Bientôt un camp de Harkis à La Ciotat

Nous avons appris qu'un camp de harkis allait s'installer bientôt à la Ciotat, plus particulièrement au-dessus des grands bassins, non loin de la carrière Bronzo. Pour certains, peut-être, cette venue de musulmans peut paraître sans intérêt. Nous pensons qu'ils auront tort d'envisager la chose ainsi. En ce qui concerne les Harkis eux-mêmes, il appartenait à la France de ne pas abandonner ceux qui lui ont montré une fidélité à toute épreuve et qui ont véritablement cru qu'il y avait que des Français de Dunkerque à Tamanrasset.

Ce serait tout de même une erreur de croire que les harkis, groupés, vivent en parasites ; loin de là. Ils sont employés à des tâches multiples et d'importance certaine.

L'implantation

Venant en partie du hameau forestier de Fuveau, près de Gardanne, les nouveaux Harkis viendront occuper, sur le territoire de La Ciotat, un terrain d'environ 3 hectares, où logeront 20 à 30 familles. Mais il ne suffit pas de décider que ces Harkis doivent s'installer là ; il importe aussi et surtout que le terrain soit préparé. C'est ainsi que par une note de service de l'office National des Forêts, des travaux furent ordonnés. Sous la conduite de M. Emmanuel Gimenez, qui est un rapatrié d'Algérie, où il était cultivateur à Bou-Medla, les travaux commencèrent le 11 juin. Nous sommes allés nous rendre compte par nous-même, sur les lieux de la matérialité de ces travaux [...]. Il fallut, tout d'abord, faire une piste d'accès au futur emplacement du camp ; cette piste, faite sans moyen mécanique, seulement avec le concours des 13 homes de l'équipe, fut menée rapidement à bien. Présentement elle est terminée, très large et parfaitement carrossable. Il n'a fallu que quelques jours pour cela, avec seulement les bras des Harkis. Actuellement, un périmètre important est débroussaillé, et les hommes s'activent. Mais le travail est long à faire, car il faudra, en outre, enlever toutes les pierres, et Dieu sait qu'il en a sur la colline...Interroger sur le temps approximatif qu'il faudra pour mener à bien les travaux, M. Gimenez pense qu'il faudra envisager environ 2 mois. Répétons-le, il n'y a, pour préparer la venue des familles, que 13 hommes sous la conduite de M. Gimenez qui est également le chauffeur du camion. Ce travail est contrôlé par M. Raoult, inspecteur des camps de Harkis.

Organisation des camps

Le terme "camp" est quelque peu impropre, car il rappelle à la mémoire de sinistres groupements humains autour de barbelés. Il serait plus pertinent d'employer ici le mot hameau, car si les Harkis vivent groupés, en communauté, ils sont tout de même libres d'aller où bon leur semble, sans nulle contrainte. Disons-le, ce sont tout simplement des ouvriers logés avec leur famille. Toutefois, de même qu'une commune a un maire, les Harkis ont leur chef de hameau, secondé par une assistante sociale. Comme nous l'avions indiqué plus haut, ces Harkis dépendent de l'Office National des Forêts, lequel est rattaché au Ministère de l'Agriculture. Les hommes sont groupés par équipes, dirigées par un chef d'équipe musulman.

Utilisation des Harkis

Ces camps ou hameaux de Harkis ne sont pas institués pour maintenir ces anciens militaires dans un doux "farniente", une tâche leur est dévolue. La principale activité des Harkis est précisément d'entretenir les bois et forêts, d'assurer leur protection. En liaison avec les brigadiers ou inspecteurs des Eaux et Forêts, avec les commandants des pompiers, également, ils interviennent pour débroussailler, pour lutter aussi contre les incendies. Il leur arrive aussi, sous la direction de représentants compétents des Eaux et Forêts, de planter des arbres. Tout cela nous donne un aperçu de l'utilité des Harkis. Vient aussi le percement de chemins forestiers qui permettront aux voitures de pompiers de venir, le cas échéant, éteindre le feu. Nous avons assez perdu de forêts jusqu'ici et ce par certaines criminelles imprudences. Nous sommes fondés de penser que, grâce aux Harkis, la forêt environnante reprendra vigueur.

I TERRASSEMENT :

A) Plateformes, (terrain dur, rocheux).

Ces plateformes de 19m,32 x 7m46 devront supporter une assise de béton, base des bâtiments. Les excédents de déblais seront répartis et nivelés autour des plateformes.

B) VOIES : la voie principale sera d'une largeur totale de 7m. de largeur, une chaussée de 5m. et deux trottoirs de 1m. de largeur. Les voies secondaires seront de 5m. de largeur, une chaussée de 4m. et un trottoir de 1m. de largeur. Voies de desserte de 3m. de largeur.

III CLOTURES :

Clôture de grillage simple torsion à mailles de 40 x40 sur 3 fils galvanisés, entre piquets métalliques fers à T de 35m/m espacés de 2m.

VI BASSIN :

Bassin couvert circulaire en béton armé d'une capacité de 120m3 ayant pour dimension R=3,25 intérieur et une hauteur de 4m.

