Commentaire historique
L'origine de ce bâtiment remonte à la seconde moitié du 16e siècle ou à la première moitié du 17e siècle, comme en témoigne l'encadrement chanfreiné de la fenêtre du second niveau de la façade ouest, qui semble être resté en place. Il s'agissait alors d'une maison d'habitation dont l'accès à l'étage se faisait vraisemblablement par un escalier extérieur adossé parallèlement à la façade ouest. La présence d'une porte murée dans le mur oriental de l'étable témoigne d'une ancienne communication intérieure avec la maison voisine à l'est.
Dans le cadastre de 1699, il semble que ce bâtiment soit associé à une autre maison mitoyenne au nord, aujourd'hui disparue. L'ensemble, désigné comme une « maison d'habitation et régailles », appartient alors à Anne Sarrobert, veuve de Pierre Guillaume, qui possède également une grange accompagnée d'une aire à battre et de terres agricoles au quartier du Collet.
L'association avec un bâtiment mitoyen au nord est attestée par le plan cadastral de 1839 : sur ce document, l'emplacement de l'actuel entrepôt agricole correspond à la partie sud d'une parcelle plus grande mentionnée comme une « écurie » de 44 m² d'emprise au sol. Toutefois, il faut noter que l'état des sections cadastrales de 1839 conserve une première mention « maison » qui a été biffée. Ce phénomène illustre un état sanitaire médiocre de l'habitat qui a pu amener les agents fiscaux à hésiter sur la fonction première du bâti. C'est donc dès le deuxième quart du 19e siècle que cette construction est dédiée à des fonctions agricoles. La parcelle appartient alors à Frédéric Bégou, qui possède également une grande maison située de l'autre côté de la rue (parcelle 1839 F1 242) ainsi que quelques terrains aux quartiers de la Passière, la Rebière, Longeagne, le Verger, la Fayée, etc.
Plan de masse d'après le plan cadastral de 1839, section F1. Echelle d'origine 1/1000e.
Propriétés de Frédéric Bégou en 1839, d'après le plan cadastral de 1839, section F1. Echelle d'origine 1/1000e.
En 1876, le bâtiment passe à Jean-Joseph Richaud, demeurant aux Isnières (Saint-André-de-Rosans) puis en 1884 il est partagé entre ce dernier (qui en conserve les 2/3) et Victorin Richaud (1/3). En 1901, il semble qu'il soit échangé contre une maison toute proche (1839 F1 236) avec Jacques-Thomas Vincent, fils.
La destruction de la partie nord, sans doute réalisée dès le début du 20e siècle, ne paraît pas avoir eu d'incidence sur le bâtiment ici étudié. C'est de cette époque que date vraisemblablement la transformation de l'ancienne porte du logis (second niveau de la façade ouest) en porte fenière – ainsi que la reprise du couvrement de la porte de l'étable. Le couvrement en voûtains de briques de l'étable – qui remplace un ancien plancher un solives – est également issu des travaux réalisés à cette période.
Propriétés de Jacques-Thomas Vincent en 1901, d'après le plan cadastral de 1839, section F1. Echelle d'origine 1/1000e.
Plan de masse et de situation d'après le cadastre de 2021, section 000F. Echelle d'origine 1/500e.
Description architecturale
Cet entrepôt agricole est situé dans la partie occidentale du bourg intra muros, face à la tour semi-circulaire de l'enceinte médiévale. Installé à l'angle d'un îlot, il est mitoyen sur son pignon sud et sur son côté ouest. Adossé perpendiculairement au sens de la pente, il comporte un rez-de-chaussée et un étage carré.
Elévation ouest.
Elévation ouest.
Plans schématiques du bâtiment. De gauche à droite : rez-de-chaussée, étage, toit.
Fonctions et aménagements intérieurs
Le rez-de-chaussée, accessible de plain-pied côté ouest par une porte piétonne large, est occupé par une étable. Une mangeoire sur banquette maçonnée est adossée au mur est, accompagnée d'un râtelier en menuiserie. Cette pièce est couverte par des voûtains en briques creuses sur poutrelles métalliques, avec des trappes d'abat-foin aménagées au-dessus de la mangeoire. Les murs conservent un enduit rustique.
L'étage carré est réservé au fenil. Il est desservi depuis l'extérieur par une porte fenière perchée, à laquelle on accède avec une échelle, et il est éclairé par l'ancienne fenêtre du logis originel. Depuis l'intérieur, l'accès se fait par une échelle de meunier installée dans une trappe aménagée dans le couvrement en voûtains de l'étable.
Rez-de-chaussée, étable. Mur est, mangeoire sur banquette et trappe d'abat-foin aménagée dans un voûtain.
Rez-de-chaussée, étable. Couvrement en voûtains.
Rez-de-chaussée, étable. Angle nord-ouest, trappe d'accès au fenil et échelle.
Structure et matériaux
Le bâtiment est construit en maçonnerie de moellons calcaires et de grès, avec des chaînes d'angles en moellons et gros moellons équarris. Les élévations conservent un enduit rustique.
Au premier niveau de la façade ouest, l'encadrement de la porte de l'étable possède des piédroits en pierre de taille de grès à arêtes vives et un linteau droit en bois. Au second niveau, la petite fenêtre conserve un encadrement chanfreiné en pierre de taille de grès layée, avec congés en biais, linteau monolithe et appui saillant mouluré. Quant à la porte fenière de ce même second niveau, ses piédroits en moellons équarris reçoivent une finition au mortier de gypse et son linteau droit est en bois.
Elévation ouest, second niveau. Petite fenêtre a appui saillant mouluré.
Elévation ouest, second niveau. Baie fenière, détail de l'encadrement.
Elévation ouest, premier niveau. Anneau en fer.
La charpente est à pannes et le toit à un pan est couvert en tuiles creuses posées sur des chevrons taillés en quartons. L'avant-toit est constitué d'un rang de génoise alors que la saillie de rive du pignon nord est simplement réalisée par le débord des tuiles de couverture, renforcé par un bourrelet de mortier.
Charpente à pannes et couverture en tuiles creuses sur chevrons taillés en quartons.
Elévation ouest, avant-toit constitué d'un rang de génoise.