Dossier d’œuvre architecture IA06001322 | Réalisé par ;
  • enquête thématique régionale, architecture militaire de Provence-Alpes-Côte d'Azur
batterie dite fort Taborda ou fort Tabourde
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Alpes-Maritimes - Tende
  • Commune Tende
  • Lieu-dit col de Tende

Pas d'indices de la présence d'un édifice antérieur sur le site

I. Généralités

Cet ouvrage s' apparente à une batterie de protection de type italien 1877-1880. Il n'avait pas le statut de "fort" à sa conception, mais était l'un des cinq "ouvrages" d'appoint du fort de barrage de Colle Alto, l'ensemble composant le camp retranché du Col de Tende. Ses dimensions sont moindres ( 76m de profondeur dans l'axe médian nord-sud, fossés compris) que celles des ouvrages de Margheria et Giaure, mais dépasse un peu en ampleur et en capacité d'accueil de garnison Pernante et Pepino. Sa conception générale est très proche de celle de l'ouvrage de Margheria, en plus simple et moins dissymétrique, et de celle de l'ouvrage de Pernante. Ici comme pour les autres ouvrages, l'appellation "fort", quoique impropre, a été consacrée par l'usage.

Il s'élève à la cote 2005m, en contrebas au sud de la cime de Beccorosso (du Bec Roux), au sud-est de Colle Alto.

Il est laissé à l'abandon par l'administration militaire, et n'a pas d'affectataire. Il est utilisé en partie comme bergerie (passerelle d'accès de fortune).

Son état sanitaire général est très médiocre; il tombe en ruines.

II. Historique

La construction de cet ouvrage, confiée par contrat du 10 juillet 1883 à l'entrepreneur Giuseppe Maggia , adjudicataire du marché pour la continuation des ouvrages du barrage de Tende, est estimée alors à 376.488 lires, ce qui confirme son importance intermédiaire au sein des cinq ouvrages de type batterie du camp retranché.

L'ouvrage était conçu pour une garnison de 120 hommes.

L'armement prévu au projet initial de la batterie comporte 6 sections d'artillerie composées de 6 à 8 canons de calibre 12 en fonte rayée cerclée, tous disposés pour le tir à barbette sur les terrasses, à raison de quatre sur le rempart du front sud ( deux pour le tir frontal vers la vallée, deux dans les angles), un ou deux (poste de tir double) sur le rempart ouest, comme sur le rempart est. Le champ d'action couvre le Vallo Fredo, le fond de la Roya, et le chemin d'accès au col de Tende.

Selon le projet initial de 1881, un retranchement annexe aurait dû être construit , sur les pentes de Beccorosso, pour protéger à l'arrière Taborda, à 2km de distance. Mais ce dispositif dont le plan figure dans l'Atlas du barrage de Tende, n'a pas été réalisé, comme les autres retranchements, dont celui de Giaure, presque identique. C'aurait du être un ouvrage avec caserne défensive, et sur le front d'attaque un rempart avec banquette de fusillade sur deux côtés, un mur de défense sur le troisième côté, le tout ceint de fossé. La caserne, crénelée aurait hébergé un poste de 120 hommes, chambre d'officiers et cuisine. Citerne de 80 m3, réduit pour les munitions.

En 1890 fut construit un peu au nord de l'ouvrage de Taborda le poste-relai permettant la communication optique entre le fort de Colle Alto et l'ouvrage de Pepino.

Un projet de 1891 proposant d'établir une petite batterie pour mortiers de 15 sur la cime de Framosa, qui domine à quelque distance au nord l'ouvrage de Taborda, fut rapidement approuvé et mis en œuvre, parce qu'il était facile à réaliser et remplaçait en partie des emplacements de mortier initialement prévus dans le fort de Colle Alto.

Le rapport confidentiel du service des renseignements militaires français, dans sa version mise à jour en 1933, date la construction de cette batterie de 1904.

