Dossier d’œuvre architecture IA06000019 | Réalisé par
Truttmann Philippe
Truttmann Philippe

Lieutenant-colonel du génie, docteur en histoire. Chargé de cours à l'École supérieure du génie de Versailles, Yvelines.

Expert en architecture militaire auprès de l'Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France. Réalise de 1986 à 1996 l’étude de l’architecture militaire (16e-20e siècles) de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur : départements des Hautes-Alpes, des Alpes-de-Haute-Provence, partie des Alpes-Maritimes, ensemble des îles d’Hyères dans le Var.

Principales publications : La Muraille de France ou la ligne Maginot (1988)

Les derniers châteaux-forts, les prolongements de la fortification médiévale en France, 1634-1914 (1993)

La barrière de fer, l'architecture des forts du général Séré de Rivières, 1872-1914 (2000)

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  • inventaire topographique
  • enquête thématique régionale, architecture militaire de Provence-Alpes-Côte d'Azur
citadelle de Villefranche, dite citadelle Saint-Elme, de la place forte de Nice
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Alpes-Maritimes - Villefranche-sur-Mer
  • Commune Villefranche-sur-Mer
  • Adresse La Citadelle
  • Dénominations
    citadelle
  • Appellations
    citadelle de Villefranche, citadelle Saint-Elme, de la place de Nice
  • Dossier dont ce dossier est partie constituante
  • Parties constituantes non étudiées
    enceinte, pont, pont, ouvrage d'entrée, édifice logistique, citerne, poudrière, casemate

La question des sources

L'ouvrage n'ayant été définitivement rattaché à la France qu'en 1860, il n'existe que peu de documents dans les archives du service historique de l'Armée de terre, à Vincennes, et essentiellement, dans le fonds du Génie (ex-dépôt des fortifications) pour ce qui touche aux différents sièges de la Place, et aux quelques périodes d'occupation provisoire (1692-1697 et 1792-1814) antérieures au rattachement. Lors de la remise à l'autorité française, les Piémontais ont emmené plans et documents. (Le nouveau grand atlas est daté de 1869).

Lors de la consultation des documents et atlas français des XVIIe et XVIIIe siècles, des confusions sont possibles avec Villefranche (de Conflent), également place de guerre, mais située en Roussillon.

Édifice antérieur : pas de traces significatives, mais un doute peut subsister pour l'actuel bâtiment de la Mairie (ex-bâtiment b du petit atlas des bâtiments militaires), doté d'un portail défensif, et dont des documents anciens - s'ils existent - permettraient peut-être de déterminer s'il a été construit en même temps que l'enceinte, ou s'il est préexistant.

Le terme « citadelle », impropre actuellement pour un ouvrage isolé, se justifie cependant par le fait que l'ouvrage, à sa création, est venu s'accoler à l'enceinte médiévale du bourg de Villefranche, enceinte qui a aujourd'hui entièrement disparu.

Rappel historique1

Construction à partir de 1550 par l'ingénieur milanais Gian Maria Olgiati, pour les ducs de Savoie Charles II, puis Emmanuel-Philibert en même temps que la nouvelle enceinte du château de Nice et les forts du mont Alban et de Saint Hospice.

A l'évidence, le rôle en était la protection et la maîtrise du port de Villefranche - une des « fenêtres» maritimes du duché de Savoie (l'essentiel de la côte appartenant, à l'époque, à la République de Gênes) - au fond d'une rade bien protégée, dont l'importance en tant que mouillage des escadres de guerre ira croissante, et durera jusque dans les années 1960 : lors des guerres du XVIIIe siècle contre la France, c'est par voie maritime, et spécialement par les escadres anglaises, que seront transportés le matériel et les approvisionnements lourds, avec Villefranche comme point de débarquement, d'où la hâte logique des années françaises de s'en emparer dès le début des campagnes.

En fait, en 1691, puis lors des campagnes de la guerre de succession d'Autriche, et celles de la Révolution, la place est attaquée plusieurs fois et prise après une très brève résistance, voire sans résistance du tout.

