• enquête thématique régionale, architecture militaire de Provence-Alpes-Côte d'Azur
poudrière de Milhaud
Œuvre étudiée
Copyright
  • (c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Var
  • Commune Toulon
  • Lieu-dit Milhaud
  • Dénominations
    poudrière
  • Appellations
    de Milhaud
  • Dossier dont ce dossier est partie constituante

Historique, topographie et typologie générale

Du temps de la marine à voiles, l’artillerie et les munitions revêtent une importance plus considérable dans les ports militaires que dans les places de guerre. En effet, les vaisseaux embarquent alors de façon constante jusqu’à 80 et 110 canons pour les plus fortes unités. Le soutien logistique d’une force navale de cinquante vaisseaux (format fixé par Colbert pour le projet d’agrandissement de l’arsenal dans les années 1670) implique donc la possibilité de disposer de plus de 4000 canons et des munitions en conséquence. L’inventaire du magasin général de l’arsenal de Toulon pour 17001 indique que le port compte alors 34 vaisseaux et frégates et que 2231 canons sont pris en compte. La quantité de poudre détenue dans le port est, en conséquence, de 726 645 milliers.

Avant l’agrandissement de l’arsenal selon les plans de Vauban, la conservation des poudres se fait dans des conditions de proximité de la ville et du port qui préoccupent les autorités locales.

Dans son projet d’arsenal de mai 16812, Vauban prévoit d’implanter un magasin à poudre et deux magasins aux artifices dans le bastion occidental de la nouvelle darse, à proximité immédiate du port et des vaisseaux, implantation de nature à faciliter le service, mais présentant de graves inconvénients en cas d’attaque ou d’explosion accidentelle. Cette disposition est abandonnée dans la variante du projet datée de mai 1682, qui exclut le magasin à poudre de l’emprise de l’arsenal et de la ville.

En novembre 1684, l’intendant de Vauvré demande à l’ingénieur général des fortifications Antoine Niquet d’établir le devis de plusieurs magasins à poudres extra-muros à l’usage du nouvel arsenal dont la construction commence 3. Le premier magasin à construire est implanté sur le site de La Goubran (aujourd’hui Lagoubran), qui forme une presqu’île en abord du canal du Las détourné par Vauban. Le terrain, estimé par un ensemble d’experts dont l’ingénieur de la marine François Gombert, est acheté en 1686 4. Le magasin à poudre est construit par l’entrepreneur Boyer, titulaire de la plupart des travaux de bâtiment du nouvel arsenal. Sa situation isolée, loin de l’arsenal, nécessite certains équipements, particuliers, comme un mur d’enceinte défensif à guérites d’angle et un logement de gardien et corps de garde à proximité immédiate, doté d’une petite chapelle.

L’emplacement d’un second magasin, sur l’île de Milhaud, à quelques centaines de mètres à l’est de la Goubran, donc un peu moins éloigné du port, est arrêtée au printemps 1692 par Vauvré 5. Le terrain, non vierge mais occupé (maison ?), est un îlot détaché de la côte par une étroite passe, dominé à peu de distance au nord par une butte dite de Milhaud, elle-même commandée par la hauteur de Malbousquet. Il appartient à un sieur de Lueil, bourgeois de Toulon, exproprié en juin 1692, moyennant un dédommagement de 3600 livres augmenté d’intérêts de retard, en décembre 1696, l’administration de la marine ayant tardé à s’acquitter de ce dû. Les travaux de construction du magasin sont alors achevés depuis plus d’un an ; attribués à l’entrepreneur César Aguillon par marché du 3 juin 1692 6, ils sont en pleine activité jusque septembre 1693 7, et soldés en mai 1695, pour un montant cumulé de 21608 livres 8.

Un canal est dragué le long de l’île Milhaud par le sieur Daniel, de La Seyne, entre février 1693 et mai 1694. Plus de 27000 m3 de vase sont extraits par des machines à cuillers 9. Un quai de déchargement est construit à proximité du magasin, pour faciliter les mouvements de poudres entre le magasin et les vaisseaux. Confiés à Gaspard Chaussegros par marché du 4 décembre 1696, les travaux sont terminés avant octobre 1697. Ils reviennent à un total de 732 livres et 21 sols 10. Un mur de clôture est édifié au titre du même marché pour isoler le magasin des particuliers possédant des terrains à proximité.