L'installation des lignes téléphoniques et télégraphiques reliant cet ouvrage à l'ensemble du dispositif date d'octobre 1892, et le colonel Stabia, directeur territorial du génie de Cuneo, en confirma le bon fonctionnement un an plus tard.

Le rapport confidentiel du service des renseignements militaires français rédigé en 1895, et mis à jour en 1898, 1899, 1907, 1909, 1914, puis en 1933, produit un plan schématique mal documenté de l'ouvrage, et le crédite par conjecture de 3 pièces de 15 au sud et de 2 pièces de 12 à l'est. Toujours d'après ces renseignements, un canon de 15 provenant du fort de Colle Alto aurait été placé en 1898 dans le "fort" Taborda.

Comme les autres, l'ouvrage de Taborda a été désarmée durant la première guerre mondiale, ce dont ne fait pas état la mise à jour pour 1933 du rapport des renseignements militaires français.

III. Description1

Fascicolo contenente il piano d'insieme [...] del Colle di Tenda [Document contenant le plan d'ensemble [...] du Col de Tende]. Détail : plan du sous-sol -SSC- [fort Tabourde].Fascicolo contenente il piano d'insieme [...] del Colle di Tenda [Document contenant le plan d'ensemble [...] du Col de Tende]. Détail : plan du sous-sol -SSC- [fort Tabourde].

Les matériaux de construction sont de provenance locale, qu'il s'agisse des parements courants, en blocage de gros moellons et cailloux (granite, calcaire et schiste), ou des rares pierres de taille (bandeaux-larmiers, tablettes d'arases, dalles de pavement, d'escaliers, encadrement de la porte). Les sols de circulation dans les corridors sont constitués d'une calade de moellons. On ne sait si les briques employées dans la construction (en encoignures, en encadrement ou couvrement de baies) ont été produites dans un four créé sur place, ou apportées par l'entrepreneur. La mise en oeuvre des matériaux et des enduits est traditionnelle, et n'emploie à l'origine que le mortier de chaux. L'ensemble des parements intérieurs (murs et voûtes), était revêtu d'un enduit couvrant blanc, mal conservé aujourd'hui; Il ne semble pas en revanche que les façades extérieures aient jamais été enduites.

Dans l'état actuel des lieux, touts les aménagements de second œuvre, ou mobiliers : menuiseries, huisseries, planchers, grilles et garde-corps en fer forgé, affûts des pièces, ont été systématiquement pillés et n'existent plus. On note toutefois à l'intérieur la conservation exceptionnelle d'une grille en fer formant réseau dans une petite fenêtre en dessus de porte, entre corridor et escalier de descente à un souterrain.

A. Plan

L'ouvrage est établi sur un replat en partie créé artificiellement, sur une ligne de crête descendant du nord au sud (depuis la cime de Becco Rosso), entre deux cimes (de Framosa, 2125m, de Tavan, 1912m). Il domine des pentes escarpées sur ses flancs est et ouest, et à l'ouest du front sud. D'importants travaux de terrassements ont ménagé une assiette plane en trapèze, presque carrée, avec fossés à contrescarpe revêtue continue. Le front de gorge (nord) a été retranché artificiellement en créant une profonde entaille dans l'arête rocheuse qui le domine, et en creusant le fossé nord dans cette entaille, en dégageant au devant l'espace nécessaire pour le passage de la route d'accès, qui se prolonge à l'est par un sentier allant jusqu'au "fort Pepino".

Vue générale prise de l'ouest.Vue générale prise de l'ouest.

Les déchets de matériaux produits par les travaux de terrassement et de construction ont été épandus au revers de la contrescarpe des fossés sud et ouest pour recharger et régulariser les pentes en formant un glacis de remblai. Malgré cela, le fossé (fond et crête de contrescarpe) n'est pas parfaitement à l'horizontale mais marque une sensible déclivité vers l'angle sud-ouest. Afin que cette déclivité n'affecte pas l'alignement horizontal de la crête, ou des parapets de terre du rempart, il a fallu sur épaissir considérablement celui-ci à partir de l'axe défini par l'angle sud-ouest du fort, ce qui explique l'absence de parallélisme en plan entre l'escarpe des fronts est et sud, et le revêtement intérieur du rempart des mêmes fronts, qui se joignent sur la cour intérieur en angle très obtus.

