Dossier collectif IA05000714 | Réalisé par ; ;
Fray François
Fray François

Conservateur du Patrimoine au service régional de l'Inventaire de Provence-Alpes-Côte d'Azur de 1968 à 2004.

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  • inventaire topographique
fermes
Copyright
  • (c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

  • Dénominations
    ferme
  • Aires d'études
    Briançon
  • Adresse
    • Commune : Névache

INTRODUCTION GÉNÉRALE

La vallée de Névache s'étire depuis Briançon jusqu'à la Maurienne, longeant la frontière italienne sur 50 km. Cette vallée glaciaire orientée au départ Nord-Sud, se tourne vers l'ouest, au-delà de l'étranglement de Plampinet qui sépare la partie méridionale rattachée à Briançon et à Montgenèvre, de la partie septentrionale, plus large et verdoyante de Névache.La vallée est arrosée par la Clarée qui, grossie des torrents dévalant des sommets voisins, progresse selon les paliers que lui a tracés le glacier disparu ; le verrou le plus important domine le village de Névache et détermine au-delà la haute vallée d'alpages, essaimée de hameaux d'habitat temporaire.

La commune de Névache, d'une superficie de 22000 hectares, est la plus grande du département. Les villages se situent entre 1480 et 2000 m d'altitude. Notre étude concerne :

1) l'habitat temporaire, à savoir les 22 hameaux d'alpage de la commune,

2) l'habitat permanent, c'est-à-dire les villages de Plampinet et de Névache, celui-ci comprenant trois hameaux : - Ville-Haute - le Château

- Ville-Basse - le Cros

- Sallé

Les deux formes d'habitat correspondent à deux architectures et à deux fonctions spécifiques. C'est pourquoi il nous a paru intéressant d'en faire deux études distinctes comprenant chacune :

- une analyse générale de la construction

- un inventaire de tous les villages, illustré de dossiers d'édifice

- un dossier "Ensemble" déterminant le profil général du village à partir de l'étude systématique des orientations, ouvertures, balcons... notés pour chaque unité ; leur examen a permis la compréhension de certains principes de la construction névachaise. L'étude a été centrée, dans les villages, sur les équipements collectifs (fours, forges, moulins) qui sont les ultimes témoins, souvent fort dégradés, de la vie communautaire traditionnelle. Les changements du mode de vie que l'on observe depuis la dernière guerre entraînent leur abandon et leur rapide détérioration. Il a donc paru important de constituer un dossier sur ces édifices et ce qui reste de leur matériel.

ANALYSE ARCHITECTURALE

A) Les maisons

Situation

L'habitat permanent occupe la cuvette centrale de la vallée de la Clarée, en aval du verrou de Lacou, selon le schéma des hameaux dispersés, caractéristiques des Alpes du Nord et des Hautes Terres des Alpes du Sud (cf. Bouquier p. 67).

Le hameau de Plampinet fut longtemps une paroisse à part. Mais Névache se compose du hameau de Sallé, du groupe de maisons de Fortville, des hameaux du Cros et de Ville-Basse, du groupe du "Château" et de Ville-Haute.

L'habitat est dispersé en hameaux, mais il n'y a pas émiettement de l'habitat. Il semble que les habitants pris entre deux dangers, le feu et la neige, aient choisi une solution moyenne : trop groupés, ils risquaient la destruction totale du village par l'incendie; trop dispersés, ils risquaient de ne pouvoir triompher des difficultés de l'hiver. Les groupements ne relèvent ni de la géométrie, ni du désordre absolu.

Les hameaux d'habitat permanent se caractérisent par la présence d'équipements publics : moulin, forge, four à pain, église, fontaines, et de dépendances privées telles que bûchères, les establons, les ruchiers.

A l'exception de Plampinet, un axe principal de circulation dessert des chemins menant aux maisons, sans aucun plan, ni voirie. Ces chemins sont appelés "deviors" à Ville-Haute.

Plampinet et Ville-Haute sont les deux hameaux les plus groupés et les plus anciens, les autres ont été construits le long de la voie de passage. La maison d'habitat permanent de la commune de Névache est très grande pour de multiples raisons : vie repliée à l'intérieur pendant l'hiver, volume de grange important, maisons doubles. Le plus souvent la maison est isolée, mais on trouve des groupes de deux ou trois unités contigües dans toutes les agglomérations ; il n'y a pas d'ilots de type urbain comme on en trouve dans la basse vallée (les Alberts, le Fontenil).