Les cartes des abords de Toulon montrent que l’île est séparée de la côte au nord-ouest par une zone bien délimitée de basses terres inondées, qui, au milieu du XVIIIe siècle, est devenue émergente, avec mares d’eau marine progressivement asséchées, transformant l’île en presqu’île.

Le magasin, de grand axe sud-ouest / nord-est, y apparaît entouré d’une enceinte rapprochée rectangulaire, non défensive (à la différence de celle du magasin de Lagoubran), elle-même incluse dans une aire close de même plan, plus vaste, avec une cour au sud-est, ce grand côté du périmètre clos, face à la mer, étant augmenté d’une petite excroissance également vers le nord-est, et adossé de deux petits bâtiments (corps de garde ? magasin annexe ?)

La capacité du magasin est donnée pour 400 milliers de poudre dans un rapport de 1747 11 rédigé par Milet de Monville, directeur des fortifications. Mur pignon sud-ouest et mur gouttereau sud-est, avec travée surépaissie logeant la cage d'escalier.Mur pignon sud-ouest et mur gouttereau sud-est, avec travée surépaissie logeant la cage d'escalier.

La construction de la grande extension ouest de l’enceinte du corps de place de Toulon, en 1860-1868, allant jusqu’au fort Malbousquet, et enserrant une aire aux deux tiers à l’usage de la Marine (darse Missiessy), place le magasin à poudres de Mihaud à proximité immédiate de l’angle sud-ouest de cette enceinte, au débouché de la « porte de Lagoubran », à la fois routière et ferroviaire. La presqu’île de Milhaud a considérablement changé d’aspect, fortement agrandie au sud-ouest par gain sur la mer, elle est détachée de la côte à l’est par un chenal, et bordée à l’ouest par un canal de livraison à l’usage de deux vastes bassins dits fosses à bois, clos de digues, aménagés de 1851 à 1857 entre les deux presqu’îles de Milhaud et Lagoubran pour l’immersion des bois d’oeuvre de chêne, et accompagnées de hangars.

Le magasin conserve sa fonction, et il est intégré fonctionnellement dans le parc de la pyrotechnie (qui comporte l’école centrale de pyrotechnie, le commandement et divers bâtiments) aménagé par la marine en 1865-1870 principalement dans une aire littorale extra-muros autour du magasin de Lagoubran, à l’ouest des fosses à bois, et sur une large digue alors créée en avancée dans la mer . Ce parc est équipé de nombreux hangars ou magasins à munitions et à explosifs, certains d’entre eux étant implantés dans la presqu’île de Milhaud et répartis dans un périmètre clos, et formant un ensemble immobilier alors dénommé « Poudrière Milhaud ».

A l’époque de la première guerre mondiale, la vocation pyrotechnique du site est maintenue, et les fosses à bois transformées en darses de la pyrotechnie. Du côté est de la presqu’île de Milhaud sont aménagés en 1916 les appontements Milhaud, pour les navires de guerre.

Le magasin à poudres est épargné par les destructions de guerre dues aux frappes aériennes des alliés en 1943 et 1944, mais ses abords sont touchés. Après la seconde guerre mondiale, la limite orientale de la pyrotechnie s’établit au canal de Milhaud, qui la sépare de l’ancienne « poudrière de Milhaud », désaffectée, dont l’enceinte ancienne, avec ses bâtiments annexes, a disparu. L’étendue de la presqu’île s’est encore augmentée en gagnant sur la mer au sud et au sud-est, aux dépens du chenal est, comblé.

Dans les années 1980 la gestion du bâtiment relève de la Direction des Constructions et Armes Navales (DCAN). Dans les années 1990 l’ancien magasin à poudre est utilisé comme dépôt d’archives de la DCAN.

Vers 1995 le bâtiment est menacé de destruction. La zone environnante est affectée aux mouvements de transit interarmées dont la base navale de Toulon est le siège. La création d’une zone affectée au stationnement sécurisé du futur porte-avions nucléaire Charles-de-Gaulle est avancée comme un motif supplémentaire en vue de sa démolition. L’opposition conjointe de la Préfecture maritime et de la Direction des travaux maritimes permet d’empêcher ce projet.

Libéré au début des années 2000, le bâtiment est remis à la Marine nationale qui ne lui trouve pas d’affectation, du fait de ses contraintes géométriques et en raison de sa présence au sein d’une « zone de danger pyrotechnique » 12.

Au début des années 2000 l’emprise du bâtiment est incluse dans une des ZPPAUP qui sont créées dans la base navale. L’officialisation de la valeur patrimoniale du bâtiment est ainsi reconnue.

