HISTORIQUE
Jusqu´au milieu du 19e siècle, il n´y a pas de pont fixe pour traverser le Grand Rhône (Référence : IA13004134) à Arles, mais seulement un pont de bateaux (Référence : IA13004098). Dès les années 1830 des projets sont présentés pour palier cette absence : en 1834, il s´agit d´un pont en fonte et fer à trois travées de 47 m de portée, celle du milieu pouvant s´ouvrir pour laisser le passage aux embarcations (MURATI, p. 87). En 1841, Marc Seguin fait une proposition de pont suspendu au décor élégant : sur la pile centrale doivent être installés deux piliers de soutien en forme d´obélisques, et sur les piles de rive, séparées des culées par une travée marinière levante, sont prévus des lions de bronze en couronnement. Mais sa solution d´une seule pile médiane, aux enrochements volumineux, aurait nui à la navigation et l´idée n´est pas retenue (idem, p. 83). En juillet 1843, un concours pour la construction d'un pont suspendu sur le Grand Rhône est lancé par le maire d´Arles. Six études sont proposées par Monsieur Carpediem, Monsieur le Vicomte de Barrère du Molard, Messieurs Oppermann et Joret, Pierre-Emile Martin, un anonyme et l'ingénieur Émile Bernard. C´est le plan de ce dernier qui est retenu : son parti est celui d´un pont fixe métallique tubulaire avec deux piles en rivière au lieu d'une centrale initialement évoquée. Ordonnée par décret en 1866, l'enquête publique a lieu du 13 au 22 juin 1867. Les travaux débutent en août 1867. Les fondations des piles, établies au moyen de l´air comprimé dans un caisson en tôle, sont terminées par l'entreprise Castor en janvier 1868, pour une dépense évaluée à 1.164.384,72 F. L´État doit contribuer pour moitié aux frais. Pendant la construction, en 1866, le pont de bateaux (Référence : IA13004098) est déplacé de 150 m environ en aval de son emplacement initial, ce dernier étant occupé par le chantier du nouveau pont (AD Bouches-du-Rhône : 2S 8/1 ; BILLO, p. 41). Avec la guerre de 1870, les travaux sont interrompus pour ne reprendre qu'en 1873. L'entreprise Mison emporte le marché le 29 décembre 1873. La charpente métallique (d´un poids de 610 tonnes) est mise en œuvre par les frères Imbert de Saint-Chamond pour un montant de 500.000 F. L´inauguration donne lieu à des festivités les 24, 25 et 26 avril 1875 (BILLO, p. 41-42). Le peintre Vincent Van Gogh immortalise l´ouvrage dans deux tableaux datant de 1888 : ''Le pont de Trinquetaille'', huile sur toile, juillet 1888, 65 x 81 cm, lieu inconnu, collection particulière ; ''Le pont de Trinquetaille'', huile sur toile, octobre 1888, 72,5 x 91,5 cm, New York, collection particulière. Dès novembre 1895, la situation du pont est jugée précaire et la circulation limitée. Le 25 novembre 1905, le Conseil Général des Bouches-du-Rhône décide de consolider l'ouvrage et d'élargir la voie routière par suppression des trottoirs intérieurs et l´installation de trottoirs extérieurs en encorbellement. En 1906, huit câbles de suspension sont mis en place pour renforcer l'ouvrage. Ils sont portés par des portiques métalliques établis sur les culées, aux entrées du pont, et au-dessus des piles. Une passerelle en encorbellement est montée de chaque côté du tablier (BILLO, p. 42). Au début de la Seconde Guerre mondiale, on pense à remplacer le pont qui est désormais inadapté au trafic croissant. Un projet de reconstruction est présenté le 29 novembre 1940. Le 7 juin 1941, on envisage de substituer un pont en maçonnerie au pont fixe métallique (AD Rhône : 3959W 1793, Sous-chemise Reconstruction du pont ; BILLO, p. 51). Le pont est entièrement détruit par l'aviation alliée le 15 août 1944, après de nombreuses tentatives de destruction par les Allemands ou la Résistance locale. On réinstalle alors un système de barques avec des bateliers. Puis un remorqueur à aubes de la Compagnie HPLM est mis en service. Enfin c´est le ''Jeanne d´Arc'', un vapeur, qui assure les transbordements entre les deux rives du 27 août 1944 au 21 juillet 1945, date de l´inauguration du pont provisoire [sans référence] (ibidem). Le 6 août 1946, le marché de déblaiement est emporté par la Société de Constructions des Batignoles, pour un montant de 1.600.000 F. Il s´agit de procéder au déblaiement des parties métalliques hors de l´eau, au découpage et à la mise en dépôt sur les quais des restes de l´ouvrage. Ces travaux durent jusqu´en 1954 au moins, en fonction des accords de crédit et en raison de la faillite de certains adjudicataires de cette opération (AD Rhône : 3959W 1793, Déblaiement). Le pont est définitivement remplacé par le nouveau pont de Trinquetaille (Référence : IA13004070) inauguré en février 1951.
DESCRIPTION
Le pont comportait un tablier métallique tubulaire, soutenu par des culées et deux piles oblongues en maçonnerie. La distance entre les culées était de 160 m. Les trois travées avaient, y compris l´épaisseur des piles, une ouverture de 50 m pour chacune des travées de rive et de 60 m pour la travée centrale.Le tablier était formé d´un plancher supporté par des poutres en fer ; il avait 7 m de largeur dont 5 m pour la voie charretière et 1 m pour chaque trottoir. Le dessous du tablier contre les culées était à 9,40 m au-dessus de l´étiage, soit à 5 m au-dessus des plus hautes eaux navigables et 2,84 m au-dessus de la plus grande hauteur à laquelle le fleuve était censé pouvoir s´élever sans rupture des digues. Pour éviter tout déplacement longitudinal du tablier, il était interdit aux chevaux de trotter sur la chaussée. Les poutres de la charpente en fer avaient 6 m de hauteur. Les piles faisaient 5 m de largeur et 14,50 m de longueur ; elles étaient terminées par un avant et un arrière bec cylindriques. Sur la rive gauche, une rampe maçonnée prolongeait le pont dans son axe, aboutissant à la rue du Pont. De ce côté, l´accès à l´ouvrage se faisait aussi par une rampe latérale, du côté aval, le mettant en communication avec le quai et donnant passage éventuellement aux troupeaux de bêtes ovines en transhumance ; et du côté amont existait un large escalier latéral, à plusieurs volées droites. Sous la rampe de la rue du Pont était pratiqué un passage voûté maintenant la circulation libre sur le quai.Sur la rive droite, il y avait la même rampe d´accès enjambant également le quai. Là, c´étaient deux escaliers latéraux, côté aval et côté amont, qui joignaient le pont au quai (AD Bouches-du-Rhône : 2S 8/1).