HISTORIQUE
Au début du XVIe siècle, le territoire de Peypin-d' Aigues était réputé désert. On y trouvait cependant quelques terres cultivées et trois bastides, l'une à Notre Done, l'autre à Fonzillouse et la dernière à Saint-Jérôme. Le 22 janvier 1506, Antoine-René de Bouliers, au nom de son fils François, baron de La Tour-d'Aigues, conclut un accord avec quatorze chefs de famille originaires de La Tour-d'Aigues, Grambois, Lourmarin et Volonne pour repeupler les deux seigneuries de Peypin et de Saint-Martin-de-la-Brasque. Chaque nouvel habitant reçut un lot de terre, un emplacement à bâtir et des droits d'usage sur les terres gastes. Plutôt que de réoccuper le site perché du village médiéval, les arrivants préférèrent grouper leurs habitations sur le coteau, au bord du vallat des Hermitans et au carrefour des deux routes. La trace du quadrillage directeur du lotissement transparaît encore dans le parcellaire de l'agglomération.
En 1540, Peypin comptait 20 maisons habitées et 160 paroissiens adultes. L'appartenance d'une moitié environ des habitants à la colonie vaudoise du Lubéron valut au village d'être condamné et mis à sac en 1545. Mais l'habitat, rapidement reconstitué, connut dans la seconde moitié du XVIe siècle une croissance importante. Le curé de Peypin dénombrait en1582 environ 90 catholiques adultes et presque autant de réformés. En 1574, la communauté et le baron de La Tour d'Aigues conclurent un nouvel accord concernant les bois du Lubéron. Mais le domaine de la Bastide du Bois, que le seigneur venait de créer en pleine montagne, fut jusqu'à la fin du XVIIe siècle source de conflits avec les habitants lésés dans leurs droits d'usage et avec le prieur qui réclamait la dîme des terres défrichées.
Le premier cadastre, rédigé en 1614, énumère 183 propriétaires, dont 19 non résidents, et 62 maisons : 30 au village,16 au hameau de Fonzillouse, 6 au hameau des Roux, 3 à Notre-Done, 6 à Saint-Jérôme et une aux Hermitans. Cependant la présence de plusieurs bâtiments ruinés et de nombreux casaux suggère une diminution récente de la population. Cette diminution, que confirme le chiffre de 40 paroissiens évalué en 1620 par le curé de Peypin, fut en tout cas passagère. En 1654, Peypin comptait 475 habitants, 278 catholiques et 197 protestants. En 1626, la communauté achetait une tuilerie et louait les services d'un tuilier. Un porcher et un boulanger communaux furent embauchés à partir de 1628, un maître d'école à partir de 1666. En 1653, le duc de Lesdiguières céda aux habitants cent charges (environ 63 ha) de terre gaste à défricher dans le Lubéron. Une concession identique faite l'année suivante aux habitants de Saint-Martin-de-la-Brasque déclencha une querelle entre les deux communautés : Peypin, qui réclamait l'inscription à son cadastre et la taille de toutes les terres essartées par les habitants de Saint-Martin, n'en obtint, au terme d'un compromis final passé en 1675, que les deux tiers. Dans la seconde moitié du XVIIe siècle, la population continua de croître. Cette augmentation paraît avoir concerné surtout les protestants, dont le nombre en 1680 atteignait 230 pour 176 communiants catholiques.
Les persécutions qui aboutirent en 1685 à la conversion forcée des réformés et la crise économique du premier tiers du XVIIIe siècle provoquèrent une nouvelle baisse démographique. En 1698, il y avait à Peypin 88 familles (autant qu'en1654), 164 propriétaires (dont 17 étrangers) et environ 80 maisons, dont 47 au village, 17 au hameau de Fonzillouse et 11 au hameau des Roux : en 1728, 80 familles, 36 d'"anciens catholiques"et 44 de "nouveaux convertis" ; en 1765, 91 maisons mais 380 habitants seulement.
Le dernier tiers du XVIIIe siècle fut plus favorable : à la veille de la Révolution, on dénombrait 95 familles et environ 450 habitants. Cette période vit pourtant renaître des conflits entre le seigneur et la communauté, au sujet du four banal (1765) et surtout des bois du Lubéron où un fermier seigneurial avait en 1776 établi une importante fabrique de tuiles et de malons.
La Révolution n'améliora guère la situation de Peypin, où l'on note une importante diminution de la population (266 habitants en 1800). La privatisation des anciens domaines seigneuriaux (bois du Lubéron) et la ruine de l'aqueduc des Hermitans retirèrent même aux habitants certaines ressources. Au cours de la première moitié du XIXe siècle, l'effectif démographique remonta pourtant et se maintint entre 400 et 450 personnes.
L'exode rural, amorcé dès le milieu du XIXe siècle, réduisit la population à 283 habitants en 1896 et 211 en 1962. Le déclin de l'agriculture défavorisée par la faible étendue du terroir exploitable et l'absence de moyens d'irrigation se poursuit encore aujourd'hui. Depuis quelques années, la commune a trouvé une nouvelle vocation dans l'accueil des vacanciers : au recensement de 1975, on comptait 136 résidences secondaires pour 89 résidences principales.
Conservateur du Patrimoine au service régional de l'Inventaire général de Provence-Alpes-Côte d'Azur de 1969 à 2007.