Dossier d’œuvre architecture IA05000150 | Réalisé par
Truttmann Philippe
Truttmann Philippe

Lieutenant-colonel du génie, docteur en histoire. Chargé de cours à l'École supérieure du génie de Versailles, Yvelines.

Expert en architecture militaire auprès de l'Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France. Réalise de 1986 à 1996 l’étude de l’architecture militaire (16e-20e siècles) de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur : départements des Hautes-Alpes, des Alpes-de-Haute-Provence, partie des Alpes-Maritimes, ensemble des îles d’Hyères dans le Var.

Principales publications : La Muraille de France ou la ligne Maginot (1988)

Les derniers châteaux-forts, les prolongements de la fortification médiévale en France, 1634-1914 (1993)

La barrière de fer, l'architecture des forts du général Séré de Rivières, 1872-1914 (2000)

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  • enquête thématique régionale, architecture militaire de Provence-Alpes-Côte d'Azur
fort dit fort de l'Olive
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Hautes-Alpes - Briançon
  • Commune Névache
  • Lieu-dit Rocher de l'Olive
  • Dénominations
    fort
  • Appellations
    fort de l'Olive, de l'ensemble fortifié du Briançonnais
  • Dossier dont ce dossier est partie constituante
  • Parties constituantes non étudiées
    enceinte, édifice logistique, caserne, citerne, position, batterie, mur défensif, casemate

Intérêt stratégique

C'est en 1874, dans le cadre de la réorganisation générale de la défense des frontières, que le Comité de Défense décida l'occupation, par un ouvrage, de la «position des Gachets » (du nom du bois couvrant le versant nord du Rocher de l'Olive).

Avancée lointaine de la place, et ne faisant pas, à proprement parler, partie de son périmètre défensif, l'ouvrage avait comme missions de surveiller le coude de la Clarée, diviser les attaques contre la crête de Peyrolle, battre les cols frontières des Thures et de l’Échelle et le débouché de la vallée des Acles.

Avec un léger décalage par rapport aux forts de ceinture de Briançon, c'est sous le nom de «fort de l'Olive» que l'ouvrage fut construit de 1881 à 1883, au moment où les relations diplomatiques commencent à se tendre avec l'Italie. L'accès du site fut assuré par une route stratégique (n° 8) qui, se greffant sur la RN 91 au nord-ouest de Saint-Chaffrey, escalade le versant sud-ouest la crête de Peyrolle, franchit celle-ci au col du Granon avant de suivre le versant sud-est du contrefort Roche-Gauthier-Rocher de l'Olive, avec un développement total de 25 km entre Briançon et le fort. Prévue également dans le programme initial de 1874, cette route a l'inconvénient majeur, mais inévitable, d'être vue des positions italiennes pratiquement dès le débouché du col du Granon.

En annexe, pour surveiller un replat en angle mort à l'est du fort et barrer un sentier montant de la Clarée, on construisit le mur défensif et la baraque du Pas du Berger.

Evolution du site

Peu de temps après sa construction, l'ouvrage est touché - comme tous ses congénères - par la crise de l'obus torpille (1885-86), puis, comme l'ensemble de la frontière du sud-est, par le développement des unités de montagne spécialisées, et la création, en France, de l'armée des Alpes (1888).

L'ouvrage est alors doté d'un magasin à poudre caverne creusé sous le massif rocheux du cavalier central. De 1891 à 1893, on construit, 1500 m en arrière, sur le sommet de l'Enlon, un blockhaus de surveillance et de protection, complété de batteries et (1904-1908) d'un magasin à poudre caverne, et relié au fort de l'Olive par un sentier suivant la crête du mouvement de terrain.

Parallèlement, l'occupation du vallon et de la crête des Acles amène la construction de la batterie du Sapey, et d'un poste de télégraphie optique (fig. 9) extérieur au fort. Pour ravitailler le fort sans être assujetti à une longue route, coupée, de plus, en hiver, on installe un téléphérique de temps de paix reliant l'ouvrage au village de Plampinet avec une force portante de 40 kg (1894).

Les choses restent en l'état jusqu'au début des années 1930 : en février 1929, la Commission de Défense des Frontières, dans son rapport relatif à la réorganisation de la frontière du sud-est, préconise le réemploi du fort de l'Olive réorganisé comme avancée, jusqu'à la Clarée, de la position de résistance, jalonnée par les ouvrages de Granon et Buffère.