En 1706, elle est épargnée par l'ordre donné par Louis XIV de raser Montmelian, le château de Nice et Saint-Hospice (un plan des 30 mines à creuser pour faire sauter l'ouvrage avait été établi dès le 22 mai 1692 par Niquet).

La comparaison entre le plan de 1656 et celui de l'atlas des bâtiments militaires, établi entre 1860 et 1870, montre qu'en deux siècles - et peut-être même depuis l'origine, l'ouvrage n'a subi aucune transformation importante.2

Devenu français, l'ouvrage est classé dans le Domaine par décret du 24 septembre 1861 et son front de mer réaménagé comme batterie de côte pour 5 obusiers de 22 cm, 5 canons de 16 cm et 3 mortiers de 32 cm, armée en 1869 de matériels rayés, puis remanié à nouveau en 1873 (D.M. du 24.9.73). Il est ensuite déclassé, mais conservé comme casernement (en 1902, on trouve, en garnison à Villefranche les 24e et 27e bataillons de chasseurs et une batterie du 13e régiment d'artillerie à pied), avec maintien d'une petite batterie de côte de 4 pièces de 47 mm à tir rapide contre les embarcations légères.

Entre les deux guerres mondiales, on construit, dans la cour, un bâtiment à usage de logement pour des sous-officiers mariés (bâtiment m) démoli depuis.

C'est après la seconde guerre mondiale que l'ensemble sera remis aux Domaines et cédé à la commune de Villefranche, qui, avec d'importants travaux d'aménagement et de restauration y installe la mairie, puis en viabilise le fossé, avec parc de stationnement.

Analyse architecturale

( en raison de l'affectation fractionnée des locaux et l'impossibilité de trouver les différents responsables, tous les locaux n'ont pu être visités)

Implantation

Vue générale prise, de l'autre côté de la rade, depuis la pointe du Rubé. Sur la crête, le fort du Mont AlbanVue générale prise, de l'autre côté de la rade, depuis la pointe du Rubé. Sur la crête, le fort du Mont AlbanEn bord de mer, à côté du site originel de l'ancien fort de Villefranche et au pied du versant occidental de la crête nord-sud, qui se détache, au nord, du mont Vinaigrier et faisant saillie sur la mer, sépare la rade de Villefranche de la baie des Anges.

Cette crête, couronnée, au sud, par la batterie de Montboron, porte le fort du mont Alban construit en même temps que la citadelle, comme ouvrage de protection, et assurant la liaison avec le château de Nice aujourd'hui disparu.

Cette implantation à contrepente fait que l'ouvrage est fortement dominée au nord-ouest, du côté du front de tête, et que le projeteur a dû le disposer en gradins, dans le sens nord-ouest-sud-est de façon à ce que les parties exhaussées assurent le défilement de celles, plus basses, par rapport aux hauteurs dominantes. Il en résulte une situation tactique très défavorable qui, si elle était admissible tant que l'artillerie se limitait à des calibres modestes et des affûts primitifs, est rapidement devenue intenable dès le milieu du XVIIe siècle, ce qui pourrait expliquer la faible résistance opposée par l'ouvrage lors des différents sièges.

Composition d'ensemble

Caserne Gaston de Foix. Plan de masse.Caserne Gaston de Foix. Plan de masse. Le plan dessine un trapèze isocèle à peu près régulier, dont la grande base - le front de mer - brisée en dehors, a 185 m entre saillants, et la petite - le front de tête- 160 m, sur 100 m de profondeur entre la courtine nord-ouest et le saillant sud-est.

Construit en fortification bastionnée, ce qui est normal eu égard à la date de construction, l'ouvrage comporte quatre bastions numérotés 1 (au nord), 2 (ouest), 3 (sud), 4 (est) encadrant des courtines assez courtes (de 30 à 45 m). (Cette numérotation a été établie probablement par le Génie français, selon un ordre différent de ce qui se pratiquera après 1870. Elle remplace, probablement, une désignation nominale que l'on pourrait sans doute retrouver sur des plans anciens).