L'orientation est bien sûr tournée vers le soleil, quelle que soit celle des toitures ; on a par conséquent des façades antérieures, celles qui présentent le maximum de baies, dont la porte d'entrée, tournées vers le sud, dans la mesure du possible. Parfois la nature du terrain, de la voirie ou des constructions pré-existantes a imposé une orientation différente.

Matériaux et leur mise en œuvre

L'habitat permanent se caractérise par un emploi de la maçonnerie plus important que dans l'habitat temporaire. Cette remarque est générale dans la vallée. Pourtant la répartition des matériaux se fait selon les mêmes critères : la pierre est réservée au corps de logis-étable, le bois à la grange et à tout le couronnement de l'édifice ; la répartition des matériaux suit donc celle des fonctions.

- La maçonnerie

Le noyau logis-étable qui sert de soubassement à l'ensemble est construit en moellons de tuf noyés dans un mortier épais de chaux et de sable ; d'autres matériaux disparates peuvent s'y trouver, pierres roulées par le torrent ou de provenances diverses, proches vraisemblablement.

Tous les rez-de-chaussée sont voûtés, d'arêtes ou en berceau, à l'aide de coffrages parfois récupérables et ayant servi pour plusieurs maisons ; une étude très approfondie des dimensions permettrait de vérifier ce renseignement. En général la forme des voûtes n'est pas définie par la court, ou les chambres lorsque le premier étage est voûté : on y trouve indifféremment un berceau ou une travée d'arêtes ; par contre, la voûte d'arêtes est réservée aux cuisines et aux pièces d'habitation en général, car elle permet de placer des meubles à peu près partout et aux étables où une et parfois deux colonnes en pierre de taille portent les retombées centrales. Ces colonnes, fréquentes dans tout le Briançonnais, sont ici généralement en grès ; on les taillait au printemps près des Alberts (Montgenèvre) ; elles se composent d'une pierre pour le fût (Diam. 0, 40 m ; H. 1, 20 m) et d'une pour le chapiteau (environ 0, 50 m de section) ; parfois une troisième pierre sert de base, mais dans presque tous les cas elle est enterrée.

Les voûtes ont une épaisseur variant entre 20 et 30 cm. Elles retombent soit sur des murs, talutés à l'extérieur, soit sur des piles d'angles (voûtes d'arêtes) adossées aux murs qui ont pu être montés, en remplissage, après achèvement des voûtes.

- Le bois

Les parties construites en bois utilisent toujours la technique de l'empilage de rondins assemblés aux angles à mi-bois, ou de demi-rondins ou de planches glissés dans les rainures, de poteaux corniers et de travées. On trouve ainsi construits soit un étage de grange entier, soit seulement des pignons ; les uns ou les autres sont parfois en encorbellement.

La technique des empilages est appelée ici le chapila.

Quelques très rares maisons ont des cloisons de pignons en pans-de-bois avec un remplissage (on doit se référer à la notice de Val-des-Prés) : Ville-Basse, maisons 2084, 2086, 2114, 2115 - Plampinet, maisons 1627, 1679. Ces cloisons voisinent avec des parties en empilages et peuvent être prises pour des réfections.

La distinction est donc très nette entre l'édifice de la grange et le soubassement maçonnée du logis. Cependant la limite entre les deux est fort variable, en raison de la multiplicité des formes due à de nombreuses réfections et reconstructions. Si les édifices où le bois a une place très importante (étage et comble complets) sont relativement rares, il ne semble pas que l'on doive imputer cette rareté aux seuls risques d'incendie. En effet on a pu observer des reconstructions tardives datées d'étages entiers et de combles sur des édifices anciens :

Ville-Haute. Maison 2803. Façade nord. Le poteau central du pignon porte l'inscription : IP / 1810.Ville-Haute. Maison 2803. Façade nord. Le poteau central du pignon porte l'inscription : IP / 1810.

