Description
Situation
Cette ancienne maison occupe une importante parcelle qui donne sur le côté pair de la rue Nationale, à l’extérieur des remparts.
Composition d’ensemble
Elle comporte deux corps de bâtiments principaux, de trois étages pour l’un et de quatre étages dont un de comble pour l’autre, formant un alignement est-ouest et reliés entre eux par une aile en longueur dans laquelle un corridor assure à chaque niveau une communication entre les deux parties.
Il faut cependant signaler que le bâtiment est, donnant sur la rue Nationale, est le résultat de l’annexion d’un autre bâtiment, qui était probablement indépendant à l’origine. L’extrémité orientale de cette adjonction constitue la travée sud de la façade de la rue Nationale. Cette annexion est du reste encore visible en toiture puisque cette partie n’est pas aussi haute que l’autre; le mur qui les sépare est en outre fort épais. De plus, jusqu’au 19e siècle, la façade donnant sur la rue Nationale formait un angle à leur jonction.
Au sud du corridor central, une petite cage d’escalier dessert un autre petit bâtiment de deux niveaux, qui permet lui-même l’accès à une dernière construction d’un seul niveau qui donne principalement sur le jardin.
Le plan complexe de cet édifice trahit sa longue histoire. Les deux bâtiments principaux ont pu être indépendants à une époque reculée. Ils ont eu chacun une cage d’escalier. Le corridor qui les relie ferme, au nord, une petite rue, ou plutôt une petite impasse, qui débouche plus au nord dans la rue Nationale. Il pourrait résulter d’une annexion d’un espace autrefois public.
Les toits sont eux aussi complexes. Celui du bâtiment ouest est à un pan. Mais celui de la partie est, pour sa plus grande part, à deux pans, son faîtage, orienté nord-sud, se situant exactement au droit de la grande cage d’escalier. Mais il est asymétrique, le pan qui part vers l‘est étant beaucoup plus vaste que celui qui part vers l’ouest. Au sud, on retrouve l’anomalie citée plus haut : cette partie est couverte d’un toit à un pan regardant vers le sud.
Matériaux
Maçonnerie enduite. Crépi au ciment moderne. Encadrement en pierre de taille de la porte principale rue Nationale, à l’est, et de trois portes et portes cochères ouvrant le second corps de bâtiment sur le jardin, à l’ouest.
Dans les parties hautes, on peut voir une maçonnerie en blocage de moellons calcaire.
Distribution
Le second corps de bâtiment a une organisation interne assez simple. A chaque étage, un corridor distribue des chambres. Cette distribution est récente. Elle date du 20e siècle.
Le bâtiment ouest, lui, a un plan beaucoup moins simple.
Dans son angle nord-ouest se trouve la grande cage d’escalierLa cage d'escalier au deuxième étage., qui donne par une rangée de baies sur l’impasse. L’escalier est tournant, à quatre noyaux, à deux retours, à trois volées et deux repos. Il a été remanié au 19e ou au 20e siècle : les noyaux ont été habillés en colonnes à chapiteaux à chaque niveau et les balustres ont été remplacés par un garde-corps métallique. Les fûts des colonnes ont en outre été décorés d’un motif peint de faux marbre à une date encore plus récente. L’escalier pourrait dater du 17e siècle, voire du 16e, mais ses très grands volumes imposent la plus grande prudence.
Au rez-de-chaussée, toute la partie centrale, dans l’axe de la porte, constitue un long corridor menant directement à la partie ouest. Au sud de ce corridor, une pièce en longueur qui n’appartenait donc pas au bâtiment d’origine. Et au nord, un grand vestibule ouvert sur la cage d’escalier. Il communique avec la rue par une porte un peu moins soignée que celle de l’axe central. A l’ouest, à la jonction des deux bâtiments principaux, une petite pièce de distribution encadrée par deux plates-bandes en pierre de taille datant vraisemblablement du 19e siècle, dont une est encore partiellement décorée d’une peinture murale à motifs florauxLe couloir du rez-de-chaussée. Vue prise vers l'est..
Aux étages 1 et 2, l’escalier, dont les paliers sont au droit du corridor central du rez-de-chaussée, ne dessert qu’une grande pièce en façade (Fig. 19) dans le bâtiment d’origine, trois si on ajoute les deux petites pièces de la partie annexée, au sud.
A noter que les archives gardent la trace de périodes où le premier étage du 30 rue Nationale était relié au 32-34 actuel, ce qui rajoute à la complexité du développement de cet ensemble.
Historique
Si on en croit le bail de 1864 qui transforme la plus grande partie de cette maison en Sous-préfecture de Castellane, le premier étage, y compris la partie correspondant à une travée de l’actuel n° 30 rue Nationale, était éclairé par quatre croisées donnant sur la rue. La mention de ces croisées aujourd’hui disparues, le grand escalier, ainsi que le développement général de la rue, appelée alors rue basse, au 16e siècle, soutienne une datation d’origine de l’édifice à la seconde moitié du 16e siècle.
La maison aurait appartenu à François Niel de Brenon au début du 18e siècle. Elle aurait également été pillée, laissée à l'abandon, avant d'être réattribuée en 1748 par l'évêque Vocance à des ecclésiastiques. Au 19e siècle, elle accueille la Sous-Préfecture, probablement à plusieurs reprises. Une première fois sous l’Empire, dès 1800. L’état de section du cadastre napoléonien indique qu’en 1834, cet édifice sert de maison à un certain Joseph Andrau, aubergiste.
Reconstruction de la façade
Depuis la fin du 19e siècle, la façade sur la rue Nationale est biaise par rapport à l’axe des murs. En 1882 en effet, la façade d’origine a été frappée d’alignementPlan représentant le rez-de-chausée le 1er et le 2ème étage de la maison appartenant aux hoirs Philip dont une partie est louée pour servir de sous-préfecture à l'arrondissement de Castellane [plan du rez-de-chaussée]., selon le plan Bourdellon de 1862. C’est à ce moment qu’a été effacé le léger angle qu’elle formait à la jonction du bâtiment d’origine et de la parcelle annexée, au sud.
La façade reconstruite, uniforme, aligne trois travées sur trois niveaux. Le rez-de-chaussée forme un soubassement massif en pierres de taille, ordonnancé. L’encadrement de la porte centraleLa porte d'entrée. est légèrement saillant. Il est ornée au centre de sa plate-bande d’un motif de fleur. Un monogramme métallique est fixé devant l’imposte : on y distingue les lettres J P et B. Le P pourrait correspondre à l’initiale du patronyme Philip, du nom du propriétaire au moment de la reconstruction de la façade. Les baies, aux étages, sont à arc segmentaire.
Le 7 juillet 1864, son propriétaire, Marie Giraud, veuve Philip, en loue une partie pour servir de nouveau d’hôtel de sous-préfecture. La sous-préfecture déménage en 1882 pour s’installer place de la Liberté, au moment où est redessiné l’alignement sur rue.
Au 20e siècle, l’ensemble est transformé en centre de vacance pour enfants par le nouveau propriétaire, la famille princière de Monaco. Après avoir servi pendant quelque temps à abriter le musée de l’association Petra Castellana, le bâtiment attend actuellement une reconversion en immeuble.
Conservateur du Patrimoine au service régional de l'Inventaire général de Provence-Alpes-Côte d'Azur de 2004 à 2017.