DESCRIPTION
Dénomination : tribune
Localisation : chœur, mur nord.
Structure et formes : tribune portée par une voussure en arc-de-cercle ; garde-corps composé de quatorze panneaux rectangulaires séparés par des pilastres plats ; aux extrémités, deux panneaux étroits (le premier et le dernier pilastre sont sculptés sur ce panneau et bordés par une partie lisse). Au-dessous et au-dessus des panneaux, deux bandeaux plat encadrés de moulures (le bandeau supérieur présente un ressaut au-dessus des pilastres n° 1, 4, 12 et 15). Une main courante. Élévation droite.
Matériaux et techniques : garde-corps en noyer, doré à l'extérieur ; décor des panneaux sculpté dans la masse en bas-relief, sur fond guilloché ; bases et chapiteaux des pilastres rapportés (collés ou cloués) décor des bandeaux gravé dans l'apprêt, sur fond guilloché. Intérieur : coupes carrées chevillées (les ressauts extérieurs du bandeau supérieur correspondent aux assemblages des montants et des traverses tous les trois panneaux (4 chevilles) ; panneaux arasés ; un panneau à plates bandes inclinées. Les panneaux 2, 3, 12 et 13 sont élargis par l'adjonction d'une bande verticale de 3, 3 à 4, 3 cm de large. Main courante chevillée (présence de deux assemblages en sifflet renforcés par une écharpe sur le dessus). Quatre pattes de fer soutiennent le plancher.
Iconographie et décor : les panneaux sculptés, identiques deux à deux, sauf le premier et le dernier, sont disposés symétriquement par rapport au centre de la tribune. Ils ont tous une composition à base de cuirs enroulés stylisés et de feuillages, sur fond de guillochis osier (sur les panneaux 2, 3, 12 et 13, une bande verticale est simplement guillochée) :
- panneau 1 : dans une niche en plein cintre, une femme (la Force ?) vêtue à l'antique, tient un tronçon de colonnette sous le bras gauche et un objet non identifié dans la main droite. Dans le bas du panneau, deux têtes de lion (?) coiffées d'un diadème (de plumes ?) ; dans le haut, deux pattes d'animal. Sous la niche, trois bouquets de fruits et de fleurs liés par un linge.
- panneaux 2 et 13 : cabochon ovale à bordure festonnée ; deux rameaux d'olivier ; deux petitses de fleurs. deux
- panneaux 3 et 12 : tête d'ange ; ailes, fleurs à graines et feuillages, dans le bas ; chutes de fleurs et fruits, dans le haut.
- panneaux 4 et 11 : tête coiffée d'un diadème de fleurs et de feuilles (?),reliée à la composition ornementale par deux draperies et surmontée par un bouquet de feuilles ; au-dessous, trois fleurs ; deux petits pinacles au sommet de la composition.
- panneaux 5 et 10 : un trophée d'instruments de musique, différents sur les deux panneaux, mais dans un encadrement identique : viole de gambe et son archet, harpe, bombarde et hautbois, sur le panneau 5 hautbois, serpent et manche de luth sur le panneau 10.
- panneaux 6 et 9 : écu à cuirs enroulés, portant un blason, sous une mitre.
- panneaux 7 et 8 : tête d'ange et volutes végétales.
- panneau 14 : la composition centrée autour d'une niche en plein cintre reprend celle du panneau 1, mais les motifs d'encadrement sont différents : deux faunes de profil. Au centre, la Justice : femme aux yeux bandés, tenant une épée et une balance. Les panneaux sont séparés par des pilastres cannelés à chapiteau toscan. Les pilastres 1 et 15, à quatre cannelures, sont plus larges que leurs bases et leurs chapiteaux. Les pilastres 3 et 13 ont cinq cannelures coupées au ras de la base et du chapiteau, comme ceux de la tribune (1). Le pilastre 12 comporte seulement trois cannelures, que l'on retrouve au-dessus, sur le bandeau. Les autres pilastres présentent quatre cannelures, aux extrémités adoucies.
Bandeau inférieur : rinceau fleuri sur guillochis osier ; bandeau supérieur : rinceau végétal, encadré par deux fleurs, au-dessus des pilastres 1 et 15 ; au-dessus du pilastre 12, le rinceau est gravé par dessus des cannelures .
