut, qui n'a pas de maison à proprement parler). Les maisons de villégiature de la première moitié du 20e siècle, autour du chef-lieu essentiellement, relèvent pour leur part d'une typologie spécifique et sont en nombre restreint. La plupart a également subi des transformations qui n'ont pas rendu toujours pertinent leur repérage.

Le repérage s'est donc déroulé comme suit :

CORPUS

chef-lieu

hameaux

maisons de villégiature

commune de Colmars

repérés

204

6

5

215

sélectionnés

18

1

2

21

% age sélectionné

9 %

17 %

40 %

10 %

Tableau des maisons repérées et sélectionnées

L'analyse se concentrera sur les maisons du bourg enceint, celles des hameaux ne modifiant pas la donne. On abordera ensuite plus brièvement le cas des maisons de villégiature qui répondent à d'autres critères morphologiques et fonctionnels.

Implantation et composition d'ensemble

Les maisons constituent 91 % des bâtiments étudiés à l'intérieur des remparts (9 % d'entrepôts agricoles). Ceux-ci ont très tôt contraint le développement du tissu urbain : on distingue des îlots composés de parcelles adossées au centre de Colmars et des îlots en périphérie où les maisons qui s'appuient sur les fortifications sont alignées en continu. L'emprise au sol du village ainsi que le tracé des axes de communications ont semble-t-il peu évolué depuis le tracé de la première enceinte à la fin du 14e siècle et son évolution dans le premier quart du 16e siècle. De fait, les aménagements projetés par Vauban dès 1690 n'ont pas seulement figé mais en grande partie prolongé un état des lieux (voir le dossier "présentation du village"[REF=IA04001880])1. Ce n'est évidemment pas le cas du bâti en tant que tel qui a été dans son ensemble ravagé par les flammes de l'incendie de 1672. Il a donc fallu tout reconstruire ou presque, en respectant le tissu urbain, et c'est pour l'essentiel de cette époque (la fin du 17e siècle) que date la plupart des habitations colmarsiennes intra-muros. Aussi les dates portées antérieures à l'incendie de 1672 relèvent-elles du réemploi, quand bien même témoigneraient-elles des restes d'un habitat plus ancien.

Date portée (1570) sur l'une des murs de la maison occupant la parcelle 2010 AB 106 Grand Rue.Date portée (1570) sur l'une des murs de la maison occupant la parcelle 2010 AB 106 Grand Rue. Date portée (1588) sur l'une des murs de la maison occupant la parcelle 2010 AB 101 rue Basse.Date portée (1588) sur l'une des murs de la maison occupant la parcelle 2010 AB 101 rue Basse.

L'agglomération est construite en bordure du Verdon et le terrain accuse, depuis la rive, une pente forte jusqu'à une ligne médiane passant par la Porte de France et la caserne Gassendi.

Dans le bourg intra-muros, les maisons forment un habitat densément groupé qui compose des rues dont les directions sont largement parallèles aux courbes de niveaux. La topographie accidentée impose une implantation quelque peu cahoteuse, dans laquelle les rues épousent en outre le dessin du rempart : il ne faut donc pas chercher de ligne droite, mais un tracé général de la voirie en sifflet du sud au nord et d'ouest en est : rue Saint-Pierre/Grand Rue/rue de Goin au sud, rue de l'Enfant Jésus/rue Basse/Grand Rue (qui fait donc un coude articulé par la Place Neuve), rue du Milieu, rue Saint-Joseph au nord enfin, reliant la place de la Salle des Fêtes à celle de la mairie (place Joseph Girieud). Les rues adjacentes coupant ces axes principaux affectent des profils interrompus (voir par exemple la rue de la Calade et celle du Rocher, qui ne se prolongent pas, et qui relient la rue Saint-Pierre, la rue de l'Enfant-Jésus et la rue Sain-Joseph. Voir également la Place Neuve et la place du Presbytère, reliées par la rue de l'Abbé Daumas mais qui ne sont pas alignées). En somme, les axes de circulation viennent buter sur des îlots de bâti aux profils variés confirment une implantation complexe en îlots irréguliers plus ou moins denses. La scission est/ouest apparaît cependant réelle.

