Dossier d’œuvre architecture IA83000112 | Réalisé par
Truttmann Philippe
Truttmann Philippe

Lieutenant-colonel du génie, docteur en histoire. Chargé de cours à l'École supérieure du génie de Versailles, Yvelines.

Expert en architecture militaire auprès de l'Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France. Réalise de 1986 à 1996 l’étude de l’architecture militaire (16e-20e siècles) de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur : départements des Hautes-Alpes, des Alpes-de-Haute-Provence, partie des Alpes-Maritimes, ensemble des îles d’Hyères dans le Var.

Principales publications : La Muraille de France ou la ligne Maginot (1988)

Les derniers châteaux-forts, les prolongements de la fortification médiévale en France, 1634-1914 (1993)

La barrière de fer, l'architecture des forts du général Séré de Rivières, 1872-1914 (2000)

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  • inventaire topographique
  • enquête thématique régionale, architecture militaire de Provence-Alpes-Côte d'Azur
batterie haute des Mèdes
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Var - Hyères
  • Commune Hyères
  • Lieu-dit Ile de Porquerolles, les Mèdes
  • Adresse
  • Cadastre 1983 J3 309
  • Dénominations
    batterie
  • Appellations
    batterie haute des Mèdes
  • Dossier dont ce dossier est partie constituante
  • Parties constituantes non étudiées
    position, blockhaus, souterrain, casemate

Construction et armement

Ouvrage construit de toutes pièces, sur un site vierge, par la Marine dans le cadre du programme de réorganisation de la défense des côtes,dont la mission lui avait échu en 1918.

Projet d'ensemble du 27 août 1927. Travaux exécutés de 1930 à 1932 puis mise en place de l'armement. Occupé par les allemands en 1942,l'ouvrage est bombardé le 18 août 1944 par le cuirassé français "Lorraine", faisant partie de la force de soutien constituée pour le débarquement allié en Provence. Repris en charge par la Marine après la Libération, l'ouvrage est désarmé, puis abandonné quelques années plus tard.

Armement : 4 pièces de 164 mm de bord modèle 1893-96 sur affût de côte modèle 1923 (obus perforant de 55 kg. Obus explosif de 50 kg. Portée:18000 m) en cuves bétonnées à ciel ouvert. Il ne s'agit pas de pièces d'artillerie de côte, mais de canons de bord équipant les cuirassés "République" "Patrie" "Suffren" "Iéna", les croiseurs "Ernest Renan""Jules Michelet" etc. Lors de la mise à la ferraille de ces unités, après la première guerre mondiale, leurs excellents canons, ainsi que leurs pièces de rechange, furent récupérés pour équiper les nouvelles batteries de côte, montés sur des affûts construits spécialement en1923. Certaines avaient déjà été utilisés comme pièces à longue portée dès septembre 1914 à Paris et à Toul.

Analyse architecturale

Situation : au sommet de l'arête rocheuse du cap des Mèdes, à l'extrémité nord-est de l’île au sud, et au-dessus de l'ancienne batterie des Mèdes. Altitude moyenne: 130 m. Accès par tronçon de route stratégique greffée sur la route de la batterie de Galeasson.

Il s'agit d'une batterie côtière « d’artillerie secondaire », qualification donnée par la Marine aux canons de 164 mmm, par opposition aux pièces de 305, 340, 380 mm etc. constituant « l’artillerie principale » des navires de ligne. Elle est orientée face à l'est pour la défense de la Grande Passe d'accès à la rade d'Hyères, entre Porquerolles et Port-Cros.

La batterie est constituée par :

- les quatre positions de pièces, implantées sur l'arête rocheuse

- le poste directeur de tir, à l'extrémité nord

- un ensemble de magasins souterrains implanté à l'aplomb de la troisième pièce

- quelques bâtiments de surface, disposés le long de la route d'accès,sur la contrepente ouest de la crête.

Positions de pièces

Numérotées de 1 à 4 de droite à gauche (du sud au nord, elles sont implantées isolément de 80 à 90 m les unes des autres, pour des raisons de dispersion.

Chaque position est constituée par une cuve à ciel ouvert, de 7, 80 n de diamètre et profonde de 2 m environ, enterrée dans le sol (protection latérale : 1 m de béton armé, sauf la quatrième pièce protégée à 0, 80 m seulement). Dans les parois, on trouve des armoires pour les munitions de première urgence. Le parapet s'abaisse à 1, 80 m dans un secteur, variant avec chaque pièce de 75° à 135°, correspondant à la partie du champ de tir pouvant être battue en site négatif (-6°). Au fond de la cuve, une plateforme circulaire porte, encastrée, une sous-sellette métallique sur laquelle était boulonné l'affût de la pièce.