Ces bastions ont les flancs les plus exposés (flanc droit du bastion 2, gauches des bastions 1 et 4) munis d'orillons hémicylindriques relativement peu saillants. Les autres flancs sont droits - donc moins coûteux - et tracés perpendiculairement à la courtine adjacente. Sauf ceux intéressant le front de mer, ces flancs sont casematés et munis de coffres à canons, avec même une poterne en fond de fossé dans les bastions 3 et 4. De la sorte, tous les flancs des fronts terrestres sont dotés, chacun, de deux étages de feux, l'un couvert, l'autre, au-dessus, à ciel ouvert, disposition compensant leur faible saillie (de l'ordre de 15 m) sur la courtine.

Bastion n° 1. Face et flanc gauche vus du fond du fossé. A droite courtine 1-2Bastion n° 1. Face et flanc gauche vus du fond du fossé. A droite courtine 1-2 Bastion n° 2. Face et flanc gauches.Bastion n° 2. Face et flanc gauches. Courtine 2-3 vue de face.Courtine 2-3 vue de face. Face et flanc gauches du bastion 4 vus du pont de l'entrée. A l'arrière-plan, presqu'île du Cap FerratFace et flanc gauches du bastion 4 vus du pont de l'entrée. A l'arrière-plan, presqu'île du Cap Ferrat

On notera que :

- les bastions 3 et 4 sont asymétriques et leurs faces sud-est, qui bordent la mer, nettement plus longues que l'autre. De plus ces bastions ne se flanquent pas réciproquement, mais seulement la moitié adjacente de la courtine 3-4.

Le bastion 4 a son saillant tronqué, situation figurant déjà sur le plan de 1656 et dont on ne sait si elle est d'origine ou si elle correspond à un effondrement ancien.

Il n'existe pas de demi-lunes : on sait que ces ouvrages constituent une composante normale du système bastionné, mais en deuxième urgence, et souvent réalisée après coup (au XVIe et au XVIIe siècle). Or un tel ouvrage aurait été utile sur le front de tête, beaucoup moins sur les deux autres fronts terrestres : la construction de trois demi-lunes figure dans le projet de Niquet du 16 septembre 1691.

L'enceinte est constituée d'une escarpe attachée et revêtue en maçonnerie de moellons assez grossière, entourée d'un fossé très profond - 15 m par endroits - et d'une douzaine de mètres de large, taillé en partie dans le roc, et aménagé récemment en voie de circulation et parc de stationnement. La contrescarpe est également revêtue. L'escarpe est en partie surmontée d'un cordon de magistrale.

Au sud-ouest, la trouée du fossé est barrée, face à la mer, par un batardeau crénelé. Au nord-est il était coupé obliquement, à hauteur de l'épaule gauche du bastion 4, par une double caponnière couverte et crénelée aujourd'hui disparue.

Bastion n° 2. Echauguette du saillant de tête. Vue prise en capitaleBastion n° 2. Echauguette du saillant de tête. Vue prise en capitale Selon l'usage de l'époque, cette enceinte est surveillée par 7 échauguettes dont 3 aux saillants des bastions 1, 2 et 3, une à chaque extrémité de la terrasse intérieure plus une au centre, et une à la brisure de la courtine 3-4. Ces échauguettes sont cylindriques - cas le plus fréquent au XVIe -, couvertes en coupole et reposent sur un cul-de-lampe circulaire, profilé en gradins renversés pleins, à trois ou quatre ressauts. La majorité d'entre elles ont disparu, réduites aux culs-de-lampe, celles actuellement complètes sont vraisemblablement des reconstitutions récentes. Ces guérites, placées de manière à avoir le plus grand secteur d'observation possible, étaient destinées à abriter, hors période de combat, les sentinelles chargées de surveiller l'enceinte et ses abords.

On notera la présence d'une huitième guérite à l'intérieur du bastion 2, sans doute affectée à la garde du magasin à poudre.