L'ouvrage est dépourvu de tout organe de flanquement saillant sur l'escarpe de type caponnière, absence compensée par l'aménagement de deux coffres ou galeries de contrescarpe à feux de revers dans les angles opposés nord-ouest et sud- est. Ce parti serait significatif de l'évolution de la conception des ouvrages défensifs italiens dans les années 1880.

Les angles des murs d'escarpe du fort sont largement arrondis de part et d'autre du front sud, ce qui n'est exprimé sur le plan de l'Atlas contemporain du projet que pour l'angle sud-est. Seuls les deux angles de la contrescarpe que n'occupent pas des galeries à feu de revers, sont également arrondis.

B. Économie défensive générale : remparts et batteries

Conformément au type de la batterie de protection, l'ouvrage présente trois fronts d'attaque constitués d'un rempart avec revêtement d'escarpe bas en glacis couronné d'un cordon-larmier , parapet en terre et terre-plein destinés à porter les pièces d'artillerie de moyen calibre (canons de 12) pour le tir à barbette, dont les emplacements sont défilés par des traverses.

Le front de gorge, au nord (72m de long, comme à Margheria), au milieu duquel est ménagée la porte d'entrée est le seul qui présente à l'extérieur, sur le fossé, un bâtiment de casernement à deux étages de casemates voûtées à l'épreuve, avec façade percée d'une fenêtre par travée (niveau fossé et rez-de-chaussée). Cette façade est couronnée par un parapet d'infanterie maigre percé de créneaux de fusillade qui assurent la défense rapprochée.

Cependant, l'élévation du front oriental du "fort" Taborda, prend le caractère d'un mur d'escarpe couronné d'une tablette et d'un épais parapet de terre, tout en tenant lieu de façade extérieure pour une aile de casemates basse en retour d'équerre du premier niveau du bâtiment nord. Ce mur est percé, comme la façade de ce casernement du front de gorge, de fenêtres ouvrant directement sur le fossé. Cette disposition non conforme au modèle-type de la batterie de protection, est une variante simplifiée de celle qui existe au fort Margheria.

Front nord : façade du bâtiment de casernement, fossé et porte à pont-levis, vue du nord-ouest.Front nord : façade du bâtiment de casernement, fossé et porte à pont-levis, vue du nord-ouest. Cour intérieure, vue du nord-est; crète du rempart et ses traverses, parados central.Cour intérieure, vue du nord-est; crète du rempart et ses traverses, parados central.

Sur les six emplacements de tir à barbette des trois fronts d'attaque, les deux qui occupaient les angles (sud-est et sud-ouest) conservent l'axe de rotation et le pavement en arc de cercle des affûts tournants.

Compte-tenu du peu d'ampleur de la plate-forme ou cour intérieure de la batterie, trois traverses creuses à réserves, soit: une par front, suffisent à défiler tous les emplacements de tir, couverts en outre au nord par le rempart qui habille le revers du bâtiment de casernement du front de gorge, rempart plus élevé que ceux des trois autres fronts. En outre, un massif isolé remparé de même hauteur et structure (deux côtés revêtus, réserve voûtée à l'intérieur) que les traverses, s'élève au milieu de la cour, à la fois pour servir de parados et pour contraindre le passage d'entrée du fort débouchant dans la cour à former une chicane tournant à gauche.

Parapet d'infanterie du front nord vu de l'intérieur, créneaux de fusillade.Parapet d'infanterie du front nord vu de l'intérieur, créneaux de fusillade.