En 2013 le bâtiment est affecté au stockage de matériels des bâtiments de surface de la Force d’action navale.

Analyse architecturale

Le magasin à poudres est aujourd’hui assez bien conservé, mais les mutations radicales subies par le paysage environnant depuis le XVIIIe siècle rendent insoupçonnable sa position insulaire initiale ; ces changements, joints à la disparition de son mur d’enceinte rapprochée, des témoins des deux états successifs de l’enclos extérieur et des bâtiments annexes antérieurs à la génération des hangars de la pyrotechnie, en font un témoin patrimonial anachronique dans son environnement actuel.

Le bâtiment voûté à l’épreuve des bombes se conforme dans ses grandes lignes aux dispositions constructives classiques des magasins à poudre dits « à la Vauban », rappelées par Bélidor dans son traité "La science des ingénieurs" 13. Il se distingue toutefois des magasins ordinaires des places de guerre par ses plus amples dimensions en plan, et par le fait qu’il comporte deux niveaux voûtés superposés, augmentant d’autant sa capacité, et non une seule salle voûtée en berceau. Vue générale  mur gouttereau nord-ouest et mur-pignon sud-ouest.Vue générale mur gouttereau nord-ouest et mur-pignon sud-ouest.

Dans œuvre, l’édifice est de long de 35,90 m, large de 9,50 m, ses murs gouttereaux épais (9 à 10 pieds selon le modèle type de Vauban) étant renforcés par huit contreforts (le modèle type du magasin à la Vauban a une salle de 20 m sur 8,12 m et quatre contreforts, ou cinq dans la variante Bélidor).

L’élévation interne comporte une salle de rez-de-chaussée voûtées d’arêtes, soit couverte d’un berceau longitudinal légèrement surbaissé, partant du sol, recoupé de quartiers latéraux très étroits (proportionnellement du vaisseau principal), définissant sept travées avec retombées concentrant les poussées au droit des contreforts. Au-dessus de cette voûte, une salle haute logée sous les deux versants du toit est voûtée, non pas en berceau plein-cintre (contrairement à ce qui apparaît sur un relevé en coupe de 1760), ni même en berceau tiers-point (profil que Vauban jugeait plus fragile que le plein-cintre) mais en chaînette. Il semble que ce profil est bien d’origine, et non le résultat d’une reconstruction postérieure.

Compte tenu des proportions allongées du magasin, la porte d’entrée n’est pas percée dans un des murs pignons, mais au milieu du mur gouttereau regardant côté terre (nord-ouest), entre le 4eme et le 5eme contrefort. Dans cette quatrième travée de la salle basse, la voûte n’est pas formée de quartiers de même hauteur, mais du berceau principal pénétré par des sortes de lunettes, et, le mur gouttereau regardant la mer est surépaissi d’une maçonnerie reliant la tête des 4e et 5e contreforts. Ce dispositif permet de loger dans la masse murale un volume en renfoncement offrant une cage à l’escalier montant à l’étage. Celui-ci, bâti en charpente de bois, se compose d’une première volée droite perpendiculaire au gouttereau, partant de la salle, exactement dans l’axe de la porte du magasin, et pénétrant dans la voûte par une arcade couverte en plein-cintre ; à la suite, un repos, dans la cage rectangulaire logée dans le mur épaissi de la travée, dessert deux volées latérales symétriques montant en sens opposé de la première volée, directement assises sur les reins de la voûte, jusqu’à l’étage ou elles débouchent sous une arche (masquée par un sas récent). Les volées de l’escalier ont conservé leurs limon, marches et rampes d’appui en bois très simple, avec départ et poteaux de section carrée, sans modénatures.

Au niveau de la salle basse, les murs gouttereaux étaient classiquement percés, dans chaque travée des deux murs gouttereau, d’un évent contournant en chicane un dé carré au milieu de l’épaisseur murale, mais ces évents sont actuellement bouchés et masqués par l’enduit. Les baies qui donnent jour aux salles, dans les murs-pignon, aujourd’hui très remaniées (toutes converties au XXe s, en portes donnant sur des avant-corps d’accès extérieur à l’étage, aujourd’hui détruits), n’étaient nullement normatives. Dans le mur nord-est, leur encadrement sans doute d’origine (en tout cas crédité par les relevés de 1760) demeure lisible : à chacun des deux niveaux, elles formaient une fenêtre géminée avec meneau central non monolithe, appui légèrement saillant, chaque jour étant couvert d’une plate-bande appareillée, et muni classiquement de volets extérieur et intérieur. Aucune menuiserie d’origine n’est conservée, les portes étant garnies de vantaux en fer du XXe siècle.