Les parapets sont en pierre et d'épaisseur variant suivant les points, et allant de 2 à 4 m. Sur les fronts terrestres, ils sont coupés d'embrasures à canon en général échancrés, à ciel ouvert, parfois couvertes. Elles sont à ébrasement extérieur, et ont peut-être été remaniés à la suite du projet de Niquet se septembre 1691, qui prévoit la réfection des parapets.

Bastion n° 1 . Face gauche. Embrasure à canon du parapetBastion n° 1 . Face gauche. Embrasure à canon du parapetEn 1868, on dénombre 29 embrasures sur les remparts.

Par contre, les parapets du front de mer sont dépourvus d'embrasure, sans doute à la suite de la restructuration de ce front en batterie de côte, avec des pièces tirant uniquement à barbette.

On note la présence de quelques dispositifs de protection contre le tir d'enfilade ou le tir fichant : une traverse pleine, en maçonnerie, coupe la banquette de la face droite du bastion 2. Celle du bastion 1 est exhaussée, tandis que les batteries supérieures des flancs droit du bastion 2 et gauche du bastion 1 sont placées en contrebas du terre-plein du bastion et paradossées (en septembre 1691, Niquet proposait la construction de traverses pare-éclats en coffres de bois remplis de terre).

En niveau, l'espace intérieur se situe sur deux plans :

- Au nord-ouest une aire plane, encagée sur trois côtés par les murs de soutènement intérieurs du rempart des fronts sud-ouest, nord-ouest et nord-est qui la protègent. Desservie de plain pied, au nord-est, par l'entrée principale de l'ouvrage, elle représente à peu près les deux-tiers de l'espace disponible, et est essentiellement occupée par les bâtiments. Cette aire est bordée, au sud-est, par un mur de soutènement, avec parapet crénelé, tombant dans la « zone basse ».

- Au sud-est, une zone basse (un tiers de l'espace) constituant le terre-plein bas du front de mer et limitée au nord-ouest par le mur de soutènement de l'aire centrale supérieure, par rapport duquel elle joue un peu le rôle de fausse braie. Cette zone ne comporte pas de bâtiments et on y parvient par une rampe courbe traversant le terre-plein du bastion 4, à partir du niveau supérieur.

Les bâtiments

Les bâtiments occupent le centre de la cour supérieure, groupés, au centre, en un ensemble dont le plan général dessine un trapèze isocèle s'appuyant, d'un côté, au revers de la courtine 1-2, et de l'autre, au rebord de la terrasse. Cet ensemble de constructions est assez confus, et sans rapport avec la rigoureuse ordonnance de bâtiments spécialisés des citadelles à la Vauban. Ses deux directrices principales sont deux gros murs de refend, baptisés "traverses" sur le grand atlas de 1869, de 2 m d'épaisseur, barrant obliquement l'espace d'emprise et auxquels s'appuient les principaux édifices, eux-mêmes séparés par deux cours.

Le tout est traversé par un axe de circulation principal, à peu près aligné avec la grande porte de la Place, et dont l'entrée nord-est, percée dans le refend, est constituée par une baie rectangulaire à montants en pierre de taille en grand appareil à bossage à chanfrein et plate-bande à claveaux de même, surmontée d'un arc en décharge triangulaire. Les montants en ont été retaillés pour élargir le passage, et on y remarque, de chaque côté, les orifices du logement horizontal d'une poutre de barrage : l'idée de défense est évidente.

Dans les bâtiments (on a utilisé la désignation figurant sur les éditions du petit atlas vers 1941, et qui a dû être établie lors de la prise en charge par le Génie en 1860 ; cette désignation a d'ailleurs varié en fonction des modifications apportées aux bâtiments), on note la présence des éléments suivants :

- bâtiment b, sous la cour : une citerne maçonnée et voûtée d'à peu près 350 m3 de capacité, avec porte de puisage dans la cour

- bâtiment c , deux fours à pain, dont un de 300 rations et un de 170 (un troisième four, plus ancien et sans doute de siège est installé sous le bastion 2, dans le coffre du flanc gauche).