Les traverses creuses (abritant des réserves de munitions à double fond) communiquent en sous-œuvre par des escaliers coudés avec une galerie souterraine qui relie les corridors de desserte des casemates basses des fronts est et nord.

Le sol de la cour intérieur (Rez-de-chaussée) est de plain-pied avec celui les emplacements de tir, délimité du parapet des remparts des trois fronts d'attaque par un mur d'appui intérieur formant deux pans coupés au droit des emplacements de tir des angles.

Le seul niveau de tir régnant plus haut est celui du chemin de ronde d'infanterie en haut de la façade nord, entre rempart et parapet en pierre à créneaux de fusillade.

C. Circulations, aménagements, bâtiments, locaux internes et coffres

La porte du fort constitue l'axe de symétrie du front nord, et en particulier de la façade du bâtiment de casernement qui occupe la majeure partie ce front de gorge, encadrée de part et d'autre par l'épaulement des remparts est et ouest. Cette façade comporte neuf travées de baies superposées sur deux étages, soit quatre travées de fenêtres de chaque côté de celle de la porte. Toutefois, le rythme des travées de fenêtres n'est pas parfaitement régulier, car elles correspondent à des travées de casemates dont la largeur n'est pas constante. La dernière travée de casemate de l'est, par exemple, est beaucoup plus étroite que les autres, car, au niveau inférieur, elle n'a d'autre fonction que d'abriter un escalier à volée unique.

Les deux étages de la façade sont séparés par un cordon-larmier qui s'interrompt au raccord vertical de cette façade avec le retour d'angle du mur de revêtement des remparts est et ouest. Ce mur lui même couronné d'une tablette saillante, vient épauler latéralement les angles de la façade jusqu'au niveau du couvrement des baies du R-C; l'élévation murale de ces retours du mur d'enveloppe suit le profil ascendant du parapet en terre du rempart.

Les fenêtres sont couvertes d'un arc surbaissé en briques, une feuillure d'encastrement pour les contrevents venant délarder en réserve du nu du parement, non seulement le bas des arcs de ces fenêtres, mais aussi -trait typologique commun aux ouvrages du camp retranché de Tende- l'emprise de rabattement de ces contrevents de part et d'autre de chaque fenêtre ( ce qui les protégeait des intempéries).

Les nombreux créneaux de fusillade du parapet d'infanterie qui constitue le troisième étage de la façade sont encadrés en briques; cet encadrement, plus resserré vers l'intérieur qu'au dehors, est dans l'ensemble bien conservé. Les dalles minces en pierre composant la tablette qui protégeait l'arase de ce parapet ont en grande partie disparu.

La porte est précédée d'un pont à unique arche dormante attenante à la contrescarpe (arc et pile en moellons sommairement équarris), que complétait un tablier de pont-levis à bascule (complètement détruit) dont le contrepoids était assuré par deux fléaux lestés qui s'abîmaient par des saignées au sol du passage, dans une fosse voûtée (16), prise sur la partie antérieure de la travée de casemate basse régnant sous le passage d'entrée. L'encadrement de la porte est en pierre de taille grise (granite) avec arc segmentaire à voussoirs passants un sur deux, le tout inscrivant en retrait un sous-arc à double rouleau (arc en pierre formant la façade d'entrée de la voûte du passage, sous-cintré par un arc en briques extradossé), sous-arc contre lequel venait s'appuyer, inscrit dans l'arcade d'encadrement en pierre de taille, le tablier du pont-levis en position fermée .

La chaussée d'accès à la cour, qui suit immédiatement les vantaux (disparus) de la porte et forme un long segment rectiligne sous passage voûté en berceau surbaissé, comporte deux bandes de dalles en pierre dure, correspondant au passage des roues des convois, avec dans l'intervalle une calade de gros moellons surfacés. Le dernier quart du passage, s'élargit pour déboucher à ciel ouvert dans le versant intérieur du rempart ; la chaussée surplombe en ce point une citerne de plan presque carré .