De fait (sous-dossier III de l'étude du 9.11.1929) un avant projet est élaboré par la direction du génie de Briançon et transmis à la Commission d'Organisation des Régions Fortifiées (C.O.R.F.) dans le cadre des études du programme restreint de défense des Alpes. Premier stade d'un ensemble plus vaste, cet avant projet prévoit de prolonger, à gauche, la galerie du magasin sous roc par une galerie coudée desservant, dans la face nord du massif rocheux, plusieurs casemates frontales, dont deux, chacune pour un canon de 75, battant les cols des Thures et de l’Échelle. Un observatoire sous cloche cuirassée doit surmonter le tout. En fait ces travaux ont déjà commencé en 1928 par main-d’œuvre militaire fournie par le 4e régiment du génie, et se poursuivront jusqu'en 1934, date d'achèvement des deux casemates pour canon de 75 de campagne, à l'exclusion du reste des organisations prévues.

A la modicité des crédits, qui ne permettait pas de faire plus (les ouvrages de la position de résistance proprement dite, Granon et Buffère, ne purent être commencés qu'en 1937 sur crédits supplémentaires) s'est ajoutée la réticence du général Belhague, inspecteur général du génie et président de la C.O.R.F., vis à vis de casemates d'artillerie frontale non cuirassées dont il écrivait que ce procédé était, de notoriété publique, condamné depuis le XIXe siècle : le peu qui fut réalisé paraît donc avoir été imposé à la C.O.R.F. par l'état-major de l'armée, à la demande du commandement régional.

Ces travaux de valorisation sont les derniers ayant affecté l'ouvrage avant la campagne de 1940, date à partir de laquelle l'ouvrage est pratiquement abandonné.

Analyse architecturale

Situation

A une dizaine de kilomètres au nord de Briançon, la Clarée, suivant jusque-là une direction ouest-est, fait un brusque coude à angle droit autour du pied du Rocher de l'Olive et prend une direction sud-nord jusqu'à son confluent avec la Durance, arrivant du Montgenèvre.

Le Rocher de l'Olive est l'extrémité nord d'un contrefort détaché, en doigt de gant, de la Crête de Peyrolle, lui-même jalonné par la Roche Gauthier (2748 m), le sommet de l'En1on (2508 m), la crête des Ruines, et bordé, à l'ouest, par des escarpements rocheux inaccessibles tombant sur le ravin du Creuzet. De même, à l'est, deux étages d'escarpements rocheux gradinent le versant tombant sur la Clarée, 700 m plus bas.

C'est au niveau du coude de la Clarée, donc en face du Rocher de l'Olive, qu'aboutissent les chemins descendant des cols frontière des Thures et surtout de l’Échelle, débouchés sud du saillant de Bardonnèche, dont l'importance stratégique dans le système militaire italien n'a cessé de croître depuis le XVIIe siècle.

Or le pied de ces cols échappe totalement aux vues des ouvrages de Briançon.

Investi d'une mission normalement dévolue, dans le nord-est, à un fort d'arrêt (Manonviller, Bourlémont etc.), le fort de l'Olive diffère cependant de manière radicale du schéma habituel de ce type d'ouvrage, en raison :

- de son implantation sur un site à peu près inaccessible au moins sur trois côtés

- de son altitude, et de son commandement

- du nombre très réduit de positions à partir desquelles il pourrait être bombardé, à distance normale, par de l'artillerie puissante.

En fait, il s'agit d'un ouvrage de montagne - échappant, donc, aux grands schémas usuels de l'époque, sorte de batterie retranchée, sur un site organisé en éperon barré.

