Commentaire historique
Cette maison est adossée au passage couvert, dit Passage du Tunnel, qui borde le pied intérieur de la courtine sud-occidentale de la fortification d'agglomération (14e siècle, voir dossier IA05001550). Son origine remonte au moins à la fin du 17e siècle ou au début du 18e siècle, mais elle a été remaniée ensuite. La partie orientale de son rez-de-chaussée était alors occupée par une boutique ou un atelier, desservie par une haute baie boutiquière intégrant un comptoir. Dans le cadastre de 1699, elle semble appartenir à Pierre Hugues et est désignée comme « maison, grange et régaille ».
C'est sans doute à la fin du 18e siècle ou au début du 19e siècle qu'elle a été partagée horizontalement, avec une partie haute et une partie basse. Elle disposait d'un jardin mitoyen installé au pied extérieur de l'enceinte fortifiée, qui a lui aussi été partitionné. Cet état foncier se retrouve dans le cadastre du 19e siècle.
Sur le plan cadastral de 1839, la parcelle possède un plan identique à l'actuel. Bien qu'existant, le passage couvert n'est pas dessiné sur ce document (comme tous les passages couverts du bourg). Elle est mentionnée comme une « maison » de 51 m² d'emprise au sol, possédant 4 ouvertures et imposée dans la 5ème catégorie fiscale (sur 8). Elle est alors divisée entre deux propriétaires. Pierre-André Richaud, tailleur, possède la partie basse de cette maison. Il détient également un jardin mitoyen de 50 m² (1839 F1 311), une « écurie » disjointe (parcelle 1839 F1 286) et quelques terres agricoles aux quartiers de Pigerolle, Blache de Raton, le Fraysse, Merdaric, l'Auche, etc. Antoine Truphême, possède la partie haute du bâtiment, un petit jardin mitoyen de 20 m² (1839 F1 310), ainsi qu'une autre maison (1839 F1 281) à proximité de l'église Saint-Arey et divers terrains sur la commune, notamment aux quartiers de Pigerolles, Blache de Raton, la Rebière, Coularive, le Fraysse, l'Auche, Grand Pré, les Coings, etc.
Plan de masse d'après le plan cadastral de 1839, section F1. Echelle d'origine 1/1000e.
Répartition des propriétaires, d'après le plan cadastral de 1839, section F1. Echelle d'origine 1/1000e.
C'est très probablement le tailleur Pierre-André Richaud qui fait faire les travaux de transformation du logis, illustrés notamment par la date « 1849 » gravée sur le linteau de la porte du logis. Outre l’encadrement de cette porte, commun à celui de la fenêtre, le couvrement voûté de la pièce remonte aussi à cette époque : en effet, cette voûte d'arêtes a été clairement collée sur les murs préexistants et elle remplace sans doute un plancher sur solives originel.
Elévation sud, premier niveau. Porte du logis, linteau avec date gravée (1849).
Après plusieurs changements de propriétaires au cours de la seconde moitié du 19e siècle, la partie haute de la maison est complétée en 1895 par l'acquisition de la maison mitoyenne au nord (1839 F1 235), réalisée par l'« herboriste » Joseph Arnoux, dit Charasson. Cette partition préfigure le découpage parcellaire actuel (voir dossier IA05001545). Quant à la partie basse de la maison, ici étudiée, elle reste associée au jardin mitoyen (1839 F1 311). En 1874, l'ensemble passe à Elisa Richaud, fille d'André, puis, en 1906, il devient la propriété de Berthe Richaud, demeurant à Saint-Alban-de-Roche (Isère).
Les aménagements intérieurs conservés dans la boutique (plafond sur lattis, enduits) ne semblent pas antérieurs à la seconde moitié du 19e siècle. Les reprises effectuées sur le pignon oriental et sa chaîne d'angle datent de la fin du 20e siècle, ainsi que l'actuelle couverture.
