I. Contexte de l'enquête
Le repérage
Ce dossier concerne les maisons de la commune de Thorame-Basse (canton de Castellane, ancien canton d'Allos-Colmars jusqu'en 2015, Communauté de communes Alpes Provence Verdon - Sources de Lumière, ancien Pays Asses, Verdon, Vaïre, Var, département des Alpes-de-Haute-Provence). Le terme "maison" comprend les édifices totalement dévolus à l'habitation, ainsi que ceux comprenant une partie habitation et une partie agricole (étable, remise, fenil…) réunies sous un même toit.
Les conditions de l'enquête.
Le repérage des maisons sur la commune de Thorame-Basse a été effectué au cours des mois d'été 2011. Le recensement s'est fait à partir du cadastre le plus récent disponible, édition mise à jour pour 1983. Le plan cadastral dit "napoléonien", levé en 1827, a servi de point de repère et de comparaison pour les bâtiments antérieurs à cette date ; l'ensemble des états de sections de ce cadastre a été consulté. Toutes les constructions portées sur le cadastre actuel ont été vues, au moins de l'extérieur. Le repérage a été effectué à l'aide d'une grille de description morphologique propre aux maisons et décrivant : - la ou les fonction(s) visible(s) du bâtiment,- la présence éventuelle et la caractérisation des espaces libres,- la mitoyenneté,- les matériaux principaux et secondaires et leur mise en œuvre,- la forme du toit et la nature de la couverture et de l'avant-toit,- le nombre d'étages visibles,- la description des élévations et des baies,- les décors extérieurs,- les aménagements intérieurs (escalier, cheminée, cloisons…),- les inscriptions historiques : dates portées, inscriptions…Cette grille de repérage a donné lieu à l'alimentation d'une base de données destinée à faire un traitement statistique et cartographique. Le repérage est toujours confronté à la question de l'état du bâti. Ainsi, ont été repérés les bâtiments ayant subi quelques modifications de détail n'affectant pas leur lecture architecturale. Les bâtiments ruinés mais dont le parti pris architectural d'origine restait lisible ont également été repérés. En revanche, les bâtiments ayant subi des transformations majeures rendant illisibles leurs caractères architecturaux n'ont pas été retenus. Les bâtiments non retenus sont principalement ceux qui ont été très remaniés à une période récente, selon des normes de construction, des matériaux et un vocabulaire architectural très éloignés de ceux de l'architecture locale : élévations entièrement repercées de grandes ouvertures rectangulaires masquant les baies anciennes, utilisation de matériaux récents rendant illisible le parti d'origine, restructuration intérieure totale ou profonde…
II. Caractères morphologiques
Le repérage concerne les maisons vernaculaires. Dans la commune de Thorame-Basse, les maisons ont été repérées dans le village (43 maisons) ainsi que dans les différents hameaux : La Valette (13 maisons), la Bâtie (5 maisons), le Moustier (3 maisons), Château-Garnier (14 maisons). 7 maisons ont été repérées hors agglomération.
Sur l’ensemble de la commune, 85 maisons ont été repérées et 13 ont été sélectionnées. Le repérage s’est donc déroulé comme suit :
Corpus | Chef-lieu | Hameaux | hors agglomération | Commune de Thorame-Basse |
Repéré | 43 | 35 | 7 | 85 |
Sélectionné | 7 | 6 | 0 | 13 |
Pourcentage de sélectionné | 16,28% | 17,14% | 0% | 15,29% |
La plupart des maisons ont été construites à l’époque contemporaine. 71,76% d’entre elles ont été datées des 19e et 20e siècles. 28,24% d'entre elles remontent à l'époque moderne dont 5 cas antérieurs au 18e siècle. Les dates portées sont rares. On en dénombre 17 sur l’ensemble du corpus, principalement dans le village et les hameaux de Château Garnier et de la Valette.
