Données historiques
Le bâtiment conserve quelques éléments qui pourraient indiquer une construction de la fin du 17e siècle ou du tout début du 18e siècle, notamment l'encadrement de porte en arc plein-cintre surmonté d'un jour de tympan et peut-être sa menuiserie, mais aussi quelques encadrements de fenêtres à arrêtes vives. On remarque que les chaînes d'angles sont en pierre de taille sur les deux premiers niveaux, alors qu'elles sont en moellons sur les deux niveaux supérieurs. Ceci témoigne d'une surélévation, possiblement effectuée au 18e siècle. Au dernier niveau du pignon sud, une baie remploie des jambages en doucine du 16e siècle.
Elévation est, premier niveau. Porte en plein-cintre.Pignon sud, quatrième niveau. Petite fenêtre avec remploi d'encadrement à doucine.
17e et 18e siècles
Dans le livre terrier de 1655 (AD05 1 E 6138, mentionné par D. Faure-Vincent, 2014), les biens seigneuriaux appartiennent à « Monseigneur le Marquis de Bressieux compte de Ribiers ». Dans le cadastre de 1737 (AD05 1 E 6139, mentionné par D. Faure-Vincent, 2014) ils appartiennent à Dame Thérèse Félix Créquy et ce bâtiment est indiqué comme « greniers à bled » et « vollalier ». Dans le terrier de 1755 (AD05 F 2214), l'édifice est désigné comme des « greniers » (parcelle 1225) appartenant « au Seigneur Marquis du Muy Comte de Ribiers », auxquels une « lapinière » est accolée au sud (parcelle 1224).
Plans visuels de la terre et seigneurie du Bourg de Ribiers, 1755. Détail du plan 7 : le château.
1793 : lotissement et vente des biens seigneuriaux
Le 19 octobre 1793, lors de la « division des biens provenant de l’émigrée Marie Thérèse Felix femme Créqui (…) cy devant comtesse dudit lieu » (AD05 1 Q 253), le bâtiment est séparé en deux lots.
Le premier lot (n° 54) concerne l' « ancienne lapignière et volatier » pour un prix estimé à 67 livres. Cette construction – aujourd'hui disparue – faisait environ 4 m de haut (« deux toises au dessus de la terre ») pour une surface totale d'environ 100 m² (27 « toises quarrées »). L'édifice est manifestement abandonné puisque « les murs [sont] en moyen etat sans etre couverts ».
Le second lot (n° 55) comprend le « batiment appellé le batiment neuf ou grenier », d'une surface totale d'environ 130 m² (35 toises carrées) et dont le prix est estimé à 1 300 livres. La description de la construction correspond à l'organisation générale du bâtiment actuel. L'état des maçonnerie est correct, puisque les « maîtres murs se trouvent en bon état, les angles desquels sont en pierre taillée » mais la couverture a « besoin d’urgentes reparations » et les aménagements intérieurs sont « en très mauvais état ».
L'étage de soubassement est manifestement uniquement accessible depuis le rez-de-chaussée par un escalier intérieur. Il est occupé par « une cave vouté contenant deux cuves en pierre chaup et sable en bon état » – ces cuves étant très probablement des cuves vinaires. Dans ce cellier, 9 tonneaux sont stockés qui forment un lot à part (n° 63), estimé valoir 144 livres. Parmi ces tonneaux, trois « sont hors d’usage par leur vetusté » et « les six autres étant garnis la chacun de quatre cercles en fer contenant environ sept charges vin le chacun en bon état actuellement remplis de vin ».
L'accès au rez-de-chaussée se fait par une porte ouverte côté est, munie d'une menuiserie en noyer, qui ouvre sur un « coridor ». Ce vestibule distribue la porte « de la cave en bois noyer fermant à clef en bon état » et accueille « l’escalier qui conduit dans le haut dudit batiment, prenant sa direction du levant au couchant ». C'est aussi là que s'ouvre « la porte d’entrée dudit grenier (...) fermant a clef en bon état », grande pièce qui occupe la quasi intégralité du rez-de-chaussée, hormis le « coridor ». Ce grenier « se trouve divisé en différentes portions pour contenir les diférantes especes de grains qu’on veut y mettre » et il est éclairé « par une fenetre ou pierre taillée garnie [de] quatre barraux fer assez fort de la hauteur de trois pieds six pouces sur deux pieds de large » (soit environ 1 m de haut par 0,7 m de large).
Le premier étage est occupé par une vaste « chambre » – « de la meme grandeur que les greniers » – « fermant a clef par une porte bois blanc en mediocre état ». Elle est éclairée par « une fenetre du coté du levant à l’instard de celle des greniers sauf qu’elle n’est point garnie en fer » et son couvrement ou « plancher superieur » a « besoin de beaucoup de reparations ».
