Dossier d’œuvre architecture IA05000139 | Réalisé par
Truttmann Philippe
Truttmann Philippe

Lieutenant-colonel du génie, docteur en histoire. Chargé de cours à l'École supérieure du génie de Versailles, Yvelines.

Expert en architecture militaire auprès de l'Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France. Réalise de 1986 à 1996 l’étude de l’architecture militaire (16e-20e siècles) de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur : départements des Hautes-Alpes, des Alpes-de-Haute-Provence, partie des Alpes-Maritimes, ensemble des îles d’Hyères dans le Var.

Principales publications : La Muraille de France ou la ligne Maginot (1988)

Les derniers châteaux-forts, les prolongements de la fortification médiévale en France, 1634-1914 (1993)

La barrière de fer, l'architecture des forts du général Séré de Rivières, 1872-1914 (2000)

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  • enquête thématique régionale, architecture militaire de Provence-Alpes-Côte d'Azur
redoute, fort des Salettes
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Hautes-Alpes - Briançon
  • Commune Briançon
  • Lieu-dit Fort des Salettes
  • Cadastre 1975 A 186
  • Dénominations
    redoute, fort
  • Appellations
    fort des Salettes
  • Dossier dont ce dossier est partie constituante
  • Parties constituantes non étudiées
    enceinte, fossé, casemate, réduit, batterie, poudrière, ouvrage d'entrée, cour

Chronologie des travaux

La création d'une « redoute à mâchicoulis» sur «le sommet de la croupe basse de la montagne du Poët» est proposée par Vauban, à l'article 60 de son premier projet pour Briançon (22 novembre 1692). Il n'est pas à exclure que Vauban ait repris là l'une des propositions du projet précédent, de l'ingénieur Delabat (12 janvier 1692), mais dont le plan manque.

Estimation : 2400 livres.

Aucune suite n'ayant été donnée, Vauban inscrit à nouveau la création de la « redoute des Salettes» dans son deuxième projet avec descriptif et estimatifs détaillés, accompagnés des dessins.

Le 8 février 1704, Vauban se plaint que rien n'est commencé.

1709-1712 : construction de l'ouvrage, conformément au projet de Vauban (mort en 1707) : une tour carrée entourée d'un fossé à contrescarpe revêtue et galerie de fusillade à feux de revers.

1747 : projet (non exécuté) de Milet de Monville visant à voûter la plateforme supérieure de la tour contre les coups fichants tirés des hauteurs proches.

1826 : projet (non exécuté) de construction d'une batterie-caverne en contrebas de la redoute, entre celle-ci et la route du Montgenèvre, pour interdire cette dernière et flanquer la coupure défensive (réminiscence du « nid de pie» demandé en vain par Vauban).

1840 : nouveau projet d' « amélioration de la route des Salettes» prévoyant de coiffer la face nord-est de l'ouvrage d'une batterie casematée à deux étages, dont un étage inférieur sous roc et une batterie supérieure construite sur la plateforme de la tour réduit, le tout enveloppé d'une sorte d'ouvrage à corne bordant la falaise rocheuse.

De 1840 à 1854, succession continue de projets et de contreprojets différant par le nombre et l'orientation des pièces de casemates, l'adjonction d'une galerie d'accès arrière sous roc, de casemates extérieures à feux de revers, le couvrement ou non du fossé nord-est, etc.

Ce n'est qu'en 1847 que sont arrêtées les dispositions du projet définitif, dont l'exécution commence par la construction d'une batterie à la Haxo à 6 pièces parallèles (achevée en 1850) , les bastions 1 et 2, puis du bastion 3, du front de gorge, du voûtement de la plateforme de la tour réduit et enfin du magasin à poudre.

On peut considérer que l'ouvrage est achevé en 1854 et ne subira plus aucune modification ultérieure, malgré la crise de l'artillerie rayée (1859) puis celle de l'obus torpille .

Passé en seconde ligne à partir de 1880, il est encore armé en 1899 de deux canons de 12 de campagne.

Missions successives de l'ouvrage

A l'origine, ouvrage d'occupation destiné à empêcher un ennemi de s'emparer d'une position ayant un commandement important sur la ville et le château. La tour-réduit, entouré d'un fossé bien flanqué, tenue par de l'infanterie et de l'artillerie légère remplit bien ce rôle, avec en outre, de bonnes possibilités de surveillance du chemin, alors peu praticable, du Montgenèvre.

