Dossier d’œuvre architecture IA06000067 | Réalisé par
Truttmann Philippe
Truttmann Philippe

Lieutenant-colonel du génie, docteur en histoire. Chargé de cours à l'École supérieure du génie de Versailles, Yvelines.

Expert en architecture militaire auprès de l'Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France. Réalise de 1986 à 1996 l’étude de l’architecture militaire (16e-20e siècles) de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur : départements des Hautes-Alpes, des Alpes-de-Haute-Provence, partie des Alpes-Maritimes, ensemble des îles d’Hyères dans le Var.

Principales publications : La Muraille de France ou la ligne Maginot (1988)

Les derniers châteaux-forts, les prolongements de la fortification médiévale en France, 1634-1914 (1993)

La barrière de fer, l'architecture des forts du général Séré de Rivières, 1872-1914 (2000)

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  • enquête thématique régionale, architecture militaire de Provence-Alpes-Côte d'Azur
ouvrage mixte dit ouvrage du Monte Grosso, secteur fortifié des Alpes-Maritimes
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Alpes-Maritimes - Sospel
  • Commune Sospel
  • Lieu-dit près de Sospel
  • Précisions oeuvre située en partie sur la commune Breil-sur-Roya
  • Dénominations
    ouvrage mixte
  • Appellations
    ouvrage du Monte Grosso, du secteur fortifié des Alpes-Maritimes
  • Dossier dont ce dossier est partie constituante
  • Parties constituantes non étudiées
    bloc, souterrain, casemate, édifice logistique

Intérêt stratégique

Aucun édifice préexistant identifié sur le site.

Important ouvrage mixte type CORF - en fait le plus grand de la frontière du Sud-Est -. Pilier d'ossature de la position de résistance de la « position fortifiée n° 2 », moitié nord de la « région fortifiée » continue des Alpes-Maritimes, entre l'Authion et la mer, tel que l'a retenue la C.D.F. dans les propositions contenues dans son rapport au ministre du 12 février 1929, relatives à la réorganisation de la frontière du Sud-Est.

Juché à plus de 1000 m d'altitude sur un des contreforts sud-est de l'Authion, à mi-chemin entre ce massif et la trouée de la Bevera, dominant la route Sospel-Tende, les cols de Brouis et du Perus, la moyenne Roya, tout concourait à en faire la clef de voûte du tronçon fortifié dans ce secteur, et à le doter de moyens puissants.

Indépendamment de sa mission d'action frontale, il doit assurer la continuité des feux de la position de résistance entre l'ouvrage de l'Arboin-Gonella-extrémité droite de l'Authion-et celui de l'Agaisen, qui commande la trouée de la Bevera, à Sospel.

Le 14 janvier 1930, par la loi-programme dite « loi Maginot », le parlement accorde 2.900 MF de crédits à la construction des « fortifications nouvelles ». Sur ce montant, une somme de 204 MF est réservée à la frontière du Sud-Est (première urgence) pour une estimation totale de 700 MF : le général Belhague, inspecteur général du génie, président de la C.O.R.F. (organisme créé en 1927 et qui doit assurer l'exécution du système conçu par la C.D.F.) estime que même limité à une première urgence, le crédit accordé ne permet pas de faire quoi que ce soit de sérieux.

Une intervention du maréchal Pétain, vice-président du Conseil supérieur de la guerre, auprès du ministre, permet d'obtenir 158 MF supplémentaires en 1930. Sur la base des 362 MF ainsi escomptés pour les exercices 1931-35, la C.O.R.F. propose au ministre le 24 décembre 1930 (sous n° 434/FA) un projet de fractionnement des réalisations en trois catégories :

1) Travaux de première urgence (« programme restreint ») comprenant les ouvrages pouvant être construits de suite, par entreprise civile, sur les crédits disponibles.

2) Travaux de deuxième urgence, comprenant les ouvrages ne pouvant être entrepris sans allocation de crédits supplémentaires, et donc à ajourner.

3) Ouvrages secondaires pouvant être construits en première urgence mais par main-d'œuvre militaire, si celle-ci est accordée.

Le Monte Grosso, compte tenu de son importance, est classé en première catégorie. Le ministre (état-major de l'armée, 3e bureau) ayant approuvé ces propositions par D.M. n° 214 3/11-1 le 26 janvier 1931, la C.O.R.F. arrête, en conséquence, le programme d'exécution par note n° 44/FA le 31 janvier 193l. Le Monte Grosso y figure pour une somme de 20, 9 MF, mais son voisin de gauche, l'Arboin, a dû être ajourné (l’affaire ressurgira plus tard en 1937, avec le projet de l'ouvrage de Plan Caval).

Projet et chronologie des travaux

Un premier A.P.S. (n° 538 F du 29 août 1931) est élaboré par la D.T.F. de Nice (lieutenant-colonel André) et prévoit un ouvrage palmé à 8 blocs (A à H) pour une estimation de 29,2 MF (dont 18.539.200 F de construction et 10.660.800 F pour l'armement, les munitions et les cuirassements). La C.O.R.F. (n° 514/FA du 12 novembre 1931) s'émeut devant le dépassement par rapport à l'estimation initiale, et invite à essayer de le réduire en fusionnant les blocs B et C (casemates d'artillerie de flanquement nord et sud), en supprimant le bloc F par insertion des mortiers de 81 dans le bloc « fusionné » B-C. L'étude, reprise par la D.T.F. de Nice, conclu en janvier 1932, débouche sur des impasses. De plus, il conviendrait de placer les mortiers de 75/31 du bloc sud (B) sous casemates cuirassées, donc plus chères.

En fait, le plan de masse de l'ouvrage doit être maintenu tel qu'il est.

Les travaux démarrent le 27 novembre 1931, précédés par la construction d'une route d'accès défilée de plus de 10 km, partant de Sospel, avec embranchement dérivé, au passage, vers l'Agaisen (fig. 1). (Le prolongement de cette route jusqu'au col de Brouis par la Baisse de Levens a été envisagé. L'idée n'est toujours pas oubliée aujourd'hui et est associée à un projet de promotion touristique du site). Le marché de gros-œuvre est adjugé à l'entreprise Borie (ainsi que celui du col de Brouis) et la conduite du chantier confiée au capitaine Simon, de la chefferie de fortification de Nice.

