Dossier d’œuvre architecture IA84000175 | Réalisé par
Sauze Elisabeth
Sauze Elisabeth

Conservateur du Patrimoine au service régional de l'Inventaire général de Provence-Alpes-Côte d'Azur de 1969 à 2007.

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  • inventaire topographique
Village semi troglodytique
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Pertuis
  • Commune Ansouis
  • Cadastre 1934 E  ; 1836 E
  • Dénominations
    village
  • Précision dénomination
    village semi troglodytique

HISTORIQUE

Au centre du pays d'Aigues, le territoire d'Ansouis occupe le bassin médian du Marderic, sorte de cuvette allongée qu'un alignement de collines (points culminants Pied Bernard 395 m, le Miraillet 364 m) isole, à l'est et au sud, des vallées de l'Eze et de la Durance. Du sud-ouest au nord-est, la limite décrit un arc de cercle largement ouvert coupant à mi-pente les coteaux et les vallons de la rive droite du Marderic. Ce dernier traverse en biais le territoire et reçoit successivement les vallats de Chabranne, d'Entraigues, du Vabre, de l'Ermitage (ou Vallat Neuf), de Gastoul et de Soulière avant d'entrer dans l'étroit goulet qui, à travers le chaînon montagneux du territoire de Villelaure, le conduit jusqu'à la Durance.

La douceur du relief - exception faite des collines méridionales, abruptes et boisées mais peu étendues -, la multiplicité des cours d'eau et des sources et la fertilité des terres assurent à la commune d'incontestables avantages du point de vue de l'agriculture. Céréales, vignes, vergers, prairies et champs de primeurs variées couvrent plus des trois quarts de la superficie totale (1 763hectares). Le réseau routier se développe sans contrainte dans toutes les directions, évitant seulement le massif du Miraillet, au sud. Les routes qui le composent relient Ansouis à Pertuis et à Cucuron (D 56), à Cadenet et à la Tour-d'Aigues (D 135), à Villelaure et à la Motte-d'Aigues (D 37).

Les témoignages d'habitat préhistorique sur le territoire d'Ansouis sont jusqu'à présent fort peu nombreux et peu sûrs : un "atelier épi-paléolithique" fouillé en 1885 et quelques pièces éparses d'industrie lithique et céramique du néolithique trouvées dans la zone des collines. L'Antiquité est mieux représentée, avec des trouvailles assez nombreuses mais non étudiées (près de la chapelle Saint-Estève, aux lieux-dits la Fortune et le Gavède) et des toponymes comme Bornas et Cassan, qui évoquent des villae de cette période. Une partie des domaines de l'abbaye de Saint-Victor de Marseille recensés en 813 et en 835 peut être localisée aux environs d'Ansouis (lieux-dits Colongue et Fenaille).

Le village, situé au centre du territoire sur un gros mamelon rocheux isolé au confluent du Marderic et du Vallat Neuf, parait s'être formé assez précocement autour du château construit dès le milieu du Xe siècle par le comte de Provence Boson. Ce site constituait en effet un point stratégique intéressant, contrôlant le carrefour de l'ancienne route reliant Aix à Apt (par Pertuis et Cucuron) et de l'un des chemins remontant la vallée de la Durance.

Vue du village et du château prise du sud.Vue du village et du château prise du sud. Vue de situation prise du sud-est.Vue de situation prise du sud-est.

La plus ancienne mention d'Ansouis date de 961, à propos d'une donation faite à l'abbaye de Montmajour par un certain Gens, vassal du comte Boson qui lui avait apparemment donné en garde le château appartenant au fisc royal. L'agglomération apparaît formée, avec son église paroissiale, vers la fin du XIe siècle (1092 ?), mais on ne possède aucun renseignement à son sujet avant la fin du XIIIe siècle. La seigneurie semble être restée aux mains des comtes de Provence, puis des comtes de Forcalquier ; et la famille d'Ansouis qu'on voit citée dans des textes de 1165, 1199 et 1202 n'avait probablement qu'un rôle secondaire. En 1193, le dernier comte de Forcalquier constitua en faveur des fils de son gendre Raine de Sabran un apanage composé des seigneuries d'Ansouis, Cucuron, Sannes, Roubians et La Motte-d'Aigues : Guillaume Maltortel, fils ainé de Raine, devint ainsi le premier baron d'Ansouis et la tige d'un lignage puissant qui domina cette partie du pays d'Aigues durant trois siècles.