Assez vite, cependant, on constate que si l'ouvrage domine bien la trouée de la Durance et le chemin du Montgenèvre, il est lui-même fortement dominé, au nord, et à très courte distance, par les pentes de la Croix de Toulouse, du rocher de l'Ombre et du bois de la Pinée. Il convient de protéger sa plateforme contre le tir fichant de tirailleurs pouvant s'infiltrer.

Par ailleurs, la construction, sous l'Empire, de la route d'Italie (RN 94) augmentant sensiblement les possibilités de pénétration, conduit à la résolution d'agrandir la redoute et de la transformer en ouvrage d'interdiction, casematé et bien doté en artillerie. C'est l'objet des projets élaborés à partir de 1826 et surtout 1840, et exécutés entre 1848 et 1854.

Vue aérienne du fort présentant : la tour centrale avec la terrasse à canons, le fossé, l'enceinte avec la galerie de fusillade.Vue aérienne du fort présentant : la tour centrale avec la terrasse à canons, le fossé, l'enceinte avec la galerie de fusillade.

Analyse architecturale

L'ouvrage actuel est essentiellement constitué d'une enceinte extérieure bastionnée (réalisée entre 1847 et 1854) enveloppant la tour primitive (1709-12) remaniée et conservée, avec son fossé, comme réduit.

L'enceinte extérieure

S'inscrit dans un trapèze isocèle dont la gorge serait la grande base (80 m) et le front de tête la petite base (40 m), avec la capitale orientée sud-ouest-nord-est. Elle comporte quatre fronts, dont trois bastionnés et précédés d'un fossé. Ce sont :

- le front de tête nord-est 1-2, bastionné

- le front nord-ouest (flanc gauche) 2-3, bastionné

- le front de gorge sud-ouest, 3-4, bastionné

- le front sud-est, flanc droit, irrégulier, sans fossé, et couronnant l'à pic rocheux sur la R.N. 94 .

Le bastion n° 1 est le demi-bastion de droite du front de tête. Les autres bastions sont numérotés à la suite, dans le sens inverse des aiguilles de la montre.

Du fait des hauteurs dangereuses qui le dominent, à courte distance, au nord et au nord-est, l'ouvrage ne comporte pratiquement pas de crêtes de feux à air libre; tous les organes de tir sont placés sous casemate.

Accès : l'ouvrage est desservi par une route d'accès partant de la R.N. 94 en face du château et aboutissant tangentiellement après plusieurs lacets à la porte située dans la courtine du front de gorge. Cette route se prolonge vers le nord-ouest et rejoint la route militaire de la Croix de Toulouse. Il existe en outre un sentier piétonnier escaladant, en lacets, l'arête rocheuse au sud du fort, également à partir de la R.N. 94 .

Front de tête 1-2

Batterie casemate, vue d'enfilade prise du nord-ouest.Batterie casemate, vue d'enfilade prise du nord-ouest. Flanquée, à droite, par le demi-bastion 1 et, à gauche, par le bastion n° 2, sa courtine porte une batterie casematée « à la Haxo» battant, en tir frontal, les pentes de la montagne et les cheminements venant de la Vachette.

La batterie est constituée de six casemates accolées, en voûte conoïde, chacune pour une pièce, s'ouvrant largement à l'arrière par baies en plein-cintre dans une façade surplombant la contrescarpe de la face est de la tour réduit. Les casemates communiquent entre elles par un alignement de passages en plein-cintre ménagés dans les piédroits, tandis que les embrasures s'ouvrent dans la plongée du talus en terre.

Le bastion 1 comporte, dans le flanc gauche, un coffre d'escarpe desservi par galerie ascendante partant du fossé de la tour réduit . Flanquement assuré par une embrasure à canon encadrée de deux créneaux de fusillade.

Bastion 2, batterie casemate, courtine 2-3, tour réduit.Bastion 2, batterie casemate, courtine 2-3, tour réduit. Le bastion 2 comporte :

- dans le flanc droit, un coffre à trois créneaux de fusillade à ébrasement gradiné,

- dans le flanc gauche, un coffre à une embrasure à canon encadrée de deux créneaux de fusillade.

Les deux coffres sont reliés par galerie sous roc et desservi par escalier et galerie ascendante partant du fossé du réduit.

Au-dessus, petit élément de crête d'infanterie avec, à droite, parapet en maçonnerie.

On notera que le grand relief donné à ce front assure le défilement de tout l'arrière de l'ouvrage.