La construction se poursuivra jusqu'au 1er juin 1935, mais les projets techniques de l'ouvrage (organisation souterraine) et des différents blocs ne seront arrêtés qu'en 1932 et même (blocs G et H) août 1933, avec des modifications introduites au dernier moment. Au 1er octobre 1933, l'estimation de la dépense atteint 38,44 MF, et devant le constat, en 1933, d'un dépassement général de 680 millions, la C.O.R.F. est contrainte de décider l'ajournement du bloc B, non encore coulé, mais dont la galerie d'accès est déjà creusée et utilisée comme galerie de service, et les mortiers de 75 mis en fabrication (ils seront affectés, en 1938, à l'ouvrage de Plan Caval). L'économie réalisée est donc moindre que celle escomptée, l'ouvrage réduit à 7 blocs, et le flanquement double, au canon, de l'intervalle Agaisen-Monte Grosso ramené à une action unilatérale (sauf intervention des tourelles des deux ouvrages).

Au fur et à mesure de l'achèvement de la construction, on met en place cuirassements, armement et équipements (1934-35).

A la date du 31 décembre 1936, les fiches d'ouvrages terminés font état de nombreux travaux d'aménagement ou de besoins nouveaux restant à faire (chambres à douilles vides, ameublement du PC et de l'infirmerie, obturation de la galerie du bloc B (2), monte-charge des blocs d'infanterie 7 et 8, nivellement des dessus, réseaux barbelés etc.) dont une partie seulement se réalisera avant 1940. La dépense atteint alors 40.414.000 F.

A ce moment, l’ouvrage représente un total de 39.400 m3 de terrassements, 15.220 m3 de béton armé à ciel ouvert, 30.600 m3 de terrassements et 12.250 m3 de maçonnerie en souterrain. Les cuirassements totalisent environ 640 tonnes d'acier à blindage ou d'acier moulé, hissés, pièce par pièce, au câble à partir de la RN 204 au pied des pentes est du mont, où la souille dans le sol est restée visible très longtemps.

En 1938, par D.M. 235/EMA du 20 janvier (S.H.A.T. carton 33 N 202) le créneau arrière du bloc 3 (T3) pour 1 JM battant les abords du bloc d'entrée et le dernier lacet de la route d'accès, est retenu pour recevoir une arme mixte de casemate pour lutter contre une irruption éventuelle de blindés : l'engin, qui était à l'état de prototype en 1940, ne sera jamais livré. Antérieurement, la mise en place d'un canon A.C. de 37 mm avait été envisagée.

Casernement de sûreté inachevé.Casernement de sûreté inachevé.Cette même année se poursuit l'étude, lancée en 1937, du casernement de sûreté destiné à loger, au plus près de l'ouvrage, le noyau actif de l'équipage, trop éloigné de Sospel. Déjà, en 1933, on avait racheté les petits bâtiments de l'entreprise et on commence en 1938 la construction d'un grand bâtiment en L, à 4 niveaux (sous-sol, rez-de-chaussée, deux étages plus combles) pour 2 officiers célibataires, 10 sous-sous-officiers et 61 soldats. A côté, on aménagera des logements pour 2 sous-officiers mariés, un lavoir séchoir, un centre d'habillement, un bâtiment pour l'intendance, et des latrines.

Mis en chantier tardivement, le bâtiment A restera inachevé en 1939, limité au gros-œuvre, tel qu'il se dresse encore aujourd'hui, au dernier virage de la route d'accès.

En 1939, l'ouvrage fait partie du secteur fortifié des Alpes-Maritimes, sous-secteur de Sospel quartier de Brouis. L'équipage avait, en 1936, un effectif théorique de 7 officiers, 34 sous-officiers et 329 gradés et soldats (465 selon le général Montagne) dont l'infanterie est fournie par la 40e demi-brigade alpine de forteresse (85e B.AF.), et l'artillerie par la 10e batterie du IIIe groupe du 157e RAP., plus un détachement du génie (sapeurs mineurs et électromécaniciens) du service de santé etc. le tout placé sous le commandement du commandant Cucchieti.

On sait que ce n'est que le 10 juin 1940 que l'Italie déclara la guerre à la France et le 20 qu'elle déclencha son offensive dans les Alpes-Maritimes. Compte tenu de sa portée (12.000 m) et de sa capacité à tirer sur 360°, c'est essentiellement avec la tourelle de 75/83 que l'ouvrage intervint dans la bataille dès le 11 juin. Du 11 au 25 juin les pièces tirèrent 1624 coups. La tourelle de 135 (portée 5600 m) et les pièces de casemate ne purent intervenir en raison de leur orientation ou leur trop faible portée, l'avance italienne s'étant arrêtée bien en deçà de leur zone d'action. Les tirs sont observés par les observatoires cuirassés des blocs 7 et 8 de l'ouvrage, celui du B2 du col de Brouis et ceux, complémentaires, de la Croix de Cougoule, de Colla Longa, du Grand Ventabren, de l'Arboin, du col d'Agnon, Plan Caval, l'Orthighera et de la Croix d'Albarea. Compte tenu de l'objectif important qu'il représentait, l'ouvrage sera violemment bombardé par l'artillerie italienne - sans aucun effet -. On note un coup au but de 149 mm sur la calotte de la tourelle de 75 (peinture écaillée) plusieurs coups de 149 et 75 sur un bloc avant, une bombe d'avion sur le bloc 3, un obus de 380 mm sur le bloc 4, au total 200 obus de 149 à 380 mm sans résultat.

A l'armistice, l'ouvrage est évacué et mis en gardiennage, il est occupé par les Italiens en novembre 1942, puis les Allemands en septembre 1943 après « l'armistice Badoglio ». Après le débarquement de Provence, il se retrouve, sans dommages majeurs, sur la ligne de feu : il semble que ce soit à cette occasion que la cloche GFM du bloc 8 ait été dynamitée pour en permettre l'évacuation.

Lors des combats entre la 1ère D.F.L. et les grenadiers allemands du 107e régiment, le 10 avril 1945, c'est du Monte Grosso que part l'attaque française sur le col de Brouis et la Croix de Cougoule.

