Dossier d’œuvre architecture IA06000045 | Réalisé par
Truttmann Philippe
Truttmann Philippe

Lieutenant-colonel du génie, docteur en histoire. Chargé de cours à l'École supérieure du génie de Versailles, Yvelines.

Expert en architecture militaire auprès de l'Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France. Réalise de 1986 à 1996 l’étude de l’architecture militaire (16e-20e siècles) de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur : départements des Hautes-Alpes, des Alpes-de-Haute-Provence, partie des Alpes-Maritimes, ensemble des îles d’Hyères dans le Var.

Principales publications : La Muraille de France ou la ligne Maginot (1988)

Les derniers châteaux-forts, les prolongements de la fortification médiévale en France, 1634-1914 (1993)

La barrière de fer, l'architecture des forts du général Séré de Rivières, 1872-1914 (2000)

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  • enquête thématique régionale, architecture militaire de Provence-Alpes-Côte d'Azur
blockhaus de la Pointe des Trois Communes, de la ligne fortifiée du Massif de l'Authion, secteur fortifié des Alpes-Maritimes
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Alpes-Maritimes - Roquebillière
  • Commune La Bollène-Vésubie
  • Lieu-dit Pointe des Trois Communes
  • Dénominations
    blockhaus
  • Appellations
    blockhaus de la Pointe des Trois Communes, de la ligne fortifiée du Massif de l'Authion
  • Dossier dont ce dossier est partie constituante
  • Parties constituantes non étudiées
    blockhaus, casemate

Blockhaus 1

Poste défensif le plus élevé et le plus septentrional du dispositif de défense du massif de l'Authion avant 1914.

Vue lointaine prise depuis l'ouvrage de la Forca.Vue lointaine prise depuis l'ouvrage de la Forca. Vue avant droite prise de l'est.Vue avant droite prise de l'est.

L'ouvrage se présente comme une tour à plan pentagonal de 8 m de côté, dont le saillant de tête est orienté au nord-est. Cette tour est à quatre niveaux : sous-sol, rez-de-chaussée, premier étage et terrasse défensive au-dessus, d'environ 10 m de hauteur totale.

Les deux faces et les deux flancs sont construits en béton armé de 80 cm d'épaisseur, percés au niveau du rez-de-chaussée et du premier étage de créneaux de fusillade. Ils sont enveloppés d'une sorte de fausse braie revêtue, surmontée d'un mur à bahut, elle-même entourée d'un fossé de 6 m de large, à contrescarpe revêtue.

Front de gorge vu du sud.Front de gorge vu du sud.La gorge, par contre, est construite en pierre de taille - par raison d'irréversibilité de la fortification - et comporte, au centre, un avant-corps en légère saillie, où s'ouvre, au rez-de chaussée, une large entrée principale voûtée en arc segmentaire, et que précédait la travée d'un pont mobile disparu. Au-dessus, on trouve deux fenêtres éclairant le balcon du premier étage, surmontées elles-mêmes de deux mâchicoulis servis depuis la terrasse. La saillie de l'avant-corps a été mise à profit pour installer, dans chaque flanc, deux créneaux à fusil superposés flanquant la gorge. De chaque côté de l'avant-corps, on trouve, au rez-de-chaussée et au premier étage, une fenêtre éclairant l'intérieur du bâtiment. Toutes ces fenêtres étaient munies de croisées vitrées à la française doublées extérieurement de volets pivotants en tôle forte : tout a disparu aujourd'hui.

De même, on remarque sur le parapet en béton armé de la terrasse, au-dessus des arcs de mâchicoulis de l'avant-corps, quelques lettres métalliques subsistant d'une inscription qui devait être «Poste des Trois Communes» surmontée de part et d'autre des dates de début et de fin de construction. L'inscription a été déchiquetée par les tirs de l'attaque d'avril 1945.

De même, les trois corbeaux portant les arcs des mâchicoulis étaient ornés des écussons aux armes des trois communes à l'intersection des limites desquelles il est situé : deux des écussons ont disparu.

Enfin, on remarque que le parapet de la terrasse partiellement en surplomb sur les parois comporte, à chaque angle d'épaule, une bretèche désignée « balcon flanquant » sur le plan du Génie.