Capitale, centre administratif et commercial de la baronnie, l'agglomération d'Ansouis prit de l'importance et se développa sur le versant méridional du site, sous le château reconstruit ou agrandi par les Sabran. C'est vraisemblablement au début du XIIIe siècle, au cours du conflit déclenché par la succession du dernier comte de Forcalquier, que le village reçut sa première enceinte fortifiée, ouvrage partiellement conservé qui nous permet de localiser et de mesurer l'extension du premier noyau urbain. Dans le courant du XIIIe siècle et le premier tiers du XIVe siècle, la croissance démographique vive et continue porta l'agglomération à s'agrandir hors de cette enceinte et à couvrir la pente presque jusqu'à la limite méridionale du village actuel. Le censier dressé en 1331 pour le baron Guillaume de Sabran, frère et héritier de saint Elzéar, énumère 260 propriétaires fonciers et donne l'image d'une agglomération au tissu serré et intensément occupé : sur un total de 290 parcelles construites, on compte 259 habitations,12 crottes (bâtiments creusés dans le rocher), 8 casaux (ruines) et 11 courts (remises agricoles) ; l'existence de pontins, la rareté des propriétés composites (une seule citée) et la fréquence des parcelles divisées entre plusieurs propriétaires témoignent de la densité de l'habitat, qui s'étend même à la campagne environnante où l'on recense deux bastides, trois granges et une dizaine de cabanons. Il semble qu'on puisse chiffrer la population à quelque 250 feux, ce qui fait d'Ansouis à cette époque une petite ville.

Un second censier, daté de 1378, montre les premiers effets de la crise économique et démographique par laquelle s'acheva le moyen-âge. En l'espace de 50 ans, le nombre des censitaires diminua d'environ 70 %, celui des parcelles bâties de 22 %. Cette rétractation du milieu construit n'est pas due aux violences des guerres qui sévirent durant cette période. Ansouis ne fut, semble-t-il, pas occupé ; mais la forte diminution de la population entraîna le desserrement et la dégradation de l'habitat - il y a moins d'habitations, beaucoup plus de casaux, de crottes, de courts et d'étables, de nombreuses parcelles composites et aucune copropriété -, tandis que l'agglomération était scindée en deux parties distinctes, l'une protégée par une nouvelle enceinte fortifiée, l'autre restant à l'extérieur et contenant surtout des remises et des ruines.

Dans le courant du XVe siècle, la situation empira encore. Dès 1437, on ne trouvait plus hors de l'enceinte aucune des maisons d'habitation qui y existaient en 1378 ; à l'intérieur de la ville, les regroupements de parcelles se multiplièrent ; les champs situés sur la périphérie du territoire restaient en friche. Beaucoup de familles, même nobles, s'éteignirent à cette époque : en 1471, Ansouis ne comptait plus que 41 foyers. Les barons d'Ansouis - Elzéar III de Sabran et ses fils - eurent leur part de difficultés et durent vendre, pour cause de dettes, la majeure partie de leur patrimoine. A la fin du siècle, Elion de Sabran faillit même perdre, pour une dot impayée, la moitié de la seigneurie d'Ansouis.

Ansouis sortit de la crise, au début du XVIe siècle, très affaibli et amoindri. La baronnie était désormais réduite à son seul chef-lieu. Surtout, les courants commerciaux qui le traversaient et qui avaient fait pour une part sa prospérité étaient durablement taris : leur rétablissement à l'époque moderne s'accompagna en effet de la déviation des itinéraires anciens au profit de ceux que suivent les grandes routes d'aujourd'hui, par le bord de la Durance et par la Combe de Lourmarin. En 1578, d'après le premier cadastre conservé, la population avait à peu près regagné son niveau de 1331 : 285 propriétaires fonciers, dont une trentaine de non résidents. L'agglomération intra-muros, ayant vu sa superficie réduite de toute la partie incluse dans la première enceinte - partie rachetée par le baron d'Ansouis pour agrandir son château - contenait à peine davantage de parcelles bâties qu'en 1378 (137, presque toutes habitées. Toute la croissance s'était reportée sur le faubourg, qui avait gagné en étendue vers le bas de la pente, au sud, et surtout sur les côtés est et ouest, le long des voies d'accès 250 parcelles, dont 148 maisons, 40 casaux et une soixantaine de bâtiments d'exploitation. Au total, 273 habitations agglomérées, auxquelles il faut ajouter 35 bastides construites dans le territoire, soit au moins 1.200 âmes. Extra muros. Traverse ou "andronne".Extra muros. Traverse ou "andronne".

La population s'accrut encore dans la première moitié du XVIIe siècle, selon le témoignage d'un curé qui estimait en 1640 avoir à sa charge près de 2.000 âmes (environ 800 paroissiens et 1.200 enfants, y compris les quelque 80 à 100 habitants du territoire de Sannes encore annexé à Ansouis), mais simultanément s'appauvrit. Le cadastre de 1649 ne recense en effet que 257 propriétaires fonciers, dont 40 étaient étrangers au village et près du tiers des habitants ne possédaient pas de logement. L'accaparement des biens-fonds par les notables du lieu et par des nobles et des bourgeois venus d'Aix et de Pertuis principalement se traduisit par la construction de nombreuses bastides et par un nouveau desserrement du tissu urbain : le nombre des parcelles se trouva ainsi réduit de plus de 40 % dans le village fortifié et de 20 % environ dans le faubourg.