A cette occasion, la tourelle de 75 du bloc 5 et les mortiers de 81 mm du bloc 4 ont été réactivés sous les ordres de l'ancien commandant de l'artillerie de l'ouvrage en 1940 ingénieur de l'usine à gaz de Menton rappelé au service à l'occasion. Intégrées au système d'appui de feux du dispositif d'attaque, les pièces interviennent effectivement pour couvrir le repli des éléments français bloqués, avec pertes, devant la Cime du Bosc, et arrêter net la contre attaque allemande : à ce titre, ce sont les dernières pièces de la ligne Maginot à avoir tiré sur l'ennemi.

Repris en charge, après 1945, par le service du génie, l'ouvrage est remis en condition (la cloche GFM du bloc 8 reconstituée en béton) dans le cadre du « secteur de défense des Alpes » jusqu'en 1964, date de l'abandon des fortifications par la France, puis celui d'une hypothétique « zone militaire de résistance prolongée » ensuite. Abandonné dans les années 70, l'ouvrage a été l'objet d'effractions et d'actes de pillage et de vandalisme. Il est actuellement (1994) en cours d'aliénation.

Analyse architecturale

L'ouvrage est implanté sur une longue crête, orienté sud-ouest-nord-est, présentant à chaque extrémité un sommet légèrement surélevé : l'Albaréa, à l'ouest (1272 m), le Monte Grosso, à l'est (1266 m). Du type «palmé », il est constitué d'une infrastructure souterraine, sur laquelle se greffent, en majorité par puits, 7 blocs traités en protection 3 et 4. L'ensemble, articulé autour d'une longue galerie centrale passant sous la ligne de crête, s'inscrit dans une bande de 520 m de long et 150 m de large, soit une emprise très supérieure en longueur à la moyenne des ouvrages mixtes du Sud-Est.

La topographie et la géologie ont amené à implanter le bloc d'entrée à la cote 1198, de plain-pied avec la galerie, dans la contrepente ouest de l'Albaréa, à 72 m en contrebas du sommet. Cette situation procure, certes, aux galeries de la caserne, de l'usine etc. groupées non loin de l'entrée, une protection exceptionnelle de près de 70 m, très supérieure à la couverture requise contre les plus gros calibres de l'époque.

Par contre, pour certains blocs placés en crête (4 et 5), cela entraîne des hauteurs de puits considérables (51 et 43 m). Compte tenu de la vitesse de déplacement des monte-charges (0,20 et 0,35 m/s), donc de leur débit d'une part, de la consommation prévisionnelle des pièces d'autre part, on aurait couru, en cas de tir prolongé, le risque d'une rupture de l'approvisionnement en munitions de l'armement de ces blocs, si on avait placé les magasins M2 au niveau de la galerie et du pied du puits, selon la règle générale.

En conséquence, et comme cela s'est pratiqué dans certains ouvrages du Nord-Est (Metrich : blocs 8 et 11, Hachemberg : PC et blocs 11 et 12) on s'est résolu à creuser les magasins M2 en « entresol », à 20 m environ sous les blocs eux-mêmes.

Il convient d'ajouter que lors de la mise au point du projet, on avait envisagé, un temps, jusqu'à 11 blocs, dont trois cloches isolées destinées à battre les versants latéraux de la crête.

A l'issue des remaniements successifs, on se réduisit à 8 blocs, désignés provisoirement par les lettres, dont la transposition en chiffres fut arrêtée après approbation des propositions du service local en date du 22 avril 1936, et se décompte comme suit :

Bloc A - entrée : bloc 1

Bloc B - casemate d'artillerie sud : bloc 2 (ajourné en 1933 et non construit)

Bloc C - casemate d'artillerie nord : bloc 3

Bloc D - tourelle de 75-33 : bloc 5

Bloc E - tourelle de 135 : bloc 6

Bloc F - casemate de 81 mm : bloc 4

Bloc G - observatoire et casemate d'infanterie : bloc 7

Bloc H - observatoire et casemate d'infanterie : bloc 8

C'est la désignation définitive, en chiffres, qu'on suivra pour la description.

Les blocs

Bloc 1 ("A")

Bloc 1. Vue générale avant gauche.Bloc 1. Vue générale avant gauche.Bloc d'entrée mixte, type Sud-Est, de plain-pied et à ravitaillement par camion. Traité en protection n° 3 c'est un monolithe de 1.240 m3 de béton armé ayant nécessité une excavation de 4.600 m3 à flanc de montagne, dans la face sud-ouest de l'Albarea, consolidée en cours de travaux, compte tenu de l'instabilité du terrain, par des soutènements en béton maigre, puis après, par un perré en béton cyclopéen. Le bloc est encastré dans le terrain, seule la façade principale est dégagée.

Précédée d'un fossé diamant de 2 m de large et 3 m de profondeur, et surmontée d'une visière portant, sur la tranche, les 8 potelets supports de l'antenne radio, la façade est tracée selon un plan en tenaille à deux faces encadrée de deux orillons cylindriques abritant, chacun, une cloche (GFM à gauche, LG à droite) et une caponnière de FM, dont les créneaux croisent leur tir pour flanquer la façade et battre la plateforme extérieur, extrémité de la route d'accès.

Vue de l'extérieur, la façade présente, de droite à gauche, dans la face droite :

- sous la visière, une grosse prise d'air munie d'un persiennage métallique

- l'entrée des matériels, baie rectangulaire de 2, 60 m de large munie d'un pont-levis métallique à bascule en dessous, construit par la firme Moissant, Laurent et Savey, à Paris (marché S.M.F. du 26 septembre 1932 pour 18 matériels, tous destinés au sud-est). La baie donne accès, de plain-pied, à un premier hall de 3, 50 m de large, destiné à abriter un camion de ravitaillement en cours de déchargement. Ce hall, muni sur le côté gauche d'une voie de 0, 60 scellée dans le radier, tête du réseau intérieur de l'ouvrage, est battu, intérieurement, par 3 créneaux de FM percés obliquement dans les piédroits (l à gauche, 2 à droite). Après un coude de 37 grades à gauche il est fermé, en fond, par une première porte blindée roulante, à deux vantaux, type A 1 bis, donnant accès à un second hall rectiligne d'environ 30 m de long, permettant le déchargement de 3 camions en file, avec enlèvement du fret par la voie ferrée placée, cette fois à droite.