Armement

En 1899, l'ouvrage comportait un armement de 8 pièces de 95 mm système Lahitolle avec approvisionnement de sûreté de 50 coups par pièce, susceptible d'être porté à 700 coups par pièce au titre des dotations de défense. Le remplacement des 95 par des canons de 120 mm longs mie 1878 plus puissants était prévu pour 1900, avec 12 emplacements possibles, dont 10 orientés vers les cols des Thures et de l’Échelle et 2 vers la vallée des Acles. La garnison de guerre de 6 officiers et 379 sous-officiers et soldats était essentiellement composée d'une compagnie d'infanterie, un gros détachement d'artillerie à pied, et de divers (commis-ouvriers d'administration, secrétaire, télégraphistes etc.), Une source captée, située en arrière sur les pentes est de l'Enlon, amenait 10 1 d'eau à la minute, par conduite enterrée dans les citernes du fort (bâtiment A : 79 m3, 1 : 350 m3) tandis que 2 fours à pain totalisant 250 rations pouvaient être complétés par un four en tôle de 180 rations. Approvisionnements et ressources de toute nature établis pour une durée de 6 mois (capacité du magasin à poudre caverne: 27.432 kg).

La capacité du casernement était de 5 places d'officiers et 517 places de soldats se répartissant - c'est une des singularités de l'ouvrage - entre le bâtiment A, caserne défensive non à l'épreuve, sorte de grand blockhaus alpin, et le « masque casematé» I, véritable caserne de guerre, et à l'épreuve an moins jusqu'en 1885.

L'ouvrage fut raccordé au réseau télégraphique maire de la place et possédait, en outre, une liaison optique avec le fort de l'Infernet (sans doute à partir de la pièce 19 au premier étage, face sud, de la caserne A) et avec les chalets des Acles (à 5 km de distance) à partir d'une petite baraque en maçonnerie située, à l'extérieur, à 75 m au sud-ouest du fort, sur le sentier de l'Enlon, ce dernier poste existe encore (1986).

Composition d'ensemble

Vue aérienne d'ensemble prise de l'est. Au premier plan, au pied des escarpements, la baraque défensive du Pas du Berger.Vue aérienne d'ensemble prise de l'est. Au premier plan, au pied des escarpements, la baraque défensive du Pas du Berger.

Le plan dessine un quadrilatère allongé irrégulier dont le grand axe sud-nord constitue la capitale. L'ouvrage, dépourvu de fossé (sauf devant la porte d'entrée), est entouré d'une escarpe en maçonnerie couronnant l'a-pic rocheux au nord et à l'ouest, et précédée au sud et à l'ouest d'une berme avec un glacis de raccordement au terrain naturel.

Le tracé en plan de cette escarpe, très irrégulier, accuse une succession de saillants et de rentrants permettant un flanquement en crête. Les fronts est et ouest, fichant vers les directions dangereuses et susceptibles, de ce fait, d'être pris en enfilade, sont munis de murs-traverses en maçonnerie percés de poternes de passage du chemin de ronde. Le front est, relativement régulier, a un tracé approximativement bastionné terminé, au saillant nord-est, par une sorte de bastion circulaire à parapet muni de créneaux de pied horizontaux rayonnants.

Vue d'ensemble du fort prise du sud depuis le pied des pentes de l'Enlon. Au premier plan, l' avancée couvrant l'entrée. A droite, la caserne A. Derrière, la cour centrale et le cavalier d'artillerie. Derrière le fort, la trouée du col de l'Echelle et les montagnes entourant Bardonnèche.Vue d'ensemble du fort prise du sud depuis le pied des pentes de l'Enlon. Au premier plan, l' avancée couvrant l'entrée. A droite, la caserne A. Derrière, la cour centrale et le cavalier d'artillerie. Derrière le fort, la trouée du col de l'Echelle et les montagnes entourant Bardonnèche.Le front sud (front de gorge) barrant l'éperon, est sensiblement rectiligne. Le bâtiment A, faisant saillie sur l'escarpe dont il assure le flanquement, en occupe à peu près la moitié. L'extrémité ouest, de plain-pied avec le terrain naturel, est doublée par une avancée en bonnet de prêtre qui rejoint, à l'ouest, la falaise dominant le ravin du Creuzet et se raccorde, à l'est, par un flanc où s'ouvre l'entrée du fort, au pignon ouest du bâtiment A. Cet ouvrage a l'escarpe sud - faisant face à la crête venant de l'Enlon - percée de 20 créneaux, dont 12 horizontaux (4 dans chaque alignement droit, 2 dans chaque face du saillant central), 6 verticaux genre «archère» (2 dans chaque alignement droit, 1 dans chaque face du saillant) et 2 créneaux de pied flanquant le saillant, et est en outre réalisé en béton, ce qui supposerait une construction, ou une reconstruction après 1888. Le flanc est de cette avancée, en maçonnerie ordinaire, est percé de la porte d'entrée, précédée d'un court tronçon de fossé franchi par un pont fixe. Cette entrée se réduit à une simple baie en plein-cintre, à entourage en pierre de taille, avec clé de voûte saillante portant la date de construction 1881/1882, surmontée d'une pierre de taille chanfreinée portant, gravée en creux, l'inscription «FORT DE L'OLIVE».