Front 2-3

Bastion 3. Chemin de ronde de la face gauche.Bastion 3. Chemin de ronde de la face gauche. Réduit à un tronçon de courtine creuse formant également contrescarpe du réduit. Elle est parcourue par la galerie périphérique d'origine, qui donne à la fois des feux de revers sur le fossé du réduit et des feux frontaux sur le fossé général, par neuf créneaux de fusillade verticaux à ébrasement gradiné .

Le bastion 3 est, lui, entièrement creux :

- dans le flanc droit, deux coffres d'escarpe accolés et dotés, chacun, d'une embrasure à canon encadrée de deux créneaux de fusillade

- dans le flanc gauche, un coffre à canon

- dans chaque face, un coffre sert trois créneaux de fusillade

- en capitale un petit magasin à poudre aveugle

Tous ces locaux, communiquant largement entre eux, sont desservis par un passage voûté ascendant avec escalier et rampes latérales, venant du fossé du réduit.

En outre, un petit escalier en colimaçon , partant du débouché inférieur du passage voûté d'accès aux coffres, monte sur les dessus du bastion pour desservir un tronçon de chemin de ronde couronnant la face gauche (avec, au saillant, une guérite en pierre) et un tronçon de crête d'infanterie en terre couronnant le flanc droit, avec locaux casematés au-dessous.

Le chemin de ronde est paradossé par un mur en maçonnerie.

Front 3-4 (gorge)

Front de gorge vu du flanc gauche du bastion 3.Front de gorge vu du flanc gauche du bastion 3. Dans la courtine, aux trois-quarts de la longueur prise à partir du bastion 3, s'ouvre la porte du fort , précédée d'un pont, partie fixe, partie levante, avec pile centrale, qui franchit le fossé.

La façade de la porte est constituée d'une structure verticale rectangulaire en pierre de taille, en légère saillie progressive de bas en haut sur l'escarpe, du fait du fruit de celle-ci. Cette façade comporte une feuillure rectangulaire au fond de laquelle s'ouvre la baie, voûtée en plein-cintre et encadrée par les fentes de passage des bras métalliques d'un pont-levis en zigzag. De part et d'autre de cette feuillure, les piédroits reposent sur un boudin et, au-dessus du linteau, s'ouvrent trois créneaux de fusillade verticaux. Le tout est surmonté d'un entablement à corniche et larmier, portant lui-même un fronton plat, où s'ouvre un évent en arc surbaissé.

La porte à deux vantaux pivotants dont l'un comporte une porte piétonnière est construite en tôle d'acier sur ossature en profilés commerciaux, avec barre de verrouillage et bras de force (ce dispositif semble du début du XXe siècle et parait avoir remplacé la porte d'origine).

La baie donne accès à un passage voûté en anse de panier, percé à la clef d'un assommoir carré, et débouchant dans le fossé du réduit. Le sol de ce passage est pavé.

Au-dessus de ce passage se trouve une casemate greffée sur la galerie à feux de revers et desservant les trois créneaux de fusillade de la façade et l'assommoir cités plus haut.

Au-dessus de la baie est gravée la date « 1853 ».

Le bastion 4 est irrégulier et creux. Son flanc droit comporte deux étages de coffres d'escarpe (chacun à une embrasure à canon encadrée de deux créneaux de fusillade verticaux) ouvrant largement à l'arrière sur la cour centrale.

Sa face droite, non terrassée, est fortement inclinée sur l'horizon et comporte neuf créneaux de fusillade verticaux. La face gauche - ou ce qui peut être considéré comme tel - est établie elle-même en tracé pseudo bastionné couronnant l'escarpement rocheux. Son parapet en maçonnerie forme, au sud-est, la cour centrale du bastion.

Ce bastion se raccorde en crémaillère par deux redans à la face droite du demi-bastion n° 1 pour constituer le front 4-1.

Tour réduit (« réduit 9 »)

Tour réduit.Tour réduit. Bâtiment carré à pans coupés, d'environ 18 m de côté, constituant, avec son fossé, l'ouvrage primitif, réalisé entre 1709 et 1712 par l'ingénieur Tardif sur un projet de 1692 de Vauban, reprenant probablement lui-même des propositions antérieures de l'ingénieur Delabat.

