Mission

S'opposer aux pénétrations venant des cols frontière et du sud par le couloir de la Tinée (qui formait frontière jusqu'en 1947 dans la région d'Isola).

Bien que couvert par les feux d'artillerie de Restefond (et encore très imparfaitement, le bloc 5 n'étant pas construit) l'ouvrage était placé en enfant perdu dans une situation très difficile, dépourvu de toute communication défilée avec l'arrière, ni de cheminement de repli, en raison de sa situation. De plus, en juin 1940, l'enneigement encore très abondant a empêché le déploiement de l'artillerie de position ; mais il gêne aussi beaucoup les italiens et les opérations, de ce fait, seront peu actives, dans cette portion du sous-secteur de Jausiers.

- Garnison : détachement du 73° BAF.

Analyse architecturale

Situation

Vue générale. Au premier plan , le bloc 1. A gauche, le bloc 5 (observatoire). A l'arrière-plan, la vallée de la Tinée.

Au pied de la pente sud-est du Mont des Fourches, à 250 m de l'ouest du hameau du Pra, le long de la route D64 Nice-Barcelonnette (la route n'existait pas à l'époque, alors un simple chemin allant du Pra à Bouzieyao) dominant le confluent du torrent du Salso Moreno (descendant du col de Pourriac) et de la Haute-Tinée (descendant de Restefond), et à 1710 m d'altitude.

L'ouvrage est construit au bas d'une pente, dans un terrain constitué d'alluvions et d'éboulis, donc instable, voire inconsistant. Son infrastructure souterraine, réduite au minimum, s'inscrit dans un rectangle de 46 x 19 m. A faible profondeur, elle a été vraisemblablement exécutée à fouille ouverte.

Composition d'ensemble

Plan pratiquement symétrique au centré, deux éléments d'abris en tôle cintrée forte de 10 m de long (l. 2,90 m) placés en alignement droit, abritent, au sud-ouest, 16 couchettes pour la troupe et au nord-est, le logement du commandant d'ouvrage et 4 couchettes pour les sous-officiers, le poste de secours, le magasin aux vivres et 3 magasins à munitions isolés par des cloisons. Ces deux abris sont reliés par un passage où s'ouvre la niche des latrines et où s'embranche un court tronçon de galerie perpendiculaire menant au puits (H. 3, 50 m) du bloc 5, observatoire en béton (murs de 1 m, dalle de 0, 50 m) à 4 créneaux (dont 3 fentes de visées et un créneau FM incliné battant vers le haut la pente du mont des Fourches derrière l'ouvrage. Ce bloc, au centre de l'ouvrage, en domine la superstructure.

Dessus et bloc.Emplacement de mortiers.Abri et cloche observatoire.Galerie du casernement.

A l'extrémité des abris, deux autres tronçons très courts de galeries perpendiculaires mènent respectivement de plain-pied :

- au bloc 2, à 2 créneaux de mitrailleuse sous trémie cuirassée "XIV° RM", l'un prenant d'enfilade, en action frontale, la Tinée en aval, l'autre tirant à revers sur la Tinée en amont et les pentes du bois Bandi (champs de tir : 60°)

-au bloc 3, également à deux créneaux de mitrailleuses, l'un enfilant la Tinée en aval (conjointement avec son homologue du bloc 2) l'autre tirant, à gauche, sur le débouché du Salso Moreno et le pont de la route de Vens.

Ces deux blocs ont les murs crénelés épais d'1, 50 m, ceux non exposés d'1 m et une dalle d'1 m.

En 1940, les montages d'armes, carters lourds et volets d'embrasure des trémies de mitrailleuse n'étaient pas livrés (livraison prévue à partir de mai ...). Les créneaux n'étaient donc pas étanches, et les armes disposées sur des montages de fortune.

Enfin, à chaque extrémité des abris souterrains, et défendus intérieurement par une chicane en maçonnerie avec créneau à fusil de défense intérieure, s'embranchent deux tronçons courbes de galerie menant, en pente douce :

- au sud-ouest, à une émergence crénelée en béton constituant le bloc 1, entrée normale de l'ouvrage (0, 80 x 1, 80) avec porte blindée (3 créneaux à fusil et 2 créneaux FM dans les parois, plus les créneaux de la porte elle-même). Au départ, niche 13 abritant le central téléphonique.

- au nord-est, au puits (h. 2, 20 m) du bloc 4 constituant l'issue de secours, avec portillon blindé et 4 créneaux sous béton.

Au passage, un tronçon de galerie mène au captage de la source alimentant l'ouvrage.

Prix de revient : 385.500 F (1935). Selon un état du 26 avril 1938 de la chefferie de Gap, chargée de la surveillance technique et de la gestion des travaux, il restait, sur le total ci-dessus, à liquider une somme de 74.000 F correspondant au bornage des zones de servitude, à quelques fournitures de mobilier, au fourneau de cuisine et aux appareils d'éclairage au propagaz et à la ventilation.

Etat général : médiocre. L'ouvrage est en partie envahi par les coulées de pierres descendant du Mont des Fourches qui ont comblé des boyaux et renversé des soutènements. On note, en plus, un affouillement des blocs. Mobilier, équipements et cloisons ont en grande partie disparu.

Conclusion

Les possibilités de remploi étant très limitées, mais l'entretien étant d'un coût négligeable, cet ouvrage pourrait être conservé comme vestige de guerre et élément touristique du patrimoine communal, au profit du hameau : sa situation le long d'un itinéraire très fréquenté l'été constitue un facteur très favorable.