- à Ville-Haute, maison 2803 : - linteau de porte de la court : 1743

- poteau de pignon en chapila : 1810

- à Ville-Basse, maison 2008 : - cadran solaire peint : 1785

- poteau de pignon en chapila : 1842

- au Cros, maison 1879 : - pierre gravée datée : 1830

- poteaux du pignon est : 1837-1854.

D'autres maisons ont des granges datées de la seconde moitié du XIXe siècle ; mais il est possible que le corps de logis remonte à une époque plus ancienne (fin XVIIIe ou début XIXe siècle).

En conséquence, il est délicat de se prononcer sur l'évolution de l'emploi des techniques de l'empilage de madriers, du moins jusqu'à la fin du XIXe siècle. On verra plus loin qu'il est peut-être préférable d'évoquer une typologie.

Parti général

D'une manière générale, les maisons ont un plan massif, rectangulaire, qui groupe l'espace d'habitation et l'étable, avec une entrée commune, la court ; les dimensions moyennes varient de 8, 30 m x 11, 70 m à 13, 50 x 21, 70 m.

Cette variation de la longueur des maisons, du simple au double, nous conduit à évoquer les différentes sortes de plans que l'on a pu observer. Une typologie a été établie pour la commune de Val-des-Prés ; il sera pratique de s'y référer : on a pu reconnaître à Névache trois des types ainsi définis :

- type A Ville-Basse, maison 2084

Plampinet, maison 1596.

- type B Ville-Haute, maisons 2756, 2856, 2876

Ville-Basse, maison 2085

Le Cros, maison 1910.

- maisons doubles : Ville-Haute, maisons 2764-2765, 2902-2908

Ville-Basse, maisons 2096-2097, 2100.

On doit ajouter des particularités importantes qui enrichissent cette typologie de dispositifs inexistants dans la moyenne et la basse vallée.

- Arcs précédant la façade antérieure

On a observé ce dispositif sur quelques maisons de Ville-Haute, Ville-Basse et le Cros.

Il subit des variantes importantes que l'on peut classer au nombre de deux :

- arcs précédant l'entrée de la court et portant une partie de l'étage ; on peut compter un arc seul (Ville-Basse, 2120) ou trois arcs (Ville-Haute, 2815).

- arcs ne portant qu'un balcon (Ville-Haute, 2930-2890) ou couverts d'un chaperon de bardeaux (le Cros, 1879).

Ce dispositif est plaqué en général sur la façade de la court et de l'étable ; son addition est manifeste lorsqu'il porte simplement un balcon. Peut-être doit-on le considérer comme une solution intermédiaire entre la court fermée, typique de la vallée de la Clarée, et la grande court ouverte des pays moins élevés ; il est significatif d'en trouver un exemple à Puy-Chalvin (Puy-Saint-André)

- Entrées en angle sous auvent

Quelques maisons présentent un retrait entre deux ailes où l'on a placé une porte ; elle est abritée par l'auvent que forme la toiture dont le plan rectangulaire ne subit aucune modification. Si à Ville-Haute et Ville-Basse c'est surtout la porte de la grange que l'on trouve dans cette position, dans les autres villages, en particulier à Plampinet, c'est la porte de la court, donc l'entréeprincipale de la maison.

- Les autres particularités concernent le volume de la grange.

- On note d'abord la présence de noyaux anciens en empilage, avec les angles à mi-bois, dans des maisons beaucoup plus vastes. Il s'agit certainement de granges isolées que l'on a englobées dans des ailes en maçonnerie qui les masquent ou qui en ont pris partiellement la place. Ces vestiges sont particulièrement évidents à Ville-Basse (maison 2074, 2084 où une grange en pierre a remplacé l'ancienne en laissant un angle apparent - 2085) et au Château (maison 2585).

- Dans la plupart des maisons, la grange couronne le corps de logis et parfois déborde en encorbellement sur une façade, mur gouttereau ou pignon. Ce dispositif aveugle ne présente rien d'exceptionnel dans sa technique, mais permet un gain de place appréciable à l'intérieur. On peut comparer, à Ville-Basse, l'encorbellement de la maison 2008, daté 1842, avec celui de la maison 1331 à Sallé, daté 1807.

Une variante peut être reconnue dans la structure en avant-sollier sur poteaux de la grange 2008 (Ville-Haute) ; la rampe, abritée par le deuxième plan, est aménagée sur une partie du corps de logis. Le pignon porte la date 1810.