- La partie est du village se développe sur un sol plan, plus propice aux superficies importantes. Les îlots massés semblent délimités par des axes de circulation plus ou moins orthogonaux sans y parvenir. Dans cette partie du village, les maisons présentent majoritairement une orientation sud-est/nord-ouest. Elles sont souvent un peu plus hautes que les maisons de la zone est.

- La partie ouest du village a en outre connu des remaniements plus importants et plus récents. La plupart des bâtiments non repérés parce que dénaturés s'y trouvent. Les maisons construites sur la pente présentent presque toutes la même orientation et les élévations ouvrent invariablement au nord-est ou au sud-ouest. Dans cette section du village la déclivité de la pente entraîne l'existence fréquente d'une dénivellation d'un étage entre les élévations antérieure et postérieure. Cet étage de soubassement sert de remise ou d'étable et parfois de commerce ou d'atelier.

La plupart des maisons ont été transformées en immeuble. Ces maisons ont malgré tout été intégrées au repérage. Ce sont des blocs en hauteur, dont l'importance des mitoyennetés témoignent de la densité d'implantation (85 % comportent au moins deux mitoyennetés). A l'inverse, les espaces libres s'avèrent largement minoritaires (une maison sur 5) :

mitoyenneté

nombre de maisons concernées

% age

0

2

1 %

1

29

14 %

2

117

57,5 %

3

56

27,5 %

cour

39

19 %

Mitoyennetés et espaces libres

La densité importante du tissu urbain a réduit la part des espaces libres. Les rues sont étroites et présentent souvent des goulots d'étranglement aux angles des îlots. Quelques places ont été aménagées, notamment dans la partie est du village, afin de structurer l'organisation interne et les déplacements. Au nord, la place du Barri, vaste espace laissé vide, correspond à une ancienne zone militaire non constructible, aujourd'hui déclassée.

96,5% des maisons possèdent une façade antérieure constituée de niveaux d'habitation placés au-dessus d'un niveau agricole (ou plus rarement commercial). Si l'on exclut des statistiques les édifices dont le repérage n'a pas permis d'identifier de façon certaine la typologie précise (hésitation entre maisons de type A1 ou A3, en fonction des évolution apportées au bâti), la proportion des maisons pour lesquelles la fonction logis prend place entre des fonctions agricoles (voire commerciale en partie basse) dépasse les 3/4 (76 %). Cela témoigne de la prééminence des maisons présentant des fonctionnalités en lien avec la vie et l'économie rurales, y compris dans un bourg militaire enceint.

Maison de type logis entre parties commerciale ou agricole en partie basse et agricole en partie haute rue Saint-Joseph (parcelle 2010 AB 167).Maison de type logis entre parties commerciale ou agricole en partie basse et agricole en partie haute rue Saint-Joseph (parcelle 2010 AB 167).

Les maisons de villégiature sont situées aux alentours du village, mais peuvent aussi prendre place aux abords des hameaux, notamment à l'adret (ainsi à Clignon Bas). il s'agit d'une génération de bâti intermédiaire, entre les maisons vernaculaires et l'apparition de la maison de type chalet, plus récente. Il s'agit de maisons isolées, qui possèdent une cour, un jardin voire les deux. La présence d'un jardin arboré est relevée dans les quatre cas, un portail de propriété en pierre de taille de grès a été repéré (référence IA04003093) et la maison transformée en hôtel (Hostellerie Vauban, avant de redevenir maison : référence IA04003092) disposait d'un parc d'un hectare et demi. Ces maisons présentent une typologie propre.

