Le savon est issu de la réaction chimique qui survient entre deux composants principaux, un corps gras, l’huile, et un produit alcalin, la soude. Le savon de Marseille n’utilise que des huiles végétales, principalement des huiles d’olives et des huiles de coprah / huiles de palmiste.
1. Le stockage des huiles
Les huiles sont stockées à leur arrivée par camion dans des cuves situées au centre de l’usine (parc à suif) et dans le bâtiment 4. En 2014, au moment de l’enquête, 13 cuves à huile se trouvaient dans l’usine. Certaines huiles sont décolorées par un procédé utilisant de la terre. Le bâtiment 4 comporte en son centre une machine qui sert à filtrer cette terre.
Une dernière cuve se trouve dans le bâtiment 9 où est fabriquée l’eau salée. Elle contient 60 t. d’huile de palme et de coprah (mélangée à 85 % -15 %).
parc à suif | parc à suif | parc à suif | bâtiment 4 | bâtiment 4 | bâtiment 4 | bâtiment 4 | bâtiment 4 | bâtiment 9 | |
cuve 27 | cuve 24 | cuve 20 | cuves 1, 2, 4 | cuve 5 | cuve 6 | cuve 7 | cuve 8 | cuve 13 | |
contenance | 40 t. | 35 t. | 35 t. | 22 t. | 19 t. | 19 t. | 31 t. | 31 t. | 60 t. |
contenu | olive | coprah/ palmiste | palme | palme | coprah/ palmiste | olive | coprah/ palmiste | palme | palme/coprah |
En 1986, les seules cuves du parc à suif offraient une capacité de stockage de 1448 tonnes d’huiles.
2. La saponification
Aujourd’hui, la saponification a lieu dans de grands chaudrons et dure environ une semaine. Elle assemble 72 % d’huile et 28 % de soude et les transforme en pâte liquide grâce à un flux de vapeur à 190° à 6 bars de pression.
Cette opération commence par l’empâtage, qui aboutit à une pâte de savon après une cuisson de deux jours interrompue chaque nuit.
Dans cette pâte est alors ajoutée de la soude en excès pour saponifier les huiles qui n’auraient pas réagi lors de l’empâtage.
Le savon obtenu est ensuite lavé à l’eau salée (teneur en sel : 23%) puis à l’eau douce pendant 3 ou 4 jours. C’est durant cette opération que le savon est nettoyé de toutes ses impuretés, des restes d’eau glycérineuse et d’éventuels excès de soude.
Lors de la dernière phase, le maître savonnier brasse vigoureusement grâce au « raclet » le savon qui bout à gros bouillons tout en ajoutant encore de l’eau. C’est la liquidation. Des analyses chimiques et son coup d’œil lui permettent de déterminer quand le savon est prêt. Ce dernier est alors laissé au repos et conduit dans de grandes cuves de stockage.
L’usine compte 8 chaudrons.
3. La solidification
Depuis la création de la savonnerie, le savon liquide était solidifié dans des mises de séchage situées au premier étage du bâtiment 2. En 1958, les mises sont détruites et remplacées par deux atomiseurs, Mazzoni 1 et 2, commandant chacun une ligne de production. Le plus petit des deux a été ferraillé. Il ne reste que le plus grand d’une capacité de 2 tonnes par heure.
Cette imposante machine qui fonctionne entièrement sous vide comporte :
- un chaudronnet qui réchauffe une première fois le savon
- une pompe qui conduit le savon vers une succession de trois surchauffeurs
- l’atomiseur proprement dit. Au centre d’un cylindre sous vide, un élément en rotation projette d’un côté le savon liquide à 120 ou 140° (selon l’huile utilisée) sur les parois du cylindre tandis que de l’autre, un racleur décroche le savon qui s’est solidifié.
- un dispositif de purification des gaz. L’air chaud est extrait de l’intérieur de l’atomiseur. Il passe dans des cyclones qui récupèrent les poussières puis grâce à une pompe à vide (pompe KSB) il est projeté dans une colonne barométrique au sommet de laquelle est installée une cavité garnie de chicanes qui condensent l’eau extraite du savon. Le sommet de la colonne dépasse du toit du bâtiment 2.
- des boudineuses sous vide qui produisent du savon solide en copeaux, les bondillons. Le savon, à la sortie des boudineuses, est un solide qui comporte 26 à 28 % d’eau. Il est même possible de faire baisser ce chiffre à 20 %. Par comparaison, le savon obtenu par les mises d’évaporation comportait 34 % d’eau.
4. Le façonnage
Les bondillons peuvent être conditionnés tels quels pour la vente.
Ils peuvent aussi être repassés dans une seconde boudineuse qui produit un boudin de section carrée qu’il faudra passer à la coupeuse pour produire les cubes finaux. Ces derniers passent alors dans un tunnel de croûtage pour être ensuite marqués par la mouleuse et conditionnés.
Pendant la plus grande partie du 20e siècle, le savon était fabriqué sous le contrôle d’un maître savonnier nommé Valentin ; au moins trois générations de Valentin se sont succédé à ce poste à l’usine du chemin de Sainte-Marthe.
Conservateur du Patrimoine au service régional de l'Inventaire général de Provence-Alpes-Côte d'Azur de 2004 à 2017.