- Les deux derniers points se situent en façade antérieure. Notons d'abord pour mémoire deux maisons dont la façade antérieure possède toutes les entrées juxtaposées mais à des niveaux différents : Ville-Basse, 2088 - Plampinet.

Plus intéressante est la disposition de deux ou trois grandes arcades en plein cintre ou en anse de panier ouvrant, au troisième ou au quatrième niveaux de la façade, sur un balcon. Seules deux maisons de Ville-Haute (2856 - 2876) et une au Cros (1910) ont ce dispositif que l'on retrouve tel quel au Pinet (Puy-Saint-Pierre) et qui s'apparente aux galeries et loggia du sud du Briançonnais ou du Queyras.

Dans l'aménagement intérieur, l'escalier occupe une place privilégiée et centrale. Il comprend généralement une volée droite, entre deux murs et part d'un côté de la court ; une porte en ferme l'accès pour éviter toute perte de chaleur. Un seul escalier de deux volées a été noté au Château, maison 2588 ; les marches sont en bois, mais il y en a en schiste (Ville-Haute, 2902). A l'étage, un palier, généralement au-dessus de la court, ouvre sur les chambres ; la porte de la grange, à l'opposé des précédentes, a un battant de fer riveté, imposé depuis les grands incendies du XIXe siècle.

Sous la première volée de l'escalier, l'espace vide peut être un accès à la cave ou un lieu de rangement du bois ou de la fabrication du pétri 1. On le nomme le fichon.

Des échelles prennent le relais de l'escalier dans les plans supérieurs de la grange.

Élévations extérieures

Deux caractères se dégagent de l'ensemble des façades de ces maisons : d'une part un caractère fonctionnel, lié essentiellement à la distribution intérieure et aux contraintes de la situation (accès, relief, voisinage), lié aussi à l'archétype qui a servi de modèle ; d'autre part, et corolairement, une absence complète de recherche esthétique. La beauté de ces maisons provient davantage de l'harmonie des volumes, de l'adéquation des formes aux matériaux, de la variété des solutions et de l'équilibre précaire d'une tradition qui s'achève avec le XIXe siècle. On doit noter enfin la qualité globale de la mise en œuvre et l'homogénéité des matériaux ; les réfections abruptes et agressives récentes (rejointoiement, décapage, ciment gris, enduits lisses, proportions des baies) sont généralement catastrophiques.

- Les façades antérieures, pignons ou gouttereaux, se manifestent par leur ordonnance plus ou moins régulière, image de la distribution intérieure : une maison de type A a une façade étroite, avec une seule fenêtre à côté de la porte de la court (Ville-Basse, 2084), tandis qu'une maison de type B se développe davantage en largeur, la porte étant alors au centre (Ville-Haute, 2756 ; Ville-Basse, 2085) ; quant aux maisons doubles, leur façade antérieure a une disposition symétrique, les deux portes étant jumelées (Ville-Haute, 2764-2765 - Ville-Basse, 2100, 2096-2097).

A l'étage, on doit noter généralement la petitesse des fenêtres éclairant des chambres. Ces fenêtres ont leur chambranle au nu du mur et sont barrées d'une grille dans le tableau ; on ne trouve qu'un exemple de grille en cage ornementée. Dans la plupart des façades, les fenêtres ont été refaites et agrandies.

Enfin, le haut de ces façades est bordé par un balcon, au niveau d'un plan de grange ; il a donc un rôle utilitaire et ne comporte ici aucun décor ; on doit pourtant mentionner un balcon sur solives à tête profilée, relativement soigné à Ville-Basse, maison 2084.

Au XIXe siècle et au début du XXe siècle on a badigeonné les maisons de couleurs vives (roses, ocres, jaunes). Plusieurs cadrans solaires peints subsistent sur ces murs.

- Les autres façades perdent le peu de symétrie et d'ordonnance des façades antérieures au profit d'aménagements carrément utilitaires.

- Aménagements relatifs à la maçonnerie : - les cheminées : on a pu observer un certain nombre de souches de cheminées adossées aux murs des maisons et montant de fond, appuyées parfois aux chapilas de la grange. Une seule repose sur deux solives de bois à hauteur du premier étage. Ce dispositif existe aux Granges de Vallée Etroite.