Ce second hall est fermé en fond, après un coude de 17 gr, par une seconde porte blindée roulante type BH accolée à un blockhaus de FM de défense intérieur ; aux premier et deuxième tiers de la longueur, s'ouvrent, à droite, dans le piédroit de la galerie, deux alvéoles servant de garages à wagonnets du réseau ferré. Passé la seconde porte, on pénètre alors au cœur de l'ouvrage.

En revenant à la façade, dans l'aile gauche s'ouvre l'entrée des hommes, dont la baie rectangulaire, desservie par une passerelle amovible jetée sur le fossé diamant, est fermée, en façade par une porte grille 9 ter et, après un retour à droite de 90° enfilé par un créneau FM, une porte blindée étanche 4 ter A. Dans le prolongement de ce retour, s'ouvre à gauche, dans le radier, la trappe grillagée d'une prise d'air de l'ouvrage, avec conduit en sous-sol.

Cette entrée des hommes donne accès à un ensemble de locaux, dont une station radio, le corps de garde et le pied de la cloche GFM, d'où un couloir, fermé en bout, par une porte étanche non blindée, ramène à la galerie centrale, derrière la première porte blindée roulante.

Symétriquement par rapport à l'entrée des matériels, d'autres locaux, moins importants, sont constitués par le pied du puits de la cloche LG, la souche de la prise d'air de façade et les postes de tir des créneaux FM de défense du hall.

Un sous-sol partiel se trouve sous l'aile gauche, constitué de quelques locaux techniques.

Bloc 2 (" B ")

Bloc non construit, bien que prévu en premier cycle, car ajourné à cause du dépassement de crédits.

Destiné à flanquer, au canon, l'intervalle Monte-Grosso-Agaisen, il devait consister en une casemate, dérivée de la casemate de Bourges type 1900, à deux niveaux, armée de 2 mortiers de 75 M 31, avec, à l'arrière, un avant-corps formant caponnière de FM (dont un créneau tirant à revers sur l'entrée) et, au-dessus, une cloche GFM de défense de superstructure (cloche GFM« A» G.M. en deux parties à 5 créneaux).

Il y a lieu de rappeler que, lors de la décision d'ajournement, la galerie d'accès à ce bloc était déjà percée et débouchait à l'extérieur à l'usage de galerie de service : il fallut donc la recombler en partie lors de l'achèvement des travaux. De plus, les matériels de 75 avaient été mis en fabrication par le service de l'artillerie, et furent ultérieurement (1938) affectés au bloc 2 de l'ouvrage de Plan Caval mais, faute de temps, ne furent pas mis en place: on ne sait ce qu'ils sont devenus après 1940.

Bloc 3 ("C ")

Bloc 3. Ensemble de la façade.Bloc 3. Ensemble de la façade.Symétrique du précédent, il a, pour mission le flanquement au canon, vers le nord, de l'intervalle Monte Grosso-ouvrage (non construit) de l'Arboin-Gonella. Structurellement, il est constitué par un dérivé amélioré de la casemate de Bourges1 de 1900, à deux niveaux, très allongé pour des raisons de défilement des embrasures par rapport à la direction dangereuse de l'ouvrage italien de la Barcone di Marta. Contrairement au précédent, il était armé de 2 matériels de canons-obusiers de 75 modèle 29 de casemate (portée 11.900 m) placés en chambres de tir en ressauts décalés en échelons refusés avec à l'arrière un troisième ressaut abritant un observatoire sous casemate et, à revers, un créneau JM couvrant le bloc d'entrée. Les façades des embrasures sont précédées, chacune, d'un tronçon indépendant de fossé diamant.

Desservi, à partir des galeries souterraines, par un puits rectangulaire de 5, 42 m avec escalier à volées droites et paliers tournant autour de la cage du monte-charge à munitions, il représente un volume de 1.130 m3 de béton spécial ayant nécessité 4500m3 de terrassements à ciel ouvert.

Au niveau des galeries, et isolés de l'ouvrage par sas étanche et porte blindée on trouve, en alvéoles, le magasin M2 (capacité : 3200 coups), le PC de bloc et la machinerie du monte-charge.

A l'étage inférieur, on trouve la ventilation gazée et les chambres à douilles des canons ainsi que l'issue de secours du bloc, avec porte blindée type Il et grille 8 bis, débouchant dans le fossé diamant.

L'étage supérieur, à plan identique pour raison d'homogénéité structurelle, on trouve les chambres de tir des deux pièces et leurs locaux annexes, la caponnière arrière avec :

Bloc 3. Créneau observatoire.Bloc 3. Créneau observatoire.- Un observatoire cuirassé sous casemate (du même type que celui originel du B4 de l'Agaisen et du B3 de Roquebrune) sous trémie spéciale adaptée à l'équipement de créneau de la cloche GFM « A » (donc apte à recevoir le bloc jumelle « D », l'épiscope L 639 ou le FM de cloche). Ce cuirassement, adapté à un champ d'observation réduit à 60 grades permettait l'économie partielle d'une cloche observatoire VDP soit un gain d'environ 100.000 F à l'époque.

Bloc 3. Créneau JM arrière.Bloc 3. Créneau JM arrière.- A revers, le JM sous trémie type n° 3 sous niche blindée, tirant à revers sur le bloc 1. Ce créneau avait été retenu pour recevoir une arme mixte de casemate, non livrée en 1940. Le plancher de l'ébrasement extérieur est curieusement incliné, à droite, pour s'adapter à la pente du terrain à battre. Associé avec une goulotte lance-grenades et un périscope de fossé, ce créneau, dont le champ de tir est limité à 36 grades rejette ses douilles à l'extérieur dans une fosse en béton et est protégé par une visière arrondie.

On notera, dans le flanc de l'orillon et celui de la première pièce, la présence d'un créneau FM de défense de façade, associé avec une goulotte lance-grenades et un périscope horizontal.