Cette entrée est fermée par un portail en bois plein à deux vantaux, doublée en arrière par une porte-grille également à deux vantaux, à partie basse tôlée, scellée dans les tronçons de murs latéraux du passage.

La porte est encadrée, à l'extérieur, de 4 créneaux de fusillade horizontaux (2 à droite, 2 à gauche) qui flanquent, donc, la façade sud du bâtiment A et le terre-plein d'entrée.

La porte franchie, on pénètre dans l'avancée: la route fait un angle droit à droite autour d'un élément de chemise en quart-de-rond crénelé doublant le pignon ouest du bâtiment A, et on se trouve en face de la seconde entrée, percée dans l'escarpe de gorge. Cette seconde entrée est une simple baie surmontée d'un arc segmentaire, sans aucune décoration.

On note dans l'élément de chemise évoqué ci-dessus, deux poternes à piéton fermées d'un vantail métallique, à cadre en fer carré doublé d'une tôle percée de deux créneaux et munie de deux verrous. Ces poternes permettent d'aller directement de l'intérieur du fort ou de la caserne A à l'entrée principale du fort sans avoir à ouvrir le second portail.

Bâtiment A

Vue intérieure du fort, prise d'ouest en est. A droite, caserne A. A gauche, masque casematé I.Vue intérieure du fort, prise d'ouest en est. A droite, caserne A. A gauche, masque casematé I. Vaste bâtiment rectangulaire (52,5 x 11 m) implanté au milieu du front de gorge dont il fait saillie, la caserne A a la particularité d'être un bâtiment logement de temps de paix, non à l'épreuve, simplement muni, sur les façades donnant à l'extérieur (pignon est et façade sud) de créneaux de fusillade qui en font une sorte de corps de garde défensif s'apparentant aux blockhaus de montagne des années 1888-1904.

Ses dispositions, les nombreuses facilités qu'il abrite, en font le casernement autonome de temps de paix non seulement du détachement de gardiennage du fort, état-major compris, mais aussi de détachements mobiles rayonnant à l'extérieur pour surveiller la frontière, assurer l'éclairage et la couverture en période de tension etc. Mais, en cas de menace de bombardement, on ne pouvait que l'évacuer pour se replier dans les casemates du masque 1 tout proche, à l'épreuve jusqu'en 1885, et présentant, ensuite, une certaine garantie contre les obus torpilles jusqu'au calibre de 150 mm.

Le bâtiment, à deux niveaux (rez-de-chaussée et un étage) plus citerne en sous-sol partiel, a un plan analogue au plan-type de pavillon d'officiers à la Vauban : au rez-de- chaussée, un vestibule central et un couloir longitudinal médian déterminent 4 « cantons» identiques de chacun 4 pièces non communicantes, affectées (1) au commandant du fort, (2) aux officiers, (3-4) à l'infirmerie, (5-6) à la boulangerie, avec four à pain de 50 rations, (7-8) aux magasins des subsistances, (10-11) au gardien de batterie, (12-13) au logement de 8 sous-officiers, (14-15) aux vivres, (16) au corps de garde, (17) à la cuisine. On retrouve le même cloisonnement au premier étage mais simplifié le couloir central est remplacé par un alignement de passages ménagés dans les piédroits et faisant communiquer les 8 chambrées totalisant 132 places couchées et la pièce 9, affectée au télégraphe.

L'accès au premier étage se fait par un perron extérieur à deux volées d'escalier droites à montées convergentes accolées à la façade nord.

Les locaux sont desservis par des conduits de cheminées regroupés dans des refends transversaux, à raison d'un refend sur deux, et émergeant en toiture par quatre souches rectangulaires transversales.

