Historique
Ouvrage CORF du type "Abri pour réserves locales" complétant la partie rive gauche du barrage de Larche, avec capacité d'une section de F.V., plus le détachement permanent de service de l'Abri. Dans le programme d'emploi des crédits alloués à la frontière du sud-est (crédits de 204 millions du 14 janvier 1930 portés à 362 millions par intervention du Maréchal Pétain) l'ouvrage est classé en 3e catégorie, c'est-à-dire réalisable par main-d'oeuvre militaire si celle-ci est accordée. Une somme de 200.000 F est réservée à cet effet pour l' "Abri de l'ancien camp de Roche la Croix" et l'Abri de la Duyère qui, lui, ne sera pas réalisé (note n° 45/FA du 31 janvier 1931). Ce point réglé, les travaux de percement commencent à la belle saison et sont considérés comme achevés en 1932. L'ouvrage est ensuite achevé selon les dispositions du projet n°177/S du 26 février 1932 établi par la Direction du Génie de Briançon.
La dépense totale, estimée le 29 octobre 1936 à 190.200 F (note n° 584/S de la chefferie de Gap) est passée, le 1.4.1938 à 528.400 F, dont 48.500 restant à régler. Compte tenu de l'éloignement de la zone des combats et aussi de sa nature même, l'abri ne joua aucun rôle dans les combats de 1940.
Classé en première série des places de guerre par décret du 29.1.1959 seulement, il sera déclassé quelques années plus tard, remis aux services fiscaux et vendu à un particulier.
Description
Situation
A une altitude de 1892 m, l'abri est situé à proximité immédiate de la Recette supérieure du téléphérique de l'ouvrage de Roche la Croix, à 700 m à l'ouest de l'ouvrage lui-même, et dans la contrepente ouest, très escarpée, d'un mouvement de terrain qui en assure le défilement complet aux vues et aux coups de la crête frontière et de la région de Larche. Bien desservi par la proximité de la route stratégique de Roche la Croix et par la voie ferrée de 0, 60 reliant le téléphérique à l'ouvrage.
L'origine du nom "Ancien Camp" du lieu-dit, replat dans la forêt de la Silve, certainement lié à l'histoire militaire des campagnes s'étant déroulées en Ubaye entre 1692 et 1800, n'a pu être élucidée de façon précise.
Composition
Ouvrage souterrain, traité en abri caverne sous roc. Entrées orientées au nord-nord-est.
En partant d'une plateforme étroite ménagée à flanc de montagne, deux galeries parallèles, distantes de 25 m, s'enfoncent dans le terrain, desservant, latéralement, les alvéoles des locaux de service, et aboutissent, au bout de 20 m, aux deux extrémités de la galerie principale, parallèle au plan de façade (25 m de long x 2, 50 m de large) constituant le casernement.
Tous les locaux sont de plain-pied avec les entrées.
Les galeries, revêtues, sont voûtées en plein-cintre. Les locaux annexes abritent les magasins, un central téléphonique, un poste de secours, un poste de commandement, la cuisine à charbon 50 rationnaires, les réservoirs d'eau, la ventilation et la centrale électrique (2 groupes électrogènes SMIM monocylindres) dont les gaz s'échappent à l'extérieur par un puits de 7, 50 m dont la tête est protégée par un massif de béton armé dit "bloc cheminée" (disposition courante dans la fortification des Alpes). Les entrées, sans fossé diamant, caponnière ni cloche de guetteur sont constituées, en façade, par un simple mur en béton armé de 2 m d'épaisseur, percé de la baie d'entrée fermée par une porte blindée étanche.
Aucune chicane sur le parcours. La défense rapprochée est limitée au créneau de FM ménagé dans le vantail de la porte blindée de chaque entrée. L'absence de cuirassements, le faible volume de béton mis en oeuvre, l'emploi de la main-d'œuvre militaire expliquent la différence de prix avec, par exemple, l'abri de Saint-Ours, de même capacité (190.200 F contre 2.185.100 F selon l'état 1936). Couverture verticale : environ 10 m de roc naturel.
Il n'y a aucun commentaire à faire sur cet ouvrage simple, bien construit et en bon état apparent dont on notera l'implantation très discrète le rendant très difficile à localiser.
Lieutenant-colonel du génie, docteur en histoire. Chargé de cours à l'École supérieure du génie de Versailles, Yvelines.
Expert en architecture militaire auprès de l'Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France. Réalise de 1986 à 1996 l’étude de l’architecture militaire (16e-20e siècles) de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur : départements des Hautes-Alpes, des Alpes-de-Haute-Provence, partie des Alpes-Maritimes, ensemble des îles d’Hyères dans le Var.
Principales publications : La Muraille de France ou la ligne Maginot (1988)
Les derniers châteaux-forts, les prolongements de la fortification médiévale en France, 1634-1914 (1993)
La barrière de fer, l'architecture des forts du général Séré de Rivières, 1872-1914 (2000)