A mi-longueur du couloir d'entrée, passe le corridor est-ouest de distribution des casemates, voûté en demi-berceau à ce niveau, et qui n'est pas superposé à celui du niveau inférieur (22), fortement décalé vers le sud. Les casemates sont toutes voûtées en berceau segmentaire d'axe nord-sud, sauf la fosse du pont-levis. Les deux travées de casemates qui encadrent immédiatement le couloir d'entrée sont un peu plus larges que ce couloir, mais moins larges que les quatre travées attenantes de part et d'autre. Ces deux premières travées latérales communiquent à la fois avec le couloir d'entrée, et avec le corridor. La travée à gauche, qui s'ouvre sur le corridor par une grande arcade à cintre surbaissé, est la cage d'escalier à rampes droites (marches posées sur des volées voûtées en briques, repos voûtés en pierre revêtus de dalles), qui dessert l'étage inférieur (cet escalier est très délabré).

La travée à droite du passage devait être le corps de garde.

Réparties de chaque côté de ces deux premières travées, les quatre casemates de dimensions normales, qui étaient affectées à des dortoirs pour la garnison, comportent chacune sur le corridor une porte encadrée de deux petites fenêtres. La dernière casemate à l'ouest, moins large, n'a qu'une fenêtre flanquant la porte. Elle voisine avec un cabinet de latrines qui termine le couloir de ce côté, et devait correspondre à l'infirmerie. Plus étroite encore, la dernière casemate orientale (magasin d'artillerie ?) n'a qu'une porte.

Au-dessous de ce rez-de-chaussée règnent les casemates qui prennent jour dans le fossé, numérotées à partir de l'escalier (16 à 21 vers l'ouest, 33 à 35 vers l'est). Ces casemates sont des deux tiers plus profondes que celles qui les surmontent, et les voûtes de chacune d'elles sont traversées par deux arcs diaphragmes parallèles alignés selon un axe unique de l'extrémité est à l'extrémité ouest: ces arcs servent à décharger les voûtes de ces casemates basses du poids des murs du corridor du niveau supérieur. La casemate sous le passage d'entrée est divisée par un mur de refend; la moitié antérieure (16), voûtée en partie en briques dans un axe perpendiculaire à celui des autres casemates, est la fosse de rabattement des fléaux du pont-levis; son mur de front forme sur le fossé un léger avant-corps. Cette fosse communique à la fois avec l'escalier , mais pas avec la partie postérieure de la travée qu'elle occupe (17) réputée avoir été affectée à la "chambre mortuaire". Les autres casemates reproduisent les dispositions de celles du rez-de-chaussée, et étaient aménagées en dortoirs ou en prisons, l'une d'elle servant de cuisine.

Au delà de la dernière casemate ouest (21), le corridor voûté en berceau (32) distribue un escalier à volée unique (22) parallèle à cette casemate, qui descend en souterrain (26-27) sous le sol du fossé. Sur le plan de l'Atlas contemporain de la construction, le souterrain fait suite à l'escalier dans l'axe; dans l'état réalisé, l'escalier se retourne d'abord à angle droit vers l'ouest au droit de l'escarpe, sous le fossé, avant de se couder à nouveau au nord pour former le souterrain qui traverse le fossé. Ce souterrain remonte ensuite pour desservir la galerie de contrescarpe à feu de revers (29) qui enveloppe l'angle nord-ouest du fossé. La partie crénelée du revêtement de contrescarpe qui correspond à l'emprise de cette galerie est en retrait d'alignement du reste de la contrescarpe; il est possible qu'au pied de ce secteur, un fossé-diamant ait été aménagé, mais l'état actuel d'encombrement du fossé ne permet pas de le vérifier.

Passage d'entrée du fort vu de l'intérieur, la porte, saignées du pont-levis au sol.Passage d'entrée du fort vu de l'intérieur, la porte, saignées du pont-levis au sol. Fossé ouest vu de l'angle nord-ouest, rempart ouest, coffre crénelé et poterne.Fossé ouest vu de l'angle nord-ouest, rempart ouest, coffre crénelé et poterne.