Matériaux et mise en oeuvre

Le gros-oeuvre est réalisé en maçonnerie mixte de moellons de grès peu équarris avec de la pierre calcaire en complément, montés au mortier de chaux et de sable. Il s'agit d'une mise en oeuvre traditionnelle sur cette portion du territoire. La pierre de taille n'est employée que pour les chaînes d'angle et certains encadrements d'ouvertures. On a la plupart du temps affaire ici à un calcaire marneux de couleur grisâtre et bouchardé. Le bois, de production locale, est utilisé pour les charpentes et les planchers. Il est également fréquemment employé pour servir de noyau aux escaliers en vis. Enfin, la couverture des toits en mélèze était systématique jusqu'aux années 1880 (voir référence IA04001862). Le tournant du 20e siècle marque la disparition du mélèze au profit de la tôle, la plupart du temps plate ou aplatie, qui représente encore 74 % des matériaux protégeant les toits intra-muros. Récemment, le bac acier est venu concurrencer la tôle, mais avec un peu plus de 20 % des couvertures colmarsiennes, il reste minoritaire.

Structure, élévation, distribution

Plans

Les maisons de Colmars adoptent dans leur majorité un plan allongé. Elles ne sont pas toujours traversantes et leur profondeur varie d'un édifice à l'autre. Certaines possèdent des façades plus développées révélatrices de superficies plus étendues. Elles sont généralement constituées par la réunion (souvent ancienne, dès le 19e siècle) de parcelles plus étroites.

Niveaux

Contraintes dans leur superficie au sol par la présence du rempart, les maisons intra-muros se développent plutôt en hauteur et possèdent majoritairement 4 à 5 niveaux (près de 9 occurrences sur 10). Les maisons les plus hautes sont souvent situées en contrebas du Rocher, probablement afin de s'affranchir plus aisément des ombres portées du rempart. Les élévations sont le plus souvent irrégulières. A l'inverse, les façades régulières repérées (qui constituent 28 % du corpus) se répartissent de manière homogène dans l'espace urbain, en tout cas ont tendance à réfuter l'idée d'une partition est/ouest du village, par ailleurs avérée sous d'autres aspects organisationnels et structurels (référence IA04001880). Ces façades correspondent surtout à des reprises voire à des maisons construites au 19e siècle.

niveaux

nombre de maisons concernées2

% age

3

20

10 %

4

97

47,5 %

5

83

40,5 %

6

4

2 %

Tableau statistique du nombre de niveaux des maisons intra-muros

Voûtements

Compte-tenu du faible nombre de maisons entièrement visitées, les informations relatives aux voûtements s'avèrent insuffisantes pour permettre des conclusions définitives. Les chiffres du repérage font état de 48 maisons avec voûtement, 23 sans, les 133 autres restant incertaines faute d'avoir pu pénétrer à l'intérieur. Les maisons établies sur la pente possèdent la plupart du temps un étage de soubassement. Ces étages de soubassement ou les rez-de-chaussée de maisons adossées présentent souvent un couvrement voûté, en arêtes ou en plein-cintre, réalisé en blocage de moellon, pour une pièce hébergeant une fonction agricole ou commerciale. Il existe également dans le village quelques exemples de voûtes d'arêtes superposées sur deux niveaux et situées aux étages de logis (2019 AB 141 et 192).

Escaliers

Si l'on considère que la moitié des maisons repérées ne permet pas d'identifier l'emplacement des escaliers de distribution (103 cas sur 204 éléments), et si l'on établit des statistiques sur l'identifiable (soit 101 éléments), on peut avancer que la majorité des escaliers sont situés en front de parcelle, juste derrière la porte d'entrée du logis (72 cas soit 71 %). Les escaliers situés en fond de parcelles constituent 18 % des cas (18 éléments). Ceux situés en milieu de parcelle représentent 9 % des cas (9 éléments). Les escaliers peuvent être droits à forte pente ou tournants. Parmi ces derniers, on distingue les escaliers en vis, souvent pourvus d'un noyau de mélèze, les escaliers rampe-sur-rampe qui sont relativement larges, avec une structure en bois et les escaliers suspendus à jour central souvent accompagnés d'une rampe en fer, qui semblent caractéristiques de l'extrême fin du 19e siècle et du premier quart du 20e siècle. Les escaliers en fond de parcelle, minoritaires mais statistiquement significatifs adoptent généralement une forme tournante, en vis ou rampe-sur-rampe. Enfin, les escaliers en milieu de parcelle distribuent en général un logis en fond de parcelle ou servent d'axe médian à une demeure ayant deux zones de logis, l'une sur rue et l'autre en fond de parcelle.