Vue verticale intérieure de la cage d'escalier prise de bas en haut.Vue verticale intérieure de la cage d'escalier prise de bas en haut.Intérieurement, l'édifice est traversé, sur toute sa hauteur, par une cage hémicylindrique renfermant un escalier tournant d'un mètre de large débouchant sur la terrasse sous un abri en coupole en béton armé : l'escalier a disparu.

Au sous-sol, on trouve (ou trouvait) des locaux de servitude séparés par des refends : la citerne et son filtre, alimentée par les eaux des chapes de la terrasse, le four à pain (diam. 1, 70 m), un chauffe-eau de 75 l, un calorifère à charbon avec magasin à combustible annexé. Un petit corridor conduit à une poterne sortant dans le fossé, à ras du flanc droit de l'avant-corps.

Les latrines, à deux stalles, sont situées également au sous-sol mais hors œuvre, sous la fausse braie, desservies par un passage dans le flanc droit, elles prennent jour dans le mur de gorge. La fosse fixe est en dessous.

Les deux autres niveaux sont compartimentés par des demi-refends perpendiculaires adossés à la cage d'escalier, et délimitant des sortes de boxes renfermant les lits de camp de la garnison et tournés vers la paroi extérieure.

Au rez-de-chaussée, l'entrée principale de l'ouvrage débouche face à la cage d'escalier centrale, entre la cuisine, à droite, et un espace dit «magasin aux canons », en fait, remise pour probablement deux pièces d'artillerie de montagne (80 mm) destinées à être mises en batterie à l'extérieur de l'ouvrage. Derrière l'escalier, le « box » comporte une cellule de discipline.

Au premier étage, mêmes dispositions, avec, en plus, à l'arrière, et séparée par des cloisons, une chambre de sous-officiers à gauche. Au centre, au-dessus de l'entrée, et donnant sur le balcon, la chambre de l'officier chef de poste jouxte le magasin aux cartouches et le bureau du télégraphe.

Blockhaus 2. ouvrage projeté et non construit.

Situation : à proximité immédiate de l'ouvrage d'avant 1914. Désignation abrégée du génie : P.T.C.

Envisagé dans le programme de la C.D.F. (1929) puis dans le programme restreint de la C.O.R.F. (434/FA du 24 décembre 1930), l'ouvrage intermédiaire de la Pointe des Trois Communes est classé en deuxième urgence - comme toutes les organisations nouvelles de l'Authion - en raison de la modicité des crédits alloués à la frontière du sud-est.

Rien ne se fait donc jusqu'en 1937 ou 38, lorsque avant de quitter son commandement, le général Mittelhauser commandant désigné de l'armée des Alpes, préoccupé de la solution de continuité de la position de résistance présentée au niveau de l'Authion, relance le projet de construction d'un ouvrage mixte à Plan Caval, d'un ouvrage d'infanterie à la Baisse de Saint-Véran - établis au standard C.O.R.F. - et d'un ouvrage d'infanterie à la Pointe des Trois Communes.

Dans le «testament» du général - en fait la longue liste arrêtée en juin 1938 des travaux restant à exécuter pour mettre la frontière en état de défense - l'ouvrage est mentionné comme devant être une casemate S.T.G., donc relevant de la fortification de campagne renforcée à occuper par les troupes de campagne.

Mais les choses vont évoluer et c'est finalement une casemate C.O.R.F. qui est conçue dans le projet établi le 20 janvier 1939 par la chefferie de Nice et dont la construction devait commencer (comme la Vachette à Briançon) à la fonte des neiges.

Encastré dans la pente du versant nord-est de la tête de l'Authion et adossé au terre-plein du sommet, à la dernière boucle de la route du blockhaus d'avant 1914, l'ouvrage aurait été constitué par une casemate double monolithe de béton armé à trois niveaux, dont deux sous-sols passifs et un étage supérieur actif, le tout traité en protection 2 et se développant sur 13 m de hauteur totale, dont 6 hors sol

Pour des raisons évidentes de protection, du côté de la pente, contre la pénétration en sous-œuvre de projectiles à fusée à retard, le mur antérieur a une épaisseur de 2, 25 m sur toute la hauteur. Le mur arrière, adossé au terrain naturel et non exposé aux coups est d'un mètre en sous-sol, pour atteindre 2, 25 m aux étages intermédiaire et supérieur.

