Le palais de Carnolès s'inscrit dans l'histoire de la villégiature. Il a été conçu pour cet usage et il le restera jusqu'au milieu du 20e siècle. Honoré II, dans la première moitié du 17e siècle, fait aménager en jardin des terres plantées d'arbres sur lesquelles il fait construire un petit casin, un petit pied à terre de deux pièces. Mais c'est Antoine Ier à partir de 1701 qui donnera à Carnolès son plein développement en tant que demeure de villégiature de campagne. Antoine Ier commence par faire redessiner le jardin par Jacques V Gabriel à qui il demande ensuite, en 1718, des plans pour un "établissement champêtre [qu'il] destine à l'agrément des [ses] vieux jours."
Cette commande s'inscrit dans une lignée versaillaise. Antoine Grimaldi a séjourné à Versailles jusqu'à son accession au trône en 1703. Le Grand Trianon vient d'y être construit (1687) par Jules Hardouin-Mansart. C'est à Jacques V Gabriel, élève de Mansart que Antoine Ier commande sa résidence de campagne quelques années plus tard. Gabriel envoie les plans d'une petite villa de plaisir, inspirée par l'Italie revisitée par Versailles. Comme au Trianon, toute proportions gardées, où une grande colonnade relie deux pavillons, on a ici deux petits pavillons de part et d'autre d'un espace central constitué d'un portique sur la façade antérieure poursuivi par une grande pièce à l'italienne ouvrant sur le jardin. La villa, sur deux niveaux, se développe en largeur avec un module de 3 sur 1 pour les façades principales. Le toit terrasse est masqué par une balustrade de couronnement agrémentée de sculptures. Mais ce qui est le plus notable et donne à ce projet l'allure d'une "folie", c'est le traitement des façades. Voulant peut-être là aussi s'inscrire dans une référence au Grand Trianon, au marbre rose et au porphyre de ses élévations, Gabriel propose pour Carnolès des façades peintes en trompe-l’œil, imitant le marbre coloré et la statuaire.
Le projet ne conviendra pas parfaitement à Antoine Ier qui souhaite un véritable palais d'été à la campagne pouvant accueillir une suite et une garnison nombreuses pendant de longs séjours. Il souhaite aussi que l'ensemble soit un véritable domaine agricole avec vergers, jardins potagers, étables, poulailler etc... Les plans de la villa sont redessinés par un architecte monégasque, Jean Antoine Latour qui modifie les proportions et reprend les distributions en privilégiant la capacité d'accueil par rapport aux espaces d'apparat.
Le palais de Carnolès s'inscrit dans une certaine lignée. Comme la villa romaine, c'est à la fois une demeure aristocratique et une exploitation agricole dont les produits sont commercialisés, citrons, foin, légumes, produits de la basse-cour. Comme les châteaux royaux du Val de Loire, c'est un lieu où la cour se déplace avec "armes et bagages" pour des séjours plus ou moins longs. Les activités, connues par l'inventaire de 1731, sont la promenade dans les jardins, la chasse au Cap Martin, les jeux d'intérieur, la musique, le théâtre.
Après une désaffection d'environ 90 ans après la mort d'Antoine Ier, le palais retrouve sa fonction de lieu de plaisance princier en 1820. De 1863 à 1947, sa fonction s'adapta à la villégiature du moment : villa à la location, casino, villa particulière appartenant à un touriste américain.
Architecte du patrimoine. Prestataire extérieur pour l'opération de repérage du patrimoine de la villégiature de Menton en 2013-2014, de Beausoleil (06) et de Roquebrune-Cap Martin (06) en 2016 et 2017, de Nice en 2017.