- Les baies de ces façades sont ébrasées à l'extérieur, parfois très profondément. La fenêtre-type est petite (50 à 70 cm) sous un arc segmentaire et grillagée (la grille étant fixée dans le tableau du chambranle).

Quant aux portes de granges, elles sont identiques aux nombreuses portes photographiées à Val-des-Prés.

- Les systèmes d'aération des granges (triangles ouverts) confèrent parfois aux façades une régularité qu'elles n'ont pas ailleurs. On peut se reporter à cet égard à la typologie établie à Val-des-Prés.

- Aménagements relatifs aux chapilas : La structure en empilage constitue le plus souvent un second édifice couronnant le logis. Il est dans presque tous les cas aveugle mais non hermétique, ne nécessitant guère, de ce fait, de trous d'aération. Il donne aux maisons un aspect monumental et sévère, à peine allégé par les balcons aménagés dans les pignons. Ces balcons ont été parfois clos de planches et ont servi à aménager une chambre ménagère.

Notons toutefois le caractère bricolé de bon nombre de maisons,soit par agrandissements ou surélévations successives, soit par réfection et suppression de parties en bois détériorées : la maison 2003 de Ville-Basse ancienne a été entièrement reprise et surélevée en pierre. Une plaque datée 1907 commémore ces travaux.

Combles et couvertures

A. Charpente

Traditionnelle et simple : ferme avec pannes, entraits et faux-entraits. Les faux-entraits sont assemblés à tenon et mortaise dans les arbalétriers et parfois soutenus par des jambettes (voir Ville-Basse, édifice 1842). Présence de contre-fiches au poinçon. Les chevrons sont d'un seul tenant de la faîtière à la sablière. Le poinçon peut être assemblé sur le faux-entrait seulement.

B. Couverture

Toit à deux pentes très débordantes sur les murs gouttereaux. Le matériau de couverture est le bardeau. Chaque famille faisait son toit tous les 80 ans environ. Les planches étaient sciées et rabotées pendant l'hiver en comptant 3 à 5 ans de séchage du bois avant la pose. Jusqu'en 1968 les habitants recevaient des subventions pour remplacer les bardeaux par des tôles à cause des incendies. C'est actuellement le contraire.

La gouttière sous l'égout de la toiture est constituée d'un "tsala" ou "chenal", c'est-à-dire un chéneau creusé à l'herminette ("aissore") dans un tronc de mélèze (M. Falque fabrique encore des tsalas). Le mélèze doit avoir 25 ans ; droit, sans nœud et d'un diamètre de 10 à 20 cm. L'arbre est abattu en automne, creusé au printemps puis est mis à sécher quelques mois avant d'être mis en place en bordure du toit.

Distribution intérieure

Elle est basée sur le principe du partage des fonctions entre l'exploitation et l'habitation et sur les liaisons entre ces espaces.

L'habitation

D'une manière générale, le volume d'habitation occupe la partie antérieure de la maison. Il se caractérise par :

- présence d'un espace de circulation au rez-de-chaussée : la"court"

- présence de trois lieux de séjour "hommes" : - un séjour d'hiver dans l'étable qui n'est plus usité

- la cuisine

- et la voûte, séjour d'été non chauffé.

La court

En général voûtée d'un berceau en plein cintre. Elle est caractérisée par son rôle de passage, ouverte sur la rue par une porte cochère, en arrière sur l'étable, sur la cuisine, la voûte et sur la cage d'escalier. Son plancher est posé transversalement pour éviter tout glissement des bêtes entrant à l'étable.

On y trouve un coffre à grain et quelques rangements pour les outils et des vêtements.

La cuisine

Le plus souvent voûtée d'arêtes ; une cheminée est adossée au mur de refend. Elle est meublée d'une table, d'un vaisselier, de placards encastrés dans le mur. Elle communique avec une cave ou réserve voûtée en berceau.

La voûte

Pièce symétrique à la cuisine, le plus souvent sans cheminée.

Les chambres

L'une était meublée d'une armoire, de lits et d'une garde-robe, l'autre de coffres à grains et de garde-manger (chambre ménagère).