A l'origine, la tour, à deux niveaux (rez-de-chaussée casematé en fond de fossé, premier étage: batterie) couverte d'une toiture pyramidale, avait son entrée principale dans la face nord-ouest, au premier étage. Juste en dessous, une poterne permettait de sortir du rez-de-chaussée dans le fossé tandis qu'un passage sous fossé assurait la communication avec la galerie de contrescarpe.

L'état actuel résulte de la restructuration exécutée entre 1847 et 1854 (en même temps que l'on construisait l' enceinte enveloppe) et portant sur les points suivants :

- suppression des issues de la face nord-ouest, sauf jonction souterraine avec la contrescarpe

- approfondissement du fossé de 1 m à 2, 50 m

- création d'une nouvelle entrée dans la face sud-est, en fond de fossé

- voûtement à l'épreuve de l'étage supérieur et suppression de la toiture

- appropriation du fossé, approfondi au rôle de rue du rempart de l'ouvrage.

Rez-de-chaussée : divisé en quatre locaux voûtés par un mur de refend d'une part, les murs encadrant les cages d'escalier d'autre part. Ces locaux repérés a, b (magasin aux vivres, c , d (boulangerie) sur le grand atlas de 1854 sont répertoriés 3, 2, 5, 6 : magasins à matériel et explosifs sur le plan de 1922. La pièce 6 (d) comporte un four pour 150 rations disposé en pan coupé dans l'angle avec le refend, tandis que sous l'escalier d'entrée existe une petite citerne voûtée de 1300 litres.

Communication entre les deux niveaux par escalier à deux volées droites.

Premier étage, également voûté en arc segmentaire, divisé en deux par refend médian se superposant à celui du rez-de-chaussée.

Au rez-de-chaussée, les murs extérieurs sont percés de 16 créneaux de fusillade verticaux à ébrasement intérieur, à raison de 1 dans chaque pan coupé, 3 dans chaque face dont un double dans les faces nord-est et sud-est.

Au premier étage, les murs périphériques sont plus épais au nord-ouest et sud-est (2, 50 m) que dans les faces nord-est et sud-ouest (environ 1 m) moins exposées. On y trouve Il embrasures à canon (pour 10 avant restructuration) :

- une dans chaque pan coupé

- deux dans la face nord-ouest, plus un créneau à fusil

- deux dans la face sud-est

- deux dans la face sud-ouest, chacune encadrée de deux créneaux à fusil

- une dans la face nord-est, plus la porte d'accès à une passerelle reliant cet étage à la batterie Haxo (passerelle actuellement supprimée) .

Fossé du réduit et entrée de la tour.Fossé du réduit et entrée de la tour. La porte d'accès, au milieu de la face sud-est, réemploie selon toute vraisemblance la porte d'origine démontée de la face nord-ouest : la baie à linteau plat surmonté d'un créneau oblique s'ouvre en retrait d'un portail surbaissé encadré de deux pilastres très simples et surmonté d'un entablement. Cet accès est protégé par un haha franchi par un pont-levis à chaînes et contrepoids (identique à ceux des tours modèles 1811 et 1846) venant s'effacer, en position relevée, dans la feuillure du portail. Au-dessus est gravée l'inscription «QVIS AUDEAT MECVM LVCTAR ... ».

Extérieurement l'escarpe s'appuie sur un soubassement constitué de deux lits de grosses pierres de taille reposant sur l'assise rocheuse naturelle. La maçonnerie courante est en moellons appareillés de gris mauve et de calcaire beige. Chaînes d'angles et encadrements de baies en pierres de taille appareillées et harpées.

Dans le pan coupé ouest, juste au-dessus du soubassement, on remarque deux médaillons sculptés ayant porté des armoiries (dont les fleurs de lys royales) martelées ensuite. Près de l'un d'eux est gravée l’inscription «DVM SPIRO SPERO» . La séparation entre les deux niveaux est soulignée par L’ancien cordon de magistrale en forme de boudin, qui a été conservé.

La galerie de contrescarpe périphérique, voûtée en berceau, ne comporte d'autre accès que Je passage souterrain la reliant à la tour: elle pouvait, de la sorte, continuer d'interdire le franchissement intérieur même après que l'ennemi ait pris pied dans l'enveloppe .

Magasin à poudre

Intérieur du bastion 4. A droite, entrée du magasin à poudre.Intérieur du bastion 4. A droite, entrée du magasin à poudre. Implanté sur le terre-plein bas intérieur du bastion 4, donc assez bien défilé aux coups venant du nord et du nord-est, il s'agit d'un bâtiment en élévation, à l'épreuve, donné en 1922 pour une capacité de 7100 kg de poudre en barils de 50 kg (à l'origine: contenance normale 7700 à 9700 kg, maximale de 8500 à 11300 kg).