Les locaux prennent jour, dans la façade nord - vers l'intérieur du fort - chacun par deux fenêtres jumelées à 1ioteau en arc segmentaire.

Côté sud - vers l'extérieur du fort - chaque local comporte, à chaque niveau, un créneau à fusil horizontal encadré de deux créneaux verticaux, type archère (sauf les locaux 16 et 27, où la répartition est inversée). Le local 16 (rez-de-chaussée) possède en plus un créneau de pied, pour le flanquement de l'avancée, les pièces 8 et 10 de grandes fenêtres fermées de volets b1iodés à deux vantaux en tôle rivetée, avec fentes de visée.

En pignon, on trouve, à l'est, deux étages de cinq créneaux horizontaux surmontés d'un troisième étage de deux créneaux, servis depuis les combles. Même disposition à l'ouest, sauf qu'au rez-de-chaussée, les pièces 16 et 17 comportent une porte et une fenêtre donnant dans la cour fermée par la chemise.

Murs en pierre de taille en appareil polygonal sur soubassement taluté. Plancher du premier étage sur poutres en fers à I. Toiture en bâtière à forte pente. Couverture en tôle ondulée galvanisée.

Sous le vestibule central (pièce 9), en sous-sol, citerne de 79 m3.

État général : assez bon. Gros œuvre d'excellente qualité, second œuvre (en particulier les menuiseries) détérioré surtout par vandalisme. Deux brèches en toiture.

Bâtiment I (« masque I »)

Masque casematé I. Casemate 7, petit four à pain et vestiges d'un fourneau de cuisine.Masque casematé I. Casemate 7, petit four à pain et vestiges d'un fourneau de cuisine. Caserne casematée de siège à un seul niveau, type 1874, implantée à l'intérieur du fort parallèlement à la façade nord du bâtiment A, dont elle n'est séparée que par une cour étroite, et dont elle assure le défilement, par rapport aux directions dangereuses du nord.

Le bâtiment est constitué de 9 casemates en maçonnerie accolées, voûtées en berceau segmentaire surmonté d'un matelas de terre. Les murs latéraux et le mur de fond sont terrassés, avec interposition d'une galerie-enveloppe, la façade sud étant seule dégagée.

Un couloir transversal débouchant dans la cour centrale du fort sépare les casemates en deux groupes d'inégale longueur: à l'ouest, 5 casemates de 9 m (1 à 5), à l'est, 4 casemates de 12 m (6 à 9). Pour rester parallèle au front de gorge, la façade du bâtiment accuse une brisure d'alignement convexe entre les casemates 6 et 7 : cette disposition a conduit à sur épaissir le piédroit correspondant en forme de trapèze allongé : le projeteur en a profité pour y loger l'un des deux fours à pain de la boulangerie de siège (casemate 7), le massif du second étant pris sur l'emprise de la casemate elle-même.

Sous une partie des locaux ouest se trouve, en sous-sol, une citerne enterrée à trois compartiments et filtres totalisant 350 m3.

Façade en moellons appareillés polygonaux ajourée, par casemate, d'une porte encadrée de deux fenêtres, à linteaux en arc segmentaire. Longueur de façade: 74 m.

Magasin caverne M

Conséquence directe de la crise dite de l'obus torpille, cet organe a été creusé après 1890 sous le massif rocheux portant le cavalier supérieur, pour doter le fort d'un magasin central à l'épreuve des nouveaux projectiles (il semble qu'antérieurement, gargousses et projectiles étaient répartis dans les différents abris des positions de batterie).

Deux tranchées à parois maçonnées, creusées dans la contrepente sud-ouest, desservent deux galeries d'accès parallèles en plein-cintre, distantes de 12,50 m d'axe en axe, débouchant dans une grande galerie transversale de 33 m de long qui dessert trois locaux sous roc: 1) au nord-ouest, un local, divisé par un refend longitudinal en (1) magasin aux projectiles et (2) magasin aux gargousses 2) au centre, un atelier de chargement 3) à l'extrémité sud-est, une chambre à poudre (5) précédée de son vestibule règlementaire (4).

Dans la paroi est de la transversale on trouve également deux placards servant au stockage des fusées détonateurs.