Le plan dessine un V renversé, dont la pointe, tournée vers l'avant, est occupée par le massif support d'une cloche GFM, formant orillon. Il se retrouve à tous les niveaux. A l'étage inférieur, on trouve les W.C., urinoirs, la buanderie, les lavabos, la cuisine, une cave, des magasins (H.S.P. 2, 50 m), le poste bas d'un monte-charge et un local destiné à la centrale et à la ventilation.

A l'étage intermédiaire: une chambre pour 18 ou 23 hommes (selon aménagement), les deux citernes métalliques (6500 l de capacité totale), le magasin aux projectiles de 50 mm et, au-dessus, les vivres de réserve.

L'étage supérieur est l'étage de combat, divisé en deux par un refend de 0, 75 m ; il comporte deux faces et deux flancs.

Le flanc gauche, protégé par un fossé diamant, comporte, entre deux orillons et à l'abri d'une visière, un créneau de JM sous niche blindée, orienté au nord et flanquant la pente nord-est de la crête de 1'Orthighiera, vers l'ouvrage de la Baisse de Saint-Véran. Ce créneau est associé à une gaine de périscope horizontal et un lance-grenades de fossé. Les étuis sont rejetés au fossé.

La face gauche est aveugle et prolonge, à gauche, le massif dans lequel est scellée une cloche GFM type A P.M. allongé à 5 créneaux (2B, 2N, 1S) destinée à la surveillance, l'observation et la défense des dessus et des abords. La cloche s'appuie sur un cuvelage allongé (1, 12 m).

La face droite comporte, elle, un créneau JM identique au précédent et protégé de la même façon, orienté sur la croix de l'Arpette et flanquant vers Plan Caval et la Béole.

Les 2 JM du bloc ont leurs axes décalés de 120° environ ; on notera qu'ils devaient être dotés de trémies type 3 (compte tenu de la raideur des pentes à battre, jusqu'à 30°) mais dites « simplifées » ou « haute montagne » modèle apparu tardivement et qu'on rencontre également à Plan Caval, la Béole et la Baisse de Saint-Véran.

Le flanc droit est brisé en dedans et comporte un rentrant à trois faces protégé par une visière.

A l'arrière, l'entrée, fermée en façade par une porte blindée étanche type 1 quater A (1 x 1, 95 m), doublée en arrière par une porte étanche non blindée disposée sur un corridor coudé à 90° à droite, pour éviter l'enfilade.

Au centre, et à l'avant, deux créneaux FM sous béton (type RB) croisent leur tir pour défendre l'entrée et en battre les approches, s'ajoutant au créneau ménagé dans la porte elle-même.

Ces créneaux sont prévus pour recevoir, à la place du FM, un mortier de 50 mm à 20° ; mais le support du mortier était encore à l'étude en 1940.

Les différents niveaux sont séparés par des planchers en béton armé de 0, 50 m d'épaisseur, solidaires dans l'ensemble ; ils sont reliés par échelles métalliques amovibles - solution dangereuse - mises en place dans un puits central utilisable pour l'installation d'un monte-charge manuel.

Conclusion

L'ouvrage 1 se dresse, sans le moindre camouflage ni défilement, au point culminant du plateau, avec une silhouette typique de donjon médiéval (Issoudun, Gisors, Château-Gaillard) jetée comme un véritable défi à la progression d'un adversaire à qui le terrain interdisait de disposer d'artillerie autre de montagne. Cette donnée essentielle du programme étant fixée, le projeteur (capitaine Dautheville) avait alors tout loisir pour donner à son ouvrage l'élévation convenant à une mission de surveillance et peut-être aussi, implicitement, de dissuasion.

Le choix d'une tour facilitait, du même coup, la répartition des locaux sur trois niveaux, plus terrasse panoramique, et, à chaque niveau, un plan fonctionnel assorti d'un niveau de confort élevé pour l'époque considérée, bien justifié à cette altitude, dans les conditions d'isolement de la garnison.

D'autre part, le choix du béton armé, dont c'est un des premiers exemples d'emploi en masse dans la fortification, est particulièrement heureux en offrant une protection très convenable pour une épaisseur réduite : la preuve en est qu'aucun coup de l'artillerie de la 1ère D.F.L., en avril 1945, n'a traversé les faces et les flancs de l'ouvrage.