A l'avant du bloc, émergeant de l'orillon, on trouve une cloche GFM « A », GM, à 5 créneaux (1 N. - 2 S - 2 Ex) assurant la surveillance et la défense rapprochée des dessus et des abords.

Les 2 tubes de 75 modèle 29 ont été enlevés après 1979 par des associations pour meubler ou recompléter des « ouvrages musées» (dont un à Fermont, l’autre au B2 du Barbonnet).

Bloc 4 (" F ")

Bloc non visité intérieurement : ce monolithe de 2.300 m3 de béton armé, ayant requis 6.600 m3 de fouilles est situé, au-dessus de l'entrée, légèrement à contrepente de l'arête sommitale. Il regroupe 4 pièces de mortiers de 81 mm modèle 32, dont 2 flanquant à gauche vers le col de Brouis, et 2 à droite flanquant vers l'Agaisen, en doublage de ceux du bloc 3 de ce dernier.

Bloc 4. Face droite (sud).Bloc 4. Face droite (sud).Bloc 4. Face nord-est (gauche).Bloc 4. Face nord-est (gauche). Bloc 4. Détail de la contrescarpe du fossé diamant.Bloc 4. Détail de la contrescarpe du fossé diamant.

Les pièces effectuant exclusivement du tir vertical à 45°, on a pu ainsi défiler le bloc aux vues des observatoires italiens, tout en groupant dans un seul bloc des pièces identiques, permettant une homogénéité des approvisionnements.

Compte tenu de sa situation, le bloc est desservi par un puits de 51, 17 m - le plus haut de l'ouvrage, dont le pied se situe à proximité immédiate de la centrale électrique, ce qui a conduit à y inclure l'évacuation des gaz brûlés et air vicié (bloc cheminée) ainsi qu'une des stations radio, ce par souci très logique d'économie. Mais ceci sous réserve de faire fonctionner la ventilation du bloc (comme nous avons pu le constater lors d'une visite en 1965) faute de quoi les gaz d'échappement des diesel y rendaient le séjour pénible, sinon intenable.

L'édifice, à deux niveaux, dessine le plan d'un polygone irrégulier à quatre côtés, résultant de la combinaison de 2 casemates de 81 mm, à directrices décalées de 116 grades, le tout adossé à une façade arrière dégagée, où débouche la cheminée et munie en outre d'une issue de secours, flanquée par une caponnière de FM.

Les chambres de tir des pièces, groupées deux à deux et séparées par un refend partiel, sont situées à l'étage supérieur, avec embrasures débouchant, sans visière, mais sous une dalle relevée, dans l'élément de fossé diamant propre à chaque façade. Au même niveau, on trouve le débouché horizontal du puits d'échappement (1, 10 x 1, 50), l'issue de secours: corridor coudé à 90° fermé par une porte blindée n° 11 A et, en façade, une grille n° 8 bis, le local radio dont l'antenne était portée par des potelets scellés dans la visière de la façade nord-ouest, et le pied du puits de la cloche GFM. Celle-ci, émergeant de la dalle, est une cloche GFM « A », GM, à 5 créneaux (2 S.-3 N.) assurant la surveillance et la défense des dessus.

A l'étage inférieur, identique en plan, on trouve les locaux de préparation des munitions dont les magasins M2 sont situés, à mi-hauteur du puits, pour les raisons exposées plus haut (sol à 15, 95 m sous le radier de l'étage inférieur du bloc).

Enfin, au niveau des galeries de l'ouvrage, et compte tenu des dispositions précédentes, on ne trouve que quelques petits locaux, dont le PC de bloc, isolés par un sas et une porte blindée.

Le puits desservant le bloc présente la particularité d'avoir l'escalier logé dans une cage accolée à celle du monte-charge, au lieu de tourner autour.

Bloc 5 (" D ")

Situé sur l'arête sommitale, en bordure nord-ouest de l'ensellement séparant les deux sommets, c'est un bloc pour tourelle à éclipse pour 2 canons obusiers de 75 M 33, conforme au plan type de la notice du 22 janvier 1932, complété par une cloche GFM à 3 créneaux assurant la défense rapprochée.

C'est un monolithe sans façade, de plus de 2.800 m3 de béton armé, traité en protection 4 pour la dalle, en raison des dimensions invariables de l'engin cuirassé qu'il renferme, seuls les piédroits ayant été partiellement réduits, par ressauts du haut vers le bas.

Bloc 5. Tourelle de 75/33 en position de tir.Bloc 5. Tourelle de 75/33 en position de tir.La tourelle, réalisée par la firme Batignolles-Chatillon, porte le n° 218, c'est-à-dire qu'elle est le 18ème engin des 20 commandés par marché SMF du 9 septembre 1931 (plus 1 par avenant du 8 février 1938) dont la dernière a été livrée en novembre 1934 (prix unitaire du marché: 3.633.000 F + 250.000 F de transport). Comme les 5 engins de ce type installés sur les Alpes, elle est munie de pièces ayant conservé la culasse Nordenfelt à bloc excentré du 75.1897 de campagne. Les tubes sont en place, sans culasse, seuls manquent l'optique et les 2 tubes de rechange.

La cloche est placée, par adjonction, dans l'axe du bloc, avec accès par le M3. C'est une cloche GFM type A, GM, à 3 créneaux normaux,

Le bloc, à deux niveaux, est desservi par un puits rectangulaire de 44 m de haut avec escalier à volées droites en béton et paliers, tournant autour de la cage d'un monte-charge de 2.500 kg à machinerie inférieure.

Compte tenu de la hauteur du puits, les magasins M2 sont situés en entresol 19 m en dessous du bloc. De ce fait, au niveau des galeries de l'ouvrage les locaux, isolés par un sas, se réduisent à la ventilation « air pur », le PC et central téléphonique du bloc, la chambre à douilles et la machinerie du monte-charge.

La ventilation gazée est installée à l'étage inférieur du bloc, avec aspiration par prise d'air cuirassée émergeant de la dalle, tout comme le refoulement de l'air vicié.

Organe le plus puissant de l'ouvrage et doté, en plus, d'une possibilité de tir dans toutes les directions, ce bloc est largement intervenu dans les combats de juin 1940 puis, à nouveau, en avril 1945. A ce titre, il a été pris à partie par l'artillerie italienne qui a réussi à placer un coup de 149 mm sur la calotte (blindée à 30 cm d'acier spécial) sans aucun effet : la trace en est encore visible aujourd'hui.