Positions de combat et abris B. C, D, N, N', O, P

L'emprise intérieure de l'ouvrage est occupée aux deux-tiers nord-est par le massif rocheux sommital du Rocher de l'Olive, aménagé en cavalier d'artillerie, et dominant d'une quinzaine de mètres la cour centrale qui occupe la partie ouest du fort.

Une rampe d'accès sud-nord partant du pied de la contrepente ouest du cavalier, près de l'abri B, en face du débouché de la galerie médiane du masque I, passe devant la façade de l'abri D, donne accès à deux groupes de deux positions de pièces disposées en L renversé, avec une branche orientée face au nord (cols des Thures et de l’Échelle), l'autre face à l'est-nord-est (vallée des Acles). Ces deux groupes de positions sont protégés latéralement par des traverses, dont deux sont creuses et munies de passages couverts avec, en annexe, de petits abris à munitions voûtés en maçonnerie répertoriés O et P. Le pied du talus extérieur de ces batteries borde le chemin de ronde des fronts nord et est de l'enceinte.

Par ailleurs, le cavalier se prolonge à l'ouest, et en contrebas, par une batterie rectiligne paradossée et orientée face au nord-nord-est. Cette batterie est protégée, à gauche, par une traverse creuse couvrant un passage couvert avec, de part et d'autre, deux abris à munitions N et N'. Derrière le parados, à l'extrémité est de la batterie, se trouve l'abri C.

Comme autres éléments constitutifs de l'ouvrage on citera :

- le baraquement en maçonnerie H; T, K implanté à côté de l'entrée sud du magasin caverne (remise, écurie et dépôt de combustible) bâtiment de temps de paix à toiture à un seul versant aujourd'hui disparue

- le bâtiment E (recette supérieure du téléphérique de Plampinet) encastré dans l'escarpe du front nord-est.

Casemates de 75

Casemate de 75, embrasure extérieure.Casemate de 75, embrasure extérieure. Premier stade, exécuté aux moindres frais, de 1929 à 1933, d'un projet plus ambitieux de modernisation du fort, cette extension consiste en un tronçon de galerie sous roc, prolongeant à gauche la transversale du magasin à poudre caverne avec sortie latérale dans le fond de l'ancien abri à munitions C, et aboutissant à deux casemates à canon creusées dans la falaise nord du rocher.

Ces casemates, axées l'une sur le col des Thures (gauche), l'autre sur le col de l’Échelle (droite) sont identiques et constituées de simples alvéoles rectangulaires à parois revêtues de maçonnerie grossière, surmontées d'une voûte surbaissée en béton doublée, à l'origine, de tôle parapluie. A l'avant, le mur de masque, en béton, est percé de l'embrasure rectangulaire entourée, à l'intérieur, d'un cadre en fers U maintenant un volet obturateur coulissant à deux vantaux, portant la découpe du tube et du frein de tir de la pièce : ce volet, en tôle assez mince et tout au plus à l'épreuve des balles et des éclats légers, constitue une protection contre les pénétrations et les intempéries, mais certainement pas le cuirassement, indispensable à l'époque considérée, d'une casemate frontale fichant dans des directions dangereuses.

Le sol des casemates, surélevé à l'avant, est revêtu d'une chape de béton imitant un dallage en pierres de taille. Il comporte, à l'avant, une circulaire en fer cornière, avec, au centre, une cheville ouvrière en acier et, à l'arrière, une cavité renforcée d'un segment de cornière métallique est destinée à recevoir la bèche de crosse de l'affût,

Ces dispositions sont destinées à l'appropriation au tir sous casemate du canon de 75 de campagne modèle 1897.

Organes rustiques, donc, assez représentatifs de la «fortification de campagne renforcée» de la période 1930-39 et qu'on pourra rapprocher des organes similaires creusés sous l'ouvrage de la Turra (au-dessus du col du Mont Cenis).

A titre de comparaison avec un organe similaire, mais réalisé en fortification permanente, on pourra se reporter aux dispositions des casemates cuirassées d'action frontale des ouvrages du Sapey (Modane), FIant et Rimplas (secteur fortifié des Alpes-Maritimes).