en front de

parcelle (latéral)

Type I

en front de

parcelle (central)

Type I

en fond de

parcelle (latéral)

Type II

en fond de

parcelle (central)

Type II

en milieu de

parcelle (latéral)

Type III

en milieu de

parcelle (central)

Type III

sans objet

NSP

70

2

14

4

6

3

2

103

Emplacement des escaliers

droit

tournant suspendu à jour central

rampe-sur-rampe

en vis

totalité du repéré identifié

43 %

13 %

22 %

22 %

en front de parcelle (type I)

53 %

13 %

13 %

21 %

en fond de parcelle (type II)

10 %

O %

50 %

40 %

en milieu de parcelle (type III)

11 %

33,5 %

22 %

33,5 %

Forme des escaliers - Pourcentage des occurrences

Du fait de la hauteur des édifices considérés, les escaliers droits présentent des pentes importantes, supérieures à 45 % et ne desservent que les étages de logis, tandis que les combles sont accessibles par des échelles de meunier. Les escaliers tournants sont majoritaires (57 %). Les escaliers en vis (22 %) montent souvent de fond, depuis le rez-de-chaussée ou le rez-de-chaussée surélevé, jusqu'au comble. Ces escaliers sont toujours munis d'un noyau et de marches en mélèze. On ne recense qu'un seul exemple d'escalier ayant conservé son lattis de bois sous l'emmarchement et qui date vraisemblablement du 17e siècle. Cependant, cette forme spécifique ne constitue pas un critère de datation absolu puisque l'annexe de l'hôtel David bâtie dans la seconde moitié du 19e siècle possède un tel type d'escalier. Il s'agit donc peut-être aussi d'une tradition et d'un savoir-faire local utilisé jusqu'à une période récente. Par ailleurs, à l'intérieur même de cette catégorie, les escaliers présentent des formes diverses et notamment des dimensions de marche variables. Ainsi dans la maison occupant la parcelle 2019 AB 192, dont les marches font près d'un mètre de longueur, tandis que celles de la maison occupant la parcelle 2019 AB 98 sont très peu profondes. La présence d'escaliers en vis ne correspond pas une catégorie spécifique de maison. On les retrouve autant dans de grandes demeures, possédant une façade dégagée sur une place, ou même dans des bâtiments publics, telle l'ancienne mairie, que dans des maisons plus modestes, de petite superficie.

Escalier droit, vue inversée (parcelle 2020 AB 87).Escalier droit, vue inversée (parcelle 2020 AB 87). Eexemple d'escalier droit puis tournant (parcelle 2020 AB 193).Eexemple d'escalier droit puis tournant (parcelle 2020 AB 193).

Exemple d'escalier en vis (parcelle 2010 AB 123).Exemple d'escalier en vis (parcelle 2010 AB 123).

Les escaliers rampe-sur-rampe sont présents dans la même proportion que les escaliers en vis (22 %), avec un développement important (de 1,50 à 2,50 m de large) et situés d'abord en fond de parcelle (la moitié des occurrences, voir par exemple sur la parcelle 2019 AB 64). Ils correspondent souvent à des maisons de superficie relativement importante et offrent davantage de confort pour les usagers par rapport aux escaliers droits en en vis. Cela explique en partie la raison pour laquelle ils ont semble-t-il été plébiscités par les propriétaires puissants de Colmars. On doit remarquer une combinaison significative pour ces escaliers, dont le départ est très majoritairement écarté de la rue, et dont l'accès s'opère au terme d'un couloir voûté d'une série d'arêtes de petites dimensions (maisons en 2019 AB 48, 64 158 ou encore 168). Les maisons présentant cette forme de distribution verticale peuvent être regrouper sous le type des "demeures bourgeoises" du bourg.