La construction paraît avoir été particulièrement soignée tant en ce qui concerne le béton que les enduits lissés d'aspect encore neufs aujourd'hui, et que la maçonnerie traditionnelle de la façade de gorge. Celle-ci présente d'ailleurs, face à l'arrière, une élévation relativement attrayante.

Vue prise de l'angle arrière gauche vers le nord-ouest. A l'arrière-plan, à droite, le Capelet et la Cime du Diable. Au centre, l'Ortighea et la Cime de Tuor.Vue prise de l'angle arrière gauche vers le nord-ouest. A l'arrière-plan, à droite, le Capelet et la Cime du Diable. Au centre, l'Ortighea et la Cime de Tuor.

Malgré les dégâts de 1945 et l'effet conjugué du ferraillage et du vandalisme, le gros-œuvre de l'édifice est parfaitement sain et en tout état de cause raisonnablement réparable. Dans le cadre du magnifique paysage où il se dresse, avec des vues lointaines sur tout l'horizon, il pourrait et devrait être réhabilité en refuge de randonnées et classé au double titre de l'architecture et des souvenirs de guerre. Ceci sous réserve que la direction du Parc national du Mercantour s'y intéresse et s'en donne les moyens : ce ne semble pas être actuellement (1993) le cas.

L'ouvrage 2, monobloc intéressant, dérivé du schéma de la casemate de mitrailleuses type nord-est et dont on ne peut que regretter la non exécution. Les plans du projet, remarquablement dessinés, permettent de mesurer la maîtrise acquise par les bureaux d'études depuis les premiers tâtonnements de 1927. Il est vrai qu'il s'agit probablement du dernier projet d'ouvrage C.O.R.F.

Le blockhaus de la Pointe des Trois Communes est réalisé dans le programme de fortification du massif de l'Authion établi après 1887. Il est construit en 1898-1899 pour compléter les deux redoutes de la Forca et de Millefourches. A l'instigation du général Mittelhauser, commandant de l'armée des Alpes, après 1927, un nouveau blockhaus est mis à l'étude. Finalement, une casemate est projetée en 1929 et mise en chantier la même année. L'ouvrage est attaqué en 1944. Il est abandonné ensuite.

  • Période(s)
    • Principale : 4e quart 19e siècle
    • Principale : 2e quart 20e siècle
  • Dates
    • 1898, daté par source
    • 1929, daté par source

Le blockhaus se présente sous la forme d'une tour à plan pentagonal. Cette tour est élevée sur quatre niveaux : sous-sol, rez-de-chaussée, premier étage, terrasse défensive. Les deux faces et les deux flancs sont en béton armé, la gorge est en pierres de taille. L'édifice est traversé verticalement par une cage d'escalier hémicylindrique, dont l'escalier a disparu. Le parapet de la terrasse comporte, à chaque angle d'épaule, une bretèche. L'autre blockhaus est une casemate en béton armé élevée sur trois niveaux : deux sous-sols et un étage de combat. Une cloche cuirassée est scellée dessus.

  • Murs
    • pierre pierre de taille
    • béton béton armé
  • Étages
    2 étages de sous-sol, 1 étage carré
  • Couvertures
    • terrasse
  • Statut de la propriété
    propriété publique
Date d'enquête 1994 ; Date(s) de rédaction 1997
(c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général
Truttmann Philippe
Truttmann Philippe

Lieutenant-colonel du génie, docteur en histoire. Chargé de cours à l'École supérieure du génie de Versailles, Yvelines.

Expert en architecture militaire auprès de l'Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France. Réalise de 1986 à 1996 l’étude de l’architecture militaire (16e-20e siècles) de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur : départements des Hautes-Alpes, des Alpes-de-Haute-Provence, partie des Alpes-Maritimes, ensemble des îles d’Hyères dans le Var.

Principales publications : La Muraille de France ou la ligne Maginot (1988)

Les derniers châteaux-forts, les prolongements de la fortification médiévale en France, 1634-1914 (1993)

La barrière de fer, l'architecture des forts du général Séré de Rivières, 1872-1914 (2000)

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