Dossier d’œuvre architecture IA04000727 | Réalisé par ;
Sauze Elisabeth
Sauze Elisabeth

Conservateur du Patrimoine au service régional de l'Inventaire général de Provence-Alpes-Côte d'Azur de 1969 à 2007.

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  • inventaire topographique
château
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Pays Asses, Verdon, Vaïre, Var - Barrême
  • Commune Tartonne
  • Lieu-dit Maladrech
  • Cadastre 1837 B 860, 861  ; 1987 ZB4 377 à 380
  • Dénominations
    château
  • Parties constituantes étudiées
  • Parties constituantes non étudiées
    chapelle, pigeonnier

Eléments de chronologie

La construction du château de Tartonne est datée par l’inscription gravée sur le cadran solaire de la façade du corps de logis : 1642 - 1644. Elle correspond vraisemblablement à l’installation de la dynastie seigneuriale des Gassendi, dont le premier hommage fut rendu en 1648.

Cette famille de petite noblesse bas-alpine, illustrée par l’érudit et philosophe Pierre Gassendi (1592-1655), compta trois branches, dont la principale se fixa à Tartonne après l’acquisition de cette seigneurie par Marc-Antoine Gassendi, lieutenant au siège de Digne.

Dans le compte-rendu de sa visite le 21 juin 1722, monseigneur Soanen parle d’un prieur de Tartonne, également chanoine de Riez, nommé Gassendi, fils ou petit-fils de Marc-Antoine, « toujours chasseur, toujours cavalier et décidant sur la religion sans l’étudier », et évoque la chapelle du château « n’étant à bien parler qu’une armoire dans le mur et dans la salle où l’on mange tous les jours ».

Son successeur fut reçu en 1764 dans le château par Balthazar de Gassendi et ses fils. En 1779, monseigneur de Beauvais visita la chapelle Saint-Jean-Baptiste, probablement construite depuis peu, située dans la cour du château, qu’il trouva en bon état et bien meublée.

Le cadastre de 1837 montre l’édifice, propriété du sieur Jaubert, amputé du bâtiment entre les deux tours rondes, mais complété par une chapelle (parcelle 861) qui s’appuyait au mur de clôture de la cour, près de la tour occidentale. Cette chapelle est signalée en bon état dans la visite pastorale de 1865, en mauvais état dans celle de 1870.

Depuis cette date, le château a plusieurs fois changé de mains et a subi de nouvelles dégradations avant d’être partiellement remis en état, à partir des années 1980, pour servir de résidence secondaire. La chapelle a disparu, le bâtiment au sud de la cour n’est plus qu’une ruine envahie par la végétation, la ferme a perdu deux de ses bâtiments et les deux autres sont à l’abandon.

Analyse architecturale

Situation

Isolé au fond de la cuvette centrale du territoire de Tartonne, à environ 500 m au nord-est de l’église paroissiale Notre-Dame d’Entraigues et en contrebas de l’ancien bourg castral. Tout autour, le coteau de faible inclinaison, exposé au midi et traversé par un canal d’irrigation, est encore partiellement cultivé.

Composition d’ensemble

L’édifice est composé de deux groupes adjacents de bâtiments disposés autour de deux cours que sépare un mur de clôture : à l’ouest, le château, à l’est la ferme. De simples chemins relient l’ensemble vers l’ouest et le sud à l’ancien chemin de Digne à Saint-André-les-Alpes, vers le nord-est à l’actuelle route D 219 de Tartonne à Lambruisse. Le château comprend 2 bâtiments parallèles, celui du sud cantonné de tours rondes. La ferme se compose de 3 bâtiments séparés.

Matériaux

Le gros-oeuvre des bâtiments est fait d’un blocage de moellons bruts en calcaire local, lié et enduit au mortier de chaux. Le même calcaire, en gros moellons équarris, a servi pour les chaînes d’angle et pour les encadrements de baie de la ferme. Pour ceux du château, on a utilisé une molasse calcaire blanche à grain fin, de provenance inconnue, le tuf jaunâtre local et le grès molassique extrait de la carrière de Clumanc. Les toits sont couverts de tuiles creuses.

Structure

Le château se compose de 2 bâtiments rectangulaires parallèles séparés par une cour close de murs. Au nord de la cour, le logis comporte 4 étages, le premier, en soubassement, entièrement voûté, le rez-de-chaussée et le 1er étage plafonnés, l’étage de comble à surcroît couvert par le toit, tous divisés par 2 refends et des cloisons. L’étage inférieur ouvre sur la cour par 3 portes, le rez-de-chaussée a un accès direct à l’ouest. Logé dans l’angle sud-ouest, un escalier à volées parallèles et moitié tournante, complété par un vestibule et des paliers voûtés d’arêtes, dessert l’ensemble. L’autre bâtiment, au sud, n’a plus qu’un étage de soubassement obscur, couvert d’un berceau en plein-cintre et accessible par une porte à l’ouest. Les tours rondes qui cantonnent ses angles ont conservé partiellement 2 étages au dessus du soubassement.

