Cet ensemble de onze sérigraphies représente des danses polonaises traditionnelles. L'auteur, Zofia Stryjeńska, les a réalisées en 1927.
L’œuvre intitulée TANCE POLSKIE initie la série : la grosseur et l'emplacement des caractères diffèrent de ceux employés pour désigner les danses des autres sérigraphies. La date est absente de l’œuvre et le danseur est cerclé de couleurs (son costume semble être une des variantes du costume de zbojnicki). "Tance polskie" signifie "danses polonaises". Au verso de la sérigraphie, figure un extrait de la tablature d'orgue de Jan Lublin, manuscrit musical de 520 pages, daté de 1540 et conservé à l'Académie des Sciences de Cracovie. Le manuscrit renferme 36 pièces, des danses pour la plupart, où l'on reconnait entre autre œuvres originales le prélude de Nicolas de Cracovie dont quelques notes sont ici reproduites et présentées au dos de l'encadrement.
Cinq des dix danses sérigraphiées sont usuellement dénommées "danses polonaises nationales" : la polonez, la kujawiak, la mazur, l'oberek et la krakowiak. L'air de l'hymne polonais est d'ailleurs celui d'une mazur. A ces danses nationales sont associées une représentation de polka, de goralski, de zbojnicki, de zydowski et de kolomyjka (certaines de ces cinq danses peuvent être qualifiées de danses "régionales").
Aucune information ne permet de renseigner la complétude de la série.
Les forme définitive et dénomination de ces danses anciennes ont été arrêtées au 18 ou 19e siècle. Les dénominations témoignent bien souvent de l'origine géographique de la danse ; parmi les exceptions notables, signalons l'oberek qui tire son origine de la façon de danser en tournant, ou encore le zydowski, adjectif signifiant "juif".
La musique qui accompagne ces danses est souvent interprétée par un orchestre, comprenant au moins un violon. De courts passages chantés peuvent être associés à la danse, notamment pour la krakowiak ou le goralski. Ces danses se dansent sur des rythmes ternaire, ou binaire pour la polka et la krakoviak, et ont suscité l'attention particulière de compositeurs polonais de renom tels Chopin, Moniusko et Paderewski, dont quelques partitions ornent le dos de certaines de ces sérigraphies. Ce sont donc des danses au rythme vif, à l'exception de la kujawiak et la polonaise dont le tempo plus modéré a séduit très rapidement la noblesse polonaise.
Pour la plupart, ces danses étaient initialement des danses populaires et rurales. La polka était prisée par les milieux ouvriers citadins, et le zbojnicki était la danse légendaire des brigands et des bergers des montagnes Tatras.
Fréquemment en cercle ou demi-cercle, plusieurs couples mixte de danseurs interprètent ces danses, hormis pour le zbojnicki qui n'est dansé que par des hommes et pour le goralski qui est le fait d'un seul couple. Zofia Stryjeńska n'a aucunement représenté l'intégralité des formations, seulement le duo de danseurs ou l'homme seul qui interprètent les éléments chorégraphiques de base.
Ces danseurs portent un costume traditionnel, aux couleurs chatoyantes témoignant de folklores locaux. Plusieurs costumes peuvent être portés pour une même danse en fonction des particularismes micro-régionaux et de l'évolution socio-historique de la danse, c'est particulièrement vrai pour la mazur. Le danseur de zbojnicki est aisément reconnaissable à son chapeau à plume et son ciupaga, bâton à la pointe métallique et au sommet pourvu d'une hache aiguisée. Les danseurs citadins de polka sont affublés d'habits du dimanche à la mode, un peu vulgaires (jupe relevée, pieds nus, chapeau surdimensionné), soulignant le caractère transgressif de la danse au 19e siècle. Les Juifs dansant le zydowski portent des costumes hassidiques : ce mouvement de renouveau religieux fondé au 18e siècle en Europe de l'Est insiste sur la communion joyeuse avec Dieu au travers le chant et la danse. Les Hutsuls dansant la kolomyjka portent des costumes reflétant le caractère provocateur de cette ethnie ukrainienne revendicatrice de bergers des Carpates (la danseuse est nue pieds et sa jupe s'ouvre sur un jupon très court). L'influence française est notable dans la jupe cerclée de la danseuse de polonez (danse qui tire son nom d'un terme francisé).
Ces danses polonaises (notamment la krakowiak, la mazur, la polonez, la polka) sont devenues très populaires dans les salons d'Europe occidentale, dans les années 1830-1840 lors des velléités d'indépendance des Polonais. Quelques dizaines d'années plus tard, la polka, populaire aux États-Unis, sera l'un des marqueurs ethniques de la population polonaise émigrée outre Atlantique. De nos jours, des formations de danseurs semi-professionnels interprètent ces danses folkloriques lors des mariages en Pologne, ou pour un public composé d'étrangers.
Chercheur Inventaire Région Sud, à partir de février 2013.