Aucun de ces bâtiments n'est à l'épreuve. Par contre, et en plus des coffres d'escarpe déjà évoqués, on trouve, sous les bastions et dans les remparts, quelques locaux ou groupes de locaux casematés, en particulier :

- sous le bâtiment g : trois longs locaux superposés qui ont dû être utilisés comme prisons, ce qui leur a valu le surnom, de bas en haut, de l'enfer, du purgatoire et du paradis

- sous le bastion 2, le magasin à poudre, remanié en 1869 par construction, à l'intérieur, d'un bâtiment léger servant de chambre à poudre, afin d'améliorer la protection contre l'humidité. A l'époque, ce magasin était essentiellement destiné à la batterie de côte aménagée en 1861 sur le front de mer.

Sous la banquette de la courtine 1-2, le bâtiment i, à deux niveaux de casemates, dont cinq au rez-de-chaussée (hauteur sous clef: 4, 60 m) et trois au premier étage (hauteur sous clef: 3, 05 m).

Il va de soi que la capacité des casemates est très insuffisante pour abriter la garnison en cas de siège, en particulier contre le tir des mortiers.

Entrée de la Place

Front nord-est (4-1), gorge. Vue depuis la contrescarpe du bastion 4. En milieu de courtine, entrée de la place et pont d'accès. A l'arrière-plan, le bastion n° 1Front nord-est (4-1), gorge. Vue depuis la contrescarpe du bastion 4. En milieu de courtine, entrée de la place et pont d'accès. A l'arrière-plan, le bastion n° 1

Ménagée dans la courtine 4-1, et légèrement décalée vers le bastion 1, elle est précédée par un pont donnant à trois arches voûtées en plein-cintre portées par des piles rectangulaires. Ce pont franchit le fossé et comportait, en tête, un premier pont-levis à flèches remplaçant celui qu'on trouve, habituellement, au niveau de la demi-lune, lorsqu'il en existe une : ce premier pont figure encore sur le plan de 1869.

La chaussée est encadrée de deux garde-corps pleins en maçonnerie soulignés, extérieurement, d'une moulure.

Le pont-levis de la porte principale s'abat sur la troisième pile du pont dormant, elle-même attachée à la courtine, sur la moitié de sa hauteur, par un massif de maçonnerie plein, de telle sorte que la travée levante ne démasque qu'une coupure de 4, 5 m environ de profondeur : cette disposition d'ailleurs bien suffisante pour la valeur de l'obstacle, s'explique peut-être par le souci de faciliter la réparation - fréquente - du tablier de la travée levante sans avoir à mettre en place des échafaudages successifs.

Compte tenu du fruit de l'escarpe de la courtine, à laquelle elle se raccorde au niveau de la chaussée, la façade verticale du bâtiment d'entrée est en saillie sur les parements adjacents. Encadré de deux embrasures à canon, son couronnement se raccorde par deux rampants à la plongée du parapet de la courtine.

Courtine 4-1 (gorge). Porte de l'ouvrage prise dans l'axe du pontCourtine 4-1 (gorge). Porte de l'ouvrage prise dans l'axe du pontLa baie, en anse de panier, s'ouvre dans une niche rectangulaire, servant de logement à la travée mobile relevée, et légèrement en retrait d'une façade plane, étroite et haute, surmontée d'une simple corniche portant un fronton triangulaire.

Les montants de la niche se prolongent, au-dessus, et jusqu'à la corniche, des deux fentes des logements des flèches du pont-levis. Entre celles-ci, un tableau très simple porte une plaque de marbre ou pierre blanche où sont gravées des armoiries ; en dessous, et juste au-dessus du linteau de la niche, une plaque de marbre blanc, de même facture que celles apposées en 1887 au-dessus des entrées des forts de Nice, porte, gravée, l'inscription «Ancien Fort St Elme - Caserne Gaston de Foix - 1557 ».

L'ensemble est très simple, et pratiquement dépourvu d'ornementation.