Elévations

Corps de logis : les quatre élévations sont bâties en blocage de moellons bruts liés et enduits au mortier de chaux, avec des chaînes d’angle en moellons de tuf équarris et un avant-toit à 4 rangs de génoise. L’élévation antérieure, au sud, comporte 3 travées de baies sur 4 niveaux, le premier renforcé sur presque toute sa longueur par des contreforts talutés : au niveau inférieur, la porte de la travée ouest ouvre sur le vestibule ; son encadrement en pierre de taille (molasse très fine) a été sévèrement mutilé, il ne reste que les amorces des pilastres qui soutenaient probablement un entablement à fronton au dessus de l’arc en plein-cintre dont la clef portait un cartouche sculpté en bas-relief (armoiries ?) rendu illisible par le bûchage. Corps de logis. Elévation sud. Porte de l'escalier.Corps de logis. Elévation sud. Porte de l'escalier.

Les 2 autres portes en arc segmentaire sont des percements beaucoup plus récents (XIXe siècle ?), de même que la fenêtre et le jour murés qui les surmontent. Les 2ème et 3ème niveaux sont percés symétriquement d’une croisée entre deux demi-croisées, toutes à encadrement en pierre de taille mouluré (partiellement restauré), meneau et traverse en bois (supprimés). Au 2ème niveau, entre la travée centrale et celle de l’est, subsiste, en mauvais état, un cadran solaire peint dont les partitions sont numérotées en chiffres romains et qui porte, à la partie supérieure de son cadre, les dates 1642 et 1644.Corps de logis. Elévation sud. 2e niveau. Cadran solaire peint daté 1642-1644.Corps de logis. Elévation sud. 2e niveau. Cadran solaire peint daté 1642-1644.

Au dernier niveau, la fenêtre à meneau de la travée centrale a été à moitié murée.

L’élévation ouest, précédée d’une terrasse dont le mur de soutènement en blocage paraît assez récent, compte 4 ouvertures, une porte bâtarde au 1er niveau, une fenêtre au 2ème et 2 jours carrés au 3ème, tous refaits au ciment.

L’élévation nord est étayée aux angles par des contreforts talutés et au centre par un avant-corps qui contient les canons des cheminées et un soupirail au 1er niveau ; les autres niveaux sont percés très irrégulièrement : une fenêtre au 2ème et 4 jours carrés au 3ème, tous encadrés de ciment.

L’élévation est n’a que 2 fenêtres, une au 1er et l’autre au 2ème niveau, encadrées de plates-bandes en mortier légèrement saillantes.Corps de logis. Elévation est.Corps de logis. Elévation est.

Mur de clôture de la cour : partiellement conservé à l’est, détruit à l’ouest, simple mur en blocage aujourd’hui dépourvu de couronnement et de portes.

Bâtiment sud : il ne reste que le 1er niveau des élévations sud, est et ouest et 3 niveaux, le dernier amputé pour recevoir un toit à un pan, des tours d’angle, tous en blocage de moellons bruts. L’élévation sud était percée d’une grande porte en plein-cintre, dont l’encadrement, probablement en pierre de taille, a été arraché. Une autre porte charretière, dont ne subsistent que les piédroits en pierre de taille, s’ouvrait à l’ouest.

Les deux tours sont ceinturées à chaque niveau d’un cordon mouluré (gros tore souligné d’un bandeau et d’un cavet) en grès et percées au 2ème niveau de meurtrières de fusillade (murées) du même matériau.

Celle de l’est est aussi ajourée au 2ème niveau d’une petite fenêtre en plein-cintre ébrasée en tuf.

Bâtiment sud. Vue d'ensemble prise du sud-est.Bâtiment sud. Vue d'ensemble prise du sud-est. Tour-sud-ouest, 2e niveau. Meurtrière de fusillade.Tour-sud-ouest, 2e niveau. Meurtrière de fusillade. Tour sud-est, 2e niveau. Fenêtre de la chapelle.Tour sud-est, 2e niveau. Fenêtre de la chapelle.

Couverture

Le corps de logis est abrité par un toit à longs pans et croupes couvert de tuiles creuses. L’autre bâtiment et les tours n’ont plus de toit.