La mise en œuvre du bâtiment est assez fruste : les murs et les contreforts sont montés en blocage de petits moellons de tout venant, les voûtes en briques, le tout revêtu d’un enduit couvrant, qui forme une plinthe à la base extérieure des murs. La pierre de taille est strictement réservée à l’encadrement des fenêtres des murs pignons (l’encadrement de la porte est dénaturé, et n’en comporte pas) et à la corniche des murs gouttereaux, profilée en cavet surmonté d’un quart de rond. Le talus des contreforts est revêtu de tuiles-canal, comme les versants du toit dont les chevrons portent directement sur le remplissage de maçonnerie des reins de la voûte supérieure. Salle voûtée du rez-de-chaussée. Au fond à droite, l'escalier d'accès à l'étage.Salle voûtée du rez-de-chaussée. Au fond à droite, l'escalier d'accès à l'étage.

Le plancher des deux salles superposées est revêtu d’un parquet en bois relativement récent, mais représentatif des états anciens.

Certains plans d’archives (1760, 1883), indiquent une rangée de douze poteaux en bois dans l’axe de la salle basse, partant du plancher et s’engageant en formant des jambes de force, non directement dans la voûte, mais dans une série longitudinale de poutres ou sablières calées sous cette voûte. Ce dispositif, dont l’utilité est mal défini, a disparu sans laisser de traces. Une coupe de 1883 laisse penser qu’à cette époque, les voûtes des deux niveaux étaient revêtues d’une sorte de lambrissage, masquant les quartiers latéraux de la voûte du rez-de-chaussée. Une telle disposition se trouve conservée dans quelques magasins à poudre de la fin du XIXe siècle à la pyrotechnie saint Nicolas de Brest.

1Toulon SHD 1L 418. 2Vincennes SHD 1V H 1831 n° 8. 3AN Marine 4SHD Toulon 1L 234 f° 14. 5AN Marine B² 87 f° 330 Lettre du 28 mai 1692. 6SHD Toulon 1L 240 f° 10. 7Etats des paiements, SHD Toulon 1L 240 et 1L 241. 8SHD Toulon 1L 242 f° 8v°. 9SHD Toulon 1L 241 et 1L 242. 10SHD Toulon 1L 244 f° 7 v° et 1L 245 f° 6. 11Description de la coste de Provence, depuis l’embouchure du Rhosne jusques au golfe de Frejus, SHD Génie Art 4 Section 2 § 6 Carton 1 n° 37 (ancienne cote). B3 46 f° 260 Lettre du 16 novembre 1684. 12Polygone d’isolement réglementaire des établissements pyrotechniques. 13Bernard Forest de Bélidor, La science des ingénieurs dans la conduite des travaux de fortification, Livre IV, Chapitre neuvième Des magasins à poudre & arsenaux pour les munitions de guerre et Planche 27.

Dans son projet d’arsenal de mai 1681, Vauban prévoit d’implanter un magasin à poudre à l'usage des vaisseaux de guerre dans le bastion occidental de la nouvelle darse, à proximité immédiate du port, implantation de nature à faciliter le service, mais présentant de graves inconvénients en cas d’attaque ou d’explosion. La variante du projet, datée de mai 1682, exclut le magasin à poudre de l’emprise de l’arsenal et de la ville. En novembre 1684, l’intendant de Vauvré demande à l’ingénieur général des fortifications Antoine Niquet d’établir le devis de plusieurs magasins à poudres extra-muros à l’usage du nouvel arsenal dont la construction commence. Le premier magasin à construire occupe la presqu’île de Lagoubran (acquise en 1686), à une assez grande distance à l'ouest de l'enceinte de la nouvelle darse, le second étant sur l’île de Milhaud (acquise en 1692), à quelques centaines de mètres à l’est de Lagoubran, donc un peu moins éloigné du port. Le terrain est un îlot détaché de la côte par une étroite passe, dominé à peu de distance au nord par une butte dite de Milhaud, elle-même commandée par la hauteur de Malbousquet. Les travaux de construction du magasin confiés à l’entrepreneur César Aguillon, sont conduits de juin 1692 à mai 1695. Un quai de déchargement est construit en 1696 à proximité du magasin, pour faciliter les mouvements de poudres entre le magasin et les vaisseaux, ainsi qu'un mur d'enceinte, non défensif (à la différence de celui de Lagoubran).