Les escaliers tournants suspendus à jour central constituent quant à eux des marqueurs de datation efficaces (19e siècle).

Elévations - Typologie des façades

Les façades irrégulières dominent (72 % du corpus). Les maisons à façade régulière se situent essentiellement le long de la Grand Rue, axe principal du village, et sur les places. Ailleurs, quelques maisons partiellement ou totalement reprises au 19e siècle présentent également une façade régulière (en 2019 AB 40, 176, 177...)

Les encadrements de portes témoignent de la supériorité numérique des linteaux (67 %). Les arcs segmentaires couronnent 20 % des portes de logis intra-muros. Ils semblent correspondre à des façades anciennes et peu reprises. Les arcs en plein-cintre restent rares (5 % du corpus).

Encadrement en pierre de taille calcaire gradinée avec plate-bande et clef de voûte saillante et passante et date portée [1864]] (parcelle 2020 AB 624).Encadrement en pierre de taille calcaire gradinée avec plate-bande et clef de voûte saillante et passante et date portée [1864]] (parcelle 2020 AB 624).

Encadrement mouluré en pierre de taille calcaire avec arc segmentaire (parcelle 2020 AB 157).Encadrement mouluré en pierre de taille calcaire avec arc segmentaire (parcelle 2020 AB 157).

On remarque l'emploi systématique de la saillie de rive en avant-toit. Cet état de fait est intrinsèquement lié aux conditions climatiques régnant à Colmars puisque ce dispositif permet de protéger efficacement les murs (en tout cas la partie supérieure) des intempéries. On observe par ailleurs la présence de sept saillies de rive avec corniche en plâtre, dont l'usage reste purement décoratif.

Distribution intérieure

Dans l'ensemble, les maisons de Colmars disposent pour l'essentiel de fonctions agricoles en parties haute et basse. Sur ce plan, elles ne diffèrent pas, même si leur proportion est moindre, des maisons de hameaux malgré le caractère développé du village. En revanche et en toute logique eu égard à la nature de ce petit centre urbain, la fonction commerciale, bien que minoritaire, s'avère aussi très significative et l'artisanat est bien représenté :

Fonctions repérées dans les maisons intra-muros

occurrences

% age

étable

147

72 %

fenil

142

69,6 %

remise

82

40,2 %

atelier

72

35,3 %

commerce/boutique

56

27,5 %

resserre

20

9,8 %

séchoir

8

3,9 %

Fonctions repérés dans les maisons intra-muros. Les % ages dépassent 100 % car les fonctions sont cumulatives.

Les maisons comportent une différenciation des fonctions par étages :

- Le premier étage, qu'il consiste en un étage de soubassement ou en un rez-de-chaussée, abrite une étable ou une remise, parfois un commerce. On ne trouve jamais de combinaison des fonctions agricoles et commerciales dans un même bâtiment, exception faite des maisons constituées par la réunion de plusieurs parcelles plus petites.

Porte d'entrée de logis avec baie commerciale accolée (parcelle 2010 AB 152).Porte d'entrée de logis avec baie commerciale accolée (parcelle 2010 AB 152).

Couloir voûté d'arêtes menant à l'escalier de distribution en fond de parcelle (parcelle 2010 AB 168).Couloir voûté d'arêtes menant à l'escalier de distribution en fond de parcelle (parcelle 2010 AB 168).

- Les étages carrés sont réservés à l'habitation d'une ou plusieurs familles. On notera à ce titre que de nombreuses maisons ont été transformées en immeubles. Ces étages d'habitation contiennent des dispositifs de chauffage (de type cheminée sans jambage), des piles d'éviers et des dispositifs de cuisson (potagers).

Potager dans la pièce principale de la maison occupant la parcelle 2010 AB 126.Potager dans la pièce principale de la maison occupant la parcelle 2010 AB 126.

- Le comble sert de grenier, de fenil et/ou de séchoir.