Distribution intérieure

- Corps de logis

Etage de soubassement : le vestibule est couvert d’une voûte à 2 travées d’arêtes qui retombent sur une colonne engagée dans le mur d’échiffre de l’escalier ; l’enduit au plâtre qui habille les murs et la voûte et le pavement en carreaux de terre cuite ont été refaits. Il en va de même des 3 pièces adjacentes. Dans celle du milieu, la cheminée a été reconstruite en briques à côté du four dont subsiste la bouche.

L’escalier à moitié tournante et les paliers voûtés d’arêtes comme le vestibule ont subi le même traitement.

Au rez-de-chaussée, les trois pièces (initialement quatre, la cloison qui séparait les deux du côté est a été abattue) ont un plafond à la française et un sol pavé de tomettes. La grande salle du milieu a conservé sa cheminée en gypserie.

Les autres étages ont été refaits à neuf.

- Corps de bâtiment sud

L’étage de soubassement, seul conservé, consiste en un grand volume voûté en berceau plein-cintre construit en blocage ; le sol, partiellement recouvert de décombres, est en terre battue ; dans le mur nord subsiste l’embrasure segmentaire d’un soupirail ouvert sur la cour.

Tour ouest : l’étage de soubassement, couvert d’une coupole surbaissée, ouvre sur le corps central par une porte en pierre de taille sans décor ; dans le mur tout autour sont aménagées de petites niches irrégulières. Au rez-de-chaussée, qui communiquait avec le corps central par une porte, il ne reste du plancher, assis sur une retraite du mur périphérique, que 2 poutres et une solive avec un fragment de la semelle en mortier de plâtre qui formait le sol de l’étage supérieur.Bâtiment sud. Tour sud-ouest. Vue d'ensemble prise du nord-est.Bâtiment sud. Tour sud-ouest. Vue d'ensemble prise du nord-est.

Dans le mur en blocage s’ouvrent les embrasures carrées et ébrasées de 4 meurtrières de fusillade et une petite fenêtre encadrée de bois. Un petit escalier en plâtre, appuyé contre le mur et en majeure partie détruit, conduisait à l’étage, aménagé en pigeonnier. Des boulins en plâtre rose portés par un rang de consoles en bois garnissent le pourtour de ce dernier.Bâtiment sud. Tour sud-ouest. 1er étage. Boulins du pigeonnier.Bâtiment sud. Tour sud-ouest. 1er étage. Boulins du pigeonnier.

Tour est : le dispositif intérieur est identique à celui de la tour ouest. La pièce du rez-de-chaussée prend jour au sud par une fenêtre ébrasée et possédait à l’est une baie ou une niche murée couverte d’un grand arc en plein-cintre. Le pigeonnier de l’étage supérieur a les mêmes boulins en plâtre rose que l’autre tour.

Bâtiment sud. Tour sud-est. Rez-de-chaussée. Ancienne chapelle.Bâtiment sud. Tour sud-est. Rez-de-chaussée. Ancienne chapelle.

CONCLUSION

Le château de Tartonne, malgré son médiocre état de conservation, constitue un intéressant exemple de résidence noble en milieu rural bas-alpin. Son plan et ses dimensions l’apparentent aux nombreuses bastides aristocratiques élevées à la même époque dans les campagnes de Basse Provence. Des dommages qu’il a subis après la Révolution, certains paraissent relever du vandalisme (mutilation de la porte de l’escalier), mais la plupart découlent seulement de l’usage agricole qui en a été fait.

Cependant le bâtiment sud cantonné de tours rondes paraît un peu archaïque et l’on peut s’étonner du traitement monumental et de l’emplacement choisis – au sud du logis, dont il intercepte la vue et le soleil – pour une annexe qui abritait les écuries et les domestiques. S’il ne s’agit pas là d’un parti pris destiné à donner à l’ensemble une allure militaire, on pourrait imaginer le remploi d’une construction antérieure demeurée inachevée et/ou détournée de sa destination d’origine. La fenêtre en plein-cintre du rez-de-chaussée de la tour sud-est ressemble fort à celle d’une chapelle, qu’on ne peut identifier à celle dont parle la visite pastorale de 1722 et qui est donc nécessairement antérieure. L’hypothèse d’un bâtiment construit – ou tout au moins commencé – dans le dernier quart du XVIe siècle ou le premier quart du XVIIe siècle rendrait compte de l’appareil défensif (meurtrières de fusillade) utilisé ici et qu’on ne retrouve pas dans le corps de logis daté de 1642-1644. Les raisons du changement de parti pourraient être conjoncturelles (destruction violente – peut-être au moment de l’occupation du lieu par les huguenots en 1574 ? - , changement de propriétaire), techniques (problèmes de stabilité) ou simplement esthétiques.