Les positions diffèrent par l'organisation de détail des locaux annexes formant corps avec la cuve.

Deuxième pièce. Vue intérieure de la cuve. Au centre, guichets de distribution des munitions. A droite, porte d'accès.Deuxième pièce. Vue intérieure de la cuve. Au centre, guichets de distribution des munitions. A droite, porte d'accès.

- Les première et deuxième pièces sont identiques avec deux groupes de magasins à munitions en béton armé disposés symétriquement de part et d'autre de la cuve (dalle de 1, 50 m).

- Troisième pièce : la cuve est adossée à un bloc bétonné constituant la tête du puits du monte-charge à munitions, montant des magasins souterrains, et desservant, à l'étage supérieur, la cuve elle-même et, à l'étage intermédiaire, la voie ferrée étroite alimentant, en liaison latérale, les deuxième et quatrième pièces.

Troisième pièce. Magasin à munitions de gauche. Guichets de distribution à la pièce. Vue de l'intérieur du magasin.Troisième pièce. Magasin à munitions de gauche. Guichets de distribution à la pièce. Vue de l'intérieur du magasin. Troisième pièce. Guichets de distribution des munitions vus depuis l'intérieur de la cuve de pièce.Troisième pièce. Guichets de distribution des munitions vus depuis l'intérieur de la cuve de pièce.

- Quatrième pièce : simples parcs à munitions en armoires disposés dans un massif en béton rectiligne auquel est adossée la cuve. Cette pièce n'était pas ravitaillée par le monte-charge de la troisième pièce,mais par une voie ferrée en rampe venant directement des entrées du magasin souterrain.

Poste directeur de tir

Vue d'ensemble du poste directeur de tir. Remarquer le camouflage.Vue d'ensemble du poste directeur de tir. Remarquer le camouflage. Dit "poste de batterie" : implanté à l'extrémité nord de la position, c'est un blockhaus en béton armé à deux niveaux, partiellement encastré dans le roc, et surmonté d'une tourelle cylindrique tournante, légèrement blindée, et où se trouvait le télémètre. Entrée - au rez-de-chaussée : par l'arrière, sortie latérale au premier étage. Communication par trappes et échelles de meunier entre les deux niveaux.

Poste de direction de tir. Etage inférieur, poste de calcul, vue intérieure.Poste de direction de tir. Etage inférieur, poste de calcul, vue intérieure.- A l'étage inférieur, on trouve le local du poste radio et, accolé, le poste de calcul, vaste pièce rectangulaire aveugle de 3 x 11 m.

- A l'étage supérieur: on trouve le local de l'observatoire terminé, à l'avant, en demi-cercle, avec trois créneaux (un axial, deux latéraux) totalisant à peu près 300° de secteur vu.

Les deux niveaux sont séparés par une dalle de béton de 1, 50 m tandis que l'observatoire est couvert par une plaque de blindage de 0,10 m, formant toiture.

La tourelle de télémètre, cylindre en acier blindé à quelques centimètres seulement est implanté à l'arrière et au-dessus de l'observatoire. Accès par trappe en dessous.

Magasins souterrains

De plain-pied avec la route d'accès, ils sont constitués par six locaux spécialisés (soutes à obus, à douilles, à gargousses, râtelier de chargement et magasin aux artifices) desservis par une galerie en U (deux galeries d'entrées pénétrantes et une transversale), en plein cintre,de 2, 50 m de largeur et de hauteur sous clef. Les soutes ont des dimensions différentes, adaptées à leur destination, et comportent un système à double paroi assurant la protection des munitions contre l'humidité.

Vue intérieure de la soute à douilles.Vue intérieure de la soute à douilles.Le magasin à douilles (capacité : 1200 coups) fait, dans œuvre 4, 50 m de large, 10, 40 m de long et 3, 25 m sous plafond; il est muni d'étagères en profilés métalliques.

La branche transversale de la galerie comporte, au milieu, un élargissement englobant le pied du puits montant à la troisième pièce, et encore équipé des cages et du mécanisme des monte-charges à munitions (hauteur totale : 14 m pour une protection de 7 m de roc franc au-dessus du ciel de la galerie).

Les deux galeries d'accès sont, à leur débouché, protégées par une dalle de béton armé et fermées par un sas constitué par deux portes étanches non blindées.

L'entrée sud est, en plus, encadrée de deux casemates en béton armé d'un seul tenant avec la tête de galerie : à droite, le local du groupe électrogène et de la citerne de refroidissement et, à gauche, un local plus petit, sans doute abri à personnel.

Autres bâtiments

Bâtiments extérieurs. Vue générale prise du nord.Bâtiments extérieurs. Vue générale prise du nord.Deux bâtiments de surface, le long de la route stratégique entre l'entrée des magasins et le poste directeur de tir. L'un de ces bâtiments est en partie détruit par les bombardements.