Du type 1848 - très proche de celui en usage dès Vauban - il comporte intérieurement une salle rectangulaire voûtée en berceau, et divisée en deux par un plancher intermédiaire sur poutres s'appuyant sur des retraites des longs pans et, en pignon, des corbeaux. En sous-sol, vide sanitaire à deux travées voûtées accessibles par trappes . Longs pans doublés par deux niveaux de galeries d'assainissement communiquant avec la chambre à poudre, de chaque côté, par deux barbacanes chicanées.

Communication entre les deux niveaux de stockage assurée par escalier en bois intérieur. Dans la voûte, deux anneaux de charge, placés à la verticale de trappes du plancher intermédiaire, permettaient le hissage des barils de poudre.

Pignons percés, au rez-de-chaussée, de la porte d'entrée précédée d'une avant-cour d'isolement et, au premier étage, de deux fenêtres (condamnées en temps de guerre).

Extrados de la voûte terrassé et couvert d'une toiture en bâtière. L'édifice était protégé par un paratonnerre.

Maçonnerie en gros moellons. Chaines d'angle et encadrements de baies en pierres de taille appareillées et harpées. Porte principale et fenêtres couvertes en arc surbaissé extradossé en gradins.

Conclusion

Malgré ses dimensions modestes et la rareté du décor architectural, le fort des Salettes n'en est pas moins un ouvrage remarquable pour plusieurs raisons :

- site montagneux particulièrement pittoresque

- un des derniers ouvrages bastionnés conçus et réalisés quelques années seulement avant la crise de l'artillerie rayée

- présence d'une batterie casemate à la Haxo1 dont peu d'exemplaires subsistent encore (bastille de Grenoble, Randouillet, château de Belfort)

- excellent état général dû à la qualité de la construction, et aux travaux de remise en état effectués par le club du Vieux Manoir ces dernières années

- tour de force technique représenté par l'exécution de certaines parties, fronts sud-est et nord-est en particulier

- présence d'un des rares spécimens subsistant de pont-levis à zigzag.

Par ailleurs, la tour réduit est un excellent exemple des organes autonomes, dérivant en droite ligne de certaines tours médiévales et qui, en montagne et sur les côtes, sous réserve de ne pas être exposés au canon de siège, ont conservé une utilité jusqu'en 1914.

Elle se place dans une évolution d'organes spécifiques, souvent issus de plans-types adaptés à des besoins particuliers, comme les « redoutes à mâchicoulis» des XVIIe et XVIIIe, les tours côtières du Languedoc (vers 1740), les tours modèles de 1811, corps de garde crénelés de 1846, blockhaus de montagne de 1887 et peut-être même les postes électriques de la ligne Morice (1957).

L'ensemble homogène constitué par la conjonction de l'enveloppe et du réduit constitue un ouvrage de tout premier intérêt.

1Modèle de batterie conçue par le général François Haxo, inspecteur général des fortifications sous la Restauration. Batterie casematée dont les maçonneries recouvertes de terre absorbent le choc des impacts, formant une coquille protectrice qui empêche l'ouvrage de se disloquer.

Vauban propose la création d'une redoute à mâchicoulis en 1692, puis en 1700. Entre 1709 et 1712, une tour carrée entourée d'un fossé est construite. De 1826 à 1854 se succèdent différents avant-projets. Le projet définitif voit le jour de 1847 à 1854 avec la construction d'une batterie à la Haxo, de bastions, du voûtement de la plate-forme de la tour et du magasin à poudre.

  • Période(s)
    • Principale : 1er quart 18e siècle
    • Principale : milieu 19e siècle
  • Auteur(s)
    • Auteur :
      Le Prestre de Vauban Sébastien
      Le Prestre de Vauban Sébastien

      Ingénieur, architecte militaire, urbaniste, ingénieur hydraulicien et essayiste français. Nommé maréchal de France par Louis XIV. Expert en poliorcétique (c'est-à-dire en l'art d'organiser l'attaque ou la défense lors du siège d'une ville, d'un lieu ou d'une place forte), il a conçu ou amélioré une centaine de places fortes.