Le plan de l'Atlas indique que les deux branches de la galerie de contrescarpe voûtée se joignent à l'intérieur à angle vif, alors qu'en réalité, cet angle est arrondi.

L'extrémité ouest du corridor (32), descend de quelques marches, puis débouche en poterne dans le fossé, non sans avoir desservi à main gauche de cette poterne, un cabinet de latrines. La disposition des locaux voûtés contenus dans l'angle nord-ouest du fort, entre le corridor et l'escalier (22), n'est pas tout à fait conforme dans l'état réalisé à ce qui apparaît sur le plan de l'Atlas du XIXe siècle. Si, immédiatement à droite du corridor, on trouve bien un réduit obscur (24) séparé par un mur de refend d'un coffre (30) percé vers le fossé de créneaux de fusillade, seul desservi directement par le corridor, en revanche le local situé plus précisément dans l'angle (23-25), n'a jamais été percé de créneaux de fusillade sur le fossé nord. Tout ce secteur du mur d'escarpe ouest, entre l'angle et la poterne du corridor, est aujourd'hui gravement ruiné par des éboulements de sa partie supérieure, qui ont entraîné une partie des terres du rempart.

A l'est, après une descente de quelques marches, le corridor (32) dessert à gauche un large escalier à volée unique (35) qui descend vers le nord sous la dernière casemate du rez-de-chaussée. Le souterrain qui le prolonge dans l'axe (36) et passe sous le fossé, remonte au revers de la contrescarpe en formant deux volées d'escalier, la seconde en retour d'angle à gauche (ouest), avant de se retourner à droite pour desservir le magasin à poudre du fort, enterré hors œuvre et invisible (pas de prise de jour dans la contrescarpe), comme à l'ouvrage de Giaura. Ce magasin (39) voûté à l'épreuve, d'une capacité de 30.000 kg, est ceinturé de son couloir d'isolement voûté élargi du côté de l'accès pour former vestibule (38).

A l'est comme à l'ouest, le corridor de desserte du front nord (32) se prolonge jusqu'au mur d'escarpe, ou il débouchait sous forme de fenêtre ou de poterne (ce débouché est complètement éboulé). Les casemates du front oriental sont distribuées, seulement au sud du corridor du front nord (32), par un autre corridor qui s'y embranche en retour d'équerre (42). Au nord du corridor du front nord, dans l'angle nord-est du fort, tiennent deux des casemates du front est (40, 41) qui se commandent mutuellement. Les six casemates de ce front situées plus au sud (43,44, 46 à 50), la dernière refendue en deux sont desservies -on l'a vu- par leur propre corridor (42). Ce dernier dessert au passage du côté ouest un magasin enterré sous la cour intérieure du fort (à l'angle N-E), voûté sur deux piliers carrés; il s'agissait peut-être de l'arsenal. A son extrémité sud, ce corridor (42) se retourne vers l'est (50)après la dernière casemate 49-51 (dont la moitié extérieure est un coffre crénelé ), pour desservir un escalier et un souterrain (52-53) passant sous le fossé, qui aboutissent à la seconde galerie de contrescarpe à feu de revers (54), logée dans l'angle sud-est du fossé. Là encore, le plan de l'Atlas n'exprime pas l'arrondi de l'angle intérieur qui joint les deux branches de cette galerie crénelée, pas plus que le retrait du nu affectant cette partie du revêtement de contrescarpe.

Les deux corridors des deux fronts casematés en retour d'équerre sont au surplus reliés par une galerie souterraine aveugle mais pourvue de cheminées de ventilation, trois fois coudée (55) qui circule sous la cour intérieure; c'est de cette galerie que partent les escaliers qui desservent les abris-réserves des trois traverses des remparts. Entre le débouché de cette galerie dans le corridor nord et la citerne du fort, sont calés deux petits magasins jumeaux (56, 57)

D. Ouvrages et bâtiments annexes

Au début de la pente nord qui domine abruptement la tranchée de la route et le front de gorge du fort, au nord-nord-est, on trouve quelques vestiges d'un petit corps de garde carré construit en blocage de schiste, aménagement classique qu'on retrouve aux autres batteries du camp retranché.

