Ce petit groupe d'ouvrages qui constitue le huitième caposaldo de la première ligne de défense du Vallo Alpino dans le sous-secteur II A dit de la Haute-Roya, s'organise sur les hauteurs du Plan Tendasque et de Rocca Cuna, au nord-ouest du lac des Mesches et du confluent des vallons de la Minière et de Castérino.

Ces ouvrages n'ont été construits que vers la fin des années 30, en fonction des spécifications de la circulaire 7000, ou encore à partir de 1939, selon la circulaire 15000.

1. Ouvrage d'infanterie n° 106, dit de Plan Tendasque

Ouvrage casematé en caverne de type 15000, commencé vers 1940 et laissé inachevé en 1942 (bloc d'entrée non réalisé), armé de 3 mitrailleuses, conçu pour résister à l'artillerie de gros calibre.

C'est un ouvrage complexe, aménagé sur une crête en pente douce, commandant le versant ouest/sud-ouest de Plan Tendasque vers le vallon de la Minière. L'entrée, dépourvue du bloc qui devait l'abriter, s'ouvre largement au début du versant est-nord-est, encaissée entre des parois de béton formant chicane à ciel ouvert. Une courte galerie d'accès dessert une chambre-abri allongée transversale (sous la ligne de crête), dépourvue d'aménagements logistiques. Deux galeries rectilignes relativement longues, partant l'une du grand côté sud de l'abri, l'autre de son extrémité est, desservent des positions de tir sous bloc. Un troisième bloc-observatoire (non actif) situé entre les deux autres un peu plus haut sur la pente, et associé à une issue de secours haute, est desservi par une galerie en escalier qui s'embranche sur la galerie d'accès au bloc actif de gauche (nord-ouest). La casemate pour mitrailleuse fixe aménagée au centre de ce bloc, a une embrasure pourvue d'une plaque de blindage, dont l'ébrasement externe à trémie est flanquée à gauche, dans une excroissance du bloc formant caponnière, par une petite embrasure pour fusil mitrailleur située au bout d'un étroit couloir courbe qui part du raccord de la galerie à la casemate. A droite, la casemate donne accès à un autre couloir coudé toujours contenu dans le bloc, qui aboutit à un créneau de visée pour signaux lumineux orientée à l'ouest, vers l'ouvrage 107. Extérieurement, le bloc est entièrement camouflé au moyen d'un immense voile de grillage revêtu de ciment, tendu sur une armature en bois de forme complexe et modelé de façon à imiter les formes aléatoires et aiguës de rochers naturels; un volet amovible de même nature permettait d'occulter l'embrasure. C'est l'exemple le plus spectaculaire et le mieux conservé de cette technique de camouflage au sein du Vallo Alpino. Les deux autres blocs, de forme surbaissée, sont simplement revêtus d'un parements en petits moellons évoquant des murs de petits bâtiments vernaculaires en ruine. Le bloc de droite (sud/sud-est) héberge deux casemates distinctes pour mitrailleuses, et dispose d'une issue de secours à la gorge, vers le nord. Le bloc-observatoire est percé des trois classiques embrasures de visée divergentes. L'issue de secours qui l'accompagne est située dans le prolongement de la galerie-escalier qui dessert à la gorge le poste d'observation, et s'ouvre vers l'est.

Aux environs de l'ouvrage, est implantée une série de N.A.S. astucieusement dissimulés entre des blocs de rocher erratiques.

2. Ouvrage d'infanterie n° 107, dit de Plan Tendasque

Ouvrage casematé en caverne de type 15000, résultant de la transformation en un ouvrage unique, vers 1940-1941, de deux ouvrages monobloc mitoyens de type 7000 commencés peu auparavant (1939) et numérotés 107-107bis, l'un incluant deux positions de tir pour mitrailleuse sous casemate, l'autre une seule. Cet ouvrage est situé en vis à vis du précédent (n° 106), sur la crête dominant le versant sud-est du Plan Tendasque. Ses tirs sont orientés au sud, vers le vallon de la Minière.

Chacun des deux ouvrages d'origine a été modifié à la gorge par suppression de la petite chambre-abri qui existait au revers des casemates active, remplacée par un raccordement direct à une galerie de distribution rectiligne. Les deux segments de galerie partant des blocs convergent en angle aigu pour se confondre en une longue galerie unique qui dessert au passage une chambre-abri longitudinale dépourvue d'aménagements logistiques, et se prolonge en se coudant deux fois du même côté en angle obtus. L'issue, située assez loin des blocs sur le versant opposé, forme une chicane ou "baïonnette" encaissée à ciel ouvert. Le bloc pourvu d'origine de deux casemates actives divergentes, complétées par une position à créneau de visée par signaux lumineux répondant à l'ouvrage 106, est simplement revêtu à l'extérieur d'un parement en petits moellons et couvert d'un dôme très aplati en ciment. Le second bloc a été plus profondément transformé. On l'a pourvu d'une excroissance latérale en caponnière flanquant son embrasure à gauche, avec visée à signaux au revers, et un étage supérieur en forme de tourelle en béton abritant une position d'observation dirigé vers l'est, a été construite sur sa terrasse de couvrement en ciment, un peu en retrait. L'observatoire d'étage a été mis en communication avec la galerie d'accès de la casemate du bas par un puits de section carré. L'ensemble de ce bloc complexe a été laissé brut de décoffrage au dehors, les travaux ayant sans doute été interrompus avant de mettre en oeuvre le revêtement de camouflage.