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      ingénieur militaire attribution par source

L'enceinte inscrite dans un trapèze isocèle comporte quatre fronts dont trois bastionnés et précédés d'un fossé. Une batterie constituée de six casemates se trouve sur le front nord-est. Sur le front sud-ouest, se trouve la porte d'entrée précédée d'un pont-levis. Au milieu du fort se trouve la tour réduit, bâtiment carré à pans coupés de deux niveaux reliés par un escalier à deux volées et couverte d'un matelas de terre. Le deuxième niveau est voûté en berceau segmentaire. Le magasin à poudre comporte un sous-sol, un rez-de-chaussée et un étage carré voûté en berceau. Rez-de-chaussée et étage sont reliés par un escalier en charpente. Le tout couvert d'un toit de tuiles plates à deux pans.

  • Murs
    • pierre moellon
  • Toits
    terre en couverture, tuile plate
  • Plans
    système bastionné
  • Étages
    1 étage carré, sous-sol
  • Couvrements
    • voûte en berceau segmentaire
    • voûte en berceau
  • Couvertures
    • toit à longs pans pignon couvert
  • Escaliers
    • escalier dans-oeuvre : escalier tournant à retours en maçonnerie
    • escalier dans-oeuvre : en charpente
  • Typologies
    casemate à la Haxo ; tour réduit
  • Statut de la propriété
    propriété publique
  • Intérêt de l'œuvre
    à signaler
  • Protections
    classé MH, 1989/02/14
    inscrit MH, 1989/02/14
  • Référence MH

Documents figurés

  • [Plan et 3 coupes de la redoute des Salettes]. / Dessin avec 2 rabats, plume et aquarelle, 28 juillet 1711. 370 x 520 cm. Service historique de la Défense, Vincennes : article 8, section 1, Briançon, carton 1, n° 25.

  • Plan de la redoute projetée sur le plateau de la Pinée. / Dessin avec deux rabats, plume et lavis, 1747. Service historique de la Défense, Vincennes : article 8, section 1, carton 3, n° 6 (18) feuille 17.

  • Profils de la redoute projetée sur le plateau de la Pinée. / Dessin, plume et lavis, 1747. Service historique de la Défense, Vincennes : article 8, section 1, carton 3, n° 6 (19), feuille 18.

  • Plan de la redoute des Salettes. Profil de la redoute sur la ligne AB. / Dessin avec un rabat, plume et lavis, 1747. Service historique de la Défense, Vincennes : article 8, section 1, carton 3, n° 6 (16) feuille 15.

  • Redoute des Salettes, fort d'Anjou, Redoute à Mâchicoulis. / Dessin, 1827. Service historique de la Défense, Vincennes, Fonds du Génie, grand atlas T 336, folio 19.

  • Place de Briançon. Plan de la ville et des forts./ Dessin, plume et lavis, 1854. Service historique de la Défense, Vincennes, Fonds du Génie, atlas des bâtiments militaires.

  • Fort des Salettes. [plans et coupes des casemates]. / Dessin, 1854. Service historique de la Défense, Vincennes, Fonds du Génie, grand atlas, T336, feuille 45.

  • Magasin à poudre au fort des Salettes (coté G) [plans, coupes]. / Dessin, 1854. Service historique de la Défense, Vincennes, Grand atlas, T336, feuille 22.

  • Plan terrier. Fort Dauphin. Fort des Salettes. Fort d'Anjou et Redoute à Machicoulis. / Dessin, sd (19e siècle). Service historique de la Défense, Vincennes, Fonds du Génie, atlas des bâtiments militaires, feuille 4.

Date d'enquête 1987 ; Date(s) de rédaction 1996
(c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général
Truttmann Philippe
Truttmann Philippe

Lieutenant-colonel du génie, docteur en histoire. Chargé de cours à l'École supérieure du génie de Versailles, Yvelines.

Expert en architecture militaire auprès de l'Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France. Réalise de 1986 à 1996 l’étude de l’architecture militaire (16e-20e siècles) de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur : départements des Hautes-Alpes, des Alpes-de-Haute-Provence, partie des Alpes-Maritimes, ensemble des îles d’Hyères dans le Var.

Principales publications : La Muraille de France ou la ligne Maginot (1988)

Les derniers châteaux-forts, les prolongements de la fortification médiévale en France, 1634-1914 (1993)

La barrière de fer, l'architecture des forts du général Séré de Rivières, 1872-1914 (2000)

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Articulation des dossiers
Dossier d’ensemble