Placée sous le vocable de saint Ferréol, la chapelle rurale dépend au Moyen Âge de l’abbaye Saint-André de Villeneuve-lès-Avignon. Avec l’église Saint-Hilaire (Référence IA84000979) et l’église Saint-Jean (disparue), l’Ecclesia Sancti Ferreoli figure dans les listes énumérant les trois églises de Viens relevant de l’abbaye Saint-André de Villeneuve-lès-Avignon des bulles papales de 1096, 1119, 1143, 1178.
L’église primitive ayant été détruite par les crues du Calavon, le bâtiment actuel a probablement été édifié sur un emplacement un peu plus éloigné de la rivière, dans la seconde moitié du 17e siècle, dans le quartier dit des Combes.
La visite pastorale du 1er juin 1659 ne fait état que d’un certain délabrement et celle du 7 octobre 1681 reste elle aussi trop laconique pour signifier s'il est question de l’édifice de l’époque médiévale ou du bâtiment de la fin du 17e siècle : "Le Sr prieur fera réparer la chapelle de St Ferréol à ses despans comme dépandante de son bénéfice". a date de 1699 gravée sur le cadran solaire de la façade, toujours à son emplacement d’origine, pourrait donner une indication sur la date de sa construction. Au moment de la Révolution française, au moment du séquestre (1790) et de la vente des biens du clergé (1791), les archives n’apportent guère d’informations sur la chapelle. Il en est de même lors de la collecte des "effets" des églises, aucun vêtements et ornements liturgiques, vases sacrés ou cloche ne sont mentionnés pour la chapelle Saint-Ferréol.
En tant que patron de la paroisse de Viens, saint Ferréol était honoré avec une grande ferveur, comme en témoignent les archives paroissiales relatant les processions du lundi de Pentecôte et du 18 septembre (la fête « votive », avait lieu à cette date ou le dimanche suivant) attirant non seulement la communauté villageoise mais aussi « le peuple de tous les environs ». On peut aussi souligner le nombre important d’habitants portant ce prénom, à la fin du 18e siècle et durant le 19e siècle. On invoque alors son intercession pour obtenir la guérison de nombreuses affections car "tout malade, à son nom, recouvre la santé", plus particulièrement les boiteux, les sourds, et les muets comme l’indiquent les versets du Cantique en l’honneur de saint Ferréol patron de la paroisse de Viens de 1865. En 1892, une nouvelle version du cantique, Cantico a Sant-Ferriou sera composée par le religieux prémontré, Xavier de Fourvière (Robion, 1853-1912), auteur du Pichot Tresor. Il lui sera alors ajouté une médiation supplémentaire concernant les protections d’ordre météorologique. Il était donc prié, aujourd’hui encore, pour éloigner du « terroir les orages, les grêles et les inondations » mais aussi pour faire tomber la pluie après la longue période de sécheresse estivale.
L’importance du pèlerinage à la chapelle en marque l’architecture : la présence des deux portes largement ouvertes sur le transept dont les dimensions sont relativement importantes pour un édifice rural et les fenêtres basses de la façade ouvertes sur la nef. Un autre élément, révélé par une photographie ancienne montrant les arrachements d’une toiture sur la façade, confirme la présence d’un auvent couvert d’une charpente reposant sur quatre piliers de pierres appareillées, toujours en place. Ces vestiges sont autant d’éléments architecturaux que l’on peut retrouver dans de nombreuses chapelles de pèlerinage.
Bien que la dévotion à saint Ferréol soit très en faveur durant le 19e siècle, l’état de la chapelle laisse cependant à désirer comme on peut le constater dans l’inventaire du mobilier du 5 mars 1906, puisqu’il est mentionné "dans le sanctuaire, un autel en bois tout vermoulu", dans les chapelles latérales des "autels en bois en ruines", "une vieille crédence démolie", des "chandeliers vieux et usés" tout comme la douzaine de bancs, les trois missels. Les visites pastorales permettent de suivre la chronologie de la déchéance : en 1937, "elle s’écroule", en 1939, "elle est en ruines".
Toutefois, on peut encore identifier aujourd’hui les anciens types de couvrement, la restauration en ayant conservé des témoins : la première travée de la nef était voûtée en berceau tandis que la deuxième était voûtée d’arêtes, de même pour la croisée et les bras du transept. Les nervures saillantes de la voûte du chœur reposaient sur deux consoles, portant encore des traces de peinture rouge.
C’est à partir de 1980 que le déblaiement des ruines s’engage à l’initiative de l’association des Amis de Viens. La restauration complète de l’édifice sera ensuite entreprise, grâce au mécénat de Christine Ruiz-Picasso, de 1993 à 1994 pour la mise hors d’eau.
Les voûtes écroulées sont remplacées par une toiture de tuiles creuses sur charpente. La maçonnerie des murs autrefois enduits, est laissée apparente, conservant toutefois quelques traces de badigeon coloré rehaussé de décor ; la qualité de l’appareillage des pilastres, des chaînes d’angle, et des impostes réalisées dans une mollasse très fine (pierre d’Espeil ?) est mise en valeur.
La seconde tranche des travaux de 1996 à 1997 a concerné l’aménagement (dallage, portes, éclairage). L’ancienne cloche bénie le 5 août 1810 ayant disparu, une nouvelle cloche est offerte par Mgr Pierre Amourier, vicaire général du diocèse d’Avignon. Le décor du plafond de la nef et du sanctuaire a fait l’objet d’une commande de Christine Ruiz-Picasso à l’artiste Michel Gueranger (né en 1941) intitulée « Mémoire cosmique », complétée en 2013 par la commande des peintures des plafonds des bras du transept.
Une statue en terre cuite de saint Ferréol placée sur la niche de la façade a été réalisée et offerte par Yvette de Gueltz (1928 -2015) de son nom d’artiste Kiliky.
Désormais, pendant la période estivale, la chapelle, qui reste affectée au culte, accueille des manifestations culturelles organisées par l’association Chapelle Saint-Ferréol. La tradition de descendre les reliques de saint Ferréol en procession du village jusqu’à la chapelle, à l’occasion de la fête du saint (à une date approchant le 18 septembre), reprend alors.
Attachée de conservation au conseil départemental de Vaucluse.