Le château a été construit pour Marc-Antoine Gassendi, lieutenant au siège de Digne, qui acquit la seigneurie de Tartonne vers 1630 et il est resté en possession de ses descendants directs jusqu'à la Révolution. L'édifice est composé de deux bâtiments, disposés de part et d'autre d'une cour centrale, et d'une ferme. Le bâtiment sud, ruiné, est le plus ancien. Il pourrait remonter au 16e siècle, à en juger par la présence de deux tours rondes munies de meurtrières de fusillade.Le bâtiment nord est daté entre 1642 et 1644, dates peintes sur le cadran solaire de l'élévation antérieure. La chapelle Saint-Jean-Baptiste, aujourd'hui détruite, fut construite contre le mur de clôture ouest de la cour entre 1764 et 1779. Converti en exploitation agricole et partiellement détruit après la Révolution, l'édifice est en cours de restauration depuis 1990.

L'édifice est composé de 2 bâtiments, disposés de part et d'autre d'une cour centrale, et d'une ferme. Le corps de logis, au nord, comprend un étage de soubassement voûté en berceau plein-cintre, un rez-de-chaussée surélevé, un étage carré et un comble à surcroît desservis par un escalier à moitié tournante dont les paliers sont voûtés d'arêtes. La salle du rez-de-chaussée a conservé son plafond à la française et une cheminée en gypserie. L'élévation antérieure ouvre sur la cour au sud par 3 travées de croisées et demi-croisées et la porte de l'escalier, dont le décor architecturé a été mutilé. Le bâtiment sud, ruiné, n'a plus que son étage de soubassement voûté en berceau plein-cintre et 2 tours d'angle circulaires munies de meurtrières de fusillade. La tour sud-est semble avoir abrité au rez-de-chaussée une chapelle. Toutes deux ont été transformées en pigeonnier.

  • Murs
    • calcaire moellon sans chaîne en pierre de taille enduit
  • Toits
    tuile creuse
  • Étages
    étage de soubassement, rez-de-chaussée surélevé, 1 étage carré, étage en surcroît
  • Couvrements
    • voûte en berceau plein-cintre
    • voûte d'arêtes
  • Élévations extérieures
    élévation à travées
  • Couvertures
    • toit à longs pans croupe
  • Escaliers
    • escalier dans-oeuvre : escalier tournant à retours sans jour en maçonnerie
  • État de conservation
    restauré
  • Techniques
    • décor stuqué
  • Statut de la propriété
    propriété privée, []

Documents d'archives

  • Procès-verbaux de visites pastorales, évêché de Senez, 1708-1723. Archives départementales des Alpes-de-Haute-Provence, Digne-les-Bains : 2 G 18.

    Visite de la paroisse de Tartonne, 21 juin 1722, folio 667-674
  • Procès-verbaux de visites pastorales, évêché de Senez, 1745-1753, 1764 à 1768, 1775, 1779 à 1781, 1785 à 1788. Registre tenu successivement par Louis Jacques François de Vocance (évêque de Senez de 1741 à1756), Antoine-Joseph D'Amat de Volx (évêque de Senez de 1757 à 1771), Étienne François Xavier des Michels de Champorcin (évêque de Senez de 1771 à 1773), Jean-Baptiste Charles Marie de Beauvais (évêque de Senez de 1774 à 1783), Sixte-Louis-Constance Ruffo (Roux) de Bonneval (évêque de Senez de 1783 à 1784), Jean-Joseph-Victor de Castellane-Adhémar (évêque de Senez de 1784 à 1788). Archives départementales des Alpes-de-Haute-Provence, Digne-les-Bains : 2 G 19

    Visites de la paroisse de Tartonne, 4 mai 1764 et 6 novembre1779.

Documents figurés

  • Plan cadastral de la commune de Tartonne, 1837. / Dessin à la plume plume, à l'encre et au lavis, levé par Cauvin, Depeyre, Martin, Nicolas, géomètres du cadastre, 1837, échelle 1/1250e, 1/2500e, 1/5000e. Archives départementales des Alpes-de-Haute-Provence, Digne-les-Bains : 105 Fi 214 / 001 à 013

    Section B de la Reynière, 3e feuille.
Date d'enquête 2005 ; Date(s) de rédaction 2007
(c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général
Sauze Elisabeth
Sauze Elisabeth

Conservateur du Patrimoine au service régional de l'Inventaire général de Provence-Alpes-Côte d'Azur de 1969 à 2007.

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