Au second étage, sont installées 6 « petites chambres ou jacobines [chambres mansardées] divisées par un coridor tirant du midy au septentrion ». Ce couloir orienté nord-sud distribue donc 3 chambres à l'est et 3 autres à l'ouest, vraisemblablement éclairées par les actuelles baies visibles au troisième niveau des façades est et ouest.
Ces deux bâtiments sont bordés à l'est par la « terrasse du cy devant château complantée de muriers sur lequel emplacement l’eau qui arrose le jardin traverse, de même que le chemin pour aller auxdits jardins ». Côté nord, le bâtiment principal est séparé de la grande dépendance agricole par « un hangard ».
1823 : cadastre de Ribiers
Dans le cadastre de 1823, ce bâtiment est désigné comme une maison (E2 408, 125 m²) partagée entre trois propriétaires : VIGUIER Louis, IMBERT Jean et MAZAN Antoine. Ceux-ci possèdent également la « lapinière » de 1755, désormais cadastrée comme « mazure » (1823 E2 408bis, 52 m²). Aujourd'hui, cette dernière a disparu, remplacée par une petite cour qui se développe au pied du pignon sud.
parcelle (section E2) | lieu-dit | nature | superficie (m²) | propriétaire |
408 | le Château | maison | 125 | VIGUIER Louis, dit Chatillon ; IMBERT Jean ; MAZAN Antoine |
408bis | le Château | maison | 52 | VIGUIER Louis, dit Chatillon ; IMBERT Jean ; MAZAN Antoine |
Description architecturale
Située à l'extrémité sud-est du bourg de Ribiers, entre la rue du Barri et le passage du Vieux Ribiers, cette maison comporte un étage de soubassement, un rez-de-chaussée surélevé et deux étages. La partie sud de l'étage de soubassement, anciennement occupée par une étable, dispose d'une mangeoire installée sur une banquette maçonnée. La partie nord est un cellier servant également de cuvage, où est conservée une grande cuve vinaire maçonnée d'environ 4,5 m3 (h = 200 cm, diam. = 170 cm). Son parement intérieur est en carreaux de terre cuite glaçurés. Il est possible que cette cuve vinaire corresponde à l'une des deux « cuves en pierre chaup et sable » mentionnée en 1793.
Etage de soubassement, étable. Mangeoire sur banquette maçonnée.Etage de soubassement, cellier. Cuve vinaire, vue de volume.
Le rez-de-chaussée et le premier étage, réservés au logis, conservent quelques menuiseries de portes et de placards en noyer, à panneaux moulurés. Ces étages communiquent par un escalier à retour dont les marches sont en carreaux de terre cuite avec nez en bois, et la main courante en maçonnerie et bois. Les pièces sont couvertes par des planchers sur solives – certaines portant une marque frappée consistant en un M surmonté d'une croix latine. Si ces poutres marquées datent probablement de la construction du bâtiment seigneurial, l'escalier semble plus récent.
Le dernier étage accueillait, outre le séchoir, un pigeonnier dont subsiste la baie d'envol ouverte dans le pignon sud, équipée d'une grille façonnée au mortier de gypse
Premier étage, cage d'escalier.Premier étage, cuisine. Mur ouest, placard mural.Deuxième étage, chambre. Poutre portant une marque : M surmonté d'une croix latine.
Le bâtiment est construit en maçonnerie de moellons calcaires et galets, avec des chaînes d'angles en pierre de taille – cette mise en œuvre étant similaire à celle décrite en 1793. L'élévation ouest conserve un enduit à pierres vues.
Au premier niveau de la façade orientale, l'encadrement de la porte du logis en pierre de taille calcaire avec couvrement en arc plein-cintre est surmonté d'un jour de tympan également en pierre de taille. La menuiserie conservée, avec ses renforts saillants verticaux moulurés, pourrait être celle qui est déjà décrite en 1793, à savoir « une porte en noyer, doublée de même avec ses pannes gonds et serrure parroissant assez solide ».
Sur les élévations est et ouest, quelques fenêtres possèdent également des encadrements en pierre de taille calcaire, avec linteau droit monolithe. Les encadrements des autres ouvertures sont façonnés au mortier de gypse avec un linteau droit en bois.
Le toit à longs pans est couvert en tuile plate mécanique ou en plaques ondulées de fibro-ciment. L'avant-toit est constitué de trois rangs de génoise.
Elévation est.Elévation ouest, fenêtres.Pignon sud, baie du pigeonnier avec lauze d'envol en schiste.