L'étable

L'étable est voûtée (voir voûte) ou plafonnée. Quelques étables ont un plafond de bois sur poteau en T (trois exemples à Ville-Haute datent du début du XXe siècle (1902)).

La partie réservée anciennement au séjour d'hiver des habitants était située latéralement près d'une fenêtre. Cet espace était muni d'un plancher. On y trouve une cheminée. La fenêtre est large et carrée, à fort ébrasement intérieur et extérieur pour obtenir le maximum de lumière et couverte d'un arc en segment. Certains tressaient en paille de seigle une plinthe tout autour des murs (Madame Fine à Sallé).

La partie réservée aux bêtes est divisée en stalles de bois.

La grange

Elle occupe la plus grande partie de la maison ; plusieurs niveaux de planchers ou "Plans" permettent d'organiser l'engrangement?

Au premier plan et à l'entrée, devant la porte : l'aire à battre. Les coffres à grains ne sont pas loin, de même que les outils indispensables: faux, râteaux, fléaux, manilles et trousses. L'espace restant est divisé en "travas" ou compartiments :

- dans la grande "trava" on engrange le bon foin destiné au mulet, à la vache laitière et aux brebis qui portent des agneaux,

- dans la petite "trava", le foin qui a pris la pluie, que l'on donnera aux "élèves" (veaux d'un an).

Au-dessus de l'aire, de la trava et des chambres, l'espace restant est divisé en plusieurs plans :

- "le damoudaou" 2 ou "galitas" est réservé aux céréales qui achèvent de mûrir et de sécher. On trouve la luzerne, le regain (agneaux), les fèves, les lentilles. Les bottes d'orge d'un côté, les bottes d'avoine de l'autre sont séparées par des bottes de seigle

- les "Cleux" sont des gerbes de paille de seigle servant à faire des liens pour lier les gerbes lors de la moisson. Le seigle ayant été battu au fléau et non cassé par une batteuse.

- les "bueiss", bottes de paille cassée par la batteuse ne pouvant être utilisées que pour la nourriture des bêtes.

Cet étage est souvent prolongé d'un balcon de bois "pontchin" qui est utilisé comme séchoir.

Les circulations entre les différents "plans" se font de deux manières : - par des échelles de bois pour les hommes

- par des trappes pour le foin.

Le foin est monté au premier plan par l'intermédiaire d'un "tour", c'est-à-dire d'une grande roue en bois et d'une poulie fixée au plancher du second plan. Pour hisser le foin, on utilise un treuil. Il est transporté dans des trousses (deux sortes de trousses : le "bourra" où le foin est enfermé dans une sorte de grand drap, et la "bérille" où il est tenu dans un filet de cordes).

Mobilier

Au "damoudaou" un espace est réservé à la chambre ménagère, grande armoire aux cloisons de planches où on laissait sécher la viande salée pendant l'hiver, posée sur un râtelier de bois.

Des coffres à grains en mélèze, peu décorés, assemblés à tenons et mortaises.

B) Annexes

Sont envisagés ici tous les édifices de service construits en appentis, accolés ou isolés à proximité des maisons : bûchères,establons, abris de ruches.

- Appentis : ce sont des constructions légères en bois : empilages de planches glissées dans des poteaux de travées. Ils sont utilisés comme lieux de rangement, ateliers, bûchères. Leur profondeur n'excède guère 3 ou 4 m, mais leur longueur est très variable. Une cave peut être aménagée au-dessous (Ville-Basse, 2085).

D'autres appentis sont de simples remises constituées d'un mur gouttereau et fermant ou non par une porte.

- Bâtiments accolés à la maison : ces bâtiments ont une structure de bois indépendante malgré leur position. Leur toiture à deux versants est parallèle à celle de la maison s'ils se trouvent contre un mur pignon, perpendiculaire s'ils sont adossés à un mur gouttereau. On les nomme en général des establons.

- Establons séparés de la maison : leur structure ne se différencie pas des précédents (dimensions moyennes 7 x 5 m). Ils servent d'ateliers pour l'artisanat (le cordonnier de Ville-Haute) ou de maison pour les grands-parents (Melle Marie de Plampinet), de remise ou de garage. Autrefois annexes de l'étable, ils abritaient les brebis qui n'avaient pas besoin de soins particuliers.