La baie est fermée par un vantail pivotant, fortement clouté contre l'attaque à la hache et muni d'un portillon à personnel. Elle donne accès à un grand vestibule voûté en plein cintre, portant au-dessus une terrasse dallée assurant la continuité de la banquette d'artillerie.

Dans le vestibule, au-dessus de la baie, on remarque l'ensemble reconstruit de la bascule supérieure en bois, dont les flèches font saillie à l'extérieur.

Comme autres points particuliers, on note :

- Au niveau de l'angle d'épaule droit du bastion 2, un pont-aqueduc traverse le fossé.

- Le coffre du flanc gauche du même bastion 2 est muni de deux embrasures à canon à axes convergents dans un orifice extérieur unique.

- A 90 m environ au nord-est du bastion 4, sur un îlot rocheux relié au rivage, on trouvait un petit ouvrage isolé dit « la tourette » ou « la redoute », sorte de tour basse, à plan pentagonal, à quatre embrasures à canon flanquant le rivage et gorge percée de créneaux de mousqueterie. Destiné à prolonger, vers le port, par des feux plus rasants, l'action de la citadelle, cet ouvrage a disparu aujourd'hui.

Conclusion

Bien qu'extrêmement sobre et pratiquement dépourvu de tout élément décoratif, cet ouvrage est très important du point de vue de l'histoire de la fortification, en tant qu'un des rares ouvrages subsistant, en territoire français, de la fortification «paléo bastionnée» à l'italienne dans un état très proche de celui d'origine. A ce titre, il se rattache au château de Guise, à Doullens, Saint-Paul-de-Vence, Navarrenx, le fort Carré d'Antibes et le mont Alban, avec lesquels on pourra se livrer à des études comparatives, étant entendu que le caractère fruste de la construction garantit son caractère fonctionnel, hors de toute recherche d'effet.

Il y a moins à dire des bâtiments intérieurs, assez banals, mais qui, remaniés par la municipalité, ont retrouvé un aspect plaisant et une utilisation fonctionnelle en tant qu'Hôtel de Ville.

1Sur la genèse de l'ouvrage et les travaux du XVIe siècle, se référer à l'article de Mara de Candido Le fort de Saint-Elme et le port de Villefranche, Nice Historique, 1999, n°70.2« Avvertimenti sopra le fortezze di S.R.A. » del capitano Morello (1656) réédité dans le «Fortezze dei Savoia » de Giorgio Beltrutti. Cunéo : l'Arcière, 1980.

La citadelle de Villefranche est reconstruite à partir de 1550 par l'ingénieur milanais Gian Maria Olgiati dans le cadre du programme d'organisation de défense du duché de Savoie. La date de 1557 figure sur la porte d'entrée, mais il s'agit d'une inscription tardive. La clef d'un arc au pied du fossé nord porte la date 1554 qui pourrait correspondre au début des travaux. Le rôle de la citadelle consiste à protéger et à maîtriser le port de Villefranche. Durant les conflits opposant la France à la Savoie, entre le 17e et le 18e siècle, la place est attaquée à plusieurs reprises. En 1706, elle est épargnée de la destruction par un ordre de Louis XIV. Entre la fin du 17e siècle et 1870, l'ouvrage n'a subi aucune transformation importante. La citadelle, devenue française, est classée en 1861. Son front de mer est réaménagé comme batterie de côte. Elle est conservée, par la suite, comme casernement.

  • Période(s)
    • Principale : 2e moitié 16e siècle
  • Dates
    • 1554, porte la date
  • Auteur(s)
    • Auteur :
      Olgiati Gian Maria
      Olgiati Gian Maria

      Ingénieur, architecte de Charles-Quint. Principales réalisations : enceinte espagnole de Mila, enceinte 16e siècle de Gênes, forteresse de Priamar à Savone, château de Montoggio. Premier projet du fort du Mont-Alban à Nice et de la citadelle de Villefranche-sur-Mer.