Baraque et mur défensif du Pas du Berger

Baraque du Pas du Berger. Façade nord-est du poste et vue extérieure du mur défensif.Baraque du Pas du Berger. Façade nord-est du poste et vue extérieure du mur défensif.En contrebas du rebord rocheux du promontoire portant le fort, on trouve, au nord-est, un étroit replat bordant lui-même un escarpement rocheux, et offrant à des détachements à pied montant de la Clarée, la possibilité de contourner et de surprendre le fort en échappant complètement aux vues des défenseurs. Ce cheminement a été barré par un mur défensif d'environ 75 m de développement construit selon la ligne de plus grande pente en baïonnette entre les deux ressauts rocheux encadrant le replat. Une poterne en plein-cintre permet le passage du sentier à travers le retranchement.

Le mur lui-même est construit en gros moellons appareillés, proche de l'appareil cyclopéen. L'ensemble est surveillé par un poste défensif dit baraque du Pas du Berger, petit bâtiment rectangulaire de 12 x 5 m implanté obliquement sur le mur défensif Compte tenu de la pente sur laquelle est assis l'édifice, l'étage supérieur de plain-pied au nord-ouest avec le terrain, surmonte, au sud-est, un étage inférieur voûté en plein-cintre et utilisé comme magasin et citerne de 6 m3.

L'étage supérieur est constitué par une grande chambre pour 12 hommes. La façade sud-ouest est percée d'une porte centrale encadrée, de chaque côté, de deux fenêtres oblongues. La façade nord-est (façade extérieure, flanquant obliquement le retranchement) ainsi que le pignon sud-est, sont percés de créneaux de fusillade du type archère (6 en façade, 3 en pignon). Le bâtiment, construit en moellons appareillés bien jointoyés, est couvert d'une toiture en bâtière dont la couverture est réduite, actuellement, au voligeage.

L'ensemble est desservi par un tronçon de route militaire s'embranchant sur la route du fort, près de la baraque du Sapey.

Baraque du Sapey

(construction entre 1882 et 1900)

Baraque du Sapey, vue d'ensemble prise de la route stratégique. Au fond, le sommet du Guiou.Baraque du Sapey, vue d'ensemble prise de la route stratégique. Au fond, le sommet du Guiou. Petit bâtiment rectangulaire de 18, 5 x 7, 5 m à simple rez-de-chaussée, situé à650 m au sud-est du fort, au bord de la route stratégique (fig. 40). Il s'agit, à l'origine, d'un bâtiment de service du temps de paix (répertorié au petit atlas de 1900 comme magasin du génie et écurie pour 5 chevaux) divisé par un refend longitudinal et des cloisons en 8 pièces, plus une écurie en pignon sud-est. L'ensemble, en maçonnerie de moellons, couvert d'une toiture en bâtière, est en mauvais état (nombreuses fissures dans les murs). Il a servi d'abri, dans les années 50, à un berger. Devant la façade sud, traces d'un jardin entouré d'un fossé. Sur les murs intérieurs, nombreux graffiti.

Batterie du Sapey

(construction entre 1882 et 1900)

Groupe de deux positions terrassées à air libre pour deux pièces chacune, séparées par une traverse pare-éclat en terre, implanté à 100 m en contrebas de la route stratégique, au bout d'un tronçon d'antenne routière, à 1200 m au sud du fort.

Cette batterie, orientée à l'est-nord-est, avait pour mission de prendre d'enfilade la vallée des Acles. Un petit abri à munitions voûté, en maçonnerie, situé un peu en retrait sur une dérivation du chemin d'accès, sert de magasin de batterie.

L'ensemble, situé dans une prairie parsemée de quelques arbres est en très bon état et constitue, en particulier du fait des vues sur les vallées des Acles et de la Clarée, un site particulièrement pittoresque.

En 1874, le Comité de Défense décide d'implanter un ouvrage sur le versant nord du rocher de l'Olive. Sous le nom de fort de l'Olive, l'ouvrage est construit de 1881 à 1883. A l'époque de la crise de l'obus-torpille, il est doté d'un magasin à poudre caverne. A l'extérieur sont construits la batterie du Sapey et un poste de télégraphie optique. En 1929, la Commission de Défense des Frontières préconise le réemploi du fort organisé comme une avancée. Des travaux se poursuivent jusqu'en 1934, date à laquelle on achève deux casemates à canons, le reste des projets n'ayant pas été réalisé. L'ouvrage est abandonné après la campagne de 1940.