Description architecturale
Cette maison est située dans la partie sud-ouest du bourg intra muros, à l'angle de la rue du Barry et du passage couvert, dit Passage du Tunnel. Celui-ci correspond à une coursière de circulation qui longe le pied intérieur de la courtine ouest de l'enceinte médiévale et qui borde la maison sur son côté ouest. A l'origine mitoyenne sur trois côtés, la maison comporte un rez-de-chaussée, un étage carré et un étage de comble. A l'intérieur, un mur de refend la sépare en deux parties, est et ouest.
Plan de masse d'après le cadastre de 2021, section 000F. Echelle d'origine 1/500e.
Vue d'ensemble prise du sud.
Pignon est.
Passage couvert longeant le côté ouest de la maison, vue de volume prise du sud.
Fonctions et aménagements intérieurs
La partie occidentale du rez-de-chaussée est accessible par une porte piétonne ouverte côté sud, précédée de quelques marches extérieures et accostée d'une fenêtre. Réservée au logis, cette partie est couverte par une voûte d'arêtes enduite. Une cheminée est adossée au mur ouest, flanquée d'une niche dont les piédroits et le fond sont constitués de dalles de grès dressées sur chant. Côté est, une porte donne accès à la partie orientale.
La partie orientale du rez-de-chaussée, anciennement occupée par une boutique ou un atelier, est desservie par une haute baie boutiquière intégrant un comptoir. Un placard-niche est aménagé dans le mur ouest. Les murs sont enduits, le plafond est enduit sur lattis avec les vestiges d'un décor peint en bleu. L'angle nord-est accueille un escalier tournant, construit en maçonnerie avec nez-de-marches en bois, qui conduit à l'étage.
La partie occidentale de l'étage appartient à la maison mitoyenne à l'ouest et au nord. La partie orientale, anciennement dédiée à l'habitat, a été transformée en fenil et dispose d'une haute baie côté sud.
L'étage de comble, occupé par un séchoir, est aéré par un jour percé dans le pignon est.
Plans schématiques du bâtiment. De haut en bas : rez-de-chaussée, étage, étage de comble, toit.
Rez-de-chaussée, logis. Vue de volume prise du sud.
Rez-de-chaussée, boutique. Vue de volume prise du sud.
Structure et matériaux
L'ensemble du bâtiment est construit en maçonnerie de moellons calcaires et de grès. La chaîne d'angle sud-est, reconstruite après la ruine et la démolition du bâtiment mitoyen, intègre des pierres de taille de grès en remploi et des gros moellons équarris. Bordant la maison à l'ouest, le Passage du Tunnel est couvert par une voûte en berceau plein-cintre, enduite.
Sur la façade sud, l'encadrement de la porte du logis possède un piédroit commun avec celui de la fenêtre. Il est en pierre de taille de grès bouchardée à arêtes vives ciselées, avec linteau monolithe. La date « 1849 » est gravée sur le linteau de la porte. La fenêtre est équipée de barreaux en ferronnerie. La menuiserie de la porte est à panneaux moulurés saillants et elle est surmontée d'une imposte vitrée en menuiserie. Sur cette même élévation sud, l'encadrement de la baie boutiquière est également en pierre de taille de grès, mais layée, avec un couvrement en arc plein-cintre. Dans sa partie inférieure, un comptoir vient fermer à moitié l'ouverture, avec un appui monolithe. Cette baie est fermée par deux vantaux asymétriques.
Chaîne d'angle sud-est, associant pierres de taille et gros moellons équarris.
Elévation sud, premier niveau. Porte et fenêtre du logis, avec piédroit commun.
Elévation sud, premier niveau. Baie boutiquière.
Sur l'élévation ouest, sous le passage couvert, on observe la disposition des dalles sur chant qui forment le fond de la niche de la cuisine. Sur le pignon est, on observe quelques vestiges d'aménagements de la maison mitoyenne disparue, notamment une pierre foyère en grès ainsi que les trous d'ancrage des solives de planchers.
Le toit à un pan est couvert en plaques ondulées de fibro-ciment, recouvertes de tuiles creuses.
Un petit réduit maçonné est accolé à l'angle ouest de la façade sud, dans le prolongement des degrés de l'escalier extérieur. Accessible par une porte basse, il est couvert en appentis par une dalle en béton.