Un peu plus loin, un troisième bâtiment, en partie engagé dans le versant de l'arête. On notera, enfin, que la batterie comportait, en outre, deux canons de 75 éclairants (pour le tir de nuit) installés en contrebas dans l'ancienne batterie de Galéasson, dont le réduit avait été restauré, à l'époque,pour loger les équipes de pièce.

Conclusion

Ensemble en très bon état, bien qu'en grande partie déséquipé.

La conception de l'ouvrage est tout à fait représentative des idées de la Marine en matière de défense des côtes, après l'expérience des opérations des Dardannelles : large dispersion des organes sur un front de plus de 500 m, réduction presque totale du relief (sauf pour le poste directeur de tir, où ce n'est pas possible), camouflage soigné, protection assurée contre le tir tendu et les projectiles arrivant sous de faibles angles de chute, manifestement on n'envisage que le combat de courte durée contre des navires de ligne.

De ce fait - et par opposition flagrante avec les ouvrages terrestres contemporains - les pièces n'ont aucune protection contre le tir vertical ou l'attaque par avion en piqué, la couverture des organes de surface est relativement faible, il n'y a pas de portes blindées aux entrées, pas d'organes de défense rapprochée, ni, pratiquement, de casernements souterrains ou a l'épreuve pour le personnel. Par contre, la protection des soutes a munitions et des circuits de ravitaillement est convenablement assurée, avec, en particulier, des précautions contre les risques de propagation d'explosion résultant d'un coup direct dans une cuve de pièce,bien que l'implantation d'une soute a obus explosifs en face du pied du puits du monte-charge ne soit pas tout à fait indiquer.

Vue d'ensemble du poste directeur de tir. Remarquer le camouflage.Vue d'ensemble du poste directeur de tir. Remarquer le camouflage.On notera tout particulièrement l'effort de camouflage permanent des divers organes (en particulier de la tourelle de télémètre du poste directeur de tir), réalisé avec un mortier rustique de teinte beige, projeté sur un treillis métallique ondulé irrégulièrement, de manière à s'harmoniser avec la rocaille naturelle de l'arête rocheuse (travail exécuté, parait-il, par un maçon italien aujourd'hui décédé et enterré au cimetière de Porquerolles).

Compte tenu de sa situation dans une zone protégée, ouvrage a conserver comme point de vue remarquable et comme élément le plus récent de la gamme d'ouvrages fortifiés existant sur les îles.

L'ouvrage est construit par la Marine sur un site vierge, dans le cadre du programme de réorganisation de la défense des côtes de 1918. Le projet est élaboré en 1927. Les travaux sont exécutés de 1930 à 1932. L'ouvrage est bombardé en 1944. Après la Libération, il est désarmé, puis abandonné.

  • Période(s)
    • Principale : 2e quart 19e siècle

La batterie est constituée par quatre positions de pièces, un poste directeur de tir, un ensemble de magasins souterrains et de quelques bâtiments de surface. Les positions sont implantées isolément. Chacune est constituée par une cuve à ciel ouvert, bâtie en béton armé. Le poste directeur de tir est un blockhaus en béton armé à deux niveaux partiellement encastré dans le roc, et surmonté d'une tourelle cylindrique tournante. Les magasins souterrains sont constitués par six locaux spécialisés desservis par des galeries voûtées en plein-cintre. Les galeries d'accès sont, à leur débouché, protégées par une dalle en béton armé. L'une des entrées est encadrée de deux casemates en béton armé. Les positions sont à remarquer pour leur camouflage.

  • Murs
    • béton armé
  • Étages
    1 étage carré, sous-sol
  • Couvrements
    • voûte en berceau plein-cintre
    • voûte plate, en béton armé
  • Typologies
    tourelle tournante
  • Statut de la propriété
    propriété publique
Date d'enquête 1990 ; Date(s) de rédaction 1997
(c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général
Truttmann Philippe
Truttmann Philippe

Lieutenant-colonel du génie, docteur en histoire. Chargé de cours à l'École supérieure du génie de Versailles, Yvelines.

Expert en architecture militaire auprès de l'Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France. Réalise de 1986 à 1996 l’étude de l’architecture militaire (16e-20e siècles) de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur : départements des Hautes-Alpes, des Alpes-de-Haute-Provence, partie des Alpes-Maritimes, ensemble des îles d’Hyères dans le Var.

Principales publications : La Muraille de France ou la ligne Maginot (1988)

Les derniers châteaux-forts, les prolongements de la fortification médiévale en France, 1634-1914 (1993)

La barrière de fer, l'architecture des forts du général Séré de Rivières, 1872-1914 (2000)

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