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      ingénieur attribution par travaux historiques

Le plan de la citadelle dessine un trapèze isocèle. L'enceinte est constituée d'une escarpe attachée et revêtue en maçonnerie de moellons. Elle comporte quatre bastions et est flanquée par sept échauguettes dont il ne reste, pour la majorité, que le cul-de-lampe. La cour supérieure de l'édifice est occupée par des bâtiments : une citerne maçonnée et voûtée, et un bâtiment renfermant deux fours à pains. Les bastions contiennent des locaux casematés voûtés. L'un renferme un magasin à poudre, l'autre, trois niveaux de locaux voûtés en plein-cintre. L'ouvrage d'entrée, monté en pierre de taille, est précédé d'un pont dormant à trois arches cintrées. Un pont-levis s'abat sur la troisième pile. Le passage est voûté en plein-cintre.

  • Murs
    • pierre moellon
    • pierre pierre de taille
  • Plans
    système bastionné
  • Couvrements
    • voûte en berceau plein-cintre
  • Statut de la propriété
    propriété de la commune
  • Intérêt de l'œuvre
    à signaler
  • Éléments remarquables
    échauguette, bastion
  • Protections
    classé MH, 1968/03/11
  • Précisions sur la protection

    Citadelle constituée par les ouvrages et les fossés (cad. D 170bis, 171, 171bis) : classement par arrêté du 11 mars 1968

Bibliographie

  • BELTRUTTI, Giorgio. Le fortezze dei Savoia. Cuneo : L'Arcière, 1980, 124 p. : ill. ; 31 cm.

  • BOUTEFOY, Madeleine, TRUBERT, Georges. Travaux et découvertes archéologiques à la citadelle de Villefranche. Dans : Archéam, Revue du Cercle d'histoire et d'archéologie des Alpes-Maritimes, n° 4, 1997, p. 27-32.

  • CANDIDO, Mara de. La défense du littoral niçois dans la première moitié du XVIe siècle. Dans : Nice-Historique, 1999, n° 69, p. 2-11.

  • CANDIDO, MAra de. Le fort de Saint-Elme et le port de Villefranche. Dans : Nice-Historique, 1999, n° 70, p. 24-35.

  • FAUCHERRE, Nicolas. Villefranche-sur-Mer, fort Saint-Elme. Dans Congrès archéologique de France. 168e session. Monuments de Nice et des Alpes-Maritimes, p. 233-239. Société française d'archéologie, Paris, 2012.

Documents figurés

  • Caserne Gaston de Foix. [citadelle de Villefranche] Plan de masse. / Dessin, plume et encre, sd [entre 1860 et 1870]. Service historique de la Défense, Vincennes : Petit atlas des bâtiments militaires.

  • Caserne Gaston de Foix. (citadelle de Villefranche). Rez-de-chaussée. Etages. [Plans] / Dessin, plume et encre, sd. [entre 1860 et 1870]. Service historique de la Défense, Vincennes : Petit atlas des bâtiments militaires.

  • Caserne Gaston de Foix. Villefranche. [Plans de détail des casemates]. / Dessin, plume et encre, sd. [entre 1860 et 1870]. Service historique de la Défense, Vincennes : Petit atlas des bâtiments militaires.

Date d'enquête 1996 ; Date(s) de rédaction 1997
(c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général
Truttmann Philippe
Truttmann Philippe

Lieutenant-colonel du génie, docteur en histoire. Chargé de cours à l'École supérieure du génie de Versailles, Yvelines.

Expert en architecture militaire auprès de l'Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France. Réalise de 1986 à 1996 l’étude de l’architecture militaire (16e-20e siècles) de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur : départements des Hautes-Alpes, des Alpes-de-Haute-Provence, partie des Alpes-Maritimes, ensemble des îles d’Hyères dans le Var.

Principales publications : La Muraille de France ou la ligne Maginot (1988)

Les derniers châteaux-forts, les prolongements de la fortification médiévale en France, 1634-1914 (1993)

La barrière de fer, l'architecture des forts du général Séré de Rivières, 1872-1914 (2000)

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Articulation des dossiers
Dossier d’ensemble