Bloc 6 (" E ")

Situé à 90 m à l'est du précédent, dans l'ensellement de la ligne de crête, entre les deux sommets. Cette position convient parfaitement à un bloc faisant exclusivement du tir indirect, et bénéficiant, de ce fait, d'un bon défilement.

Bloc 6. Vue générale des dessus. Au premier plan, cloche LG. Au deuxième plan, tourelle de 135 en position de tir. Entre les deux, les cloches de prise d'air.Bloc 6. Vue générale des dessus. Au premier plan, cloche LG. Au deuxième plan, tourelle de 135 en position de tir. Entre les deux, les cloches de prise d'air.

Ce monolithe de 2.850 m3 de béton armé, ayant nécessité 4.950 m3 de terrassements à ciel ouvert, abrite une tourelle à éclipse pour 2 « lance-bombes » (obusiers) de 135 mm modèle 1932, complétée par une cloche lance-grenades.

Le bloc, traité en protection n° 4 pour la dalle, est conforme dans ses dispositions à la notice du 14 août 1930, avec cloche lance-grenades logée dans l'angle sud-est du massif.

La tourelle porte le n° 110, c'est-à-dire la dixième tourelle de ce modèle (sur 17 fabriquées) réalisée par la firme Châtillon-Commentry en exécution d'un marché SMF passé le 24 juillet 1929 (les 7 suivantes sortant des usines de Fives Lille pour les tourelles, Châtillon-Commentry pour les avant-cuirasses.)

Prix de revient estimé du cuirassement (25 novembre 1931) : 2.200.000 F+ 150.000 F de transport.

Compte tenu de la faible portée des pièces (5.600 m), l'engin n'est pas intervenu dans les combats de 1940. Révisé et remis en état vers 1954, il a perdu un tube prélevé par une association, après l'abandon de l'ouvrage.

Le bloc, enterré et sans façade, est à deux niveaux reliés aux galeries souterraines par puits rectangulaire de 23 m à escalier à volées droite et paliers tournant autour de la cage du monte-charge à machinerie inférieure.

Compte tenu de la hauteur admissible du puits, les magasins M2 (obus et charges) chambre à douilles, le PC du bloc, la ventilation « air pur » se situent au pied du puits, isolés de la galerie principale par un sas étanche.

Le bloc proprement dit renferme (outre la tourelle), à l'étage inférieur, les chambres du personnel de service (10 hommes couchés + le chef de tourelle) et, à l'étage supérieur le magasin M3, la ventilation « air gazé » dont l'aspiration, comme le rejet de l'air vicié, se fait par deux prises d'air cuirassées en dalle.

Bloc 7 (" G ")

Bloc 7. Vue d'enfilade prise de la droite.Bloc 7. Vue d'enfilade prise de la droite.Situé à la crête militaire de l'extrémité sud-est du mouvement de terrain, c'est un monolithe de 1.900 m3 de béton, pour 5.300 m3 de terrassements, et la combinaison d'un observatoire d'artillerie et d'une casemate d'infanterie.

Son plan en V très ouvert (ce plan, et l'angle d'ouverture entre les deux ailes, ont été déterminés de manière à ce que l'aile gauche, qui renferme la cloche observatoire, constitue un orillon défilant, à gauche, l'embrasure de la cloche JM contre les coups d'écharpe venant de l'est) regroupe :

- dans le flanc droit un jumelage de mitrailleuses, sous trémie n° 3, flanquant, à droite, les pentes et l'intervalle vers l'Agaisen

- au-dessus, une cloche GFM « A » GM à 5 créneaux assurant à la fois la surveillance et la défense des dessus, et la mission de cloche conjuguée de l'observatoire voisin

- au centre, une cloche JM GM/2 tirant sur le Grazian et la crête frontière

- dans l'orillon, à l'extrémité gauche, une cloche observatoire V.D.P.

Relié aux galeries souterraines par puits carré de 23, 40 m, avec escalier tournant à volées droites, il comporte deux niveaux principaux dont un aveugle.

- A l'étage inférieur : ventilation air gazé, latrine.

- A l'étage supérieur : chambre de tir du JM (avec goulotte lance-grenades, périscope horizontal et rejet des étuis dans une fosse bétonnée extérieure) protégée, extérieurement par une visière, et les puits d'accès aux 3 cloches.

Bloc 8 (" H ")

Bloc 8. Dessus. Au deuxième plan, à gauche, cloche GFM reconstituée.Bloc 8. Dessus. Au deuxième plan, à gauche, cloche GFM reconstituée.Situé à 120 m au nord du précédent, à l'angle nord-est du mouvement de terrain, c'est un observatoire d'artillerie orienté vers le col de Brouis et la Roya. Il comporte, en outre, un JM sous casemate flanquant, à revers, le versant nord de l'ouvrage.

Ce monolithe de 1.300 m3 de béton armé, pour 7.200 m3 de terrassements, dessine un plan en triangle rectangle, à deux niveaux à arêtes arrondies.

A l'angle nord, émerge une cloche GFM « A » GM à 5 créneaux et cuvelage renforcé. Le cuirassement a été en partie détruit en 1945 par explosion intérieure pour ouvrir une issue, et a été réfectionné ensuite en béton : expédient de fortune, justifié par le manque de crédits. Cette cloche, en plus de sa mission normale de surveillance était appropriée à celle de cloche conjuguée à l'observatoire.

A l'angle est émerge une cloche observatoire VDP (observatoire d'artillerie).

Le créneau JM, doté d'une trémie 3, est percé dans la face ouest. Il rejette ses étuis à l'extérieur dans un caisson en béton, ne comporte pas de visière et est associé, latéralement, à un périscope horizontal et une goulotte lance-grenades.

Le bloc est relié aux galeries par puits de 10 m, avec escalier tournant. A l'étage inférieur on trouve le logement pour le personnel de service (4 places couchées), une latrine et la ventilation gazée, avec prise cuirassée en dalle. L'étage supérieur regroupe essentiellement les locaux de combat (poste de travail des observateurs, chambre de tir du JM, approvisionnements de cartouches de 7,5).