Au milieu du XVIIIe siècle, la zone de basses terres émergées séparant l'île de la côte est devenue émergente, transformant l’île en presqu’île.

La capacité du magasin est donnée pour 400 milliers de poudre dans un rapport de 1747 rédigé par Milet de Monville, directeur des fortifications. La construction de la grande extension ouest de l’enceinte du corps de place de Toulon, en 1860-1868, allant jusqu’au fort Malbousquet, et enserrant une aire aux deux tiers à l’usage de la Marine (darse Missiessy), place le magasin à poudres de Mihaud à proximité immédiate de l’angle sud-ouest de cette enceinte, au débouché de la « porte de Lagoubran », à la fois routière et ferroviaire. La presqu’île de Milhaud a changé d’aspect, fortement agrandie au sud-ouest par gain sur la mer, elle est détachée de la côte à l’est par un chenal, et bordée à l’ouest par un canal de livraison à l’usage de deux vastes bassins dits fosses à bois, clos de digues, aménagés de 1851 à 1857 entre les deux presqu’îles de Milhaud et Lagoubran. Le magasin conserve sa fonction, et il est intégré fonctionnellement dans le parc de la pyrotechnie aménagé par la marine en 1865-1870 principalement dans une aire littorale extra muros autour du magasin de Lagoubran, à l’ouest des fosses à bois, et sur une large digue alors créée en avancée dans la mer. Des hangars à munitions et à explosifs, sont alors implantés dans la presqu’île de Milhaud, répartis dans un périmètre clos, et formant un ensemble alors dénommé« Poudrière Milhaud ».

Le magasin à poudres est épargné par les destructions de guerre dues aux frappes aériennes des alliés en 1943 et 1944 (à la différence de Lagoubran), mais ses abords sont touchés. Après la guerre, la « poudrière de Milhaud », désaffectée, a perdu son enceinte ancienne et ses bâtiments annexes, tandis que la surface de la presqu’île s’est encore augmentée en gagnant sur la mer au sud et au sud-est, aux dépens du chenal est, comblé.

Dans les années 1990, l’ancien magasin à poudre, utilisé provisoirement comme dépôt d’archives, est menacé de destruction ; ce risque est cependant écarté, malgré la difficulté de lui trouver une affectation pérenne, et l' intérêt patrimonial de l'édifice, remis à la Marine nationale au début des années 2000, est reconnu.

  • Période(s)
    • Principale : 4e quart 17e siècle
    • Secondaire : 3e quart 19e siècle
  • Auteur(s)
    • Auteur :
      Niquet Antoine
      Niquet Antoine

      Ingénieur général des fortifications de Provence, de Dauphiné, de Languedoc en 1680. En 1700, il est à Toulon où il travaille avec Vauban sur un nouveau projet d'aménagement du site : retranchement de la ville, aménagement du port et de la darse, défense de la ville avec des forts et des tours. Auteur des projets de fortification de la place de Seyne (Alpes-de-Haute-Provence) en 1690.

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      ingénieur militaire attribution par source
    • Personnalité :
      Girardin de Vauvré Jean-Louis
      Girardin de Vauvré Jean-Louis

      Intendant de la Marine à Toulon à partir de 1680. Il assure la défense de la ville de Toulon lors du siège de la ville par les troupes du prince Eugène et du duc de Savoie, au cours de la guerre de Succession d'Espagne, en 1707.

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      commanditaire attribution par source
    • Auteur :
      Aguillon César
      Aguillon César

      Entrepreneur de maçonnerie à Toulon fin 17e, début du 18e siècle. Construit plusieurs batteries sur la rade de Toulon en 1695, ainsi que la poudrière de Milhaud entre 1692 et 1695. Réalise des travaux à la tour Balaguier en 1702.

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      entrepreneur de maçonnerie attribution par source

Les mutations radicales subies par le paysage environnant depuis le XVIIIe siècle rendent aujourd'hui insoupçonnable la position insulaire initiale du magasin. Voûté à l’épreuve des bombes, l'édifice répond dans ses grandes lignes aux normes architecturales classiques des magasins à poudre dits « à la Vauban », rappelées par Bélidor dans son traité La science des ingénieurs. Il se distingue toutefois par ses amples dimensions en plan (35,90 m X de 9,50 m dans oeuvre, 7 travées définies par 8 contreforts, le modèle type du magasin à la Vauban a une salle de 20 m sur 8,12 m et cinq contreforts), et par le fait qu’il comporte deux niveaux voûtés superposés, augmentant d’autant sa capacité, et non une salle unique voûtée en berceau.