Sur la voussure peinte : rinceaux végétaux entourant un cartouche orné d'un vase de fleurs.
Dimensions : H. tot. 165 cm, La. 698 cm ; garde-corps : H. 111 cm ; panneaux : H. 78 cm, La. 35 ou 35, 5 cm ; pilastres : La. 11, 5 cm, sauf les pilastres n° 1 et 15 : La. 14 cm.
État de conservation : bois fortement vermoulu, main-courante très dégradée ; dorure usée et localement écaillée. Certains panneaux présentent une bande verticale non sculptée, mais guillochée (n° 2, 3, 12, 13) : sont-ce des remplois, élargis pour pouvoir s'intégrer à la balustrade ? (les panneaux similaires de la tribune (1) présentent le même défaut). En revanche, le panneau 14 a été rétréci sur les côtés et probablement dans le bas. Quant au panneau 1, la bizarrerie de sa composition s'explique par des modifications de proportions (évidentes sur les côtés).
Polychromie de la voussure usée.
Inscriptions, marques : les panneaux 6 et 9 portent le blason de l'évêque Fabrice de la Bourdaisière : écu ovale parti - en 1 coupé, en 1 d'or à un dextrochère de gueules tenant un rameau de vesce de sinople ; en 2, parti de sinople à un pal d'argent et de gueules à un pal d'argent ; - en 2, d'azur à deux serpents entrelacés d'or, à la bordure engrelée d'argent et de gueules.
HISTORIQUE
La tribune porte les armoiries de Fabrice de la Bourdaisière, évêque de 1624 à 1646, qui indique dans un rapport sur l'église de Cavaillon, dressé en 1631, qu'il avait fait décorer deux tribunes en bois déjà construites, dont l'une pour les orgues et les musiciens (A.D. 84, IV G5, f0 1053). L'existence d'une tribune est attestée en 1609 dans un mémoire de l'architecte Martellange concernant des travaux dans l'église (A.D. 84, IV G 38, f0 99-100, 28 mars 1608).
Les panneaux à grotesques (1 et 14) semblent du XVIe siècle.
Comme la tribune (1), celle-ci fut dorée de 1682 à 1685, par Jean Gleize et Michel Blanc (A.D. 84, 3 E 33/824, f0 239, prix-fait du 14 décembre 1682 ; IV G 32, p. 57 et suivantes, du 23 janvier 1683 au 2 mai 1685).
NOTE DE SYNTHÈSE
Les panneaux 1 et 14 sont en remploi, comme les panneaux correspondant de la tribune (1). Si l'on compare les panneaux 5 et 10 des deux tribunes (instruments de musique) on voit que ceux de la tribune (2) copient les autres, avec des incompréhensions. Le sculpteur a schématisé ce qu'il ne connaissait pas bien ou ne comprenait pas : la viole, la flûte réduite à un cylindre sans trous, les partitions (transformées en un petit livre raide). Cette impression de "mauvaise copie" est aussi valable pour les panneaux 4 et 11, représentant des visages féminins coiffés d'un diadème noué de draperies. Si les panneaux 3 et 12 reprennent assez fidèlement le décor de ceux de la tribune (1), il faut remarquer la différence de taille et de traitement des angelots des panneaux 7 et 8, qui devraient leur être semblables.
Dans l'ensemble, la qualité de la sculpture est nettement moins bonne sur la tribune (2). Les pilastres ne sont pas homogènes ; la plupart comportent quatre cannelures terminées en congé, à l'exception des pilastres 3 et 13, qui ont cinq cannelures terminées à cru et le pilastre 12, qui n'en comporte que trois, prolongées sur la traverse supérieure ; quant aux pilastres 1 et 15, qui ont bien quatre cannelures, ils sont plus larges que leurs bases et chapiteaux et les cannelures sont à cru.
Tout comme la tribune (1), la tribune (2) semble réutiliser des éléments préexistants, tout en copiant la plus ancienne pour les autres panneaux.
Photographe au service régional de l'Inventaire de Provence-Alpes-Côte d'Azur de 1970 à 2006.