Cette paupérisation de la population, jointe à une conjoncture plus difficile et à la séparation obtenue au terme d'un long procès par la communauté de Sannes, amena à partir du milieu du XVIIe siècle une nouvelle baisse démographique. Dès 1656, le curé d'Ansouis évaluait à moins de 700 ses paroissiens adultes ; l'affouagement de 1698 compta 264 familles ; en 1700, le curé constatait avec amertume que près des quatre-cinquièmes des 1360 habitants du lieu devaient avoir recours pour vivre aux aumônes distribuées par l'hôpital.

La crise économique du début du XVIIIe siècle aggrava encore la situation. En 1728, il n'y avait plus que 190 familles, en 1765, 867 habitants. Vers la fin du XVIIIe siècle, on notait cependant une légère amélioration : dans sa Description publiée en 1787, Achard donne en effet à Ansouis environ 1200 âmes et célèbre la fertilité du territoire qui produit des fruits (cerises et prunes) et des primeurs (navets et melons) réputés.

Après une nouvelle chute durant la Révolution (977 habitants en 1800), la population d'Ansouis resta à peu près stationnaire durant la première moitié du XIXe siècle (996 habitants en 1836, 1.029 en 1841, 984 en 1857) avant de voir ses effectifs réduits de moitié par l'exode rural (710 habitants en 1896, 520 en 1962, 536 en 1975).

Avec une courbe démographique en baisse presque constante, l'agglomération a peu évolué depuis le milieu du XVIIe siècle : quelques maisons ont été rénovées au XVIIIe ou au XIXe siècle, beaucoup d'autres sont tombées en ruine, en particulier dans le vieux village où des îlots entiers ont disparu. Le milieu urbain apparaît à l'analyse comme fossilisé - beaucoup de petites maisons du type 1 (le plus ancien) y ont été relevées - et comme immobilisé - aucun accroissement notable, mais en revanche quelques vides creusés entre les deux cadastres de 1836 et de 1934. Ansouis conserve aujourd'hui avec difficulté un équilibre précaire entre une agriculture encore vivace - mais désavantagée par le défaut de moyens d'irrigation - et un tourisme en voie de développement : le château attire du monde, le nombre des résidences secondaires, aménagées dans les ruines du vieux village ou disséminées dans la campagne alentour, s'accroit rapidement depuis quelques années.

Le village a été inscrit à l'inventaire supplémentaire des Sites en 1944.

Bourg castral mentionné en 961, en bordure de l'itinéraire Pertuis ; Apt, chef lieu de Baronnie en 1193 ; développement continu jusqu'au milieu du 14e siècle ; 1er bourg fortifié avant 1300, 2e bourg fortifié dans le 3e quart du 14e siècle ; environ 250 feux de queste vers 1300 ; entre 1348 et 1470 baisse démographique de 80%, ruine partielle, disparition de la baronnie et déviation de l'itinéraire ; au 16e et dans la 1ère moitié du 17e siècle forte hausse démographique, environ 2000 habitants en 1640, reconstruction du faubourg ; essor contrarié par la paupérisation de la population au profit de l'aristocratie aixoise et pertuisienne ; démographie en baisse au 18e siècle, légère remontée dans la 1ère moitié du 19e siècle, en baisse continue depuis 1850 : 867 habitants en 1765, 1029 en 1841, 710 en 1896, 536 en 1975.

  • Période(s)
    • Principale : Moyen Age
    • Principale : Temps modernes

Site de versant à forte pente ; plan en éventail sous le château, étage en 3 parties : 1e bourg fortifié (détruit et recouvert par les terrasses du château au 16e siècle) , 2e bourg fortifié, faubourg médiéval reconstruit au 16e siècle ; à l'est, petit faubourg linéaire construit au 19e siècle.

  • Typologies
    bourg castral du 11e siècle à plan en éventail
  • Statut de la propriété
    propriété publique
  • Intérêt de l'œuvre
    à signaler

Documents figurés

  • Plan d'alignement de la Grand Rue, côté nord depuis la rue du Château jusqu'à la rue du Grand Portail.. Dessin, 1913. Archives départementales du Vaucluse, Avignon : 2 O 2, 3.

  • Vue d'ensemble du village et du château côté est. Etat au début du 20e siècle. Deydier (photographe). Carte postale, édition Vve Turcan, sd.

Date d'enquête 1968 ; Date(s) de rédaction 1987
(c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général
Sauze Elisabeth
Sauze Elisabeth

Conservateur du Patrimoine au service régional de l'Inventaire général de Provence-Alpes-Côte d'Azur de 1969 à 2007.

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