Galeries souterraines

L'infrastructure souterraine de l'ouvrage, protégée, comme déjà dit, par une très forte couverture de terrain naturel, est constituée par un ensemble de locaux techniques ou de logement regroupés à l'arrière près du bloc d'entrée, et desservis par une galerie centrale à peu près rectiligne ouest-est, partant de l'entrée pour se terminer au pied des puits des blocs 7 et 8 les plus avancés. Des dérivations latérales desservent les blocs et irriguent les groupes de locaux. Ces locaux souterrains sont voûtés en plein-cintre ou en anse de panier construits en maçonnerie selon des gabarits normalisés.

Sitôt franchie la deuxième porte blindée roulante on rencontre un carrefour et on croise une grande transversale tracée en U renversé qui aboutit, à gauche, au bloc 3, et devait aboutir à droite au bloc 2 (non construit) en desservant, au niveau du coude, le pied du puits du bloc 4. Pendant les travaux de construction, cette branche droite débouchait à l'extérieur et était utilisée comme galerie de service pour l'évacuation des déblais: elle ne fut recomblée que tardivement (1937) à son extrémité.

Peu après le carrefour, on coupe un alignement d'alvéoles transversaux d'environ 4 m de large et 3,55 m sous clef contenant :

- à gauche, la salle de neutralisation d'ouvrage, avec deux batteries de 10 filtres standard, montées en parallèles et disposées le long des parois, avec aspiration en carneau venant, sous le radier, de la prise du bloc 1, et soufflage dans la galerie par conduits en tôle galvanisée, dont une dérivation traverse une batterie de chauffe.

Cuisine.Cuisine.- à droite, la cuisine, avec guichet de distribution et bacs à déchets donnant sur la galerie principale, à gauche, le long du piédroit, une cuisinière Arthur Martin à 5 éléments munis de brûleurs au fioul et surmontés d'une hotte en tôle d'acier greffée, comme la cheminée de l'appareil de cuisson, sur le réseau « air vicié » de l'ouvrage. Les parois sont carrelées en faïence blanche sur 2 m de haut, et l'équipement comporte les habituels bacs à plonge. L'alvéole se poursuit, en fond, d'un second tronçon renfermant des locaux annexes.

Quelques mètres plus loin, nouvelle série d'alvéoles perpendiculaires à la galerie et séparés selon la règle du « tant plein que vide » (2 à gauche - 3 à droite) :

1) A gauche : les magasins aux vivres de la cuisine.

Centrale électrique. Vue d'enfilade en direction du fond.Centrale électrique. Vue d'enfilade en direction du fond.2) A droite : la centrale électrique à plan en U, dont une branche et le retour en L utilisés comme salle des groupes, et la deuxième branche abrite les réservoirs à gazole. La salle des machines abrite, en file, 4 groupes électrogènes (et non 3 comme d'usage dans le Sud-Est) à moteur diesel SMIM 6 SR 19 de 150 CV entraînant des alternateurs 210 V triphasés. Le long du piédroit de droite, on trouve les réservoirs journaliers à gazole et les bouteilles de lancement des groupes ; à gauche, le tableau électrique de contrôle et de couplage et les départs.

Dans l'aile en retour, on trouve: les groupes convertisseurs 210 V-110 cc des tourelles des blocs 5 et 6, et un groupe CLM 108 installé après coup en lieu et place du CLM LH 39 habituel, les ventilateurs d'extraction du local et les chambres de détente des échappements. L'installation a été réalisée par marché du 31 mai 1934.

Parallèlement à la salle des machines et isolé par porte coupe-feu automatique et porte étanche, le local des citernes à gazole, et plus loin, celui des citernes métalliques d'eau de refroidissement.

On notera l'existence d'un couloir de communication directe entre l'extrémité de la salle des machines et le pied du puits du bloc 4 tout proche.

3) A gauche, en face des citernes à gazole, l'atelier mixte artillerie-génie.

4) A droite : pour mémoire (voir plus haut) le local des réservoirs d'eau de refroidissement de l'usine.

Un peu plus loin, à droite, on aborde la zone du casernement. Celui-ci est formé de trois grandes galeries de 4 m de large et 62 m de long, parallèles à la galerie centrale, séparées de celle-ci et l'une de l'autre par un merlon de terrain naturel de 4 m d'épaisseur.

Trois galeries transversales ou « écoutes» assurent la communication entre groupes de locaux, plus une quatrième partielle propre à l'infirmerie, et un couloir de fonction avec les citernes à eau de l'usine.

Les grandes galeries sont fractionnées par des cloisons en chambres, regroupées par destination donnant, pour les deux-tiers de l'espace disponible, 9 chambres de troupe (de 20 à 24 hommes de capacité en lits à deux étages modèle 1876 de casemate, récupérés dans les forts d'avant 1914), 3 chambres de sous-officiers et leur mess, 5 chambres d'officiers.

Les extrémités sont affectées, pour la première galerie, à l'infirmerie, pour les deuxième et troisième, aux locaux du PC d'ouvrage et des centraux téléphoniques et répartiteurs.

Les lavabos, à auge, sont disposés le long des parois de tronçons élargis des couloirs transversaux. Quant aux latrines, à fosses chimiques Asepta standard, elles sont disposées en deux groupes (troupe d'une part, cadres de l'autre) logés dans deux tronçons discontinus d'une quatrième galerie longitudinale, en limite sud de l'ensemble.

Cette organisation est conforme aux prescriptions de la notice du 23 avril 1930 relative à la « construction d'un casernement souterrain dans un ouvrage puissant ».

A gauche de la galerie centrale et surélevés par rapport à celle-ci, en face de la sortie du troisième couloir de la caserne, on trouve deux alvéoles parallèles et de longueur inégale (15 et 20 m) de 4, 27 m sous clef, abritant les réservoirs d'eau de l'ouvrage, soit 3 réservoirs métalliques de 33 m3 de réserve, 2 de 25 m3 de service courant, 1 de contrôle de 6, 6 m3 et 1 de 3,3 m3. On remarque qu'un des réservoirs a été éventré à l'explosif lors d'une effraction récente.

