HISTORIQUE
Une tenace tradition littéraire attribue au Dauphin André la création, en 1202, de l'hospice du Lautaret 1. Mais André Allix 2 a montré qu'il s'agissait d'une confusion avec l'un des deux hospices de la vallée de la Guisane. La mention d'une "maison du col du Lautaret" n'apparaît dans les textes qu'en 1454 3. A cette date seul existait l'hospice de la Madeleine, au pied du versant briançonnais du col. Ni l'hôpital de La Grave, ni l'hospice de Loche n'avaient encore été créés.
Une visite pastorale de 1455 4 nous donne une description de cette "maison nouvellement construite à la limite du diocèse", et dont la fondation est confiée à un laïc du Villar d'Arène. Elle ressemble plus à un refuge qu'à un hospice et sert davantage aux bergers estivants qu'aux voyageurs et pèlerins. La maison est vaste, mais mal meublée : il ne s'y trouve que deux lits. L'évêque prend des dispositions pour accroître la prospérité de l'établissement, y attirer les voyageurs par des concessions d'indulgences, et y faire construire une chapelle attenante.
Malgré de perpétuelles difficultés, l'hospice se maintient et existera comme tel jusqu'à la fin du XVIIIe siècle.
L'hospice était tenu par un gardien dont le rôle était de procurer aux voyageurs en détresse un abri et de la nourriture, en cas de tourmente de sonner la cloche qui devait les guider vers l'hospice, et d'entretenir les longues perches plantées de part et d'autre du chemin et qui, dépassant la neige, indiquaient le tracé de la route par tous les temps 5.
Les comptes-rendus des visites pastorales nous laissent penser que l'hospice était souvent en mauvais état et que les réparations n'étaient pas toujours effectuées 6. Celle-ci, rédigée en 1672 par un envoyé de Mgr le Camus 7, nous en donne une description assez précise.
"Cet hôpital est entretenu par la communauté du Villar qui donne deux quintaux de pain au concierge... Le concierge a encore trente et six journaux de prés qui appartiennent audit hôpital. Il en paye la taille et fournit tous les ans vingt quintaux de feure ou cluy pour entretenir la couverture dudit hôpital. le concierge loge toute sorte de monde, tant les pauvres que les riches, il loge ceux qui ont de quoi en payant, et aux pauvres il donne du pain et du fromage et du vin. Il y aune grande écurie et une seule chambre où il y a cinq lits, trois desquels servent pour les passagers et les deux autres pour eux. La communauté ne fournit pour tout meuble que trois mesures d'étain, savoir une pinte, une chopine et un demi-setier, et trois couvertures de lit. Le concierge est obligé de faire porter les passants qui se trouvent malades dans leur hôpital, ceux qui viennent du côté de La Grave les faire porter à l'hôpital de la Madeleine du diocèse d'Embrun, ceux qui viennent du côté de la Madeleine, de les faire porter à La Grave".
En 1755 les courriers qui vont de Briançon à Bourg-d'Oisans deux fois par semaine font étape à "la maison du Lautaret" 8.
A la Révolution l'hospice est attribué au bureau de bienfaisance de Villar-d'Arène 9. Au début du XIXe siècle l'ancien refuge du Lautaret existe toujours mais est devenu une auberge.
De nombreux dessins et gravures nous donnent une idée de l'aspect du refuge au XIXe siècle. Depuis la description de 1672, l'hospice s'est agrandi d'une pièce. Le logement de l'hospitalier est au XIXe siècle distinct de la chambre réservée aux voyageurs. Un plan non daté, que les Archives départementales des Hautes-Alpes attribuent au XVIIIe siècle, nous donne une idée de la structure et de la distribution du bâtiment. L'écurie et le logement du gardien sont voûtés d'arêtes mais la chambre des voyageurs et la laiterie sont plafonnées.
Dans la première moitié du XIXe siècle, l'hospice ne comporte pas d'étage. Le toit d'ardoise est surmonté d'un clocher-mur qui contenait la cloche qui guidait les voyageurs dans la tempête. La porte d'entrée est protégée par un porche, identique à ceux des maisons du Villar.
A cette époque de nombreux voyageurs comme Honoré Paillas 10 ont insisté pour que l'hospice du Lautaret soit entretenu et conserve sa fonction. Sous le Second Empire l'hospice est surélevé d'un étage. Mais il reste trop petit pour faire face au trafic induit par la construction de la route nationale 91. C'est le refuge Napoléon construit en 1856 qui prend le relais de l'hospice du Lautaret. Au début du XXe siècle le refuge Napoléon sera lui-même concurrencé par les hôtels de tourisme.
L'actuel café de la Ferme est l'ancien hospice du Lautaret. Il appartient toujours à la commune du Villar-d'Arène qui le donne en gérance à des particuliers.
DESCRIPTION
Situation
Sur le col. La façade est au sud. La construction était jusqu'en 1850 complètement isolée. Elle est aujourd'hui entourée par le refuge Napoléon, des hôtels de tourisme et les bâtiments du jardin alpin.
Matériaux
Murs : moellons de pierre enduits à la chaux.
Voûtes : blocage.
Structure
Le rez-de-chaussée est entièrement voûté d'arêtes à l'exception de la pièce ouest qui est plafonnée.
Élévations
Le porche en demi hors-œuvre a disparu depuis 1877 au moins. Toutes les baies ont été transformées récemment.
Couverture
Le toit à deux longs pans est couvert de fibro-ciment.
Photographe au service régional de l'Inventaire de Provence-Alpes-Côte d'Azur de 1970 à 2006.