Date portée | lieu-dit | références cadastrales |
1504 | Le Village | 2012 F 116 |
1614 | Le Village | 2012 F 46 |
1643 | La Valette | 1983 B3 288 |
1659 | La Valette | 1983 B3 285 |
1777 | Le Village | 2012 F 73a |
Date portée | Lieu-dit | références cadastrales |
1812 | Le Village | 2012 F 58 |
R. 1881 F. | Le Village | 2012 F 167 |
S. 1886 J.A. 8c | Château Garnier | 1983 A4 620 |
1890 | Le Village | 2012 F 80 |
1895 | Château Garnier | 2012 A4 650 |
1895 | Château Garnier | 2012 A4 646 |
1898 | Le Village | 2012 F 24 |
1911 | Le Village | 2012 F 147 |
1934 | Le Village | 2012 F 112 |
1934 | Le Village | 2012 F 56 |
1934 | Château Garnier | 1983 A4 608 |
6-8 1960 | La Valette | 1983 B3 291 |
La confrontation entre le cadastre de 1827 et le cadastre actuel montre que les trois hameaux ont peu évolués tant dans leurs densités que dans leurs organisations. Bien que le centre ancien du village ait conservé sa configuration ancienne autour de trois axes parallèles traversants : la rue Haute, la Grande rue et la rue Basse, on observe la disparition de certaines cours et la construction de bâtiments sur d'anciennes parcelles non bâties aménagées probablement en jardins. Dans certains cas, des maisons adossées ont été réunies pour ne former qu'un bâtiment unique. Un phénomène que l'on constate dans la partie centrale de l'agglomération. Alors que l'implantation des maisons par rapport à la voirie apparaît irrégulière dans les hameaux, elle présente une certaine régularité dans le village. Sur l'ensemble du corpus, 48,24% des maisons ont été restaurées, 7,06%, dénaturées et 44,71%, préservées. Lorsque les restaurations sont mineures, qu'elles n'altèrent pas la lecture des bâtiments et permettent de restituer leur formes d'origines ou un état plus ancien, ces derniers ont été sélectionnés.
Implantation et composition d’ensemble
Dans les agglomérations de la commune, 23,53% des maisons sont mitoyennes sur un côté, 44,71%, sur deux côtés et 18,82%, sur trois côtés. Seules 9 maisons ne présentent pas de mitoyenneté. Les maisons mitoyennes sur un côté sont majoritairement implantées dans les hameaux qui présentent un tissus urbain discontinu et peu dense. Celles mitoyennes sur trois côtés sont principalement situées dans le chef-lieu qui présente un tissu dense et continu avec parfois des ilots composés de deux alignements adossés. La mitoyenneté s'effectue le plus souvent par le mur pignon. D’une façon générale, les maisons occupent toute la surface de la parcelle à l’exception de celles qui possèdent une cour. On en dénombre 12 dans le bourg, 5 à Château-Garnier, 3 à La Valette et 1 à la Bâtie. Les maisons avec jardin attenant sont rares. 7 sont situées dans le village et 1 à Château-Garnier.
Matériaux et mise en œuvre
Le matériau employé pour le gros œuvre est la pierre sous la forme de moellon brut ou à peine équarris, montés au mortier de chaux et de sable. Les façades étant enduites il est souvent difficile d’identifier la nature exacte des matériaux. Parmi les 85 maisons repérées sur la commune, 74 sont construites à partir d'un mélange de calcaire et de grès dont la proportion varie selon les bâtiments. Ces deux matériaux sont extraits localement dans des carrières mais il est possible que les moellons de petite taille aient été en partie issus de l'épierrage des champs.
L’emploi de la pierre de taille est rare et réservée à certains encadrements de baies, le plus souvent des portes. 12 cas ont été recensés principalement dans le village (9 cas) ainsi que dans les hameaux de Château-Garnier (2 cas) et de La Bâtie (1 cas). Les encadrements façonnés en ciment, réalisés au cours du 20e siècle, ont été observés sur 7 maisons, et 2 en brique apparente, dans le village. On note que sur l'ensemble de la commune, près de 72,94% des maisons sont dépourvues d’encadrements.