Ce schéma de distribution reste visible malgré les reprises intervenues au cours du 20e siècle. On doit remarquer l'absence de deux éléments : l'eau (aucun puits n'a été rencontré) et les latrines (probablement supprimées partout depuis l'installation du réseau actuel d'égouts). Il existe à Colmars des interpénétrations de parcelles et des passages entre maisons mitoyennes ont existé par le passé. Il ne reste aujourd'hui que quelques traces de ces distributions sous la forme de portes murées laissant un espace libre en profondeur du mur de refend afin de servir de niche. Cette disposition autrefois fréquente, est également attestée par les témoignages.

Certaines demeures ont conservé de distributions datant du début du 20e siècle :

- Les maisons les plus modestes possèdent une unique pièce à vivre servant aussi de cuisine, avec une cheminée, un potager et un évier. La pièce à vivre est la mieux éclairée, donne souvent sur la rue et se trouve au premier étage carré. Dans le prolongement de cette pièce en profondeur prend place une alcôve qui abritait souvent un lit. L'espace d'habitation peut être complété par une chambre parfois aveugle en fond de parcelle, ou par des chambres plus lumineuses aux étages supérieurs, prenant l'intégralité de la surface au sol.

- D'autres logis, plus confortables, possèdent un cloisonnement plus net entre les espaces communs et les chambres.

Les décors intérieurs conservés sont assez variés. Ils font appel, pour l'essentiel, à la technique de la peinture. A cet égard, on peut mentionner l'escalier en vis de l'ancienne mairie, qui arbore un décor bicolore : le niveau inférieur du mur est peint, jusqu'au tiers, en rouge sombre, tandis que le niveau supérieur reçoit une couleur brun-rose. A l'intérieur des appartements, on peut trouver des décors datant du début du 20e siècle, où dominent les motifs floraux stylisés peints (référence IA04001863) ou des papiers peints (référence IA04001861).

Parmi les maisons possédant une fonction agricole en partie haute, plusieurs possèdent un séchoir spécifique destiné non pas aux séchage des denrées, mais à vocation d'agrément. Localement appelés "soléiadous", ces séchoirs colmarsiens sont largement ouverts, parfois sur la totalité du mur gouttereau. On les trouve le plus souvent sur l'élévation sud-est ou sud-ouest (en fonction de l'orientation de la maison), mais parfois aussi au nord. Une tradition orale considère ces séchoirs comme des pièces d'ensoleillement pour les habitants, même si la présence de nombreux vergers aux alentours de la ville semble corroborer la fonction de séchage. Rien n'interdit cependant que ces espaces aient eu une fonction d'agrément, préservée aujourd'hui. En effet, ces "soléiadous" ont parfois été aménagés en "salons d'été" voire "salons d'hiver" et sont dans ce dernier cas de figure fermés de grandes baies vitrées.

"Soléiadou" réaménagé en salon d'été (maison parcelle 2010 AB 366)."Soléiadou" réaménagé en salon d'été (maison parcelle 2010 AB 366).

On a repéré des balcons, eux aussi majoritairement situés sur les élévations sud des maisons. Ils firent leur apparition au début du 20e siècle, période où la recherche d'ensoleillement incita certains habitants à emménager hors-les-murs. Ces balcons prennent souvent place sur des maisons disposant par ailleurs d'un "soléiadou", ce qui semble indiquer : soit que les "soléiadous" avaient encore un usage agricole à cette période (des témoignages oraux précisent qu'ils étaient également utilisés comme fenils dans le second quart du 20e siècle, ce qui rend d'autant plus délicat la distinction entre séchoir et fenil), soit que les maisons étaient déjà divisées en appartements et que les occupants des étages inférieurs aspiraient à disposer eux aussi d'un accès au soleil.

Décor

La plupart des élévations sont revêtues d'un enduit. Dans leur quasi totalité, ils sont selon toute vraisemblance postérieurs à 1800. Les enduits lisses, majoritaires, semblent les plus anciens. On observe en outre que de tels enduits ont été employés lors de récentes restaurations de façades pour quelques bâtiments anciens, sans qu'il soit possible de déterminer si cette opération a respecté le décor antérieur. Les enduits lisses sont colorés. Ils ont parfois reçu un décor peint qui peut constituer en de fausses chaînes d'angle peintes (ainsi pour la maison occupant la parcelle 2019 AB 192). On relève deux exemples exceptionnels de décor peint : un cadran solaire (toujours en 2019 AB 192) et des colonnes encadrant la façade de la maison sur la parcelle 2019 AB 75.