3. Ouvrage d'infanterie n° 108, dit de Rocca Rossa

Ouvrage casematé en caverne de type 15000, réalisé d'un seul jet vers 1940-1941, pour deux positions de tir casematées pour mitrailleuse, chacune dans un bloc. La situation topographique de l'ouvrage, ménagé dans la partie basse d'un front rocheux peu élevé et presque vertical , diffère de celle des deux ouvrages précédent, dont les blocs émergent sur des versants aux pentes modérées. Cependant, le plan même de l'ouvrage, avec sa longue galerie d'accès partant du revers du front rocheux, deux fois coudée, desservant au passage une chambre-abri longitudinale nue, et se ramifiant à angle aigu en deux branches jusqu'aux positions de tir casematées, rappelle en touts points celui de l'ouvrage n° 107. On peut dire que la conception de l'ouvrage est une réédition simplifiée de l'état final de l'ouvrage 107, dans laquelle chaque bloc, saillant faiblement de la paroi rocheuse et dépourvu de camouflage extérieur, n'abrite qu'une casemate active, celle de gauche seule étant équipée par surcroît d'un créneau de visée pour signaux lumineux en connexion avec l'ouvrage 107.

4. Abri-caverne sans n°, dit de Roca Cuna

Abri-caverne non actif construit dans son gros œuvre vers 1940-1941 et n'ayant jamais reçu ses aménagements définitifs.

Niché dans le bas d'un front rocheux, il se compose d'une chambre-abri de 25m 50 de long avec trois niches percées à intervalle réguliers dans son grand côté opposé au front rocheux, et deux retours d'équerre fermés chacun d'une façade vers l'extérieur, et inscrivant côte à côte dans leur volume à la fois les deux courtes galeries d'accès, et des locaux de service ou logistiques. La galerie d'accès de gauche est flanquée à droite du local du groupe électrogène, au revers duquel elle décrit une chicane dans laquelle on accède aux latrines, et gagne la chambre-abri en montant quelques marches. Symétriquement, la galerie d'accès de droite est flanquée à gauche du local de la cuisine, qui prenait jour en façade par une fenêtre, et de deux réserves.

5. Caserne dite du Gias de la Gasta

Cette caserne pour cent hommes, construite avant 1940 adopte un plan-type reproduit à l'identique à Peyrefique (12e caposaldo). La conception générale de l'implantation compte trois sous-ensembles architecturaux organisés sur une vaste terrasse artificiellement aménagée à flanc de pente: le corps de caserne proprement dit, développé sur trois niveaux (rez de chaussée et deux étages), et deux bâtiments de service plus petits en simple rez-de-chaussée.

L'un, derrière le corps de caserne, isolé des pentes environnantes par un dégagement bordé d'un mur de soutènement, est divisé en deux travées inégales, la plus large pour la cuisine de la troupe et l'autre pour les douches; le versant du toit côté façade d'entrée se prolonge en auvent porté sur quatre poteaux, abritant un promenoir. La façade percée de deux portes encadrant une fenêtre, est simple, mais son enduit ciment est agrémenté d'un appareillage simulé. Ce bâtiment est flanqué du lavoir, qui avait son propre toit.

Le second bâtiment de service est une écurie pour 9 mulets, avec auvent sur jambettes prolongeant la pente du toit au dessus de la façade d'entrée, avec trois portes et anneaux de fixation de longes au mur. Les murs de cette écurie sont entièrement revêtus en ciment nu et portent un toit en bâtière à charpente bois. Le sol intérieur comporte des caniveaux. Mangeoire au mur.

Le plan du corps de caserne proprement dit, en double profondeur avec corridor axial débouchant aux deux bouts, se décompose en deux corps d'un seul tenant associés dans le grand axe, de trois travées chacun, l'un étant plus grand d'un dixième environ que l'autre (largeur, longueur).

Les fenêtres du plus grand corps sont plus larges et géminées, celles de l'autre étant simples. La première travée du petit corps, attenante à la troisième du grand corps, est occupée par le vestibule de l'entrée principale et par l'escalier à volées droites qui dessert les étages.

Caserne du Gias de la Gasta : vue générale. Au premier plan, cuisine et lavoir, à l'arrière plan, corps de caserne principal. Caserne du Gias de la Gasta : façade sur la vallée, mur pignon et terrasse du corps de caserne principal.

La distribution du rez de chaussée est la suivante, travée par travée, en partant du mur-pignon du grand corps :

1) salle à manger de la troupe,

2) salle à manger des sous-officiers / réserve de vivres et cuisine des sous-officiers,

3) chambre pénitentiaire et corps de garde / latrines et magasin,

4) vestibule et escalier,

5)bibliothèque / chambre des officiers,

6) mess des officiers / chambre des officiers avec salle de bains.

Caserne du Gias de la Gasta : vue générale du côté de l'arrivée, à droite, écuries. Caserne du Gias de la Gasta : façade d'entrée du bâtiment des écuries. Caserne du Gias de la Gasta : intérieur des écuries.

Les murs extérieurs de ce corps de caserne sont revêtus d'un enduit ciment avec empattement et faux-appareil réglé au rez-de-chaussée, bandeaux d'étage et encadrements de fenêtres en relief. La charpente du toit en bâtière est de conception mixte: pannes et fermes en ciment armé, chevrons et liteaux en bois. Couverture en zinguerie avec égout en forte saillie.