La plupart des bâtiments sont enduits au mortier de chaux ou au ciment. Bien que ces enduits ne soient pour la plupart plus d’origine, deux types apparaissent prédominants : l’enduit à pierre vue dans 50,53% des cas et l’enduit lisse, dans près de 32,63%. L’enduit à la tyrolienne réalisé au cours du 20e siècle n’apparait que sur trois maisons, parfois associé à un enduit lisse. L’un d’entre eux est daté de 1904. L’emploi du bois de mélèze produit localement, pour le gros œuvre, sous forme d’essentage en planche est exceptionnel sur la commune (1 seul cas situé dans le chef-lieu). Son usage le plus fréquent réside dans la réalisation des charpentes et des couvertures en planche ou en bardeau qui ont aujourd’hui entièrement disparu. Ces dernières remplacées de façon quasi systématique au début du 20e siècle par des couvertures en métal n’ont pu être recensées au moment de l’enquête. Le bois est également employé pour la réalisation des menuiseries notamment les portes. Au tournant du 20e siècle apparaissent de nouveaux matériaux de gros-œuvre comme la brique, puis le parpaing artisanal, et enfin le corps creux en béton. Ces derniers ont souvent été employés dans le cadre de restaurations.
Structure, élévation, distribution
Les maisons ont entre deux et cinq niveaux. On note que 37,65% d'entre elles ont 4 niveaux et 52,94%, 3 niveaux.
62,35% des maisons ont un étage de soubassement et 69,41%, un étage de comble. Dans 81,18% des cas le niveau inférieur abrite une étable et dans 75,29% le niveau supérieur, un fenil. Lorsque l'intérieur du niveau inférieur a pu être observé, on dénombre 19 cas de voûtes d’arêtes, 14 cas de voûtes en berceau, 14 cas en berceau segmentaire, et 3 cas de voûte mixte associant le plus souvent une voûte en berceau à une voûte d'arêtes.
La répartition des étages la plus fréquente est : étage de soubassement, rez-de-chaussée surélevé, étage carré, étage de comble.
La plupart des bâtiments ont une élévation irrégulière (65,88%). 32,94% localisées principalement dans le chef-lieu ont une élévation régulière à travées. Une seule maison située dans le hameau de Château-Garnier possède une élévation ordonnancée.
27 maisons (31,94%) possèdent un escalier extérieur qui permet d'accéder à l'entrée du logis. Dans la majorité des cas cet escalier est droit et perpendiculaire à la façade (10 cas). Dans d'autres cas il peut être droit et parallèle à la façade (3 cas) ou en équerre (5 cas). La présence d'une terrasse est rare et toujours liée à un escalier droit parallèle à la façade (3 cas).
La liaison entre les étages s'effectue par un escalier intérieur.
Peu de maisons ayant été visitées, la distribution intérieure reste inconnue.
Couverture
Les couvertures en métal tous types confondus (tôle, tôle ondulée, bac acier) constituent environ 96% du corpus. La tuile plate produite localement ou dans des tuileries proches comme à Thorame-Haute n’est présente aujourd’hui que dans 2,11 % des maisons du corpus alors que l’on sait par des témoignages ou des photographies anciennes que son usage était beaucoup plus répandu. Les deux formes de toitures prédominantes sont le toit à longs pans : 61 cas répartis sur l’ensemble de la commune, et le toit à un pan : 28 cas dont l’usage est limité au village notamment sur des maisons avec une surface au sol limitée (souvent inférieure à 50 mètres carrés) adossées par le mur pignon. Les toitures sont bordées d’une rive en saillie dans 88,42% des cas. La génoise le plus souvent à un ou deux rangs n’apparaît que dans 21,05% des cas, dans le village et dans le hameau de La Combe. On la trouve plus fréquemment associée à des toitures en pente douce. D’une façon générales les pentes des toits sont douces dans 46,32% des cas et fortes dans 52,63%.
Décor
Le décor réside principalement dans la présence de faux encadrements (24 cas) et de faux appareils en pierre de taille (13 cas). Les deux sont souvent combinés. La plupart de ces décors ont été observés sur des maisons situées dans le chef-lieu. On relève également la présence de trois cadrans solaires. Deux sont situés dans le hameau de Château-Garnier ; un dans le hameau de La Bâtie.
Typologie
Le corpus est réparti en quatre groupes typologiques:
- Les maisons avec parties agricoles en parties basses et hautes (type A3a) représentent 81% du corpus.
- les maisons avec partie agricole, artisanale ou commerciale en partie basse (type A1), 16,47% du corpus.
- les maisons avec partie agricole en partie haute (type A2), 10,59% du corpus.
- les maisons sans partie agricole, artisanale ou commerciale (type B), 2,35% du corpus.
Chercheur au Service régional de l'Inventaire de la Région Provence-Alpes-Côte d'Azur (2007-2022).