Façade restaurée (fausse chaîne d'angle harpée peinte en trompe l'oeil, encadrement des fenêtres et cadran solaire, parcelle 2010 AB 192).Façade restaurée (fausse chaîne d'angle harpée peinte en trompe l'oeil, encadrement des fenêtres et cadran solaire, parcelle 2010 AB 192).

Outre les enduits, le décor des façades consiste dans l'emploi de pierre de taille autour des baies et/ou des portes (10 % des habitations repérées). Quelques portes de logis possèdent un décor sculpté en réserve sur le clef de l'arc (à motif de coeur ou d'étoile : ainsi en 2019 AB 61 et 179). On retrouve le même type d'ornements sur certaines maisons de Villars-Colmars datant des 17e-18e siècles : Villars-Colmars était alors un écart de Colmars, avant de prendre son indépendance à la Révolution française (voir référence IA04002084). Cette similitude semble en tout cas constituer un marqueur de datation crédible pour les maisons colmarsiennes concernées.

Les chronogrammes visibles sont rares intra-muros. Outre les dates portées sur les enduits et les encadrements de porte dans le second quart du 19er siècle, on a repéré quelques chronogrammes plus anciens, souvent utilisés en remploi donc non pertinents dans l'optique d'une datation de la maison (ou d'une intervention ultérieure). Ces remplois doivent donc plutôt être considérés comme des éléments de décor (ainsi en 2019 AB 106 et 179). Enfin, il est probable que les enduits lisses masquent aujourd'hui des chronogrammes, comme semble l'indiquer la façade de la maison occupant la parcelle 2019 AB 58 sur laquelle l'enduit dégagé localement laisse apparaître la date "1802" gravée sur la pierre.

III. Typologie

Typologie pour l'ensemble de la commune :

A1 : Maison avec partie agricole, commerciale ou artisanale en partie basse (18 % du corpus total)

(38 repérées ; 8 sélectionnées (21%))

Logis au-dessus ou à côté d'une partie agricole ou commerciale

A2 : Maison avec partie agricole en partie haute (4,7 % du corpus total)

(10 repérées ; 4 sélectionnée (40 %))

Logis en dessous ou à côté d'un fenil

A3 : Maison avec parties agricoles en parties basses et hautes (74 % du corpus total)

(155 repérées ; 15 sélectionnées (9,5 %))

Logis entre les parties agricoles

B : Maison sans partie agricole, commerciale ou artisanale (3,3 % du corpus)

(7 repérées ; 4 sélectionnées (57 %))

Absence de partie agricole

Sans surprise, les maisons présentant une fonction logis entre des parties agricoles tourne autour des trois-quarts de la totalité du corpus repéré (et 100 % pour les maisons de hameaux). En outre, plus d'une maison sur trois est concernée par l'artisanat et/ou le commerce (34 %, si l'on considère qu'une maison de type A3 peut aussi contenir ce type d'activités), une proportion conforme aux activités d'un gros bourg (les maisons de hameaux en sont dépourvues). Il convient toutefois de considérer ce chiffre avec circonspection, dans la mesure où le tourisme en développement depuis la fin des années 1990 a entraîné des aménagements spécifiques dédiés à l'accueil des visiteurs. Les maisons ne comptant qu'une partie agricole en partie haute voire dépourvues de toute activité agricole tiennent une place marginale (moins de 10 % de l'ensemble du corpus en cumulé). Celles comportant à la fois une étable et un fenil (respectivement 153 et 148 cas) représentent 73 et 70,5 % de l'ensemble, soit des pourcentages similaires aux maisons de type A3, la fonction de séchoir étant anecdotique selon les données du repérage (moins de 4 %).