Eléments de la superstructure

1) CHARPENTE : métallique, par fermes boulonnées en cornières suivant détail ci dessous :

- de 35 x 35 x 35 pour les arbalétriers

- de 30 x 30 x 3 pour les entraits et les diagonales

Goussets en tôle de 5m/5m. Les fermes reposent sur les panneaux porteurs avec lesquelles elles sont liaisonnées par des fers plats boulonnés en feuillure entre 2 panneaux. Dans les bâtiments A et Abis, il est prévu un contreventement en ceinture en cornières de 30 x 30 x 3 boulonnés. Tous les fers sont, après nettoyage et brossage, protégés par ne peinture anti-rouille. Les pannes, faîtages et sablières sont en bois de 0,14 x 0,06m de section tirefonnées sur des équerres en cornières inégales de 80 x 50, boulonnées sur les arbalétriers.

2) COUVERTURES : en fibrociment ondulé grandes ondes, teinte grise, fixation par tirefonds avec rondelles et plaquettes plastiques. Faîtières angulaires à bords ondulés. Le conduit partira du plafond et sera réalisé par un tuyau de 150 de diamètre [...]. La hotte d'angle sera en tôle [...]

3) PIGNONS ET AVANT-TOITS : les fermes d'extrémité sont habillées par des frisettes rainées et bouvetées fixées sur ossature placée dans les ailes des cornières. Les avancées de toitures en pignon et en long pan sont habillées également par des panneaux de même nature.

4) MURS EXTERIEURS : par panneaux interchangeables et boulonnés entr'eux. Chaque panneau est composé d'un cadre de 0,1 x 0,04m. de section recevant en feuillure un élément sandwich de 57m/m dont l'ame est en lignite aggloméré replaquée sur la face interne par de l'amiante-ciment cellulosique et sur la face externe par du fibro-ciment. L'assemblage de ces panneaux est effectué à la presse pneumatique. L'angle extérieur formé par le cadre saillant, et le sandwich reçoit, pour une meilleure finition, 1/4 de rond appliqué sur lequel 1/4 de rond repose en partie basse sur un lit de mastic plastique pour renforçant l'étanchéité. Au droit des fermes, placées tous les 2 panneaux, une barre de fer plat boulonnée est placé dans la maçonnerie. Les joint verticaux intérieurs et extérieurs sont calfeutrés par des champs plats appliqués.

5) MENUISERIES : les croisées en sipo de la Côte-d'Ivoire de 36m/m sont à 2 feuilles ouvrantes à la française, à noix et gueule de loup avec jet d'eau et pièces d'appui. Elles sont ferrées par 4 paumelles de 90 et une crémone de lé avec poignée et garniture. Les portes extérieures donnant accès aux appartements sont du type isoplane à armatures multicellulaires et 2 faces de contreplaqué avec collage "Marine" sur la face externe. Elles sont sont ferrées avec 3 paumelles de 110 et une serrure avec plaques d'entrée et béquille double. Les autres portes (wc et intérieures) sont de même type [...].

6) PLAFOND : par panneaux composés d'une ossature bois, d'un revêtement sur la face vue en amiante-ciment cellulosique et d'une isolation supérieure en laine de roche de 45m/m avec papier pare-vapeur.

7) CLOISONS : par panneaux standards dans la mesure du possible. Chaque panneau est constitué par un cadre bois recevant aux 2 faces des plaques d'amiante cellulosique de 6m/m. Les panneaux reposent au sol sur une lisse en isolant mou Phaltex imprégné au bitume, destiné à rompre la transmission du bruit et introduits en haut dans un rail formé de deux 1/4 de rond.

"Arrivée à La Ciotat après un passage au hameau de Sault dans le Vaucluse. A l'époque l’autoroute n’existait pas. Les grands se baignaient dans les bassins de la société des eaux. Le gardien du hameau était un ancien militaire vivant sur place avec femme et enfants ; il était très apprécié et serviable pour les déplacements à l’hôpital (maison départementale des soins), les démarches administratives ; une infirmière se déplaçait sur place. Le hameau était composé de 33 logements de 3 familles par bâtiment de 30m2 sans douche (lavage avec tuyau) ; l'eau était chauffée sur poêle à mazout ; il existait un bassin à proximité et une ancienne carrière tout autour. Détruit en 1980 ou tout au moins déménagement des familles qui seront relogées ; certains ne voulaient pas partir, une famille a résisté jusqu’en 1982 (famille Boualem). Albert Ritt a mis à disposition un terrain avec le soutien du maire de l’époque à la condition de reloger tous les Harkis. C’est la Logirem qui a construit sur ce terrain avec bail emphytéotique de 99 ans, les appartements, de grands logements adaptés aux familles nombreuses devaient revenir aux parents. Aujourd'hui il ne reste que les murets ; le plan de la voirie est resté le même que celui du hameau. Il y avait une école sur site pour les maternelles et le CP, un instituteur se déplaçait sur place ; à partir du CE1 les enfants étaient scolarisés à l’école Saint-Jean (une école réputée) de La Ciotat. Un bus était affrété ; la cantine était sur place. Les mamans ne sortaient pas au début ; installé à 10km de La Ciotat, le hameau était très mal desservi contrairement au nouveau site de relogement où un service de bus facilitait les déplacements. La voirie est restée la même. Le hameau descendait jusqu’en bas. Au moment de la construction de l’autoroute, de nombreux accidents sont survenus. Un terrain de foot a été installé plus tard (aujourd’hui occupé par des petites entreprises, petits locaux) ; l’école se trouvait à l’emplacement du bâtiment blanc et il y avait un petit stade pour les jeunes. Les arbres sont toujours en place. Il existe un rond-point des Harkis à La Ciotat".