  • Période(s)
    • Principale : 4e quart 19e siècle
    • Principale : 2e quart 20e siècle

L'ouvrage est entouré d'une escarpe en maçonnerie dont le plan dessine un quadrillatère allongé irrégulier. La porte d'entrée, formée d'une baie en plein-cintre, se trouve à l'est. La caserne est un bâtiment rectangulaire à deux niveaux avec une citerne en sous-sol. Elle est couverte d'un toit en bâtière en tôles ondulées galvanisées. Les murs sont construits en pierres de taille. Une autre caserne est constituée de neuf casemates en maçonnerie voûtées en berceau segmentaire surmontées d'un matelas de terre. Par un système de galeries voutées en plein-cintre, on accède à trois locaux sous roc servant de magasin. L'intérieur du fort est également occupé par des positions et des abris. Deux casemates à canons creusées dans la falaise nord du rocher sont constituées d'alvéoles rectangulaires surmontées d'une voûte surbaissée en béton. Au lieu-dit le Pas du Berger, situé en contrebas du fort, se trouvent un mur défensif en gros moellons et un petit bâtiment en moellons avec toit en bâtière. Au lieu-dit le Sapey se trouvent un bâtiment en rez-de-chaussée avec maçonnerie de moellons et toit en bâtière et une batterie.

  • Murs
    • pierre moellon
    • pierre pierre de taille
  • Toits
    tôle ondulée, terre en couverture
  • Plans
    système bastionné
  • Étages
    1 étage carré, sous-sol, en rez-de-chaussée
  • Couvrements
    • voûte en berceau segmentaire
    • voûte en berceau plein-cintre, en béton armé
    • roche en couvrement
  • Couvertures
    • toit en bâtière
  • Statut de la propriété
    propriété publique

Documents figurés

  • Plan terrier du fort de l'Olive et dépendances. / Dessin, 1893. Service historique de la Défense, Vincennes : Fonds du Génie, atlas des bâtiments militaires, feuille 7.

  • Fort de l'Olive. Plan terrier. / Dessin, 1895. Service historique de la Défense, Vincennes : Fonds du Génie, atlas des bâtiments militaires, feuille 15.

  • Fort de l'Olive. Plan d'ensemble. / Dessin, 1894 révisé 1896. Service historique de la Défense, Vincennes : Petit atlas des bâtiments militaires, feuille 50.

  • Fort de l'Olive [plans de la caserne A, des citernes et du masque casematé]. / Dessin, 1896. Service historique de la Défense, Vincennes : Grand atlas, T 336, feuille 51.

  • Fort de l'Olive. Magasin à poudre, abris. / Dessin, 1898, révisé 1900. Service historique de la Défense, Vincennes : Petit atlas des bâtiments militaires, feuille 51 bis.

  • Fort de l'Olive. Abris aux munitions n, n', o et p. / Dessin, 1902. Service historique de la Défense, Vincennes : Grand atlas, T 336, feuille 62.

  • Baraque de la recette inférieure du câble de Plampinet au fort de l'Olive. / Dessin, 1907. Service historique de la Défense, Vincennes : Grand atlas, T 336, feuille 62.

  • Fort de l'Olive [plan masse]. / Dessin, sd [19e siècle]. Service historique de la Défense, Vincennes : Grand atlas, T 336, feuille 51.

Date d'enquête 1986 ; Date(s) de rédaction 1996
(c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général
Truttmann Philippe
Truttmann Philippe

Lieutenant-colonel du génie, docteur en histoire. Chargé de cours à l'École supérieure du génie de Versailles, Yvelines.

Expert en architecture militaire auprès de l'Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France. Réalise de 1986 à 1996 l’étude de l’architecture militaire (16e-20e siècles) de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur : départements des Hautes-Alpes, des Alpes-de-Haute-Provence, partie des Alpes-Maritimes, ensemble des îles d’Hyères dans le Var.

Principales publications : La Muraille de France ou la ligne Maginot (1988)

Les derniers châteaux-forts, les prolongements de la fortification médiévale en France, 1634-1914 (1993)

La barrière de fer, l'architecture des forts du général Séré de Rivières, 1872-1914 (2000)

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