Les maisons de villégiature

Les maisons de villégiature présentent des profils similaires entre elles. Elles sont implantées sur un terrain en pente à l'exception de la maison occupant la parcelle 2019 AB 437 qui a été construite sur un terrain aplani pour l'occasion, et présentent des caractéristiques d'ensemble similaires dans leur mise en oeuvre et morphologie globale. Malgré quelques différences, l'homogénéité domine largement. On notera que la maison devenue Hostellerie Vauban a fait l'objet de plusieurs adjonctions lorsqu'elle a changé de destination pour recevoir des voyageurs. C'est l'édifice qui témoigne du décor le plus soigné et raffiné, notamment grâce à sa frise de céramique vernissée sur la façade principale (référence IA04003092).

parcelle

niveaux

façade régulière

nombre de travées

décor

encadrement

pierre de taille/

mouluré

balcon/terrasse

forme du toit

jardin

maison sélectionnée

2019 A 166

4

oui

3

oui

non

oui

en pavillon

oui

non

2019 AB 226

4

oui

3

oui

oui

oui

en pavillon

oui

oui

2019 AB 234

3

oui

3

oui

oui

oui

en pavillon

oui

non

2019 AB 437

4

oui

3

oui

non

oui

longs pans

oui

oui

2019 B 239

3

oui

2

oui

oui

oui

longs pans +

demi-croupe

oui

non

Caractéristiques principales des maisons de villégiature colmarsiennes.

1Consulter notamment Olivier Joseph, "L'incendie de Colmars 8 août 1672 et autres incendies dans le Haut Verdon (XVIIe et XVIIIe siècles). Histoire et récit d'une catastrophe", Les Montagnes Imaginées, 2007.2Voir le dossier Village de Colmars (référence IA04001880) pour une analyse plus fine de la répartition par "secteur" dans le bourg.

Les maisons de Colmars ne sont pas antérieures à l'incendie d'août 1672 (voir notamment l'analyse historique menée par Olivier Joseph). Certaines dates portées plus anciennes inscrites sur quelques façades intra muros (1570, 1588) témoignent de remplois, car le village entièrement détruit fut reconstruit à partir de cette date et au 18e siècle pour l'essentiel, même si quelques maisons ont été édifiées au 19e voire au 20e siècle, parfois à partir d'un bâti préexistant.

A partir de la seconde moitié du 19e siècle les habitations se sont implantées hors-les-murs, essentiellement en face des remparts, puis l'essor du tourisme au début du 20e siècle a entraîné la construction de maisons de villégiature aux alentours du village. Les résidences secondaires récentes n'ont pas été prises en compte.

  • Période(s)
    • Principale : 2e moitié 17e siècle
    • Principale : 18e siècle
    • Principale : 19e siècle
    • Principale : 20e siècle
  • Typologies
    A1 : maison avec partie agricole, artisanale ou commerciale en partie basse ; A2 : maison avec partie agricole en partie haute ; A3a : maison avec parties agricoles en parties basses et hautes ; B : maison sans partie agricole, artisanale ou commerciale
  • Toits
  • Décompte des œuvres
    • nombre des immeubles au dernier recensement de l'INSEE 786
    • repérées 215
    • étudiées 21

Bibliographie

  • ISNARD, Marie Zéphirin. Récit de l'incendie de Colmars en l'évêché de Senez (8 aoûts 1672). Dans : Bulletin de la société scientifique et littéraire des Basses-Alpes, tome V, 1891-1892.

  • JOSEPH Olivier. L'incendie de Colmars 8 août 1672 et autres incendies dans le Haut Verdon (XVIIe et XVIIIe siècles). Histoire et récit d'une catastrophe. Olivier Joseph : Les Montagnes Imaginées, 2007, 46 p.

Date d'enquête 2010 ; Date(s) de rédaction 2011
(c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général
Mosseron Maxence
Mosseron Maxence

Chercheur au Service régional de l'Inventaire de la Région Provence-Alpes-Côte d'Azur (2007-2022).

Cliquez pour effectuer une recherche sur cette personne.