La salle de rez-de-chaussée est voûtées d’arêtes, autrement dit couverte d’un berceau longitudinal légèrement surbaissé, partant du sol, recoupé de quartiers latéraux très étroits (proportionnellement du vaisseau principal), avec retombées concentrant les poussées au droit des contreforts. Au-dessus de cette voûte, une salle haute logée sous les deux versants du toit est voûtée, non pas en berceau plein-cintre (contrairement à ce qui apparaît sur un relevé en coupe de 1760), ni même en berceau tiers-point (profil que Vauban jugeait plus fragile que le plein-cintre) mais en chaînette. Il semble que ce profil est bien d’origine.

Autre exception, la porte d’entrée n’est pas percée dans un des murs pignons, mais au milieu du mur gouttereau regardant côté terre (nord-ouest). Dans cette quatrième travée de la salle basse, le mur gouttereau regardant la mer est surépaissi d’une maçonnerie reliant la tête des 4e et 5e contreforts, dispositif permettant de loger dans la masse murale la cage de l’escalier en bois montant à l’étage. Celui-ci, apparemment d'origine, se compose d’une première volée droite perpendiculaire au gouttereau, dans l’axe de la porte du magasin, et pénétrant dans la voûte par une arcade couverte en plein-cintre ; à la suite, un repos, renfoncé dans le mur épaissi, dessert deux volées latérales symétriques montant sur les reins de la voûte en sens opposé de la première volée, et débouchant sous une arche.

Les évents des murs gouttereaux de la salle basse sont actuellement bouchés et masqués par l’enduit. Les baies qui donnent jour aux salles, dans les murs-pignon, aujourd’hui très remaniées, n’étaient nullement normatives : elles formaient une fenêtre géminée avec meneau central non monolithe, munie classiquement de volets extérieur et intérieur.

Les murs et les contreforts sont montés en blocage de petits moellons de tout venant, les voûtes en briques, le tout revêtu d’un enduit couvrant, qui forme une plinthe à la base extérieure des murs. La pierre de taille est strictement réservée à l’encadrement des fenêtres des murs pignons et à la corniche des murs gouttereaux. Le talus des contreforts est revêtu de tuiles-canal, comme les versants du toit dont les chevrons portent directement sur le remplissage de maçonnerie des reins de la voûte supérieure.

  • Murs
    • calcaire moellon enduit
    • calcaire pierre de taille
    • brique enduit
  • Toits
    tuile creuse
  • Plans
    plan rectangulaire régulier
  • Étages
    rez-de-chaussée, étage de comble
  • Couvrements
    • voûte d'arêtes
    • voûte en berceau
  • Élévations extérieures
    élévation à travées
  • Couvertures
    • toit à longs pans pignon couvert
  • Escaliers
    • escalier intérieur : escalier tournant à retours en charpente
  • Statut de la propriété
    propriété de l'Etat
  • Intérêt de l'œuvre
    à signaler

Par son bon état de conservation, le magasin de Milhaud offre un exemple remarquable de magasin à poudres du type préconisé par Vauban, un peu surdimensionné pour son adaptation aux besoins de la flotte d'un port de guerre. Il est en outre l'unique témoin de sa catégorie depuis la disparition du magasin de Lagoubran.

Documents d'archives

  • Lettre de l'intendant de la marine Vauvré, 28 mai 1692. Archives nationales, Paris : Fonds de la Marine B² 87 f° 330.

  • Marché de construction du magasin à poudre de Milhaud, 3 juin 1692. Service Historique de la Défense, Toulon : 1L 240 f° 10.

Documents figurés

  • Plan, profil et élévation du magasin à poudre de Milhaud... / Dessin à l'encre, 1760. Service Historique de la Défense, Vincennes : Marine DD2 696 (82).

  • Poudrière Milhaud. [Plan masse] / Dessin à l'encre, 1883. Service Historique de la Défense, Toulon : 2 K 2 158.

  • [Magasin à poudre de Milhaud] Coupe longitudinale AB. / Dessin à l'encre en couleur, 1883. Service Historique de la Défense, Toulon : 2 K 2 158.

Date d'enquête 2014 ; Date(s) de rédaction 2015
Articulation des dossiers
Dossier d’ensemble