Quelques 80m au nord de ce corps de garde, près de la cote 2111, un autre petit corps de bâtiment rectangulaire en ruines, divisé en deux travées par un mur de refend, est l'ancien poste de télégraphie optique construit en 1890 pour mettre en communication les ouvrages de Taborda et de Pepino avec le fort de Colle Alto. La crête nord-sud entre la cime de Becco Rosso et celle de Framosa, empêche toute co-visibilité de Colle Alto à Pépino : Taborda était donc le relais indispensable pour assurer les communications optiques entre les ouvrages. Le poste optique de Taborda était desservi à partir d'un chemin qui s'embranche sur la route d'accès un peu avant le fort, et suit la ligne de crête nord-sud jusqu'au Becco Rosso.

Crète et cime de Framosa, à l'ouest de Pépin; à gauche, batterie de mortier et fort Tabourde.Crète et cime de Framosa, à l'ouest de Pépin; à gauche, batterie de mortier et fort Tabourde. Cime de Framosa, sa batterie, vue générale (Tabourde, vue depuis la route de Pépin).Cime de Framosa, sa batterie, vue générale (Tabourde, vue depuis la route de Pépin).

Ce chemin de crête dessert ensuite, par un petit embranchement à droite, la cime de Framosa (2125m), sur laquelle une batterie de mortier de 15 a été aménagée sur un projet de 1891. Ces emplacements de mortiers remplaçait avantageusement ceux du fort de Colle Alto: la position de Framosa (dite aussi de Taborda) permettait un champ de tir plus vaste, un meilleur contrôle du font de la vallée de la Roya, et offrait des visées sur les petites vallées du Rio Fredo, Framosa, de La Mentargue et Carmagna.

Il s'agit d'une petite batterie classique, sur plan hexagonal très irrégulier, composée d'une simple banquette en terre, en partie soutenue de murettes en pierre sèche, pouvant accueillir (dans une aire de 9m40 / 15m) quatre mortiers de 15 en acier rayé. Un petit dépôt de munitions maçonné avait été creusé dans le rocher au pied de l'escarpe ouest de l'ouvrage. Cette batterie de mortier est aujourd'hui assez mal conservée.

1les chiffres de repérage portés entre parenthèses dans la description renvoient à la numérotation portée sur le plan de l'opera di Taborda au niveau inférieur, tiré de l'atlas (fascicolo) du camp retranché du Col de Tende, contemporain de la construction (Sessione Staccata di Cuneo)

Ouvrage de fortification dont la construction est confiée par contrat du 10 juillet 1883 à l'entrepreneur Giuseppe Maggia, adjudicataire, pour une somme de 376 488 lires. Il faisait partie des cinq batteries de protection satellites du fort de barrage de Colle Alto et conçu pour 120 hommes. L'armement prévu au projet initial comporte 6 sections d'artillerie composées de 6 à 8 canons de calibre 12 disposés pour le tir à barbette sur les terrasses. Le champ d'action couvre le Vallo Fredo. L'ouvrage est dépourvu de tout organe de flanquement saillant, absence compensée par l'aménagement de deux galeries de constrescarpe à feux de revers dans les angles nord-ouest et sud-est ; ce parti serait significatif de l'évolution de la conception des ouvrages défensifs italiens dans les années 1880. Selon le projet initial de 1881, un retranchement annexe aurait dû être construit sur les pentes du Beccorosso, mais n'a pas été construit. En 1890 fut édifié un peu au nord le poste-relais permettant la communication optique entre le fort de Colle Alto et celui de Pepino. L'installation des lignes téléphoniques et télégraphiques reliant cet ouvrage à l'ensemble du dispositif date d'octobre 1892. Comme les autres, le fort Pernante a été désarmé durant la première guerre mondiale. Il est laissé à l'abandon par l'administration militaire et n'a pas d'affectataire.