- Abris de ruches : petites constructions en longueur, orientées et ouvertes au midi, couvertes d'un toit en appentis (L. 9 m, l. 2 m). On en trouve en particulier à Sallé, abritant des ruches tressées. Le miel est récolté également dans les autres villages, Ville-Haute, où les ruches peuvent être installées sur des balcons, ou Plampinet.

- Bûchères à ciel ouvert : ce sont en fait de simples enclos bordant les jardins ; on y trouve le fumier et le bois coupé maintenu dans des châssis légers.

1le "pétri" est de la poussière de charbon (provenant des mines de Freyssinet et de la vallée de la Guisane, ou du filon à ciel ouvert du Queyrellin ou du bois de l'Argentière en montant à Laraux). On le mélangeait à de l'eau de façon à former une pâte dont on découpait des blocs compacts destinés à entretenir le feu dans le foyer. Ces blocs étaient percés d'un trou pour améliorer le tirage.2Rostolland, p. 54 : "d'amount haout" : en haut de la maison.
  • Période(s)
    • Principale : 18e siècle
    • Principale : 19e siècle

La maison d'habitat permanent de la commune de Névache est très grande pour de multiples raisons : vie repliée à l'intérieur pendant l'hiver, volume de grange important, maisons doubles. Le plus souvent la maison est isolée, mais on trouve des groupes de deux ou trois unités contiguës dans toutes les agglomérations ; il n'y a pas d'îlots de type urbain comme on en trouve dans la basse vallée (les Alberts, le Fontenil). L'orientation est bien sûr tournée vers le soleil, quelle que soit celle des toitures ; on a par conséquent des façades antérieures, celles qui présentent le maximum de baies, dont la porte d'entrée, tournées vers le sud dans la mesure du possible. Parfois la nature du terrain, de la voirie ou des constructions pré-existentes a imposé une orientation différente. L'habitat permanent se caractérise par un emploi de la maçonnerie plus important que dans l'habitat temporaire. Cette remarque est générale dans la vallée. Pourtant la répartition des matériaux se fait selon les mêmes critères : la pierre est réservée au corps de logis-étable, le bois à la grange et à tout le couronnement de l'édifice. Tous les rez-de-chaussée sont voûtés, d'arêtes ou en berceau, à l'aide de coffrages parfois récupérables et ayant servi pour plusieurs maisons (renseignement vérifié par une étude approfondie des dimensions). La voûte d'arêtes est réservée aux cuisines et aux pièces d'habitation en général car elle permet de placer des meubles à peu près partout, et aux étables, avec une colonne centrale, disposition fréquente dans tout le briançonnais. Les parties construites en bois utilisent toujours la technique de l'empilage de rondins assemblés aux angles à mi-bois, ou de demi-rondins ou de planches glissés dans les rainures de poteaux corniers et de travées ; on trouve ainsi construits soit un étage de grange entier, soit seulement des pignons ; les uns ou les autres sont parfois en encorbellement. Cette technique est appelée chapila. Quelques très rares maisons ont des cloisons de pignons en pan de bois avec un remplissage. D'une manière générale, les maisons ont un plan massif, rectangulaire, qui groupe l'espace d'habitation et l'étable avec une entrée commune, la court . Il existe trois types de plans. Dans la plupart des maisons, la grange couronne le corps de logis et parfois déborde en encorbellement sur une façade ; elle comporte plusieurs niveaux de planchers ou plans permettant d'organiser l'engrangement. Deux caractères se dégagent de l'ensemble des façades : d'une part le caractère fonctionnel, lié essentiellement à la distribution intérieure et aux contraintes de la situation géographique et d'autre part une absence complète de recherche esthétique.

  • Typologies
    maison-ferme ; rez-de-chaussée voûté ; grange dans les combles avec entrée indépendante ; court ; chapila
  • Toits
    bardeau
  • Murs
    • bois
    • maçonnerie
    • pan de bois
  • Décompte des œuvres
    • étudiées 32
Date d'enquête 1974 ; Date(s) de rédaction 2001
(c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général
Fray François
Fray François

Conservateur du Patrimoine au service régional de l'Inventaire de Provence-Alpes-Côte d'Azur de 1968 à 2004.

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