L'eau provient de l'extérieur, du captage de la source des Granges au Mangiabo (à la cote 1250 m, soit 50 m plus haut).

Un peu plus loin, soit au bout de l'alignement droit de 155 m partant de la deuxième porte blindée de l'entrée, on rencontre un barrage de défense intérieure de galerie, constitué par un blockhaus de FM tourné vers les avants, associé à une porte blindée type 10.

Aussitôt franchie cette porte, s'embranche à droite la courte antenne desservant le bloc 5. La galerie principale, pour elle, s'infléchit très légèrement à gauche, puis continue en alignement droit, avec la même section (type III), sur une centaine de mètres, jusqu'à l'embranchement, à droite, de l'antenne du bloc 6.

Après celui-ci, sa section se réduit (T V) tout en se prolongeant sur 130 m jusqu'à un carrefour en étoile à trois branches inégales : à droite on arrive très vite au sas du bloc 7 et à gauche, un tronçon de 75 m se termine à l'entrée du bloc 8. Depuis le carrefour du bloc 6, du fait de la réduction de section, la galerie comporte, à droite, tous les 15 m, une niche permettant le croisement des chariots, poussés à bras, de transport du matériel.

L'ensemble des locaux souterrains représente 900 m de galeries de communication (9200 m3 de déblais et 4100 m3 de maçonnerie), 155 m de puits (4.600 m3 de déblais, 2150 m3 de maçonnerie), 16.800 m3 de déblais et 6.000 m3 de maçonnerie pour les locaux et magasin.

Conclusion

Cet ensemble puissant - le plus grand des Alpes - même amputé d'un bloc ajourné, offre une bonne représentativité des formes techniques de la fortification C.O.R.F., dont la seule tourelle de 135 mm du Sud-Est, et un des deux seuls exemplaires encore en place au bloc 3, d'un type particulier d'observatoire cuirassé sous casemate, différent de ceux du Janus (B5 et B6) et de Roche la Croix (B6).

Le gros-œuvre est en très bon état, et la plus grande partie des équipements en place malheureusement détériorés voire sabotés par toute une série de prélèvements ou d'actes de vandalisme (réservoir d'eau éventré, tronçons de câbles volés).

D'autre part l'ouvrage n'est desservi, en cul-de-sac, que par une route de montagne de près de 13 km, au tracé audacieux, qui, faute d'entretien, se dégrade inexorablement et constitue, en tout état de cause, une lourde servitude. Son prolongement jusqu'au col de Brouis, par la Baisse de Levens, étudié avant 1940 et abandonné, ressurgit de temps en temps dans les projets d'aménagement touristique. Cette dernière perspective pourrait s'appuyer sur la présence du grand bâtiment du casernement de sûreté, resté inachevé (fig. 30), et la situation en limite - mais à l'extérieur - du Parc national du Mercantour (sous réserve que cet organisme acceptât de sortir d'attributions limitées au milieu naturel). Par contre, une promotion limitée à l'aspect « fortification» se heurterait, inévitablement, à la saturation atteinte, autour de Sospel, avec trois ouvrages C.O.R.F. et un fort de 1880.

1La casemate de Bourges est inventée par le Commandant du Génie Laurent en 1885, elle sera expérimentée et adoptée à Bourges en 1899. Son emplacement se situe dans les flancs des ouvrages pour être dissimulée aux yeux de l’ennemi, assurant le rôle de flanquement pour défendre les abords de l’ouvrage et des intervalles.

Situé sur une position ayant vue sur plusieurs distances et directions, l'ouvrage du Monte Grosso est destiné à être la clef de voûte du tronçon fortifié du secteur. Il est retenu par la Commission de Défense des Frontières en 1929. Les travaux démarrent en novembre 1931 et se poursuivent jusqu'en 1935. Cette année, l'équipement est presque installé. Il est le plus grand ouvrage de la frontière sud-est. On met en chantier un casernement de sûreté qui reste inachevé en 1940. L'ouvrage participe activement lors de l'offensive de juin 1940. Il est abandonné en 1964.

  • Période(s)
    • Principale : 2e quart 20e siècle

L'ouvrage est constitué d'une infrastructure sur laquelle se greffent, en majorité par puits, sept blocs. L'infrastructure souterraine est composée de locaux techniques et logistiques, à savoir une salle de neutralisation, une centrale électrique, un casernement, des citernes, lesquels locaux sont desservis par une galerie centrale, le tout voûté en berceau en anse de panier. Un bloc correspond à l'entrée, de plain-pied avec la galerie centrale, trois correspondent à des casemates, deux à des tourelles et deux derniers à des observatoires. Les blocs tourelles sont élevés sur deux niveaux. Chaque bloc est muni d'une ou de plusieurs cloches cuirassées selon les cas. A proximité, le bâtiment de casernement est un édifice, maçonnés de moellons, élevé sur deux étages et dépourvu de toiture.

  • Murs
    • pierre moellon
    • béton béton armé
  • Étages
    sous-sol, 2 étages carrés
  • Couvrements
    • voûte en berceau en anse-de-panier
  • Typologies
    cloche cuirassée
  • Statut de la propriété
    propriété publique

Ouvrage reconnu et visité, sauf l'intérieur des blocs 3 à 8, en raison des difficultés d'accès à l'époque de l'enquête (1994).

Date d'enquête 1994 ; Date(s) de rédaction 1997
(c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général
Truttmann Philippe
Truttmann Philippe

Lieutenant-colonel du génie, docteur en histoire. Chargé de cours à l'École supérieure du génie de Versailles, Yvelines.

Expert en architecture militaire auprès de l'Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France. Réalise de 1986 à 1996 l’étude de l’architecture militaire (16e-20e siècles) de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur : départements des Hautes-Alpes, des Alpes-de-Haute-Provence, partie des Alpes-Maritimes, ensemble des îles d’Hyères dans le Var.

Principales publications : La Muraille de France ou la ligne Maginot (1988)

Les derniers châteaux-forts, les prolongements de la fortification médiévale en France, 1634-1914 (1993)

La barrière de fer, l'architecture des forts du général Séré de Rivières, 1872-1914 (2000)

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