Cet ouvrage s'apparente à une batterie de protection de type italien 1877-1880. Il s'élève à la cote 2005 m, en contrebas au sud de la cime de Beccorosso. Il est établi sur un replat créé en partie artificiellement, sur une ligne de crête descendant du nord au sud : assiette plane en trapèze, presque carrée, avec fossés à contrescarpe revêtue continue. Les matériaux de construction sont de provenance locale (granit, calcaire et schiste) . Les sols de circulation sont en calade de petits moellons ; emploi de brique en encadrement des baies. L'ensemble des parements intérieurs était revêtu d'un enduit couvrant blanc à surface grattée, bien conservé, mais il semble que les façades extérieures n'aient jamais été enduites. Il présente trois fronts d'attaque, avec parapet en terre et terre-plein destinés à porter les pièces d'artillerie, dont les emplacements sont défilés par des traverses. Le front de gorge au nord, au milieu duquel est ménagée la porte d'entrée, a 72 m de long ; il est le seul qui présente un bâtiment de casernement à deux étages de casemates voûtées, avec façade à travées régulières. Il est couronné d'un parapet d'infanterie percé de créneaux de fusillade. L'élévation du front oriental prend l'aspect d'un mur d'escarpe couronné d'une tablette et d'un épais parapet de terre, percé de créneaux de fusillade, qui tient lieu de façade extérieure pour une aile de casemates basses en retour d'équerre. Cette disposition non conforme au modèle-type de la batterie de protection, est une variante simplifiée de celle qui existe au fort Margheria. Trois traverses creuses à réserve, une par front étant donné l'exiguïté de la plate-forme ; elles communiquent en sous-oeuvre par des escaliers et une galerie souterraine. En outre, un massif isolé remparé de même hauteur et structure s'élève au milieu de la cour pour servir de parados et contraindre le passage d'entrée du fort à former une chicane à gauche. Le passage d'entrée est voûté en berceau segmentaire qui surplombe la citerne ; s'ouvre dessus le corridor de desserte des casemates, en demi-berceau ici, en berceau au sous-sol. Les casemates sont voûtées en berceau segmentaire également et affectées à des dortoirs, latrines, magasins d'artillerie (?) , prison et cuisine. Des galeries aveugles souterraines rejoignent les différentes parties du fort : les deux galeries de contrescarpe à feu de revers, coffres percés de créneaux de fusillade vers le fossé, magasin à poudre, casemates du front oriental, magasins. Présence de bâtiments annexes : corps de garde, poste de télégraphie optique, batterie de mortier de la cime de Framosa.

  • Murs
    • granite
    • calcaire
    • schiste
    • enduit
    • moellon
  • Toits
    terre en couverture
  • Plans
    système bastionné
  • Étages
    étage de soubassement, rez-de-chaussée surélevé, 1 étage carré
  • Couvrements
    • voûte en berceau segmentaire
    • voûte en berceau
  • Élévations extérieures
    élévation à travées
  • État de conservation
    mauvais état
  • Statut de la propriété
    propriété publique

Documents figurés

  • Fascicolo contenente il piano d'insieme, la planimetria, la pianta e le sezioni delle opere che costituiscono il campo trincerato del Colle di Tenda [Document contenant le plan d'ensemble, la planimétrie, le plan et les coupes des ouvrages qui constituent le camp retranché du Col de Tende] / Dessin, vers 1887. Archivi del Genio Militare, Turin : fonds de la Sezione Staccata di Cuneo (référencé S.S.C.). Original disparu.

Date d'enquête 2001 ; Date(s) de rédaction 2002
(c) Région Provence-Alpes-Côte d'Azur - Inventaire général
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